4 – Syst`emes d`équations différentielles - IRMA

Universit´e de Strasbourg
MPC Math´ematiques L3 (S5)
P. Guillot, bureau 314, [email protected]
§4 – Syst`emes d’´equations diff´erentielles
efinitions
On ´etudie les ´equations diff´erentielles de la forme
Y0(t) = AY (t) + B(t) (E)
o`u Aest une matrice n×n, et Y:ICn(avec Iintervalle
de R). On a donc
Y(t) =
y1(t)
y2(t)
.
.
.
yn(t)
et Y0(t) =
y0
1(t)
y0
2(t)
.
.
.
y0
n(t)
.
L’´equation homog`ene associ´ee est
Y0(t) = AY (t) (H)
Comme d’habitude, les solutions de (H)forment un espace vec-
toriel ; si Y0est une solution particuli`ere de (E), alors toutes les
solutions de (E)sont de la forme Y0+Yavec Ysolution de
(H). On va surtout regarder des ´equations homog`enes dans le
cours.
esolution en pratique
L’id´ee g´en´erale pour r´esoudre Y0(t) = AY (t)est tr`es simple,
et on l’a d’ailleurs d´ej`a vue dans le cours pr´ec´edent sur un
exemple :
On cherche une matrice Qtelle que D=QAQ1soit
simple, par exemple diagonale ;
On remarque que
Y0(t) = AY (t)(QY )0(t) = D(QY )(t).
On pose Z(t) = QY (t), on cherche donc `a r´esoudre
Z0(t) = DZ(t).
– Si Dest suffisamment simple, alors on est ramen´e
`a r´esoudre plusieurs ´equations diff´erentielles lin´eaires
d’ordre 1(avec des fonctions IC, c’est-`a-dire qu’on
s’est ramen´e `a n= 1). On sait compl`etement r´esoudre
ces ´equations.
Ayant trouv´e une solution Z(t), on r´ecup`ere Y(t)puisque
Y(t) = Q1Z(t).
Exemple. (1) R´esoudre
y0
1(t) = 15y1(t) + 44y2(t)
y0
2(t) = 10y1(t) + 27y2(t)
C’est Y0(t) = AY (t)avec
A=15 44
10 27 et Y(t) = y1(t)
y2(t).
Le polynˆome caract´eristique de Aest X212X+ 35 =
(X7)(X5), les valeurs propres sont 5et 7, donc Aest
diagonalisable. On cherche les vecteurs propres, et on trouve
qu’en posant
P=2 11
1 5
alors
P1AP =7 0
0 5 =D .
Si on pose donc Q=P1, et
Z(t) = QY (t) = 5y1+ 11y2
y12y2=z1(t)
z2(t),
alors Zsatisfait l’´equation Z0(t) = DZ(t). On est donc ramen´e
`a z0
1(t) = 7z1(t)
z0
2(t) = 5z2(t)
On sait bien faire ¸ca : on a z1(t) = λ1e7tet z2(t) = λ2e5t.
Pour finir, Y(t) = P Z(t), donc
y1(t) = 2 λ1e7t+ 11 λ2e5t
y2(t) = λ1e7t+ 5 λ2e5t
Exemple. (2) Parfois la matrice An’est pas diagonalisable. Par
exemple
y1(t) = y1(t) + y2(t)
y2(t) = y1(t)+3y2(t)
Dans ce cas le polynˆome caract´eristique est (X2)2, et on voit
facilement que An’est pas diagonalisable. Par contre, admet-
tons que l’on ait remarqu´e (en g´en´eral ce sera une indication
du texte de l’exercice...) qu’en posant
P=1 3
1 4
alors
P1AP =2 1
0 2 =D .
On fait le mˆeme “changement de fonction inconnue”, `a savoir
Z(t) = QY (t)(avec Q=P1), et on doit r´esoudre
z0
1(t)=2z1(t) + z2(t)
z0
2(t)=2z0
2(t)
Voil`a qui fait encore partie des ´equations que l’on sait r´esoudre.
La deuxi`eme donne z2(t) = λ2e2t, et en injectant dans la
premi`ere ´equation on voit que z1satisfait
z0
1(t)=2z1(t) + λ2e2t.
On r´esout ¸ca par la m´ethode habituelle (y compris la variation
de la constante puisqu’il y a maintenant un second membre !).
On trouve facilement
z1(t) = (λ1+λ2t)e2t.
1
Finalement Y(t) = P Z(t)et donc
y1(t)=(λ1+ 3λ2+λ2t)e2t
y2(t)=(λ1+ 4λ2+λ2t)e2t
Etude qualitative
On va maintenant donner une formule “g´en´erale” pour les
solutions de Y0(t) = AY (t)(et mˆeme de Y0(t) = AY (t) + B
avec Bun vecteur constant). En pratique, connaˆıtre cette for-
mule n’est pas plus efficace que connaˆıtre la m´ethode ci-dessus.
Par contre c’est utile pour faire une ´etude “qualitative” : par
exemple on va calculer la dimension de l’espace des solutions.
Pour n= 1 on sait tout r´esoudre grˆace `a l’exponentielle, et
l’outil dont nous avons besoin maintenant est l’exponentielle de
matrice.
Rappels sur l’exponentielle
Admettons que l’on ait d´efini l’exponentielle comme la
r´eciproque du logarithme (et le logarithme comme une primitive
de 1
x).
Depuis la formule de Taylor, on sait que, pour xR, on a
ex=
+
X
n=0
xn
n!= lim
N+
N
X
n=0
xn
n!.
Pour un nombre complexe z, la seule d´efinition de son exponen-
tielle que l’on ait est
ez=
+
X
n=0
zn
n!.
Il faut bien alors d´emontrer que la limite existe pour s’assurer
que eza un sens : vous l’avez normalement fait en 1`ere ann´ee.
Au passage, c’est comme ¸ca que l’on donne une vraie d´efinition du
cosinus et du sinus : on pose cos(θ) = Re(e)et sin(θ) = Im(e).
Exponentielle de matrice
Soit Aune matrice m×m. On pose
exp(A) = eA=
+
X
n=0
An
n!.
Il faut d´emontrer que la limite existe pour que ceci ait un sens.
Donnons l’id´ee dans le cas o`u Aest diagonalisable : comme on
a montr´e que toute matrice pouvait ˆetre approch´ee par des ma-
trices diagonalisables, ¸ca rend le r´esultat cr´edible (sans consti-
tuer une preuve compl`ete).
Si donc A=P1DP avec D=diag(λ1, . . . , λm), on a
An=P1diag(λn
1, . . . , λn
m)P, et
PN
n=0
An
n!=P1PN
n=0
Dn
n!P
=P1diag(PN
n=0
λn
1
n!,...,PN
n=0
λn
m
n!)P
Puisque l’exponentielle r´eelle (“normale”) converge, on voit que
cette derni`ere expression converge vers
P1diag(eλ1, . . . , eλm)P=eA.
Voyons les propri´et´es de base :
Proposition 1. 1. exp(0) = Id (la matrice identit´e)
2. Si AB =BA (attention !), alors eA+B=eAeB.
3. Si A=P1BP alors eA=P1eBP.
4. Soit F(t) = etA, pour tR. Alors F0(t) = AF (t).
La propri´et´e (4) est bien sˆur celle qui nous int´eresse, du
point de vue des ´equations diff´erentielles. Pour “voir” pourquoi
¸ca fonctionne, autorisons nous `a traiter la somme infinie comme
une somme normale. On obtient :
d
dt (etA) = P
n=0
d
dt
tnAn
n!
=P
n=1 ntn1An
n!
=AP
n=1 tn1An1
(n1)!
=AetA .
Le th´eor`eme principal
Th´eor`eme 2. Les solutions de l’´equation diff´erentielle Y0(t) =
AY (t)sont les fonctions de la forme
Y(t) = etAC0,
o`u C0est un vecteur colonne n×1constant. Les solutions de
Y0(t) = AY (t) + Blorsque Aest inversible sont les fonctions
de la forme
Y(t) = etAC0A1B .
D´emonstration. C’est la mˆeme que pour n= 1 ! En effet, si Y
satisfait Y0(t) = AY (t), alors on regarde F(t) = etAY(t).
On d´erive, on voit que F0(t) = 0, donc Fest constante :
F(t) = C0, et c’est bon.
Pour la deuxi`eme partie, il s’agit juste d’observer que la
fonction constante t7→ −A1Best solution particuli`ere.
Exemple. Reprenons l’exemple (1). Puisque tA =
P1diag(7t, 5t)P, on a
etA =Pe7t0
0e5tP1=2e7t11e5t
e7t5e5tP1.
(Comme pec´edemment, on n’a pas besoin de calculer P1.)
On a donc Y(t) = etAC0=M(t)P1C0, en notant M(t)la
matrice ci-dessus. En ´ecrivant P1C0=λ1
λ2, on retrouve
bien le mˆeme r´esultat.
