Circulaire_du_12_janvier_2010 - Internet Services de l`Etat en

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RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
PRÉFECTURE DES HAUTES ALPES
DIRECTION DES LIBERTES PUBLIQUES
ET DES COLLECTIVITES LOCALES
Gap, le 12 janvier 2010
LE PREFET DES HAUTES-ALPES
BUREAU DES RELATIONS AVEC LES
COLLECTIVITES LOCALES
à
Monsieur le Président du Conseil Général
Affaire suivie par : Aurélie BOMPAR
Tel : 04.92.40.49.48
Fax : 04.92.40.48.79
[email protected]
Mesdames et Messieurs les Présidents d'EPCI
Mesdames et Messieurs les Maires
Madame la Directrice Générale de l'OPH 05
Monsieur le Président du S.D.I.S.
Monsieur le Président du Centre de Gestion
En communication à :
Madame la Sous-Préfète de Briançon
Monsieur le Trésorier-payeur général
OBJET : Les recours juridictionnels ouverts à l'encontre des contrats publics
(complète la circulaire du 18 décembre 2007 relative à l'ouverture d'un recours de pleine
juridiction des tiers évincés à l'encontre des contrats administratifs).
REFERENCES :
−
−
−
−
−
Ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 relative aux procédures de recours applicables aux
contrats de la commande publique, entrée en vigueur le 1er décembre 2009 ;
Décret n° 2009-1456 du 27 novembre 2009 relatif aux procédures de recours applicables aux
contrats de la commande publique ;
Code de justice administrative : articles L.551-1 à L.551-23 ;
Arrêt du Conseil d'Etat, Assemblée, 16 juillet 2007, Société Tropic Travaux Signalisation ;
Circulaire préfectorale du 18 décembre 2007 relative à l'ouverture de nouvelles formes de
recours contentieux à l'encontre des contrats administratifs pour les tiers évincés, disponible sur
le site internet de la préfecture des Hautes-Alpes.
CHAMP D'APPLICATION :
La présente circulaire a vocation à concerner l'ensemble des contrats administratifs soumis à
une procédure de mise en concurrence, c'est à dire, notamment, les marchés publics, les
délégations de service public, les contrats de partenariat, les concessions de travaux, les
concessions d'aménagement... que vos collectivités et établissements publics sont susceptibles
1
de conclure.
Par la présente circulaire, je souhaite attirer votre attention sur la coexistence, à compter du 1er
décembre 2009, de deux voies de recours permettant la contestation de contrats signés.
En effet, d'une part, depuis l'arrêt « Société Tropic Travaux Signalisation » rendu le 16 juillet 2007,
tout concurrent évincé de la conclusion d'un contrat administratif est recevable à demander
l'annulation du contrat lui-même. D'autre part, l'ordonnance n° 2009-515 du 7 mai 2009 et son
décret d'application du 27 novembre 2009 relatifs aux procédures de recours applicables aux
contrats de la commande publique1 ont créé un référé contractuel, recours dirigé également contre
un contrat signé, et régi par le code de justice administrative (articles L.551-13 à L.551-23).
Si ces deux recours ont donc pour point commun d'être dirigés contre des contrats signés, ils se
distinguent néanmoins aussi par leurs différences qu'aborde cette circulaire. L'ordonnance et le
décret précités ont apporté quelques modifications substantielles à la procédure de référé
précontractuel, également exposées dans la présente analyse.
I – Rappels et précisions concernant le recours « TROPIC » (ou recours en contestation de la
validité du contrat)
Comme je vous l'indiquais à l'occasion de la circulaire qui vous a été adressée le 18 décembre
2007, le Conseil d'Etat a, à la suite d'une longue évolution juridique, consacré un recours de pleine
juridiction en contestation de la validité d'un contrat signé. Jusqu'à l'intervention de ce revirement
jurisprudentiel, seules les parties à un contrat pouvaient demander au juge d'en prononcer la nullité.
