CONDUITE D'UNE CONSULTATION ET D'UN EXAMEN CLINIQUE CHEZ LE NOURISSON La sémiologie est la partie de la médecine qui étudie les signes de la maladie. C'est donc "l'art de mettre en sens les signes qui font signe". Il faut observer ce qui fait signe. Pour ceci il faut avoir une connaissance du normal mais aussi du pathologique. Il faut mettre en lien les informations pour faire sens et générer des hypothèses en s'arc-boutant sur la physiopathologie. I. Généralités de la sémiologie en pédiatrie A. Généralités Pour bien consulter, il faut être dans de bonnes conditions matérielles : Les conditions sensorielles : pièce calme par exemple Les conditions d'intimités Les conditions de confidentialités Les étapes de l'initiation de la rencontre entre le patient et le praticien sont : Les salutations : On salue les gens présents dans la pièce Les identifications mutuelles : On se présente et on s'assure de l'identité du patient (vous êtes bien les parents de …) L'exposé du projet : On dit ce que l'on va faire (interrogatoire, examen et arrivée d'un sénior) L'amorce : "Je vous sens inquiète, qu'est ce qui vous inquiète ?" B. Les conditions de l'examen Il faut localiser l'accompagnement du nourrisson et l'identifier. Il faut aussi sentir l'ambiance de la mère/père et : Evaluer la famille Evaluer le contexte socio-économique Evaluer l'histoire (carnet de santé +++) Kevin CHEVALIER 1 C. Les incontournables En pédiatrie, il y a trois items incontournables : Les antécédents familiaux. Le développement staturo-pondéral et psychomoteur. La courbe de croissance est très importante pour évaluer ce paramètre. Les vaccins et la vitamine D D. Examen de l'enfant Il faut s'assurer de la coopération de l'enfant. Pour ceci il faut : Une attitude amicale Anticiper et expliquer pour ne pas effrayer l'enfant Mimer les gestes pour que l'enfant comprenne mieux Toujours commencer par le banal. Lors d'un examen, il faut toujours commencer par le membre controlatéral non douloureux. L'examen ORL est à faire en fin d'examen (car il est souvent mal vécu) II. Le diagnostic C'est une démarche élaborée qui se construit sur la lecture des signes. Elle se repose sur 3 temps : A. Le diagnostic positif On a une définition de la maladie (ici température supérieur à 38,5) et la mise en évidence des signes et syndromes qui s'y rapportent. Il ne faudra pas négliger l'apport de la para-clinique (examens complémentaires). Pour arriver à un diagnostic positif on va rechercher : Les manifestations cliniques. Par exemple : Une maman qui dit que son enfant a de la fièvre sans en prendre la température car elle connait son enfant. A l'inverse une maman qui a pris la température : pourquoi l'a-t-elle fait ? Les circonstances de découverte. Par exemple : Hématurie : Un gamin a pris un coup dans les côtes après un match de foot et a uriné rouge. Kevin CHEVALIER 2 Il faut s'arc-bouter sur les signes différentiels. Dans certaines circonstances, il faut prendre en compte les effets du traitement. Par exemple: Si on traite un œdème avec des diurétiques et que l'œdème disparait alors. On a donc un effet thérapeutique qui va confirmer le diagnostic. On a aussi les complications qui peuvent orienter sur le diagnostic. Manifestations cliniques Circonstances de Découverte DIAGNOSTIQUE POSITIF Complications Effet du traitement Diagnostique différentiel B. Le diagnostic différentiel Cela consiste à dire ce qui n'est pas. On va éliminer toutes les pathologies qui correspondent aux signes ou non. C. Le diagnostic étiologique Il consiste à rechercher l'origine des symptômes. III. Diagnostic d'une hyperthermie chez un nourrisson A. Diagnostique positif 1. Mesure de la température Il faut savoir selon quelles modalités l'on va réaliser cet examen, mais aussi avec quels instruments et dans quelles conditions de mesure. Une hyperthermie est diagnostiquée pour une température supérieure à 38,5°C. Kevin CHEVALIER 3 2. Circonstance de découverte (cdd) La prise de température est un principe systématique dans le cadre d'une surveillance. Elle peut être "attendue". Par exemple chez un enfant après vaccination. C'est aussi un signe d'appel dans le cas : D'altération du cas général D'éruption cutanée Si on a des troubles digestifs, ORL, pulmonaires (toux, dyspnée), urinaires (urines qui sentent fort) 3. Types d'hyperthermie Il existe 3 types d'hyperthermie : L'hyperthermie aigue : On va rechercher quel est le mode d'installation et mettre en place les mesures thérapeutiques. L'hyperthermie prolongée (> 5 jours) : On réalise une courbe des températures et on regarde le traitement antérieur pour l'adapter. L'hyperthermie au long cours : La courbe des températures sera une donnée très importante. On notera les horaires et les modalités de prise de cette température. 4. Tolérance et gravité Il faut devant un signe regarder s'il y a urgence. Pour ceci on évalue : Les paramètres hémodynamiques et les paramètres "vitaux" : Pression artérielle (systolique, diastolique, moyenne) Fréquence cardiaque Saturation en O2 Fréquence respiratoire Kevin CHEVALIER 4 On regarde aussi les paramètres neurologiques Conscience, réactivité Mouvements anormaux, convulsions, tonus On a aussi les signes cliniques associés à la gravité : Purpuras ++ Trouble de la coagulation Une hyperthermie chez un enfant de moins de 3 mois s'explore tout de suite car elle est d'emblée grave. 