On observe au passage que, C0´etant un vecteur quelconque, le vec-
teur P1C0peut lui aussi ˆetre n’importe quel ´el´ement de R2, et on peut
aussi bien travailler avec lui (donc avec λ1et λ2) plutˆot que de calcu-
ler P1et de donner un nom aux coordonn´ees de C0.)
On constate avec amertume que cette nouvelle approche ne
simplifie pas du tout les calculs. Par contre, l’expression com-
pacte du th´eor`eme permet de faire des remarques qualitatives.
Faisons la plus simple de toutes :
Corollaire 3. L’espace vectoriel des solutions de Y0(t) = AY (t)
est de dimension n(o`u Aest de taille n×n).
D´emonstration. Soit Scet espace des solutions. L’application
lin´eaire CnSqui envoie C0sur la solution etAC0est un
isomorphisme. (Son inverse envoie une solution Ysur Y(0).)
Donc dim S= dim Cn=n.
2
Exercices
Correction de l’exercice 2, semaine 2 : Les va-
leurs propres sont 1,0,1, des vecteurs propres possibles sont
par exemple (6,12,11),(1,2,2),(0,1,1) respectivement.
Ainsi en posant
P=
610
12 2 1
11 2 1
on a P1=
011
166
210
,
et
P1AP =
1 0 0
0 0 0
0 0 1
.
L’expression donn´ee pour Andans le texte de l’exercice est cor-
recte, sauf pour n= 0 enquel cas A0=Id.
Exercice 1. R´esoudre
x0(t) = 6y(t)6z(t)
y0(t) = 2x(t) + 11y(t) + 12z(t)
z0(t)=2x(t)10y(t)11z(t)
C’est la matrice Aci-dessus...
Exercice 2. R´esoudre
x0t) = 2x(t)3y(t)
y0(t) = x(t) + y(t)
Quelles sont les solutions `a valeurs dans R?
Exercice 3. R´esoudre
y0
1(t)
y0
2(t)
y0
3(t)
=
510
051
005
·
y1(t)
y2(t)
y3(t)
Ne pas chercher `a simplifier la matrice : ¸ca ne marchera pas...
Probl`eme.
Pour chaque polynˆome
φ(x) = αn+1xn+1 +αnxn+. . . α0
on consid`ere l’´equation diff´erentielle
(Eφ) : αn+1y(n+1)(t) + αny(n)(t) + . . . α0= 0 .
Dans le cours pr´ec´edent on a vu comment r´esoudre (Eφ)lorsque
les racines de φsont distinctes. Dans ce probl`eme on traite le
cas g´en´eral.
(1) (a) Soit yune fonction, et soit z(t) = ty(t). Montrer
que z(n)(t) = ty(n)(t) + ny(n1).
(b) Soit φ0la d´eriv´ee du polynˆome φ. Montrer que si yest
solution `a la fois de (Eφ)et de (Eφ0), alors zest solution de
(Eφ).
(c) Supposons que φait la factorisation suivante :
φ(x)=(xλ1)m1· · · (xλk)mk.
Soit yij (t) = tieλjtpour 0i<mj. Montrer que yij est
solution de (Eφ).
Indication : λjest racine de φ, de φ0, de φ00 ,. . . et de
φ(mj1) . . .
(2) En reprenant le cours de la semaine 3, montrer que
r´esoudre l’´equation (Eφ)revient `a r´esoudre une ´equation de la
forme Y0(t) = AY (t)o`u Aest une matrice carr´ee de taille n+1
(si φest de degr´e n+ 1).
En d´eduire que l’espace vectoriel des solutions de (Eφ)est
de dimension n+ 1.
(3) Il reste `a montrer que les fonctions yij sont lin´eairement
ind´ependantes.
(a) Montrer que c’est le cas lorsque k= 1 (c’est-`a-dire
lorsque φ(x) = (xλ1)n+1).
(b) Soient P1, P2, . . . , Pset Qdes polynˆomes, et soient
µ1, . . . , µSdes constantes. On suppose que pour tout tR
on a
P1(t)eµ1t+P2(t)eµ2t· · · +Ps(t)eµst=Q(t).
Montrer que tous les polynˆomes sont nuls.
Indication : on voit que Qdoit ˆetre solution d’une certaine
´equation diff´erentielle (Eψ)o`u ψressemble beaucoup `a φ, les
µirempla¸cant les λi; comme Qest un polynˆome, ceci entraˆıne
Q= 0 pour des raisons tr`es simples de degr´e. Ensuite en divi-
sant par eµston est ramen´e `a s1au lieu de s, et on peut
faire une r´ecurrence. Dans le (a) on a trait´e le cas s= 1.
(c) Conclure.
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