I N F O R M A T I O N S Cinquième réunion nationale du Groupe de réflexion sur la cardiologie interventionnelle ● C. Le Feuvre* L a cardiologie interventionnelle continue de progresser très rapidement. Les complications aiguës de l’angioplastie deviennent exceptionnelles, malgré l’extension des indications à des lésions coronaires de plus en plus complexes. Cette 5e réunion nationale du Groupe de réflexion sur la cardiologie interventionnelle s’est déroulée à Marne-la-Vallée les 6 et 7 décembre 1998. Elle a donné lieu à de nombreux échanges d’idées, en particulier dans le cadre des ateliers de films sur les stents perdus, l’angioplastie à la phase aiguë de l’infarctus ou le stenting sans prédilatation, ou dans le cadre de controverses sur le stenting des lésions longues (J. Fajadet, X. Favereau), sur la prise en charge du choc cardiogénique (C. Spaulding, I. Laurent) ou sur l’usage préventif de l’abciximab (A. Vahanian, B. Valeix). Nous résumons ici les principaux thèmes abordés. ANGIOPLASTIE À LA PHASE AIGUË DE L’INFARCTUS Les bénéfices du stent à la phase aiguë de l’infarctus ont été confirmés par l’étude STENTIM II (J.P. Monassier). Dans cette indication, le stent Wiktor diminue de 30 % le taux de nouvelle revascularisation à 6 mois par rapport au ballon. L’amélioration des taux de survie nécessite une reperfusion tissulaire avec flux TIMI 3 dans les premières heures de l’infarctus. La persistance d’un flux ralenti (TIMI 2 ou slow-flow) en aval du stent doit donc être considérée comme un échec de procédure. Cette absence de reperfusion tissulaire malgré une désobstruction coronaire réussie semble plus fréquente en cas d’angioplastie de sauvetage après échec de fibrinolyse. Elle pourrait être favorisée par des embolies distales liées à la fragmentation du caillot par le matériel d’angioplastie. Le Corvasal® intracoronaire et le lavage du lit distal coronaire par du sérum physiologique sont souvent inefficaces. Les traitements proposés associent le vérapamil (200 µg intracoronaire renouvelable deux à trois fois en cas de bonne tolérance hémodynamique et en l’absence de trouble conductif) et l’abciximab. Une étude randomisée comparant stryadine et vérapamil est en cours. Un ballon intra-aortique sera mis en place en cas de bas débit cardiaque. T. Lefèvre propose de prévenir cet échec de reperfusion tissulaire en prati- * Service Pr A. Vacheron, Hôpital Necker, Paris. 6 quant un stenting sans prédilatation, afin d’éviter la fragmentation du caillot par le ballon. STENT ET LÉSIONS DE BIFURCATION Le stent permet de traiter les lésions de bifurcation avec un taux élevé de succès primaire (Y. Louvard, M.C. Morice). L. Maillard a présenté les résultats immédiats et à long terme d’une série multicentrique de 95 patients dilatés et stentés sur des lésions de bifurcation. Le taux de succès de la procédure était de 98 %. Le taux de nouvelle revascularisation à 6 mois était de 20 %, dont 17,5 % par angioplastie et 2,5 % par pontage. Les 9 patients avec sténose du tronc commun et contre-indication chirurgicale avaient le plus mauvais pronostic (un infarctus et un décès). Chez les autres patients, l’angioplastie avec stent des bifurcations présente dans cette série un taux élevé de succès primaire et de bons résultats à long terme. NOUVELLES TECHNOLOGIES Le guide pression intracoronaire permet d’évaluer la réserve fonctionnelle myocardique à partir de la mesure à l’état basal et après adénosine du gradient de pression secondaire à la sténose coronaire. Ce guide permet ainsi de quantifier le retentissement fonctionnel des sténoses considérées comme intermédiaires en angiographie, et de discuter en cours de procédure l’indication d’une éventuelle angioplastie (S. Cattan). Plusieurs communications ont porté sur de nouveaux stents. Le stent Wiktor hépariné à basse pression a été présenté par J. Marco. Le stent couvert permet d’éviter une tamponnade secondaire à une perforation coronaire par le guide d’angioplastie ou d’exclure un anévrisme coronaire en obstruant son orifice d’entrée (D. Blanchard). R. Bonan a présenté une revue complète de la littérature sur l’irradiation coronaire