Les tests de marche Dispositifs d’analyse de la marche Intérêt de ces évaluations spécifiques Get Up & Go Test • Equilibre assis droit sur une chaise à dossier • Transfert assis debout EPREUVE COTEE DE 1 A 5 • Equilibre debout 1 = pas d'instabilite 5 = risque permanent de chute • Marche 3 mètres Score > 3 • Demi-tour • Tour de la chaise • Transfert debout assis Timed up & go test • < 20 sec : bonne mobilité • < 14 sec : faible risque de chute • > 30 sec : dépendance pour la mobilité Podsiadlo D, J Am Geriatr Soc 1991 Shumway-Cook A, Phys Ther 2000 Beauchet O, JNHA, 2011 Test de Tinetti modifié Test de Tinetti modifié Interprétation : < 20 points : risque de chute très élevé 20-23 points : risque de chute élevé 24-27 points : risque de chute peu élevé 28 points : normal Les dispositifs spécifiques d’analyse de la marche • Le chronométrage du sujet sur une distance donnée : vitesse spontanée, vitesse maximale. • Les systèmes baropodométriques par capteurs plantaires (semelles embarquées dans les chaussures munies de nombreux capteurs) ⇒ caractériser des anomalies podologiques ⇒ orienter la confection d’orthèses plantaires. Les principaux dispositifs sont F-Scan®, Footscan® et Emed®. • Les systèmes filaires (Locomètre®/Walkmeter®) : l’avant ou l’arrière du pied du patient est relié par un fil à un enregistreur de mouvement Le locomètre Le locomètre Les dispositifs spécifiques d’analyse de la marche • Les tapis ou piste de marche (GAIT-Rite®) : permettent l’analyse de l’ensemble des paramètres spatio-temporels du cycle de marche, y compris la largeur du pas. ⇒ tapis dans lequel sont disposés de très nombreux capteurs de force (mesure des pressions plantaires) • L’accéléromètre tri-axial : basée sur l’utilisation d’accéléromètres, pour détecter respectivement les accélérations linéaires, angulaires et les inclinaisons, en différents points du corps. • L’analyse optocinétique, ou 3D : dispositif d’analyse cinématique composé de 6 caméras infrarouges (Vicon®, Motion Analysis® et Elite®) L’analyse quantifiée de la marche Tapis GaitRite + Système à base de caméra(s) vidéo ± Système d’analyse du mouvement en 3 dimensions ± Plate-formes de forces ± Système d’enregistrement EMG Système Vicon Evaluation de la vitesse de marche • Standardisation du test de marche : – Distance = 4 mètres – Départ arrêté – Marche habituelle – Pas de conseil particulier • Cutoffs pour la vitesse de marche – > 1.0 m/s = vieillissement réussi – < 0.6 m/s prédictif d’un état de santé altéré et d’un déclin fonctionnel • La vitesse de marche = marqueur de fragilité • Analyse de 9 études de cohorte – 35 485 patients > 65 ans vivant à domicile - Suivi 9-21 ans • Réduction de la mortalité de 12% par 0,1 m/s Studenski et al, JAMA 2011 Risque d’événements péjoratifs et vitesse de marche Houles, Cahiers de l’année gérontologique 2010 Etude de la variabilité de la marche • Variabilité de la marche = Fluctuations d’un pas à l’autre • L’œil humain ne détecte pas les petites variations • Évaluation : Amplitude calculée à partir du coefficient de variation = (écart-type /moyenne) x 100 – Longueur du pas – vitesse de marche – cadence • Variabilité plus élevée chez les sujets âgés • Variabilité de la marche = marqueur du risque de Hausdorff JM, Hum Mov Sci 2007 chute Beauchet O, J Am Geriatr Soc 2003 Les tests en double tâche • Stop walking when talking test • Mesure de la vitesse de marche (10m) – En situation normale – Avec exécution d’une tâche manuelle (ex; port d’un verre) – Avec exécution d’une tâche « intellectuelle » (ex : compter à l’envers de 2 en 2 à partir de 30) – Avec une tâche manuelle et une tâche intellectuelle "Stops walking when talking" as a predictor of falls in elderly people. Démence n = 26 Dépression n = 25 ATCD d’AVC n = 20 Lundin-Olsson, Lancet, 1997 Lorsqu’un patient présente une modification de la marche ou des performances attentionnelles au cours d’une double tâche Prédiction du risque de chute : OR = 5.3 (95% CI, 3.1-9.1) Beauchet O et al. Eur J Neurol. 