4 | La Lettre du Cardiologue n° 478 - octobre 2014
ÉDITORIAL
Incontestablement, l’étude phare du congrès de l’ESC à Barcelone a été l’étude
PARADIGM-HF, en raison de ses résultats impressionnants mais aussi de
sespotentielles conséquences sur les futures recommandations pour le traitement
de l’insuffi sance cardiaque à fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) altérée.
Une molécule au nom “futuriste” de LCZ 696 va probablement révolutionner
letraitement de l’insuffi sance cardiaque à FEVG altérée, en détrônant probablement
les immuables inhibiteurs de l’enzyme de conversion (IEC) ; ces IEC, qui avaient su
résister à l’assaut des inhibiteurs des récepteurs de l’angiotensine II (ARA2). Le LCZ
696, combinaison d’un ARA2 (le valsartan) et d’un inhibiteur de la néprilysine (une
endopeptidase neutre qui dégrade les peptides vaso-actifs) a été comparée à l’énalapril.
Cet essai prospectif, en double aveugle, et randomisant les patients soit dans le groupe
énalapril 20mg/j ou le LCZ696 400mg/j, a inclus plus de 8 000patients insuffi sants
cardiaques. Les patients étaient de vrais insuffi sants cardiaques, avec une dysfonction
systolique du ventricule gauche (FEVG en moyenne à 30 %) en classe NYHA II-IV,
avec un traitement recommandé (IEC, bêtabloquants et anti-aldostérone) et un taux
depeptides natriurétiques élevé requis (et ce d’autant plus en l’absence d’hospitalisation
pour insuffi sance cardiaque). Certains esprits chagrins pourront reprocher la phase
test dite de “run-in afi n de ne pas inclure les patients non tolérants aux drogues
utilisées... Douze pour cent des patients nont pas poursuivi l’étude. Cétait le cas pour
les bêtabloquants, et pourtant... les bêtabloquants sont aujourd’hui incontournables.
Le critère principal était la mortalité cardiovasculaire et les hospitalisations pour
insuffi sance cardiaque mais, point intéressant, la taille de la population était calculée
pour une réduction de la mortalité cardiovasculaire de 15 %.
Les résultats sont impressionnants : réduction du critère principal et de la mortalité
cardiovasculaire de 20 % en faveur du LCZ696, et ce, non contre un placebo mais contre
unIEC !!!! Avec une réduction de la mortalité globale de 16 %, et deshospitalisations
pour insuffi sance cardiaque de 21 % !!! Plus d’hypotension symptomatique avec
leLCZ696, mais pas plus d’interruptions de traitement pourcetteraison, moins
d’hyperkaliémie, d’insuffi sance rénale et de toux, ainsi qu’unebaisse des interruptions
detraitement pour eff ets indésirables !!!
Létude PARADIGM-HF propose enfi n dans l’insuffi sance cardiaque chronique
untraitement de substitution plutôt qu’un traitement additif… une vraie révolution !
Deuxquestions restent en suspens : la première est la disponibilité de cette drogue
enpratique quotidienne ; deux facteurs vont alors être déterminants : l’implémentation
de cette drogue dans les recommandations européennes et… le prix. La seconde
question est celle de sa tolérance dans la vraie vie, chez des patients de la vraie vie,
dontles caractéristiques ne sont pas toujours, pour ne pas dire très souvent,
cellesdespatients inclus dans les études… mais restons optimistes, PARADIGM-HF
off re une jolie bouff ée d’oxygène pour nos patients insuffi sants cardiaques chroniques.
Insuffi sance cardiaque :
quoi de neuf àl’ESC ?
Heart failure: whats new at the ESC congress?
La Lettre du Cardiologue n° 478 - octobre 2014 | 5
ÉDITORIAL
Létude CONFIRM-HF, évaluant l’intérêt du carboxymaltose ferrique chez les patients
insuffi sants cardiaques avec FEVG altérée, a montré une amélioration signifi cative du test
demarche de 6 minutes à 6mois par rapport au placebo. Une analyse post hoc
decetteétude a montré une réduction signifi cative des hospitalisations pour insuffi sance
cardiaque de 30 %.
Au cours du congrès de l’ESC, deux études s’intéressant à la stimulation vagale
dansl’insuffi sance cardiaque chronique ont apporté des résultats quelque peu décevants.
Létude NECTAR-HF, prospective et randomisée, a évalué l’impact de la stimulation
vagale droite sur le remodelage ventriculaire (critère principal : le diamètre télésystolique
ventriculaire gauche à 6mois). Aucune diff érence signifi cative na été retrouvée entre
legroupe stimulation vagale et le groupe placebo pour le critère primaire, de même que
pourles volumes ventriculaires gauches. Étonnamment, il n’y avait pas de diff érence entre
les2groupes pour la fréquence cardiaque et les paramètres de variabilité sinusale.
Une autre étude non randomisée, l’étude ANTHEM-HF, aux limites méthodologiques
certaines, a comparé la stimulation vagale droite et gauche, mais sans groupe contrôle.
Aucune amélioration des volumes ventriculaires gauches nétait retrouvée ; seule unediscrète
amélioration de la FEVG d’à peine 5 % a été obsere avec la stimulation vagale, mais sans
comparaison à un groupe placebo.
Deux études s’intéressant à la resynchronisation cardiaque ont été également présentées.
Létude BIOPACE évaluait l’intérêt de la stimulation biventriculaire par rapport à
lastimulation ventriculaire droite, chez des patients ayant une indication conventionnelle
destimulation cardiaque. Avec un suivi de près de 5,6ans, 1 800patients ont été inclus avec
une FEVG moyenne de 55 %. Il y avait une tendance non signifi cative de la réduction
ducritère primaire, mortalité globale et hospitalisation pour insuffi sance cardiaque,
enfaveur de la stimulation biventriculaire. Il n’y avait pas de diff érence entre les patients
avecFEVG>ou<50 %, avec cependant un nombre limité de patients avec FEVG<50 %.
Enfi n, l’étude SEPTAL-CRT, comparant les sites de stimulation ventriculaire droite
apicaux et septaux, a montré la non-infériorité de la position septale par rapport à la position
apicale pour le remodelage ventriculaire gauche.
Une étude réalisée chez les transplantés cardiaques a montré que l’analyse desmicro-ARN
circulants permettait de prédire le rejet et, ainsi, d’éviter le recours aux biopsies
endomyocardiques chez 70 % des patients. Des données très intéressantes à confi rmer.
Un congrès très riche pour l’insuffi sance cardiaque chronique, mais également
dansd’autres domaines, ce qui confi rme la place prépondérante du congrès de l’ESC
pournotre pratique quotidienne.
À l’année prochaine, à Londres
Pr Christophe Leclercq
Département de cardiologie et maladies vasculaires, hôpital Pontchaillou, CHU de Rennes.
L’auteur n’a pas précisé
seséventuels liens d’intérêts.
1 / 2 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !