CAS CLINIQUE
38 | La Lettre du Cardiologue • n° 458 - octobre 2012
Un pontage aorto-bifémoral a alors été réalisé à partir de l’aorte
ascendante au moyen d’un deuxième tube en Dacron® de 25 mm
de diamètre. Celui-ci a été acheminé au niveau de l’abdomen
selon un trajet rétromusculaire pararectal gauche et prépéritonéal
jusqu’à une troisième prothèse de Dacron® dont les extrémités
ont été anastomosées aux artères fémorales profondes (figure 3).
L’examen anatomopathologique a confirmé la sévérité de l’atteinte
pariétale de l’aorte ascendante avec la présence de calcifications
massives au voisinage de portions ulcérées (figure 2). L’examen
microscopique a retrouvé une hyperplasie intimale avec disparition
de la média, remplacée par un intense remaniement fibrocalcaire
dépourvu de cellules spécifiques.
Les suites opératoires ont été marquées par une durée prolongée
de ventilation assistée en raison d’une pneumopathie. Le contrôle
par angioscanner au premier mois a confirmé l’absence d’anomalie
du montage réalisé sur l’aorte ascendante et la perméabilité du
pontage aorto-bifémoral (figure 3). Le patient a quitté l’hôpital
après le délai habituel, les signes d’ischémie des membres infé-
rieurs ayant disparu. L’échographie cardiaque a confirmé le fonc-
tionnement normal de la prothèse valvulaire alors que la fraction
d’éjection était mesurée à 40 %.
Discussion
Les patients atteints de la maladie de Takayasu font habituellement
l’objet de multiples interventions de revascularisation, le risque de
complication artérielle postopératoire étant notoirement élevé (1).
L’atteinte de la valve aortique au cours de la maladie de Takayasu
a été documentée depuis longtemps (2, 3). Dans le cas décrit
ci-dessus, il existait en outre une aorte ascendante porcelaine et, de
façon plus inhabituelle, la protrusion de calcifications exubérantes
était responsable d’un aspect de sténose supravalvulaire au niveau
de la jonction sinotubulaire (figure 1). La saillie des calcifications
masquait l’émergence des artères coronaires dont les ostia étaient
sévèrement rétrécis (figure 1), une localisation classique de la
maladie coronaire en cas d’aortite de Takayasu (4, 5). Il existait
une altération de la fonction ventriculaire gauche systolique asso-
ciée à une hypertrophie myocardique notable, et on connaît le
pronostic péjoratif de ces anomalies échographiques au cours de la
maladie de Takayasu (6). Les valvules aortiques étaient rétractées
et fibreuses (figure 2) et une intervention conservatrice telle que
certains ont pu la réaliser lorsque le mécanisme de la fuite était lié
à une ectasie de l’aorte ascendante n’était pas envisageable (7). Un
remplacement de l’ensemble de la valve et de l’aorte ascendante
a donc été réalisé (intervention de Bentall). La portion initiale
du tronc coronaire gauche a été excisée et celui-ci a été réim-
planté par l’intermédiaire d’un court segment de tube prothétique
(technique de Cabrol modifiée) [figure 3]. Après l'excision de son
premier centimètre, l’artère coronaire droite a été mobilisée et
réimplantée directement sur la face antérodroite du tube aortique.
Certains ont proposé des méthodes alternatives pour traiter les
sténoses coronaires ostiales liées à une maladie de Takayasu :
endartériectomie avec ou sans patch d’élargissement (8, 9), ou
encore pontages aortocoronaires avec des greffons veineux, car
l’artère mammaire interne est souvent inutilisable (10, 11). Dans
le cas de notre patient, l’ancienneté et la sévérité des calcifica-
tions pariétales aortiques, alors que le réseau coronaire d’aval
était indemne, nous ont conduits à préférer une revascularisation
coronaire directe. Il a enfin été possible de traiter le syndrome
de Leriche par un pontage entre l’aorte ascendante et les artères
fémorales profondes (12) [figure 3]. ■
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Références bibliographiques