1 ©Arnaud de Saint Julien - MPSI Lycée La Merci 2012-2013 Résumé de cours sur l’arithmétique des polynômes Vous remarquerez à quel point l’arithmétique des polynômes ressemble à l’arithmétique des entiers. Dans tout le chapitre, K désignera le corps R ou C. 1 Divisibilité dans K[X] Définition 1 Soit A et B deux polynômes de K[X]. On dit que A divise B s’il existe un polynôme P de K[X] tel que B = AP . Exemples : tout polynôme divise 0 et A − B divise An − B n . Propriétés : Si A est non nul et que P divise A, alors deg P 6 deg A. Si D divise A et B, alors D | A + B et D | AU + BV avec U et V dans K[X]. Nous rappelons que comme sur Z, il y a une division euclidienne sur K[X]. C’est essentiellement grâce à cet outil fondamental que les anneaux Z et K[X] se ressemblent beaucoup d’un point de vue arithmétique. Théorème 2 (Division euclidienne) Soit A et B dans K[X] avec B non nul. Il existe un unique couple (Q, R) de polynômes de K[X] tels que A = BQ + R 2 et deg R < deg B. PGCD 2.1 Définition et méthode de calcul Définition 3 soit A et B deux polynômes de K[X]. – Si (A, B) = (0, 0), on pose pgcd(A, B) = 0. – Si (A, B) 6= (0, 0), on appelle pgcd(A, B) le polynôme unitaire de plus grand degré qui divise A et B. Pour avoir l’unicité du PGCD, on impose à celui-ci (s’il est non nul) d’être unitaire. On notera parfois pgcd(A, B) = A ∧ B. Exemple : si A = a0 + · · · + an X n ∈ K[X] avec an 6= 0 alors pgcd(A, 0) = A an . Pour calculer le pgcd, on utilise l’algorithme d’Euclide qui repose sur la propriété suivante (*) : Proposition 4 Soit A et B deux polynômes de K[X] avec B non nul. On note R le reste de la division euclidienne de A par B. On a alors D(A) ∩ D(B) = D(B) ∩ D(R) 2.2 et pgcd(A, B) = pgcd(B, R). Coefficients de Bezout Proposition 5 Soit A et B deux polynômes de K[X] . Alors il existe deux polynômes U et V de K[X] tels que pgcd(A, B) = AU + BV. Les polynômes U et V sont appelés des coefficients de Bezout. Attention la réciproque est fausse et il y a une infinité de coefficients de Bezout possibles. Application à la recherche d’une solution particulière d’une équation diophantienne linéaire AX + BY = C. Théorème 6 (Caractérisation du pgcd) Soit A et B deux polynômes de K[X] et D un polynôme nul ou unitaire de K[X]. Le polynôme D est le pgcd de A et B ssi il vérifie les deux propriétés suivantes : ©Arnaud de Saint Julien - MPSI Lycée La Merci 2012-2013 – D | A et D | B. – ∀C ∈ K[X], (C | A et 2 C | B) ⇒ C | D. Ce théorème exprime que pgcd(A, B) est le plus grand diviseur commun de A et B au sens de la divisibilité. 2.3 Polynômes premiers entre eux Définition 7 Deux polynômes de K[X] sont dits premiers entre eux si leur pgcd vaut 1, c’est à dire si leurs seuls diviseurs communs sont les scalaires non nuls (éléments de K∗ ). Théorème 8 (Bezout) deux polynômes A et B de K[X] sont premiers entre eux ssi il existe deux polynômes U et V de K[X] tels que AU + BV = 1. 2.4 Théorème de Gauss Question : si A | BC, a-t-on A | B ? Réponse : non en général (X 3 | X 4 = X 2 × X 2 mais X 3 ne divise pas X 2 ), oui si a ∧ b = 1, c’est le théorème de Gauss (*). Théorème 9 (Gauss) Si A | BC et A ∧ B = 1, alors A | C Question : si A | C et B | C, a-t-on AB | C ? Réponse : non en général (X 3 | X 4 et X 2 | X 4 mais X 3 × X 2 = X 5 ne divise pas X 4 ), oui si A ∧ B = 1, Proposition 10 Si A ∧ B = 1 et si A | C et B | C, alors AB | C. 3 Polynômes irréductibles 3.1 Généralités Définition 11 Un polynôme A de K[X] est dit irréductible si deg A > 1 et si ses seuls diviseurs sont les scalaires non nuls et ses polynômes associés, c’est à dire de la forme λA avec λ ∈ K∗ . Les polynômes irréductibles sont aux polynômes ce que sont les nombres premiers pour les entiers. Exemples : – tout polynôme de degré 1 est irréductible. – soit P ∈ K[X] avec deg P > 2. Si P admet une racine a dans K alors P n’est pas irréductible car divisible par X − a. – La réciproque est fausse puisque (X 2 + 1)2 n’admet pas de racines réelles mais est réductible dans R[X]. – Attention la notion d’irréductibilité dépend du corps de base : X 2 + 1 est irréductible dans R[X] mais pas dans C[X] car X 2 + 1 = (X − i)(X + i). 