Depuis l'arrêt « Tropic Travaux Signalisation », quelques précisions ont été apportées par le juge
administratif quant aux conditions de recevabilité du recours et de la mise en œuvre des pouvoirs du
juge :
1° Champ d'application du recours Tropic et personnes ayant un intérêt à agir :
Ce recours est susceptible de concerner tous les contrats administratifs. Néanmoins, la décision
Tropic reconnaissant un intérêt à agir aux « concurrents évincés », seuls les contrats soumis à une
procédure de mise en concurrence peuvent être contestés par cette voie de droit.
La notion de « concurrents évincés » emporte deux conséquences :
-Un opérateur qui n'a pas été candidat à l'attribution du marché et qui n'apporte aucun élément
justifiant qu'il aurait pu être candidat ne saurait être considéré comme un concurrent évincé2 ;
-L'attributaire du marché n'est pas recevable à exercer ce recours en contestation de la validité du
contrat, lequel n'est ouvert qu'aux seuls concurrents évincés2.
2° Moyens invocables :
Ce recours est ouvert à tous les moyens de légalité ; l'ensemble des vices pouvant entacher la
procédure de passation, les manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence,
ainsi que les irrégularités affectant le contenu des obligations contractuelles, sont recevables devant
1
Transposition
2007/66/CE du 11 décembre 2007
2
CE, 16 novembre 2009, ministre de l'immigration, n° 328826
de
la
directive
« Recours »
2
le juge.
3° Délais de recours :
Le recours Tropic peut être introduit dans un délai de deux mois à compter de l'accomplissement
des mesures de publicité appropriées, notamment au moyen d'un avis mentionnant à la fois la
conclusion du contrat et les modalités de sa consultation. Dès lors, ce recours peut être ouvert sans
condition de délai lorsqu'aucune publicité portant sur la signature du marché n'a été faite, ou lorsque
celle qui a été réalisée sera considérée comme n'étant pas appropriée.
C'est ainsi que la publication de la liste annuelle des marchés passés par une commune qui contient
le nom de l'attributaire et le montant, mais ne mentionne pas les modalités de consultation du
contrat, ne peut faire courir les délais à l'encontre du contrat3 .
L'appréciation de la notion de publicité adéquate pouvant s'avérer délicate (et dans l'attente de
jurisprudences éclairantes sur ce point), je ne peux que vous encourager, pour la conclusion de
chaque contrat, à opter en faveur d'une publicité qui soit suffisante, tant dans son support que dans
son contenu.
4° Pouvoirs du juge :
Le juge dispose de très larges pouvoirs, puisqu'en fonction de la nature de l'illégalité commise, il
peut décider de prononcer :
-la résiliation du contrat ;
-la modification de certaines clauses du contrat ;
-le maintien du contrat, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation ;
-l'annulation totale ou partielle du contrat, le cas échéant avec effet différé (exemple : en cas
d'absence d'élément d'appréciation d'un critère de choix des offres4) ;
-l'indemnisation en réparation des droits lésés.
II – Création d'un référé contractuel
En application de la directive 2007/66/CE et afin de garantir un recours efficace, le nouveau
recours créé à l'encontre du contrat signé est un contrat exercé en la forme des référés, c'est à dire
devant un juge unique, sans rapporteur public, statuant en premier et dernier ressort.
1° Champ d'application du référé contractuel et personnes ayant un intérêt à agir
Le référé contractuel est ouvert à l'encontre de tous les contrats de la commande publique, c'est à
dire notamment les marchés publics, les délégations de service public, les concessions
d'aménagement …
Les personnes habilitées à introduire un tel recours sont celles qui ont un intérêt à conclure le
contrat et qui sont susceptibles d'être lésées par le manquement invoqué.
Le référé contractuel est également ouvert au préfet s'agissant des contrats de la commande
publique passés par les collectivités territoriales et leurs établissements publics.
3
4
CAA Marseille, 15 octobre 2009, EURL Cabinet RSD, n° 07MA0325
TA Nîmes, 1er octobre 2009, Soc. JC Decaux mobilier urbain, n° 0802985
3
Une personne qui aurait exercé un référé précontractuel ne sera pas recevable à exercer le référé
contractuel si l'organisme adjudicateur s'est conformé à la décision rendue sur ce recours et s'il a
respecté l'obligation de ne pas signer le contrat.