2009 Les paradigmes de double tâche Double tâche • Définition : Réaliser simultanément une tâche attentionnelle en marchant • Évaluation : Comparaison des performances entre les conditions de simple et double tâche Modifications des performances sous double tâche : • Interprétées comme des interférences dues à une compétition des besoins attentionnels requis pour chaque tâche • Dépendant principalement de la capacité à répartir Pashler H, Psychol Bull 1994 Diapositive correctement empruntée à O. Beauchet, l’attention SFGGentre 2012 deux tâches (fonctions exécutives ++) Démence et troubles de la marche • Prévalence des troubles de la marche – – – – – Allan et al. JAGS 2005 90% : Démence parkinsonienne 79% : démence vasculaire 75% : DCL : Légère 40% / Modérée 87% / Sévère 100% 43% : Maladie de Parkinson 25% : Maladie d’Alzheimer : Légère : 0% / Modérée : 33% / Sévère : 50% – 7% : Groupe contrôle • Un trouble de la marche oriente vers une démence non MA (RR=15) • Le type de troubles de la marche permet de différencier le type de démence non MA • Le risque de chute semble maximal lorsque la démence est à un stade modéré puis décroît (confinement ?) Démence et troubles de la marche • Les modifications de marche sous double tâche détectent la démence débutante Pettersson, Dement Geriatr Cogn Disord. 2005 • Chutes précoces dans certaines formes de démences • Les liens entre les troubles de la marche, la cognition et la survenue de chutes reposent sur les fonctions exécutives Beauchet, J Mot Behav 2005 Peut-on proposer une classification des troubles de la marche ? Classification de Nutt, Marsden et Thompson (1993) En fonction du niveau du contrôle moteur • Niveau supérieur : structures corticales, NGC, mésencéphale – Choix des réponses posturales et locomotrices en fonction de l'environnement , des motivations... – Perturbations multiples : organisation, initiation et coordination des réponses posturales et locomotrices • Niveau intermédiaire : atteintes des voies sensori-motrices ascendantes ou descendantes (ataxie cérébelleuse, hémiparésie) – Sélection appropriée des synergies, mais défaut d'exécution • Niveau inférieur : atteinte des systèmes sensoriels et musculo-squelettiques Nutt JG, Neurology 1993 – Réduction d'activité et incoordination des synergies Classification d’Alexander et Goldberg (2005) Cleve Clin J Med 2005 Basée sur le niveau de déficit sensitivo-moteur. • Niveau 1 « faible » – La marche ataxique sensitive (atteinte du système vestibulaire, des voies de la sensibilité profonde et des nerfs périphériques) : Démarche instable, talonnante – La marche douloureuse due à l’arthrose. Boiterie – La marche déficitaire périphérique due à une myopathie ou à une neuropathie. Démarche dandinante, claudication radiculaire du canal lombaire étroit, steppage unilatéral ou bilatéral (polyneuropathie) Classification d’Alexander et Goldberg (2005) • Niveau 2 « modéré » – Marche de l’hémiplégique et de l’hémiparétique. Spasticité et fauchage du membre inférieur. – Marche du paraplégique et du paraparétique. L’hypertonie pyramidale fixe en extension les membres inférieurs qui sont posés alternativement en avant par une inclinaison de rotation du tronc du côté opposé (c’est une démarche de gallinacé). – Marche parkinsonienne. Démarche à petit pas traînants avec rétropulsion, sans élargissement du polygone de sustentation, sans