dans la prévention de la resténose. L’irradiation endocoronaire inhibe l’hyperplasie intimale et prévient le remodelage constrictif. Les études randomisées SCRIPPS et WRIST (iridium 192 vs placebo) objectivent sous irradiation une diminution d’un facteur 4 du risque de nouvelle revascularisation pour resténose. D’autres études sont en cours afin de confirmer ces résultats préliminaires : étude BRIE (Beta Radiation In Europe), étude START (Strontium 90 vs placebo), étude BERT La Lettre du Cardiologue - n° 307 - février 1999 I (suivi angiographique et par échographie endocoronaire), étude GUIDANT, étude INHIBIT (traitement de la resténose intrastent chez 320 patients), étude IRIS (qui utilise un stent radioactif, l’Isostent : 32P - stent Palmaz-Schatz). Le suivi à long terme conditionnera l’avenir de l’irradiation intracoronaire (risque potentiel de resténose tardive, de fibrose, d’anévrisme coronaire). Aux États-Unis, la brachythérapie intracoronaire est réalisée dans une centaine de centres. Si les espoirs de la brachythérapie se confirmaient, ce traitement pourrait être soit appliqué en cas de résultat incomplet au ballon, en utilisant un stent radioactif, soit réservé secondairement à la resténose intrastent. TRAITEMENT DE LA RESTÉNOSE INTRASTENT (H. Eltchaninoff) Le stent est un progrès majeur en angioplastie, diminuant le taux d’occlusion aiguë et de resténose à moyen terme. Il est, selon les centres, utilisé dans 50 à 90 % des procédures. Le taux faible de resténose des études randomisées (7 % dans BENESTENT 2) ne reflète cependant pas la pratique courante. Le taux de resténose intrastent est entre 20 et 30 % dans les registres (35 % dans le centre de Washington). On peut estimer à 25 % le risque de nouvelle dilatation après angioplastie avec stent. Cette resténose intrastent est liée exclusivement à l’hyperplasie intimale. On distingue les resténose focales (< 10 mm), les formes diffuses (> 10 mm), et les formes prolifératives (plusieurs centimètres, dépassant le stent). Plusieurs techniques ont été proposées dans le traitement de cette resténose, comme le ballon, les techniques ablatives, et plus récemment le stent dans le stent, le ballon coupant, les radiations ionisantes. Traitement de la resténose intrastent par ballon Le ballon agit par surexpansion du stent (56 %) et par extrusion de la prolifération intimale à l’extérieur du stent (44 %). C’est la première technique utilisée en raison de sa simplicité et de son taux élevé de succès primaire (98 à 100 %). Le risque de nouvelle resténose est cependant entre 50 et 60 % en cas de resténose diffuse (tableau I). Il est plus faible en cas d’angioplastie au ballon pour resténose focale : 11 % de revascularisation secondaire dans l’étude de Reimers (JACC 97). Traitement de la resténose intrastent par athérectomie La méthode la plus étudiée est l’athérectomie rotative complétée par ballon. Elle agit par ablation (54 %), surexpansion du stent (15 %) et extrusion de l’hyperplasie intimale à travers les Tableau I. Taux de nouvelle resténose après angioplastie au ballon pour resténose intrastent. Resténose angiographique Bauters (Circulation 1998) série totale (n = 87) resténose diffuse (n = 24) Eltchaninoff (JACC 1998) série totale (n = 57) resténose diffuse (n = 40) Nouvelle revascularisation pour resténose 22 % 53 % 17 % 53 % 63 % 40 % 40 % La Lettre du Cardiologue - n° 307 - février 1999 N F O R M A T I O N S mailles du stent (31 %). Il est nécessaire d’utiliser un rapport fraise/artère > 0,7 et de compléter systématiquement le rotablator par une angioplastie au ballon. Les taux de nouvelle revascularisation pour deuxième resténose varient entre 19 % et 35 %. La comparaison avec le ballon seul retrouve une tendance en faveur du rotablator complété par ballon (tableau II). Tableau II. Taux de nouvelle resténose après angioplastie au ballon ou au rotablator complété par ballon pour resténose intrastent. Von Dahl (n = 100) rotablator + ballon Registre BARASTER (n = 155) ballon rotablator + ballon Étude randomisée ROSTER ballon rotablator + ballon Resténose angiographique Nouvelle revascularisation pour resténose 49 % 