2° Moyens invocables
Les violations que le juge du référé contractuel peut sanctionner sont les suivantes :
-L'absence totale de publicité préalable ou encore l'absence de publication au Journal officiel de
l'Union européenne lorsqu'elle était requise ;
-La violation du délai de suspension de la signature du contrat (il s'agit du délai minimum à
respecter entre l'envoi de la décision d'attribution et la signature du marché) ;
-La violation de l'obligation de ne pas signer le marché en cas de saisine du juge du référé
précontractuel.
3° Délais de recours
Le délai de recours est de un mois à compter de la publication d'un avis d'attribution. Dans les
autres cas, ce recours ne peut plus être introduit au-delà de six mois à compter de la conclusion du
contrat en l'absence de publication d'un avis d'attribution.
4° Pouvoirs du juge :
-Le juge peut prononcer la suspension de l'exécution du contrat, dans l'attente de sa décision au fond
-Il peut prononcer la nullité du contrat (exemple : en cas d'absence de toute publicité ou de défaut
de publicité communautaire) ;
-Il peut prononcer la résiliation du marché ou la réduction de la durée d'exécution du marché ;
-Il peut prononcer des pénalités financières (qui ne peuvent excéder 20 % du montant HT du contrat
imposées au pouvoir adjudicateur).
Par conséquent, le nombre et la nature des manquements que le juge des référés peut sanctionner
sont plus restrictifs que dans le cadre du recours TROPIC. Les moyens invocables dans le cadre du
recours « Tropic » peuvent être identiques à ceux du référé contractuel et sanctionner les
manquements aux obligations de publicité et de mise en concurrence. Mais ils peuvent également
aller plus loin et porter sur les règles de compétences internes, alors que le référé contractuel ne le
permet pas. Le recours « Tropic » constitue donc une voie de recours complémentaire permettant
au juge de plein contentieux de contrôler des moyens que le juge des référés ne peut contrôler.
Le référé contractuel doit par ailleurs être envisagé dans la continuité du référé précontractuel : il
est effectué en la forme des référés, ouvert aux mêmes personnes. Toutefois, il ne constitue pas une
simple prolongation du référé précontractuel, puisque le juge du référé contractuel ne pourra
sanctionner que des violations qui ne peuvent pas faire l'objet d'un recours avant la signature.
4
III – Précisions concernant le référé précontractuel rénové
Les contrats pouvant faire l'objet de la procédure de référé précontractuel (identiques à ceux
relevant du référé contractuel) font désormais l'objet d'une définition qui figure à l'article L.551-1
du code de justice administrative ; ce sont les contrats « ayant pour objet l'exécution de travaux, la
livraison de fournitures ou la prestation de services, avec une contrepartie économique constituée
par un prix ou un droit d'exploitation ».
L'introduction du recours précontractuel entraîne désormais la suspension automatique de la
signature du contrat, et ce, jusqu'à la notification de la décision juridictionnelle. Le juge des référés
ne sera donc plus amené à prendre, pour chaque recours, une ordonnance de suspension. Afin que la
personne publique sache qu'un recours a été introduit et qu'elle ne peut pas signer le marché, le
décret du 27 novembre 2009 prévoit que tout recours doit être notifié par le requérant. Le décret
impose que la notification soit effectuée « en même temps que le dépôt du recours ». Elle sera
réputée accomplie à la date de sa réception par le pouvoir adjudicateur.
En outre, le délai de suspension, c'est à dire le délai minimal que doit respecter un pouvoir
adjudicateur entre le moment où il envoie sa décision d'attribution du marché5 aux candidats
évincés et le moment où il peut effectivement le signer, doit être précisé dans la notification de la
décision.
Les délais à respecter sont les suivants :
-Lorsque la décision est envoyée par voie postale à au moins un candidat, le délai minimal est de
seize jours entre la date d'envoi de la décision d'attribution et la signature du contrat.
-Lorsque la décision est envoyée par voie électronique à tous les candidats, le délai minimal à
respecter est réduit à au moins onze jours.
Pendant ce délai, le juge du référé précontractuel ne pourra pas statuer.