ballant des bras. Un retard à l’initiation, un demi-tour décomposé, des blocages et un piétinement sur place. – Marche ataxique cérébelleuse. Démarche ébrieuse, faite d’embardées. Station debout avec oscillations et élargissement du polygone de sustentation. Classification d’Alexander et Goldberg (2005) • Niveau 3 « élevé » – Marche sénile. Peur de tomber. Démarche précautionneuse, lente, avec pas traînants, ballant des bras diminué, tronc en flexion et légère augmentation du polygone de sustentation. – Marche frontale. Difficulté à initier le mouvement, petits pas traînants, polygone de sustentation élargi. Les membres inférieurs s’entrecroisent avec piétinement sur place. • Autres types de marche – Marche non étiquetée – Marche normale – Marche impossible • Un trouble de la marche peut être la conséquence d’un déficit à plusieurs niveaux. La plupart des psychotropes, notamment par leur action sédative, participent également à l’altération des fonctions sensitivo-motrices. Classification proposée par Azulay • Classification à partir du trouble fonctionnel principal ⇒ Permet d’orienter la prise en charge thérapeutique Azulay JP, Rev Neurol (Paris) 2010 Classification de Snijders Snijders et al, Lancet Neurol 2007 Démarche diagnostique en 3 étapes Données cliniques Confirmation diagnostique Signes et symptômes Tests cliniques associés Ex : déséquilibre lors des Ex: hypotension manœuvres de déstabilisation orthostatique Syndrome clinique Ex : marche parkinsonienne (suspicion de syndrome parkinsonien atypique) Caractéristiques de la marche Ex : marche à petits pas Investigations complémentaires Ex: IRM, biologie, EMG… Test thérapeutique éventuel Ex : L-dopa, arrêt BZD Evolution Ex : apparition d’un syndrome cérébelleux Diagnostique probable Ex : atrophie multisystématisée Autopsie Preuve histopathologique Confirmation diagnostique Ex : atrophie olivo-ponto-cérébelleuse Traduit et adapté de Snijders, Lancet Neurol 2007, Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 Démarche diagnostique enJahn 3 étapes K, Dtsch Arztebl Int 2010 1ère étape : Description de la marche Signes et symptômes associés 2ème étape : Diagnostic syndromique Principes thérapeutiques Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 2ème étape : Diagnostic syndromique Principes thérapeutiques Jahn K, Dtsch Arztebl Int 2010 3ème étape : autopsie Limites de ces classifications • Association fréquente d’atteintes à plusieurs niveaux • Ne prennent pas en compte – Les maladies cardio-vasculaires – Le déconditionnement à l’effort • Ne prennent pas en compte la iatrogénie • « Rigidifient » a priori le diagnostic • Ne prennent pas ou peu en compte les aspects cognitivo-émotionnels Kemoun G, SFGG 2012 Quelle prise en charge thérapeutique devant un trouble de la marche ? Prise en charge thérapeutique • Dépend directement des problèmes identifiés ⇒ Importance de l’étape diagnostique ⇒ Traitement des maladies sous-jacentes • Supprimer ou limiter les facteurs aggravants : alcool, iatrogénie, douleur… • S’assurer d’un bon chaussage • Kinésithérapie – – – – – Tenir compte des comorbidités, du déconditionnement Renforcement musculaire Travail proprioceptif Travail de la posture et de l’équilibre Travail de la marche ± aides techniques • Prise en charge comportementale : réassurance PIEDS MAL CHAUSSÉS, CHUTES ASSURÉES ! UN BON CHAUSSAGE Possède un avant pied Maintient le pied, large Est à la bonne pointure Possède des talons de 3 à 4 cm, à base large Tient le talon Est muni de semelle antidérapante, En cas de problème, n ’hésitez pas à en parler au kinésithérapeute du service Prise en charge - particularités • Développement d’activités physiques spécifiques basées