RETOUR A DOMICILE APRES... Après amygdalectomie ■ M. François* L’amygdalectomie est l’ablation des amygdales palatines. À la sortie de la clinique ou de l’hôpital, le patient a une ordonnance d’antalgiques et des conseils pour l’alimentation. Les enfants ne retourneront à l’école qu’au bout d’une semaine environ, pour les adultes il est souvent nécessaire de prévoir un arrêt de travail de 15 jours. LES SUITES NORMALES ◆ Les dépôts blanchâtres Les loges amygdaliennes, laissées ouvertes, vont se recouvrir en quelques heures de dépôts blanchâtres. Il ne s’agit pas d’une infection des loges amygdaliennes, mais d’une suite normale d’amygdalectomie. Il ne faut pas chercher à décoller ces enduits, cela ne pourrait que faire mal ou pire faire saigner. ◆ L’haleine fétide L’haleine peut être fétide, en particulier le matin. Là encore ce n’est pas un signe d’infection, mais simplement le témoin du fait que le patient n’avale pas assez de salive, ce qui permet le développement de bactéries commensales dégageant une odeur nauséabonde. Les bains de bouche peuvent soulager temporairement, mais la vraie solution est de boire et de saliver. On peut améliorer les choses en faisant mastiquer du chewing-gum (sans sucre) qui force à saliver et à avaler la salive. ◆ La douleur L’amygdalectomie a la réputation, justifiée, d’être douloureuse. Des antalgiques sont donc systématiquement prescrits, sous forme liquide * Service ORL, hôpital Robert-Debré, Paris 36 du fait de la dysphagie. Il faut prévoir des antalgiques de palier II de l’OMS car le paracétamol est insuffisant et l’aspirine contre-indiquée. Chez le jeune enfant il est prescrit du Codenfan®, pour le grand enfant ou l’adulte il existe des associations paracétamol-codéine comme Codoliprane® et Efferalgan Codéine®. Le Codoliprane® est dispersible dans l’eau. Il est conseillé de dégazéifier l’Efferalgan Codéine® avant de le boire. Il est très important de donner les antalgiques de manière régulière et de ne pas attendre que la douleur s’installe car elle sera alors difficile à calmer. Il faut attendre environ une heures après la prise du médicament pour que son effet soit sensible, donc s’arranger pour donner l’antalgique une heures avant les repas. La douleur dure 2-4 jours chez l’enfant, un peu plus longtemps chez l’adulte. Il existe dans ce domaine de grandes variations interindividuelles et, dans une même famille, l’un pourra n’avoir pratiquement plus mal dès le deuxième jour alors que l’autre, opéré par le même ORL et selon la même technique, aura des douleurs beaucoup plus intenses et plus prolongées. ◆ Le poids L’amygdalectomie n’est pas un bon moyen pour maigrir ! même si le patient perd quelques kilos dans les jours qui suivent l’intervention, il rattrapera son poids d’origine très rapidement. En fait le problème est inverse : environ un tiers Correspondances en médecine - n° 2, vol. IV - avril/mai/juin 2003 des enfants hypotrophes de moins de 5 ans, opérés pour amygdales obstructives générant des pauses respiratoires nocturnes, vont rattraper le poids de leurs pairs dans l’année qui suit l’intervention (cela ne marche pas chez les enfants qui ne font pas de pauses respiratoires, l’amygdalectomie n’est pas un moyen pour eux de grossir). ◆ L’alimentation C’est, après la douleur, le point central des suites d’amygdalectomie et la raison de la majorité des coups de fil ou des visites chez le médecin traitant. En fait, les deux problèmes sont liés car c’est à cause de la douleur que le patient a du mal à s’alimenter (et qu’il peut perdre provisoirement du poids). Il faut donc faciliter les prises alimentaires en proposant : – d’abord et avant tout des aliments que le patient aime (ce n’est pas le moment d’essayer les choux de Bruxelles ou les épinards, même si ces légumes sont faciles à avaler) ; – une alimentation qui ne pique pas : pas de vinaigre, pas de jus de fruits acides, pas de boisson gazeuse, pas de biscuits salés ; – une alimentation qui ne gratte pas : les biscottes seront trempées et les corn flakes aussi, la purée de pommes de terre gratte moins si on ajoute un peu de navet ou de chou fleur ; – il faut éviter ce qui est trop froid (attendre si on sort la glace du congélateur) et ce qui est trop chaud (soupe tiède et non brûlante) ; – varier l’alimentation, faire un effort de présentation, proposer un plat spécial pour l’opéré (les enfants sont sensibles à ce “truc” démagogique) ; – et surtout veiller à ce que le patient boive suffisamment. CE QUI N’EST PAS NORMAL ◆ La fièvre Une température supérieure à 38,5° C n’est pas normale au-delà des 24 premières heures. Un examen médical est alors conseillé pour vérifier l’absence d’infection intercurrente telle qu’otite, pneumopathie, infection urinaire. Ce n’est que par élimination des autres diagnostics que la fièvre pourra être imputée à l’amygdalectomie. Il est habituel alors de prescrire, outre des antipyrétiques, une association amoxicilline-acide clavulanique pendant une semaine. ◆ La douleur Des douleurs intenses doivent faire vérifier la compliance au traitement antalgique et la posologie de celui-ci. Si les douleurs sont trop intenses, une hospitalisation doit être envisagée pour antalgie parentérale et perfusions de réhydratation. ◆ L’alimentation La mauvaise prise alimentaire pose exactement les même questions : le traitement antalgique est-il prescrit à une dose suffisante et surtout est-il pris ? Moins le patient boit et plus il a mal. Pour rompre ce cercle vicieux il faut parfois envisager une réhospitalisation de 24 à 48 heures pour perfusion et antalgiques IV. ◆ Les saignements L’extériorisation de sang rouge par la bouche après le retour au domicile est tout à fait anormale et impose le retour à la clinique ou à l’hôpital. Les patients sont avertis au moment de prendre le rendez-vous opératoire qu’ils ne doivent pas s’éloigner de l’endroit où ils vont être opérés pendant les 15 premiers jours postopératoires : imaginez les conséquences d’une hémorragie brutale survenant en avion au-dessus de l’Atlantique ou dans les embouteillages des retours de week-end ou de départ en vacances ! De même les patients sont avertis du risque hémorragique prolongé que fait courir l’aspirine : pas d’aspirine dans les 8 jours qui précèdent ou qui suivent une amygdalectomie. L’ORL vérifiera que le saignement vient des loges amygdaliennes. En effet le principal diagnostic différentiel chez l’enfant est l’épistaxis. Suivant l’aspect des loges, l’importance du saignement, l’ORL choisira d’hospitaliser le patient pour surveillance ou de le réendormir au bloc opératoire pour une hémostase réglée. Correspondances en médecine - n° 2, vol. IV - avril/mai/juin 2003 37