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Scénario d’un cauchemar à double entrée [1/2]
Date : 26 janvier 2016
Bernard PLOUVIER
L’histoire ici présentée peut se déguster de façons opposées. Soit on la considère comme une
fiction romanesque, imprégnée de licence poétique… puisqu’aucun noble et grave historien n’a
osé écrire les faits rapportés.
Soit on l’admet comme assez proche de l’insaisissable vérité historique, qui demeure, pour
toute époque, un idéal inaccessible, faute de connaître tous les détails factuels, l’identité des
personnages restés en coulisses et les intentions réelles de ceux qui ne vivent que du regard
d’autrui et ne se sentent à l’aise que sous les feux des projecteurs. Plus que jamais notre
époque pourrait être une paraphrase du grand Will : une histoire pleine de bruit et de fureur,
racontée par un idiot (Macbeth)… à ceci près que les idiots, aux mensonges si utiles à la paix
sociale, se sont multipliés de façon dramatique.
Acte I – Les années 1937-1990 : la fin de l’indépendance européenne
Nous l’a-t-on suffisamment enseigné : le bon Franklin Delano Roosevelt (FDR) sauva les USA
grâce à son New Deal… tout est faux dans cette affirmation et FDR l’a parfaitement compris en
l’année fatidique 1937, négligée par la quasi-totalité des historiens patentés.
Scène 1 - Les prémices de notre temps : la conception du bonheur selon Roosevelt
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En mars 1937, après 4 années de New Deal coûteux autant que partiellement inefficace et
totalement illégal (seul le Congrès et non le Président des USA peut injecter de l’argent public
dans l’économie privée), l’on subit à Wall Street une nouvelle panique boursière, suivie d’une
nouvelle cascade de faillites : en deux ans, 40 milliards de $ de valeurs boursières s’évaporent
et l’indice Dow Jones baisse de 60%. Le chômage, qui stagnait aux alentours de 7,6 millions
d’individus au début de l’année 1937, grimpe à 10,5 millions à la fin de l’année et 13 millions à
la fin de 1938, soit le retour à la case départ de l’ère Roosevelt.
Comme pour narguer le potentat US, le revenu national allemand de l’année 1937 (où le
chômage est nul, au point que l’on engage des travailleurs Italiens dans le Reich) est égal à
150% de celui de l’année 1932. Les résultats du commerce extérieur allemand pour les années
1937-38 sont exceptionnellement brillants, grâce à ce clearing qu’aux USA l’on confond
volontairement avec l’autarcie. En 1937-38, si l’économie allemande et la japonaise (cette
dernière grâce à la mise en valeur du Mandchoukouo et du Jehol) vont bien, et même de mieux
en mieux au fil des semestres, les USA plongent de nouveau dans la crise économique.
L’expérience Roosevelt, celle du New Deal, est un désastre économique et financier. FDR est
suffisamment intelligent et lucide pour ne pas s’enraciner dans l’erreur. Il comprend que le
capitalisme pur et dur, que lui-même et ses collaborateurs ont tant vilipendé depuis la
campagne électorale de 1932, est bien mieux adapté à la plus grande puissance économique
de la planète qu’un dirigisme étatique malhabile. En cette année 1937, FDR commence à rêver
comme un mégalomane… et il le peut, étant à la tête d’un immense pays, gavé de richesses
naturelles, admirablement équipé, disposant d’une foule d’ingénieurs inventifs et très qualifiés,
ainsi que de businessmen entreprenants, hyperactifs et totalement dénués du moindre scrupule
d’ordre humaniste.
