École des Mines de Douai — FI1A Mathématiques Compléments de topologie
Compléments de topologie
F. Delacroix, École des Mines de Douai, 28 septembre 2007
Ce document présente quelques notions de topologie, non essentielles pour la compré-
hension du cours de Fi1A, mais offrant un recul plus important sur certains points de ce
cours.
Ce document pourra être complété par vos demandes, n’hésitez pas à demander des
approfondissements.
1 Diamètre
1.1 Dans un espace vectoriel normé
Soit Eun espace vectoriel normé. Étant donnée une partie Ade E, on définit le
diamètre de Acomme la quantité
Diam(A) = supnd(x, y), x, y AoR+∪ {∞}
avec en plus la convention que Diam() = 0.
Proposition 1
Le diamètre d’un compact est fini et atteint.
Preuve. Il s’agit de prouver que l’application «distance»
d:E×ER+
(x, y)7−d(x, y) = kxyk
est bornée sur K×Ket atteint ses bornes. On va pour cela munir l’espace vectoriel E×E
d’une norme, montrer que l’application dest continue sur E×Eet que K×Kest un
compact de E×E.
On peut munir E×E(notamment) de l’une des trois normes suivantes, généralisations
directes des exemples fondamentaux de Rn: pour (x, y)E×E,
k(x, y)k1=kxk+kyk k(x, y)k2=qkxk2+kyk2k(x, y)k= sup{kxk,kyk}.
(exercice : vérifier que ce sont bien des normes, et qu’on retrouve la situation habituelle
de ces normes sur R2lorsque E=Rnormé par la valeur absolue). Ces trois normes
sont équivalentes (exercice, inspirez-vous de l’exercice 1 question 3 du chapitre 1) et donc
définissent la même topologie sur cet espace vectoriel, et aussi, c’est ce qui nous intéresse,
la même notion de convergence.
Pour une suite de couples ((xn, yn))nN(deux paires de parenthèses : une pour la
notation «couple», l’autre pour la notation «suite») de E×E, et un couple (`, m)E×E,
on a ainsi équivalence des assertions suivantes (démonstration laissée en exercice) :
(1) la suite ((xn, yn))nNconverge vers (`, m)E×E,
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(2) lim
n→∞ k(xn, yn)(`, m)k= 0 (c’est la définition de la convergence) où la notation k.k
désigne l’une quelconque des trois normes ci-dessus,
(3) les suites des composantes (xn)nNet (yn)nNconvergent respectivement vers `et m.
Alors K×Kest compact. Pour le démontrer, fixons une suite ((xn, yn))nNde K×K;
il s’agit de prouver qu’elle admet une sous-suite convergente.
Par définition, la suite (xn)nNest une suite de K, donc, en vertu de la propriété de
Bolzano-Weierstrass, elle admet une sous-suite (xϕ(n))nNconvergeant dans K,ϕdésignant
une application NNstrictement croissante.
La suite (yϕ(n))nNest elle aussi une suite de K, donc elle admet une sous-suite
(yψϕ(n))nNqui converge dans K,ψétant encore une application NNstrictement
croissante.
La fonction ψϕest la composée de deux fonctions strictement croissantes de NN,
c’est donc elle-même une fonction strictement croissante de NN. La suite (xψϕ(n))nN
est extraite de la suite (xϕ(n))nNqui est convergente, elle est donc convergente.
Comme les suites (xϕ(n))nNet (yϕ(n))nNsont toutes deux convergentes dans K, la
suite des couples ((xϕ(n), yϕ(n))nN, extraite de ((xn, yn))nNest donc convergente dans
K×Ken vertu de la caractérisation de la convergence dans E×Eexposée plus haut.
Ceci prouve bien que K×Kest compact.
Il reste à prouver que dest continue. Rappelons les inégalités triangulaires : pour deux
vecteurs aet b, on a
kak−kbk
6kabk6kak+kbk.
Pour (x, y),(x0, y0)E×E, on a donc les majorations suivantes :
|d(x, y)d(x0, y0)|=kxyk−kx0y0k
6kxyx0+y0k
6k(xx0)(yy0)k6kxx0k+kyy0k=k(x, y)(x0, y0)k1.
Ceci montre que l’application dest 1-lipschitzienne (lorsque l’on a muni E×Ede la norme
k.k1, donc continue. En effet, la majoration précédente montre que |d(x, y)d(x0, y0)|tend
vers 0lorsque (x0, y0)tend vers (x, y).
Finalement, l’image K×Kpar l’application dest celle d’un compact par une fonction
continue, donc c’est un compact de R, c’est-à-dire un fermé borné : dest bornée sur K×K
et atteint ses bornes.
Ainsi, le diamètre de Kest fini et réalisé par (au moins) un couple (x, y)particulier.
Proposition 2
Le diamètre d’une boule (ouverte ou fermée, peu importe) est égal au double de son
rayon.
Preuve. Procédons par double inégalité, en nous intéressant à une boule fermée B(a, R)
de centre aet de rayon R, que l’on notera simplement B.
Pour x, y B, grâce à l’inégalité triangulaire :
kxyk=kxa+ayk6kxak+kyak6R+R= 2R.
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Le majorant ainsi obtenu étant indépendant de xet y, on peut passer au sup, ce qui
montre que
Diam(K)62R.
