L’intérêt porté par les urologues aux facteurs pronostiques
dans le cancer du rein provient du fait qu’ils permettent
l’information du patient et la stratification des malades en
groupe de pronostic homogène dans le cadre d’essais cliniques
et du suivi thérapeutique.
LES LEÇONS DE L’ÈRE DE
L’IMMUNOTHÉRAPIE
L’utilisation des interleukines était associée à un faible taux de
réponse (15%) mais à une toxicité significative. Il était donc
nécessaire d’identifier les patients qui pouvaient bénéficier du
traitement. Deux modèles pronostics ont été déterminés par le
groupe français d’immunothérapie d’une part et le MSKC
d’autre part. Le modèle du groupe français d’immunothérapie
retenait quatre facteurs de mauvais pronostic : le taux de
neutrophile > 7,5 103/mL, l’intervalle d’apparition des
métastases inférieur à 1 an, la présence de métastase hépatique
et l’existence de plus d’un site métastatique. Ces critères
permettaient de déterminer trois groupes pronostics (bon,
intermédiaire et mauvais) (Figure 1). Negrier et al. ont montré
qu’il n’y a pas de bénéfice de l’immunothérapie pour les
patients de mauvais pronostic [1, 2] et de pronostic intermédiaire
[3] (Figure 2). Le Modèle du MSKC a retenu des facteurs de
pronostics différents : le taux de lactate deshydrogénase (LDH),
d’hémoglobine, la calcémie corrigée, l’indice de Karnofsky et
la réalisation préalable d’une néphrectomie élargie [4]. Ces
critères ont également permis de déterminer trois groupes
pronostics (Figure 3). La validité de ce modèle a été confirmée
par une validation externe [5] et de manière prospective au
cours de nombreux essais de phase III.
En revanche, après 20 ans d’immunothérapie, aucun marqueur
de biologie moléculaire n’a pu être utilisé en pratique clinique.
Les analyses d’ADN micro arrays menées par Pantuck et al. en
comparant la signature génétique de cellules de tumeurs répondant
ou pas à l’immunothérapie [6] ont permis de passer en revue de
nombreux marqueurs : protéine G, ubiquitine, chémokine, Heat
Shock Proteins, PTEN… Les recherches les plus abouties ont
concerné les protéines CA IX, les tumeurs constituées de cellules
exprimant cette molécule semblant corréler à une meilleure
réponse à l’immunothérapie [7] (Figure 4).
L’histologie a été également utilisée pour prédire la réponse à
l’immunothérapie. Upton et al ont proposé une stratification
en trois groupes pronostics en fonction du type de CCR (cellules
claire ou autre) de la présence ou non de structure histologique
papillaire, alvéolaire et granulaire. Seuls les CCR à cellules
claires sans structure papillaire ni granulaire et avec plus de 50%
Progrès en Urologie (2007), 17 139-143
Les facteurs pronostiques dans le cancer du rein
Jean Jacques PATARD
139
Figure 1 :Courbe de survie en fonction les groupes de risque selon le
modèle du groupe français d’immunothérapie.
Figure 2 : Courbe de survie en fonction la thérapeutique employée dans
le groupe de risque intermédiaire selon le modèle du groupe français
d’immunothérapie.
des structures alvéolaires étaient catégorisées comme étant de
bon pronostic [8] (Figure 5).
La question qui se pose aujourd’hui est de savoir dans quelle
mesure ce qui était vrai avec l’immunothérapie est aussi vrai
avec les anti-angiogéniques. Il existe très peu de données
disponibles pour prédire la réponse au traitement anti-
angiogénique. Motzer et al. ont rapporté un modèle de prédiction
de la réponse au Sunitinib [9]. Dans ce modèle les facteurs
pronostics statistiquement indépendants ont été le taux
d’hémoglobine, le statut ECOG, la présence de métastases
hépatiques et le nombre de sites métastatiques.