5. Les premières mesures mises en œuvre On va : Découvrir le nourrisson, lui retirer une couverture ou un drap. Le mettre dans une pièce aérée Hydrater le nourrisson Donner un traitement médicamenteux : Paracétamol 60 mg/kg/24h en 4 prises Acide acetylsalicylique AINS (Advl, ibuprofène) ? On réalisera une surveillance et un examen clinique répété. B. Diagnostique différentiel Il faut savoir rester critique. On peut rechercher une erreur (appareil défectueux, prise…) Il peut s'agir de thermomimie. Ce sont des adolescents qui inventent l'hyperthermie. On a aussi le syndrome de Münchhausen qui sont des sévices par procuration. Ce sont les parents qui vont inventer des symptômes inquiétants chez leurs enfants. Kevin CHEVALIER 5 C. Diagnostique étiologique 1. Par signe de gravité Pour rechercher la cause, on va évaluer la gravité : On va réaliser des mesures thérapeutiques immédiates Par principe, on va évoquer certaines étiologies : Purpura fulminans Méningite purulente Septicémie 2. Diagnostique évident On va ensuite rechercher les diagnostiques évidents mais non graves comme les maladies éruptives, contage (contagion), symptomatologie. 3. Le "scan/balayage" de principe On va rechercher : Des antécédents familiaux Des antécédents personnels (croissance, vaccins…) L'histoire de la maladie On va ratisser les signes fonctionnels, généraux et physiques 4. Méthode appareil par appareil On va réaliser une auscultation appareil par appareil : Neurologique Pulmonaire HGE (Hépato-Gastro-Entérique) Urinaire Ostéoarticulaire Cutané ORL (en dernier) Kevin CHEVALIER 6 5. Méthode processus par processus On va faire une recherche selon les processus : Processus infectieux ++ surtout dans les hyperthermies. (Viral, bactériens, parasites, …) Processus prolifératifs (cancers) comme la leucémie Processus immuno-médié / maladie de système comme la maladie de Kawasaki ou une maladie inflammatoire (maladie de Crohn). Processus traumatiques (résorption d'un hématome) D'autres processus comme les toxiques, les processus malformatifs, génétiques, vasculaires… 4. Méthode "hypothético-déductive" +++ On va émettre des hypothèses précoces à partir des signes (souvent au moins 3). On va invalider ou valider ces hypothèses avec d'autres examens pour arriver à un diagnostic final. Ce qui veut dire qu'on doit avoir une interrogation orientée, une attention constante. On va devoir associer des faits et avoir une très bonne capacité d'écoute. Pour cette méthode il faut connaître la sémiologie. D. La thérapeutique On va d'abord se poser la question du traitement en urgence ou non. On va donner un traitement symptomatique pour combattre les symptômes (douleurs). On va aussi donner un traitement étiologique qui va régler l'origine du problème. On veut aussi traiter les complications qui peuvent survenir. Il faut poser un traitement iatrogène, c'est-à-dire qui ne nuit pas à l'enfant : "primum non nocere". Kevin CHEVALIER 7 IV. Cas cliniques A. Cas clinique 1 Maxence, 6 mois. Amené par ses parents car "brûlant" Aurait présenté des mouvements bizarres : secousses pendant 10 secondes puis s'est raidi Se frotte l'oreille. Indiquez les éléments que vous recueillez lors de votre examen clinique. 1. Histoire de la maladie et circonstances de découverte On va reconstruire l'histoire de la maladie et chercher les circonstances de découvertes : Depuis quand ? Avez-vous vu votre médecin les jours récents ? Y'a-t-il quelqu'un dans l'entourage (ami, frère ou sœur) qui a quelque chose ? Depuis quand ? Est-ce votre premier enfant ? (mère aguerrie ou non) 2. Signes cliniques "Aurait présenté des mouvements bizarres : secousses pendant 10 secondes puis s'est raidi" Recherche de convulsions dans la famille Description des convulsions Les symptômes de fièvre et de convulsion font penser à une agression du système nerveux agressé. Y'a-t-il un syndrome méningé ? "Se frotte l'oreille ?" On va regarder le conduit auditif, en dernier bien sûr. On va aussi rechercher une aggravation de l'otite type mastoïdite. 3. Vérification des paramètres essentiels On vérifie : Les vaccins Le développement staturo-pondéral (Courbe de croissance) Le périmètre crânien La vitamine D Kevin CHEVALIER 8 B. Cas clinique 2 Louise, 4 ans Au réveil "pas bien" avec une température de 40°. Se plaint de douleur lors de la miction. Alors qu'était propre la nuit "accident" d'énurésie depuis 48h. Indiquez les éléments que vous recueillez lors de votre examen clinique. 1. Signes cliniques On va rechercher les signes d'une infection urinaire : Miction régulières (pipi toutes les 5 minutes) Enfant plus propre la nuit. Attention néanmoins, on va rechercher la quantité d'urine. Si l'enfant urine beaucoup on aura peut être un diabète qui a irrité la vessie. 2. Examens On va faire un examen des urines (présence de leucocytes, urine trouble ?) On va palper la vessie On va recueillir l'hémodynamique. On va réaliser une échographie. On va interroger les antécédents familiaux urinaires, la normalité de l'appareil urinaire pendant l'échographie de la grossesse ? Kevin CHEVALIER 9