On rappellera enfin que le référé précontractuel est ouvert en cas de manquement aux obligations de
publicité et de mise en concurrence. En tout état de cause, le juge est saisi avant la conclusion du
contrat.
Le juge peut ordonner à l'auteur du manquement de se conformer à ses obligations en lui fixant un
délai à cette fin, et suspendre ou annuler l'exécution de toute décision qui se rapporte à la passation
du contrat. Il peut supprimer les clauses destinées à figurer dans le contrat.
IV - Conclusions
Dans le cadre du référé précontractuel, depuis l'arrêt du Conseil d'Etat rendu le 3 octobre 2008
(décision Smirgeomes, n° 305420), le requérant doit désormais prouver que le manquement allégué
lui a causé préjudice, ce qui tend à réduire la portée de ce recours.
Toutefois, les acheteurs publics doivent tenir compte du nouveau référé contractuel, puisque
l'ordonnance « recours » vise à accroître l'efficacité des recours, avant et après la signature des
contrats, et à lutter contre la passation des marchés de gré à gré illégaux.
5
La décision d'attribution peut être envoyée par voie postale ou électronique
5
La création de ce nouveau recours contractuel et le maintien certain du recours Tropic élaboré par la
jurisprudence me conduisent une nouvelle fois à vous inciter à veiller à la sécurité juridique des
procédures et des actes contractuels que vous êtes amenés à conclure régulièrement.
Mes services demeurent à votre disposition pour tout complément d'information utile que vous
pourriez souhaiter sur la mise en œuvre de ces nouvelles dispositions.
LE PREFET
Nicolas CHAPUIS
6
Tableau de synthèse des recours juridictionnels ouverts contre les contrats de la
commande publique
Type de recours
Champ
d'application du
recours
Personnes ayant
un intérêt à agir
Délai de
recours
contentieux
Moyens
invocables
Pouvoirs du juge
Référé
précontractuel
Tous les contrats de
la commande
publique : marchés
publics, délégations
de service public...
-Personnes ayant un
intérêt à conclure le
contrat et qui
s'estiment lésés par
des manquements
aux obligations de
publicité et de mise
en concurrence
(cocontractant
évincé,
soumissionnaires
écartés) ;
Saisine du
juge jusqu'à la
signature du
contrat.
Violation des
obligations de
publicité et de
mise en
concurrence
-Ordonne à l'auteur
du manquement de
se conformer à ses
obligations ;
-Suspend ou annule
l'exécution de toute
décision qui se
rapporte à la
passation du contrat
;
-Supprime les
clauses destinées à
figurer dans le
contrat.
-Préfet
Référé
contractuel
Tous les contrats de
la commande
publique : marchés
publics, délégations
de service public...
-Personnes ayant un
intérêt à conclure le
contrat et qui
s'estiment lésés par
des manquements
aux obligations de
publicité et de mise
en concurrence
(cocontractant
évincé,
soumissionnaires
écartés) ;
-Préfet
Recours
« TROPIC »
(Recours de plein
contentieux)
Contrats
administratifs
soumis à une
procédure de mise
en concurrence
Les « concurrents
évincés »
-1 mois
suivant la
publication
d'un avis
d'attribution
-Absence de
publicité
préalable
-Violation du
délai de
suspension de
-6 mois
la signature du
maximum
contrat
suivant la
-Violation de
conclusion du l'obligation de
contrat en
ne pas signer le
l'absence de marché en cas
publication
de saisine du
d'un avis
juge du référé
d'attribution. précontractuel
-Prononce la
suspension de
l'exécution du
contrat ;
-Annulation du
contrat ;
-Résiliation du
marché ;
-Réduction de la
durée d'exécution du
marché ;
-Pénalités
financières.
2 mois à
compter des
« mesures de
publicité
appropriées »
-Résiliation du
contrat
-Modification de
clauses du contrat
-Poursuite de
l'exécution du
contrat sous réserve
de mesures de
régularisation
-Indemnisation en
réparation des droits
-Vices
entachant la
procédure de
passation du
contrat
-Irrégularités
affectant le
contenu des
obligations
contractuelles
7
lésés
-Annulation totale
ou partielle du
contrat
8
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