3.2 Description des polynômes irréductibles de K[X] Le théorème de D’alembert Gauss affirme que tout polynôme non constant de C[X] admet au moins une racine complexe. On en déduit : Proposition 12 Les polynômes irréductibles de C[X] sont les polynômes de degré 1. Sur R, nous avions démontré que tout polynôme de R[X] pouvait s’écrire comme un produit de polynômes de degré 1 ou de aussi quasiment tout fait, on a : degré 2 à discriminant strictement négatif. Proposition 13 Les polynômes irréductibles de R[X] sont : – les polynômes de degré 1 – les polynômes de degré 2 à discriminant strictement négatif. Les factorisations que nous avions appelées «maximales» sont donc des factorisations à l’aide de polynômes irréductibles. C’est l’équivalent de la décomposition en produit de facteurs premiers pour les entiers. ©Arnaud de Saint Julien - MPSI Lycée La Merci 2012-2013 4 3 Exercices Exercice 1 (Un vrai-faux) 1. Les diviseurs du polynôme X sont les polynômes λX avec λ ∈ K. 2. Soit A et B dans K[X] tels que A divise B et B divise A. A-t-on A = B ? 3. Soit A et B dans K[X] tels que A divise B. Alors deg A 6 deg B. 4. Un polynôme de K[X] qui admet une racine n’est pas irréductible. 5. Un polynôme de C[X] qui n’admet pas de racine dans K est irréductible. 6. Un polynôme de R[X] qui n’admet pas de racine dans K est irréductible. 7. Un polynôme de K[X] de degré 2 ou 3 qui n’admet pas de racine est irréductible. 8. Le polynôme X 2 − 2 est irréductible dans Q[X]. Exercice 2 Décomposer en produit de facteurs irréductibles sur C puis sur R le polynôme X 8 − 1. Exercice 3 (Oral CCP) On considère les polynômes P = 3X 4 − 9X 3 + 7X 2 − 3X + 2 et Q = X 4 − 3X 3 + 3X 2 − 3X + 2. 1. Décomposer P et Q en facteurs premiers sur R, puis sur C (on pourra calculer les valeurs de P et Q en 1 et 2). 2. En déduire le ppcm et le pgcd des polynômes P et Q. 3. Indiquer une autre méthode permettant d’obtenir le pgcd de P et Q. Exercice 4 Pour chaque polynôme, calculer le PGCD (unitaire) des polynômes et déterminer un couple de coefficients de Bezout. On pourra vérifier ces résultats avec la fonction gcd de MAPLE. 1. X 4 + X 3 − 3X 2 − 4X − 1 2. X 5 − X 4 + 2X 3 + 1 et X 3 + X 2 − X − 1 et X 5 + X 4 + 2X 2 − 1 3. X 7 + X 6 + X 5 + X 4 + X 3 + X 2 + X + 1 et X 5 + X 4 + X 3 + X 2 + X + 1. Exercice 5 Soit a et b dans K et p et q dans N∗ . 1. Déterminer le PGCD des polynômes X − a et X − b. 2. Déterminer le PGCD des polynômes (X − a)p et (X − b)q . Exercice 6 Soit P et Q dans K[X]. Démontrer que (P + Q) ∧ P Q = 1 ⇒ P ∧ Q = 1. Exercice 7 Déterminer les polynômes P ∈ C[X] tels que P 0 divise P . Exercice 8 (Autour de P et P 0 ) Soit P ∈ K[X]. 1. Démontrer que si P et P 0 sont premiers entre eux, alors P n’a que des racines simples sur K. 2. Démontrer que la réciproque est vraie si K = C mais fausse si K = R. Exercice 9 (Difficile) Soit n et m dans N∗ tels que n > m. Le but de l’exercice est de déterminer le PGCD des polynômes X n − 1 et X m − 1 1. Déterminer le PGCD de X 8 − 1 2. Déterminer le PGCD de X 63 − 1 et X 6 − 1. et X 28 − 1 puis le PGCD des entiers 63 et 28. 3. Effectuer la division euclidienne de X n − 1 par X m − 1, en écrivant celle de n par m. 4. En déduire que PGCD(X n − 1, X m − 1) = X PGCD(n,m) − 1. Exercice 10 (Oral CCP) Soient θ ∈ R et n ∈ N∗ . Décomposer en produit de polynômes irréductibles dans C[X], puis dans R[X] le polynôme P = X 2n − 2X n cos(nθ) + 1.