35 % 46 % 32 % 36 % 19 % Le laser complété par ballon agit par ablation (29 %), surexpansion du stent (40 %) et extrusion de l’hyperplasie intimale à travers les mailles du stent (31 %). Le taux de revascularisation pour nouvelle resténose varie de 21 % à 45 % dans quatre études portant sur 25 à 151 patients. L’athérectomie directionnelle a été utilisée par Cattelaens chez 28 patients (TCT 1998). Le taux de nouvelle resténose était de 50 %. Autres traitements de la resténose intrastent L’utilisation d’un second stent déployé dans le premier a été proposée par plusieurs équipes avec un taux élevé de succès primaire et des taux de nouvelle revascularisation allant de 17 % à 44 % dans deux équipes françaises (tableau III), et de 8 % à 44 % dans la littérature. Tableau III. Taux de nouvelle revascularisation après angioplastie avec second stent pour resténose intrastent. T. Lefèvre (AHA 97) B. Chevalier (AHA 98) Succès primaire Nouvelle revascularisation pour resténose 100 % 97 % 17 % 33 % Le ballon coupant a été utilisé par Nakamura dans 194 lésions de resténose intrastent, avec 31 % de resténoses angiographiques et 23 % de nouvelles revascularisations. L’abstention d’un nouveau geste d’angioplastie est licite en cas de resténose intrastent asymptomatique. L’hyperplasie intimale intrastent diminue à long terme dans 40 % des cas. La chirurgie est proposée dans les resténoses itératives symptomatiques, avec ischémie étendue. Les traitements locaux (thérapie génique) sont en cours d’expérimentation animale. D’autres méthodes comme la radiothérapie 7 I N F O R M A T I O N S sont en cours d’évaluation chez l’homme. Dans l’étude WRIST, l’irradiation intracoronaire par 192 Ir (15 Gy à 2 mm pendant 22 minutes) diminue de 61 % le taux de nouvelle revascularisation pour resténose. CHIRURGIE MINI-INVASIVE Les avantages et les inconvénients de la chirurgie mini-invasive ont donné lieu à une controverse passionnante. Avantages de la chirurgie mini-invasive (P. Nataf) Le développement depuis quatre ans de la chirurgie mini-invasive répond à l’objectif qui consiste à diminuer l’agression chirurgicale, en limitant l’incision cutanée, le délabrement tissulaire, l’agression de la circulation extracorporelle (CEC) et du clampage aortique. Plusieurs techniques répondent à cet objectif : pontage sans CEC (par sternotomie médiane ou minithoracotomie), chirurgie valvulaire ou pontage sous CEC par petite incision, robotique, télémanipulation, anastomoses mécaniques... La qualité de l’anastomose lors du pontage sans CEC est améliorée par l’utilisation d’un stabilisateur cardiaque (93 % à 99 % de pontages perméables vs 62 % à 92 % en l’absence de stabilisateur). Le pontage coronaire à cœur battant peut être avantageusement proposé en alternative à la CEC lorsqu’il existe des calcifications aortiques importantes, une altération majeure de la fonction ventriculaire gauche, une insuffisance respiratoire ou rénale sévère, des troubles de l’hémostase. Le pontage sans CEC est contre-indiqué en cas de coronaire intramyocardique, calcifiée, de diamètre < 1,5 mm. La qualité des résultats de cette technique est conditionnée par l’expérience du chirurgien (courbe d’apprentissage), le retour aux techniques classiques en cas de difficulté et la limitation des indications à l’artère interventriculaire antérieure ou la coronaire droite. Limites de la chirurgie mini-invasive (O. Bical) L’enthousiasme pour la chirurgie mini-invasive s’estompe si l’on analyse ses résultats en détail. Les petites incisions nécessitent un étirement cutané, source de chéloïdes, compliquent la tech- nique chirurgicale et limitent les purges gazeuses. Certains abords, notamment en chirurgie valvulaire, peuvent léser les artères mammaires et compromettre une revascularisation coronaire ultérieure. Les douleurs post-thoracotomie sont souvent importantes, favorisées par l’étirement tissulaire et l’ablation de cartilage costal. La durée moyenne de séjour est peu différente (7 jours vs 10 jours en cas de chirurgie conventionnelle). Le temps d’occupation de la salle d’opération est augmenté de 50 %. Le système de CEC percutanée fémorale (système Heart-Port) permet, certes, de limiter la taille de l’incision mais il expose à des complications vasculaires, à des difficultés techniques et à un coût élevé (30 000 F par patient). L’utilisation d’un stabilisateur à usage unique, indispensable au pontage sans CEC, alourdit le coût de la procédure. Les taux de morbidité et de mortalité du pontage sans CEC sont élevés dans les centres avec peu d’expérience (technique absente en 1995, et actuellement réalisée dans 300 centres aux États-Unis), et beaucoup de chirurgiens ont renoncé à cette technique. Le stress myocardique, évalué par dosage de la troponine, est augmenté. Le taux de perméabilité des pontages sans CEC est amélioré par l’utilisation d’un stabilisateur, mais reste moins élevé qu’après pontage sous CEC, et pour un patient en bon état général ayant plusieurs échecs d’angioplastie, la qualité de l’anastomose coronaire l’emporte sur la longueur de l’incision. Enfin, certaines artères sont inaccessibles au pontage sans CEC (interventriculaire postérieure, rétroventriculaire postérieure ou marginale gauche). Toutes ces limites ne doivent cependant pas faire arrêter la chirurgie mini-invasive. Le pontage sans CEC est reproductible, évite les phénomènes inflammatoires liés à la CEC, et peut être économique si l’on réutilise les stabilisateurs. Pour O. Bical, les indications du pontage sans CEC doivent être limitées aux patients à haut risque de complication avec une chirurgie conventionnelle (patients âgés, en mauvais état général, avec insuffisance rénale). En 1998, O. Bical a ponté sans CEC 20 patients à haut risque chirurgical (versus 400 patients pontés sous CEC pendant la même période). Deux patients sont décédés (à un et deux mois), les dix-huit autres ont des pontages perméables malgré deux sténoses anastomotiques. La figure 1 illustre une sténose anastomoFigure 1. Sténose ostiale coronaire droite ; pontage sans CEC coronaire droite par artère mammaire interne ; sténose anastomotique à la jonction mammaire interne segment 2 coronaire droite. 8 La Lettre du Cardiologue - n° 307 - février 1999 I N F O R M A T I O N S Figure 2. Angioplastie de la sténose ostiale de la coronaire droite avec mise en place d’un stent : la sténose passe de 58 % à 0 %. tique après pontage sans CEC de la coronaire droite, lors d’un contrôle motivé par une ischémie inférieure postopératoire. Ce patient bénéficiera en extemporané d’une angioplastie de la sténose ostiale de la coronaire droite (figure 2). Par ailleurs, le développement de la chirurgie mini-invasive a permis d’améliorer les techniques de chirurgie conventionnelle : extubation précoce, limitation des transfusions, intervention en normothermie, prélèvement mammaire squelettisé, écartement sternal limité, prélèvement saphène sous vidéo, utilisation d’une CEC la moins bio-incompatible possible pour éviter les phénomènes inflammatoires réactionnels. ■ ✁ À découper ou à photocopier A A BB O O N N N N Merci d’écrire nom et adresse en lettres majuscules Dr, M., Mme, Mlle ........................................................................... Prénom .......................................................................................... Pratique : ❏ hospitalière ❏ libérale EE ZZ -- VV O O UU SS !! Tarif 1999 / L C / Bimensuel ABONNEMENT FRANCE / DOM-TOM et CEE ❐ 1 an / 580 F ❐ 2 ans / 940 F ❐ 1 an / 290 F étudiants joindre la photocopie de la carte ❐ + 60 F par avion pour les DOM - TOM ❏ autre.......................... ABONNEMENT ETRANGER / autre que CEE Adresse.......................................................................................... ❐ 1 an / 720 F POUR RECEVOIR LA RELIURE ...................................................................................................... Code postal ................................................................................... ❐ + 190 F par avion ❐ 70 F avec un abonnement ou un réabonnement ❐ 140 F par reliure supplémentaire (franco de port et d’emballage) Ville ................................................................................................ 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