Considérons maintenant un couple de vecteurs diamétralement opposés (x, x)dans
lequel kxk=R. Alors
kx(x)k=kx+xk=k2xk= 2kxk= 2R.
Ce la considération de ce couple particulier découle que le sup dont il est question, c’est-
à-dire Diam(K)vérifie Diam(K)>2R.
Finalement Diam(K) = 2R.
Remarquons que la démonstration précédente fonctionne bien pour une boule fermée,
où l’on peut choisir xtel que kxk=R, mais pas pour une boule ouverte. On doit alors
modifier la seconde partie de la démonstration en considérant une suite (xn)de la boule
ouverte qui converge vers un point xtel que kxk=R. Par exemple avec xn= (R1
n)e
eest un vecteur de norme 1.
1.2 Dans un espace métrique
Un espace vectoriel normé est un cas particulier d’espace métrique (qui est lui-même
un cas particulier d’espace topologique), c’est-à-dire un ensemble dans lequel existe une
notion de distance.
Définition 1
On appelle espace métrique tout ensemble Etel qu’il existe une application
d:E×ER+
appelée distance (ou : métrique) telle que
(1) dvérifie l’axiome de séparation :
x, y E, (d(x, y) = 0) (x=y)
(2) dsoit symétrique :
x, y E, d(x, y) = d(y, x)
(3) dvérifie l’inégalité triangulaire :
x, y, z E, d(x, z)6d(x, y) + d(y, z).
Beaucoup des notions présentées dans le chapitre 1 à propos des espaces vectoriels
normés sont en fait des propriétés métriques (boules, partie bornée. . .) ou topologiques
(ouvert, fermé, compact, connexe. . .). Il est toutefois important de remarquer qu’un espace
métrique n’est pas forcément un espace vectoriel (pas forcément «plat»1)
1Rappelons à ce sujet que la Terre n’est pas plate, et que ces notions de distance ont tout de même
un sens concret.
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Exemple 2 (La distance SNCF)
Dans un ouvert de R2, on fixe un point appelé PARIS. On définit alors la distance
entre deux points Aet Bcomme étant
d(A, B) = δ(A, P ARIS) + δ(P ARIS, B)
δdésigne la distance euclidienne habituelle (toute ressemblance avec des person-
nages existants serait purement fortuite).
Exemple 3 (Distance discrète)
Soit Eun ensemble quelconque non vide. On définit la distance discrète sur Een
disant que
d(x, y) =
0si x=y
1si x6=y.
Ce dernier exemple est intéressant car complètement contre-intuitif et pourtant très
cohérent : tous les points distincts de Esont séparés par la même distance 1. On peut
s’en faire une idée dans R2si Ene contient que trois points (les placer de telle sorte qu’ils
forment un triangle équilatéral de côté 1), ou dans R3si Card E= 4 (utiliser un tétraèdre)
mais ce modèle géométrique est vite limité.
Le diamètre d’un compact dans un espace métrique est toujours fini est atteint (la
démonstration de la proposition 1 s’adapte très bien). En revanche, le diamètre d’une
boule n’est pas toujours ce qu’on croit. Seule la première partie de la démonstration de
la proposition 2 s’adapte bien (c’est l’objet de la proposition suivante). La seconde partie
de cette démonstration repose sur la colinéarité de xet x, et ceci n’a plus de sens dans
un espace métrique général.
Proposition 3
Dans un espace métrique, le diamètre d’une boule est inférieur ou égal au double de
son rayon.
Exemple 4
Soit Eun ensemble muni de la distance discrète. Alors, pour tout aEet tout rR
tel que r < 1, la boule fermée B(a, r)est réduite au point a, et son diamètre est donc
nul !
L’expansion de l’Univers, conséquence directe de la théorie de la relativité générale
d’Albert Einstein consiste en la modélisation de la variation de la métrique (c’est-à-dire
la distance) dans l’Univers au cours du temps. Ce ne sont pas les galaxies qui se déplacent,
mais la métrique (manifestation de l’espace-temps lui-même) qui «gonfle».
2 Continuité et norme d’une application linéaire
2.1 Continuité d’une application linéaire
Soient Eet Fdeux espaces vectoriels normés, f:EFune application linéaire.
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Proposition 4
Les assertions suivantes sont équivalentes :
(1) fest continue sur E,
(2) fest continue en 0,
(3) αR
+,xE, kf(x)k6αkxk,
(4) le quotient kf(x)k
kxkest borné lorsque xdécrit E\ {0}.
Preuve. Constatons d’abord que l’implication (1) =(2) est triviale : la continuité sur E
tout entier entraîne en particulier la continuité en 0.
Montrons maintenant la réciproque (1) =(2) : supposons fcontinue en 0et soit
x0E; montrons que fest continue en x0. Pour hE, on a par linéarité
f(x0+h)f(x0) = f(x0+hx0) = f(h).
Puisque fest continue en 0, ce vecteur tend, lorsque h0, vers f(0), c’est-à-dire 0
(linéarité oblige). Ainsi f(x0+h)tend vers f(x0)lorsque h0, c’est-à-dire que fest
continue en x0.
Montrons que (3) =(2) : supposons l’existence d’un tel α > 0. