Chirurgie de l’anévrysme de l’aorte ascendante au cours de l’angioBehçet :
A propos d’un cas opéré et revue de la littérature
Gueldich M, Chatti S, Ziadi J, Hakim M, Ghedira F, Denguir R, Kalfat T, Khayati A
Service de chirurgie cardiovasculaire et thoracique. CHU La Rabta. Tunis
Introduction :
La maladie de Behçet est une maladie inflammatoire d’étiologie inconnue. L’atteinte cardiovasculaire représente la principale cause de
mortalité. Elle apparait dans 2 à 28% des cas.
L’anévrysme de l’aorte ascendante associé à une insuffisance de la valve aortique est une complication rare mais grave. La chirurgie
demeure le seul traitement curatif.
Nous rapportons dans ce travail un cas d’anévrysme de l’aorte ascendante opéré avec succès selon la technique de Bentall.
Observation :
Il s’agit d’un patient de sexe masculin âgé de 39 ans connu porteur de la maladie de Behçet admis pour anévrysme de l’aorte ascendante
associé à une insuffisance aortique importante.
La douleur thoracique paroxystique était le seul signe fonctionnel.
L’examen a révélé une tachycardie et un souffle diastolique au foyer aortique. L’ECG a montré une HVG de type diastolique. Un
élargissement médiastinal a été noté à la radiographie du thorax avec un index médiastino-thoracique(IMT) à 0.5.
L’échographie trans œsophagienne (ETO) a objectivé, outre la dilatation ventriculaire gauche, un anévrysme de l’aorte ascendante associé à
une fuite aortique importante.
L’angiosanner aortique a mis en évidence une dilatation anévrysmale de l’aorte ascendante mesurant 7.1 mm de diamètre. Cet examen n’a
pas objectivé d’autres atteintes artérielles.
L’indication opératoire fût retenue devant l’importance de l’anévrysme. Sous CEC et à cœur arrêté, le geste a consisté initialement en un
remplacement de la valve aortique par une prothèse mitrale inversée N° 27 type Saint Jude suivi d’un remplacement de l’aorte ascendante
par un tube en Dacron de 30 mm avec réimplantation des ostia coronaires.
La sortie CEC était facile sans recours aux amines vasoactives.
Les suites ultérieures étaient marquées par la survenue d’arythmie complète par fibrillation auriculaire (ACFA) ayant bien évolué sous
traitement anti arythmique.
Discussion :
La maladie de Behçet est une vascularite dont l’étiologie demeure encore inconnue malgré les hypothèses étiopathogéniques figurant dans
la littérature. Elle est souvent découverte devant l’apparition de la triade symptomatique décrite par Hulusi Behçet associant une aphtose
bipolaire avec des lésions oculaires. Cette maladie affecte préférentiellement les sujets jeunes avec nette prédominance masculine.
L’atteinte cardiovasculaire se manifeste le plus souvent par des thromboses veineuses, toutefois l’atteinte artérielle est possible. Elle
survient chez 2 à 12% des patients. L’aorte et les artères pulmonaires sont les plus fréquemment atteintes. Les lésions artérielles
anévrismales sont présentes dans 65% des cas. L’insuffisance aortique est découverte dans 5 à 19% des cas et constitue avec la dilatation
anévrismale de l’aorte ascendante les principales causes de décès au cours de l’angio Behçet. Le remplacement de la valve aortique
requiert certaines précautions chirurgicales afin de prévenir la désinsertion prothétique secondaire et l’apparition de faux anévrismes qui
sont assez fréquents. Plusieurs approches chirurgicales ont été proposées à cet effet : mise en place d’un tube valvé (intervention de
Bentall) et l’homogreffe aortique. Certaines équipes appliquent la technique de Bentall modifiée : le geste consiste en fixation première de
la prothèse aortique au tube par un surjet au prolène3/0, l’ensemble est ensuite fixé à l’anneau aortique. Outre ces différentes techniques
d’autres précautions sont à entreprendre pour prévenir les complications postopératoires : une phase de rémission clinique et biologique
est recommandée en préopératoire car elle conditionne les suites ultérieure postopératoires. De même, les malades opérés dans un
contexte d’urgence en phase active de la maladie doivent bénéficier d’un traitement anti inflammatoire précoce en postopératoire en
dépit de son effet immunosuppresseur pouvant favoriser les infections et le retard de cicatrisation de la plaie opératoire.
Conclusion :
L’angioBehçet est une entité anatomo-clinique grave et rare. La dilatation anévrysmale de l’aorte ascendante peut poser des difficultés de
réparation chirurgicale vue l’atteinte pariétale d’origine inflammatoire. La chirurgie en dehors des poussées inflammatoires permet de
réduire l’incidence des complications postopératoires en particulier les faux anévrysmes sur sites anastomotiques.
Angioscanner aortique: dilatation
anévrismale de l’aorte ascendante.
Dilataion anévrismale de l’aorte
ascendante : vue peropératoire.
Vue opératoire après réparation complète
selon la technique de Benthall