L’imagerie médicale semble pouvoir fournir des outils prédictifs
de la réponse au anti-angiogénique. L’écho doppler, l’écho
doppler de contraste, certaine technique d’IRM (DCE IRM) et
de tomodensitométrie d’émission de positron (FMISO PET),
en permettant de mesurer le flux sanguin, le volume ou la
perméabilité vasculaire, pourraient avoir un intérêt pour la
prédiction de la réponse et le monitoring des approches
néoadjuvantes. Cependant aucun outil n’est encore validé à
ce jour.
De nombreux candidats moléculaires sériques et tumoraux
sont actuellement étudiés par l’analyse de profil d’expression
génique. Le travail de Rini et al a ainsi montré que la perte de
fonction du gène VHL est associée à une meilleure réponse au
traitement antiangiogénique (10) (Figure 7).
QUELS OUTILS POUR PRÉDIRE LA
RÉPONSE DANS LA MALADIE
LOCALISÉE ?
Le développement des stratégies adjuvantes chez les patients
de haut risque nécessite de déterminer les patients pouvant
bénéficier de ces traitements adjuvants. Dans cette objectifs,
les trois variables pronostiques majeurs que constituent le stade
140
Figure 3 : Courbe de survie en fonction des groupes pronostiques
selon le modèle du MSKC
Figure 4 : Courbe de survie en fonction de l’expression du marqueur
biologique CA IX
Figure 5 : Courbe de survie en fonction de la classification histologique des tumeurs.
141
Figure 6 :Candidat moléculaires de prédiction de la réponse à l’immunothérapie.
Figure 7 : Courbe de survie en fonction du profil d’expression du
gène VHL.
Figure 8 :Courbes de survie en fonction des 3
variables pronostiques majeures Stade TNM,
Grade de Fuhrman et ECOG
TNM, le grade de Fuhrman et le statut ECOG ont une précision
pronostique limitée lorsqu’ils sont pris individuellement (Figure
8). En revanche la combinaison de ces variables au sein de
système pronostic permet de gagner en précision de prédiction.
Kattan et al ont ainsi proposé un nomogramme [11] dont la
validation externe a été rapportée [12, 13] (Figure 9). Le groupe
SSIGN a également mis au point un nomogramme [14] (figure
10), validé en externe [15] et qui sera utilisé dans l’essai
clinique Sorce. Le troisième nomogramme actuellement validé
est celui de l’UISS [16] (Figure 11). Il a été validé en externe
dans une très large étude multicentrique [17] et sera employé
dans les essais ECOG2805 et START.
Un nouveau nomogramme est actuellement en développement.
Il prend en compte le stade TNM 2002, la taille tumorale, le
grade de Fuhrman et la présence de symptômes locaux ou
systémiques. Le type histologique n’apporte par d’information
supplémentaire et n’est donc pas pris en compte. La précision
diagnostic de ce nomogramme atteint 86%. Sa validation
externe dans une cohorte indépendante est en cours. L’avenir
de ces outils pronostics réside certainement dans la combinaison
de variable clinique, pathologique, moléculaire et d’imagerie
àl’intérieur de modèles intégrés [18].
En conclusion, nous nous dirigeons vers de nouvelles stratégies
d’évaluations pronostiques dans le cancer du rein. Nous
disposons de nouveaux agents pharmacologiques dirigés contre
des cibles moléculaires connues. Il sera donc nécessaire
d’explorer ces cibles et d’intégrer ces explorations aux modèles
pronostiques bien établis dont nous disposons déjà. Ces systèmes
intégrés devraient posséder une meilleure valeur prédictive. Ils
devront être validés prospectivement au cours d’essais dédiés
et de manière externe dans de large étude de phase III. Nous
disposerons ainsi d’algorithmes prédictifs personnalisés pour
le traitement et le suivi.
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Figure 9 :Nomogramme de Kattan dans le cancer du rein Figure 10 : Courbe de survie en fonction du résultats du score SSIGN.
Figure 11 :Score UISS de classification pronostique des cancer du rein.
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