Les fondements de la nouvelle « doctrine Roosevelt » se précisent en 1937-38. La guerre ne
peut que ranimer le Big Business. L’expansion économique hors des USA (ce que d’aucuns
appelleront bientôt l’impérialisme US) doit être soutenue par une énorme armée, aux constants
progrès techniques permis par une recherche de pointe. Cette force militaire doit être toujours
prête à intervenir puissamment en n’importe quelle région du globe où les intérêts US sont ou
semblent menacés. De ce fait, FDR met en place, dès 1938-39, un énorme complexe militaro-
industriel, injectant massivement des fonds publics dans l’industrie de guerre, n’hésitant pas à
faire tourner la planche à billets verts (d’autant que les USA renferment, depuis 1936, la plus
grande partie des stocks d’or de la planète) ni à augmenter de façon vertigineuse la Dette de
l’État fédéral, par la pratique systématique d’un énorme déficit budgétaire.
L’ambition de FDR est de donner aux USA le leadership économique et politique de la planète.
Pour cela, il lui faut rabaisser l’Europe occidentale, principale concurrente économique, lui voler
ses colonies pour en tirer les matières premières nécessaires à l’économie US (et en priver les
concurrents européens), enfin établir de bonnes relations avec le seul concurrent politique qui
devrait subsister après la guerre qu’il s’efforce de déclencher : l’URSS. Le Japon doit être
réduit de la même façon que le Reich et en tous cas exclu de l’accès au commerce chinois.
FDR a décidé souverainement la fin des empires coloniaux classiques, desquels on tirait des
matières premières et des travailleurs à bon marché et où l’on écoulait en masse des produits
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de basse qualité. « Les méthodes du XXe siècle veulent qu’on industrialise les colonies » : par
cette phrase d’août 1941, rarement citée, FDR lance ce que l’on appellera plus tard
« l’économie globale », soit la politique de délocalisation des industries, exigeant beaucoup de
personnel, de régions à hauts salaires et à forte protection sociale vers les zones jusque-là
sous-développées, dont les populations demeurent (temporairement) moins exigeantes. Là
encore, il faudra attendre quelques décennies avant de les voir appliquées, mais les idées
rooseveltiennes triompheront. « Plus d’impérialismes après la guerre ! », cela ne concerne que
le colonialisme et nullement l’impérialisme économique.
Si l’Armée Rouge n’a pas envahi toute l’Europe, ce n’est pas FDR qu’il faut en remercier. Bien
au contraire, lors de la Conférence de Yalta, tenue du 4 au 11 février 1945, il a déclaré à
Dougashvili-‘’Staline’’, lors d’une entrevue capitale dont Churchill a été intentionnellement
exclu, qu’il ne voulait laisser participer l’US-Army à l’occupation de l’Allemagne que durant
deux années, qu’il se désintéressait du tracé des frontières en Europe centrale et désirait
œuvrer à une décolonisation accélérée dans le monde aux dépens de l’Europe.
Il est sans intérêt que FDR ait menti à ses proches et à son opinion publique en présentant
‘’Staline’’ comme un « modéré », prêt à rétablir la liberté religieuse en URSS. FDR ne fut pas
un niais, qu’Uncle Joe a roulé dans la farine. C’était un homme d’État dont les prévisions à
long terme nécessitaient le déclin prolongé de l’Europe… et quelle façon plus aisée d’obtenir la
ruine économique d’un continent que de le laisser sombrer dans l’absurdité marxiste ? Devant
certains de ses interlocuteurs, en 1943-44, FDR a soulevé le masque : « Toute l’Europe sera
bolchevisée ? Pourquoi pas ! Les peuples d’Europe auront simplement à supporter la
domination russe ».
Ce n’est pas ‘’Staline’’ qui a trompé FDR, c’est FDR qui a trompé les Européens. Si, de la
Conférence de Potsdam jusqu’au mois de septembre 1949, Truman a pu tenir la dragée haute
à ‘’Staline’’, c’est grâce à la possession en exclusivité de la bombe atomique. Une fois que de
multiples trahisons eurent fourni cette arme suprême aux Soviétiques, la guerre froide se
transforma en équilibre de la terreur, inaugurée par la guerre de Corée, fort bonne pour la
reprise des affaires aux USA… car la thèse de « l’utilité des guerres » découle tout naturellement
de la doctrine Roosevelt !
