Amygdalesetcavitbuccale Hypertrophie amygdalienne bilatérale et amygdalectomie chez l’enfant Bilateral tonsil enlargement and tonsillectomy in children ● M. François* CE QU’IL FAUT RETENIR LÕamygdalectomieestformellementindiqueencasdÕhypertrophieamygdaliennebilatrale,sietseulementsi celle-ciestsymptomatique. Niveaudepreuve 2c Mots-clés : Hypertrophie amygdalienne - Apnées du sommeil Amygdalectomie. Keywords: Tonsil enlargement - Sleep apnea - Tonsillectomy. >Æ amygdalectomie est une intervention relativement courante chez l’enfant. Une enquête de la Société française d’ORL et de chirurgie cervico-faciale fait état d’environ 75 000 amygdalectomies par an en France, dont 90 % chez des enfants (1). Les deux principales indications sont les angines récidivantes et les amygdales obstructives (2). L’hypertrophie amygdalienne est une pathologie relativement récente : exceptionnelle dans les années 1970, elle est devenue de plus en plus fréquente et représente actuellement un motif courant d’amygdalectomie chez l’enfant. Cette pathologie est particulière à l’enfant de moins de 5 ans. Pour des raisons actuellement inexpliquées, certains enfants développent une hypertrophie amygdalienne progressive bilatérale, sans ou avec très peu d’épisodes d’angine. Des cœurs pulmonaires chroniques secondaires à une hypertrophie amygdalienne négligée ont été décrits dans la littérature, d’où l’intérêt d’un diagnostic et d’un traitement avant que les complications ne surviennent. L’hypertrophie amygdalienne peut être découverte fortuitement lors d’un examen de l’oropharynx et, si elle est asymptomatique, tous les auteurs sont d’accord pour dire qu’une simple surveillance suffit. * Service ORL, hôpital Robert-Debré, Paris. Dans d’autres cas, l’hypertrophie amygdalienne est découverte lors de l’examen motivé par une symptomatologie d’obstruction pharyngée, particulièrement la nuit. Les signes d’appel les plus fréquents et les plus évocateurs sont un ronflement très sonore, entrecoupé d’arrêts de la respiration de plus de 5 secondes, et un sommeil agité avec des réveils fréquents. Les signes diurnes sont plus frustres et peu spécifiques : céphalées matinales, somnolence ou au contraire agitation, dysphagie aux solides. Il peut aussi y avoir un retentissement pondéral, avec cassure de la courbe de poids. Une polysomnographie nocturne, ou même un enregistrement, pendant le sommeil, de la saturation transcutanée en oxygène, permettraient d’objectiver des apnées avec désaturation (3). Chez ces enfants avec apnées obstructives objectivées par polysomnographie et hypertrophie amygdalienne, l’amygdalectomie est efficace dans environ 80 % des cas (3). L’échec du traitement est lié à une cause associée : morphologie particulière, apnées centrales, etc. Mais, pour des raisons de coût et de disponibilité des appareils, l’enregistrement polysomnographique est rarement fait. La décision opératoire est fondée uniquement sur l’interrogatoire et la constatation de volumineuses amygdales laissant peu d’espace entre leurs bords internes. Il faut rechercher la notion d’apnées nocturnes, de sueurs ou d’écoulement de salive par les lèvres restées entrouvertes. Parmi ces enfants, certains ont d’authentiques apnées du sommeil, d’autres ont probablement une obstruction plus modérée et ne présentent donc pas de risque de développer un cœur pulmonaire chronique. Il a été cependant prouvé que ces enfants peuvent tirer un bénéfice de l’amygdalectomie. Pour des raisons éthiques, il n’est pas possible de faire des essais cliniques randomisés amygdalec- La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 295 - novembre-décembre 2004 Evidence-basedmedicine tomie versus pas d’intervention chirurgicale (4). Mais on dispose des résultats de quelques études cas-témoins au sujet de l’impact de l’intervention sur la qualité de vie des enfants amygdalectomisés pour amygdales obstructives, sans enregistrement préalable de polysomnographie ou de la saturation transcutanée en oxygène. Pour la majorité des enfants, l’amélioration de la qualité de vie est substantielle (5, 6). Elle porte essentiellement sur la qualité du sommeil et la diminution de l’anxiété parentale, mais aussi sur l’activité de l’enfant. L’effet sur la courbe de poids est plus inconstant. En conclusion, en cas de ronflements associés à des arrêts de la respiration de plus de 5 secondes la nuit, à des sueurs, et en cas de constatation de très grosses amygdales, l’amygdalectomie peut être proposée chez l’enfant sans enregistrement préalable de la saturation transcutanée en oxygène ou polysomnographie. W R É F É R E N C E S 1. De Gaudemar I. Compte-rendu du 110e Congrès de la Société française d’ORL et de chirurgie de la face et du cou. La Lettre d’ORL et de chirurgie cervicofaciale 2003;291:5-7. 2. Senez B, Laugier J, groupe de travail réuni par l’ANAES. Indications de l’adénoïdectomie et/ou de l’amygdalectomie chez l’enfant. Ann Otolaryngol Chir Cervicofac 1998;115:S22-45. 3. Shintani T, Asakura K, Kataura A. The effect of adenotonsillectomy in children with OSA. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 1998;44:51-8. 4. Lim J, McKean M. Adenotonsillectomy for obstructive sleep apnea in children. Cochrane Library 2003, issue 3. 5. Potsic WP, Pasquariello PS, Baranak CC, Marsh RR, Miller LM. Relief of upper airway obstruction by adenotonsillectomy. Otolaryngol Head Neck Surg 1986;94:476-80. 6. De Serres LM, Derkay C, Sic K et al. Impact of adenotonsillectomy on quality of life in children with obstructive sleep disorders. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2002;128:489-96. Autres ? uestions non résolues LesfacteursfavorisantlÕhypertrophie amygdaliennechezlesenfantsdemoinsde5 ans, qui,engnral,nefontpasbeaucoup dÕangines,sontencoreinconnus. La Lettre d’Oto-rhino-laryngologie et de chirurgie cervico-faciale - no 295 - novembre-décembre 2004