sur le rythme pour améliorer la marche et diminuer le risque de chutes – Exemple : rythmique Jacques Dalcroz Trombetti A, Rev Med Suisse 2011 Chez le patient dément • prise en charge pluridisciplinaire • personnalisation, ciblage des objectifs • association d’exercices stimulant force et équilibre • intégration de tâches sollicitant attention, mémoire immédiate, mémoire de travail et praxies, • travail en double tâche Manckoundia P, Ann Readapt Med Phys 2008 Ce qu’il faut retenir • Intérêts de la double tâche dans l’évaluation des troubles de la marche du sujet âgé ⇒ Détection simple et efficiente du risque de chutes ⇒ Les modifications de marche sous double tâche détectent la démence débutante (troubles des fonctions exécutives) … • Importance de l’approche diagnostique devant un trouble de la marche 1. Description, signes associés 2. Caractérisation 3. Prise en charge thérapeutique 4. Réévalutation L’expérience lilloise de l’évaluation multidisciplinaire de la chute L’expérience lilloise • À l’origine : 1 gériatre, 1 neurologue, 1 rééducateur • + ophtalmo, kiné, ergo, diététicienne, assistante sociale, podologue • 1 journée d’hospitalisation • A l’issue de la consultation – Information du patient / de(s) l’aidant(s) – Rééducation spécifique – Courrier au MT indiquant les facteurs de risque de chute identifiés et reprenant les recommandations • Propositions d’investigation(s) complémentaire(s) • Modifications environnementales • Modifications thérapeutiques Le profil des patients Caractéristiques Age Moyen > 85 ans Sexe (F/H) Patient vivant en institution Patient vivant seul ADL (moyenne / médiane) Utilisation d’une aide technique de marche Diabète Hypertension ensemble des patients (n=641) (%) 80,6 ans 28% 2,7/1 25 % 57 % 5,0 / 5,5 42 % 17 % 54 % Prévalence des chutes dans les 6 mois précédents la consultation Facteurs de risque de chute Nb chutes dans les 6 mois (médiane) Séjour au sol > 1 heure Peur de tomber Hypotension orthostatique Maladie de Parkinson Démence MMS moyen Dépression Antécédent de fracture Nb médicaments >4 Prise d’au moins un psychotrope Get up and go > 20 secondes Au moins un facteur environnemental Trouble proprioceptif Trouble de la marche Trouble de l’équilibre Déficit visuel 3 ± 3,7 30 % 79 % 22 % 9% 47 % 24,1 22 % 40 % 69 % 55 % 58 % 77 % 71 % 87 % 66 % 45 % Anomalies de l’examen neurologique retenues comme facteurs de risque de chutes • Des troubles de la sensibilité profonde (diapason) (59%) • Des troubles cognitifs (43 %) • Des anomalies du tonus musculaire ou une diminution franche de la force musculaire (25%) • Un syndrome cérébelleux (17%) • Une akinésie (17%) • Des troubles de la sensibilité superficielle (17%) • Un syndrome parkinsonien (7 %) • 85% des symptômes, syndromes ou maladies observés n’étaient pas connus au moment de l’évaluation multidisciplinaire A Guillochon et al, Rev Neurol (Paris) 2009 Troubles de la marche observés chez les chuteurs adressés en consultation de la chute à Lille selon la classification d’Alexander et Goldberg (2005). Prévalence (n = 266) (%) Marche sénile 70 (26.3 %) Marche douloureuse et myopathique 58 (21.8 %) Marche ataxique sensitive 52 (19.5 %) Marche parkinsonienne 45 (16.9 %) Marche normale 27 (10.2 %) Marche hémiplégique et hémiparétique 8 (3 %) Marche ataxique cérébelleuse 5 (1.9 %) Marche frontale 4 (1.5 %) Marche non étiquetée 24 (9 %) Marche impossible 8 (3 %) Guillochon, Rev Neurol (Paris) 2010 Les propositions faites à l’issue de l’évaluation multidisciplinaire n = 135 Puisieux F et al, Am J Phys Med Rehabil 2001 Incidence des chutes dans les 6 mois précédents la consultation Incidence des chutes dans les 6 mois après la première consultation