Scène II - 1945-1990 : les trois blocs hétérogènes
Bien des auteurs présentent la Grande Guerre (1914-1918) comme le « suicide de l’Europe »,
alors que ce ne fut qu’une tentative, certes grandiose autant que coûteuse, mais la mise en
tutelle de la vieille Europe ne débuta qu’en 1945, après la seconde tentative, très réussie, celle-
là.
Un grand Président des USA, Harry Truman, aidé d’un remarquable secrétaire d’ࣽÉtat, ex-chef
d’état-major général de l’US-Army, George-Catlett Marshall, avait compris qu’il était plus
intelligent pour l’économie US d’aider l’Europe occidentale à redresser son économie, tout en
la délestant de ses colonies, que de la laisser se bolcheviser. De ce fait, le monde fut partagé
en trois blocs.
La décolonisation ne fut obtenue qu’à la fin des années 1950… et le Tiers-monde fut alors
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partagé entre les deux groupes de prédateurs : l’ultra-capitaliste US et les deux rivaux
marxistes, l’URSS et la Chine. Dès 1952, l’économiste et statisticien Alfred Sauvy, un homme
inventif à l’esprit pas toujours juste, avait divisé les États de la planète en ultra-capitalistes,
marxistes et Tiers-monde (par allusion, anachronique, au Tiers-État de notre Ancien Régime).
Durant les années 1960, de puissants hommes d’affaires et d’influence d’Europe occidentale
avaient été mixés à leurs grands frères des USA au sein du Groupe Bilderberg, pour influencer
la politique des États faibles (ceux d’Europe occidentale et scandinave). En 1973, la crème du
Bilderberg fut assaisonnée de quelques magnats japonais et devint la Commission Trilatérale (à
ne pas confondre avec la création, dans ces mêmes années 1960, de quelques chefs d’États
du Tiers Monde : la Tricontinentale, dominée par des marxistes lassés de la tutelle des gérontes
du Kremlin… c’est lors d’une réunion de cet organisme, en 1966, que Fidel Castro et quelques
marxistes programmèrent à leur façon brouillonne le mouvement des années 1967-70, dont
chacun sait qu’il culmina en 68).
Dans les séminaires fort discrets de la Trilatérale (en France : le Club Le Siècle), l’on enseigna
aux Européens et aux Japonais que la protection sociale est un boulet économique et que,
privatisée sur le mode US, elle serait plus efficace (sans ajouter à qui profiterait cette efficacité).
Idem que seul le libre-échange est bon, que le capitalisme familial et strictement national est
dépassé, que l’épargne des individus est très mauvaise, étant pernicieuse au Big Business. En
1999, lors du raout annuel de la Trilatérale, tenu à Davos et largement médiatisé une fois n’est
pas coutume, l’on a lancé le slogan : « Mondialisation responsable », pour se concilier les
gogos et même quelques écologistes bourgeois, et l’on a créé l’officine d’endoctrinement des
clowns des media : le WEF (World Economic Forum).
Mais, entretemps, l’URSS, ruinée par la course aux armements autant que par la stupide
économie marxiste, s’était effondrée et l’on en était passé à la phase d’application des deux
grandes idées rooseveltiennes : économie globale ; mondialisation des vies politique et
(sous)-culturelle. Toutefois, l’autocrate politicien FDR n’aurait jamais accepté que la trinité
dorée des financiers, des entrepreneurs et des négociants confisque à son profit l’ensemble
des pouvoirs, domestiquant les milieux (dans toutes les acceptions de ce terme) de la politique,
des media et des associations diverses (dont de nombreux clergés). L’on en était passé au 2e
Acte, en trahissant le synopsis original du concepteur.
Illustration : partie de "L'Europe après la pluie II" de Max Ernst au Wadsworth Artheneum Museum of Art, Hartford (Etats-Unis)
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