La Lettre du Cancérologue • Vol. XXIII - n° 5 - mai 2014 | 157
Résumé
Les traitements néo-adjuvants n’ont pas d’efficacité prouvée sur les tumeurs résécables. La stratégie théra-
peutique des formes localement avancées reste la chimiothérapie, qui peut être intensifiée. La radiothérapie
n’a pas d’indication hors essai. Une résection secondaire est possible après un traitement d’induction.
Mots-clés
Cancer du pancréas
Chimiothérapie
Radiothérapie
Summary
Neoadjuvant treatments have
no proved effi ciency for resect-
able tumors. Chemotherapy
is the standard for locally
advanced tumors. There is no
indication for radiotherapy.
Secondary resection is feasible
after induction treatment.
Keywords
Pancreatic cancer
Chemotherapy
Radiotherapy
Le traitement néo-adjuvant des cancers localement
avancés est en réalité un traitement “d’induction”,
dans l’espoir de rendre résécable la tumeur. Il y a
peu d’essais spécifi ques dans cette situation, car
les essais de chimiothérapie mélangent les formes
métastatiques et les formes localement avancées. La
méta-analyse de S. Gillen et al. a montré dans cette
situation qu’il y a, après traitement préopératoire,
35 % de réponses objectives, 41,6 % de stabilisations
de la maladie et 20,8 % de progressions comme
dans les tumeurs résécables. En revanche, le taux
de résection est de 33,2 %, avec 79,2 % de résec-
tions R0. La morbidité de la chirurgie est supérieure
(39,1 versus 26,7 % pour les tumeurs résécables
d’emblée), probablement en raison de la nécessité
d’une reconstruction vasculaire. La SG médiane de
ces patients dont la tumeur a été réséquée secon-
dairement est de 20,5 mois, versus 23,3 mois dans
les cas résécables d’emblée et 10,2 mois lorsque la
tumeur n’avait jamais été réséquée. La réévalua-
tion après traitement d’induction permet parfois
une résection secondaire des tumeurs localement
avancées, avec une survie médiane proche de
celle observée chez les patients dont les tumeurs
étaient résécables d’emblée.
Deux essais prospectifs dont les résultats sont
contradictoires ont évalué la radiochimio thérapie
néo-adjuvante dans les cancers localement avancés.
La première étude (3) a inclus 119 patients atteints
d’adénocarcinomes pancréatiques localement
avancés, randomisés entre une radiochimio thérapie
par 5-FU + cisplatine et une chimiothérapie par
gemcitabine. La SG et la survie sans progression
(SSP) étaient signifi cativement moins bonnes dans
le bras radiochimiothérapie (SG médiane : 8,6 versus
13 mois ; p = 0,03). Le deuxième essai (4) a inclus
74 patients randomisés entre une prise en charge
par radiochimiothérapie avec de la gemcitabine et
un traitement par gemcitabine seule. La SG était
significativement meilleure dans le bras radio-
chimiothérapie (11,1 versus 9,2 mois ; p = 0,017).
Devant ces résultats contradictoires, certains
auteurs ont suggéré qu’il fallait réaliser une
chimiothérapie première et réserver la radio-
chimiothérapie aux patients dont la maladie
était sous contrôle grâce à la chimiothérapie. Une
analyse rétrospective de 2 études prospectives (5)
a recensé 181 tumeurs localement avancées trai-
tées par chimiothérapie pendant 3 mois ; en cas de
maladie contrôlée (n = 128), les patients pouvaient
être traités par radiochimiothérapie ou poursuivre
la chimiothérapie initiale, décision laissée au libre
choix de l’investi gateur. Dans cette étude, il y avait
une amélioration signifi cative de la SSP et de la SG
avec une radiochimiothérapie de clôture après une
chimiothérapie d’induction chez les patients dont
la maladie était sous contrôle (15 versus 11,7 mois ;
p = 0,0009).
Une grande étude internationale de phase III, rando-
misée, a tenté de répondre défi nitivement à la ques-
tion : l’essai LAP 07 (6). Au total, 449 patients ont
été inclus et randomisés entre gemcitabine et gemci-
tabine + erlotinib. Chez les 269 patients contrôlés
après 3 mois, une deuxième randomisation était
réalisée entre poursuite de la chimiothérapie initiale
et radiochimiothérapie. Dans cet essai, il n’y a pas
eu d’amélioration signifi cative de la SSP, ni de la SG
(médiane : 16,4 versus 15,2 mois ; HR = 1,03). Cet
essai complètement négatif nous incite à ne réaliser
une radiochimiothérapie que dans le cadre d’un essai
thérapeutique ; hors essai, c’est la chimiothérapie
qui doit être préférée.
La chimiothérapie intensifi ée est sans doute une
piste intéressante, qui est en cours d’évaluation.
Les résultats préliminaires d’une étude de cohorte
prospective conduite entre février 2010 et février
2012 et ayant inclus 77 patients atteints d’un adéno-
carcinome localement avancé ont retrouvé 28 %
de réponses complètes, et une médiane de SG de
22 mois. Parmi ces patients, 36 % ont pu avoir une
résection secondaire. ■
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