Mai 2014
Au cours des dernières années, certaines entreprises
s’étaient vues menacées de se faire retirer l’accréditation
qui leur avait été délivrée selon la Charte et s’étaient même
vues émettre des contraventions à cette même Charte
et au Règlement en raison du fait que les mots qu’elles
employaient pour acher publiquement leur commerce
étaient exclusivement en anglais et qu’elles n’utilisaient
pas de terme générique français pour décrire leurs activités
dans cet achage public.
Avant la modification de la position de l’Oce, cette
dernière tolérait l’achage unilingue anglophone
pour ces mêmes entreprises, lesquelles sont, pour
la plupart, des entreprises dont les activités dépassent le
Québec et qui sont structurées sous des juridictions autres
que québécoise. Leur marque étant développée en anglais,
sans distinction pour la « société distincte » que représente
le Québec.
Le jugement déclaratoire au terme duquel les parties
désiraient obtenir l’avis de la Cour visait à répondre à la
question suivante :
Une marque de commerce de langue
anglaise, sans version française déposée,
qu’on utilise dans l’achage public et
la publicité commerciale, doit-elle être
accompagnée d’un terme descriptif de
caractère générique en français pour
respecter la Charte et le Règlement ?3
C’est par la négative que le tribunal a répondu à cette
question. Toutefois, puisque le Procureur Général du
Québec a porté cette aaire en appel, les parties sont
retournées au statu quo, du moins pour l’instant.
Dans son jugement du 9 avril dernier, monsieur
le juge Yergeau conclu que « l’achage d’une marque
de commerce uniquement dans une langue autre que
le français est autorisé dans l’achage public et dans la
publicité commerciale et, en particulier, sur des enseignes
de devanture de magasin lorsqu’il n’existe aucune version
française déposée de la marque de commerce »4.
Dans ses motifs, la Cour distingue les concepts de
« nom d’entreprise » et de « marque de commerce », afin de
réconcilier l’application des diérentes lois et règlements
qui s’appliquent.
À ce titre, selon la Charte, le nom d’entreprise doit être
formulé en langue française pour qu’une entreprise puisse
être constituée. Pour sa part, la marque de commerce
est visée par plusieurs exceptions législatives qui ne
l’assujettissent pas à la Charte et est utilisée afin que les
consommateurs puissent distinguer les services oerts
et les produits vendus par un commerçant à travers la
multitude de commerces qui existent sur le marché.
Prenons l’exemple d’une marque de commerce « ABC ».
Le nom de plusieurs franchisés autorisés à exploiter
sous telle bannière ne contiendra généralement pas la
marque « ABC ». Afin de se conformer aux exigences
de la loi, leur nom sera un matricule ou un nom tel
« Gestion DEF inc. », soit un nom qui ne réfère pas à la
marque. La marque « ABC » sera alors indiquée comme
autre nom par l’entreprise opérant un tel commerce.
Toutefois, ce même franchisé pourra utiliser, si le jugement
étudié est maintenu et conformément aux pratiques
passées de l’Oce, la marque « ABC » plutôt que le nom
de son entreprise sur la devanture de son commerce dans
son achage public.
C’est ce qui était en péril et qui a été permis par le
jugement étudié puisqu’il n’existerait, dans l’exemple
précédent, aucune marque dite francophone déposée
à l’OPIC pour « ABC » comme c’est le cas pour plusieurs
entreprises présentes dans diérentes provinces ou pays
et souvent exploitées en franchises.
3 Magasins Best Buy ltée et als c. Québec (Procureur Général), 2014 QCCS 1427, par. 9.
4 Ibid, par. 265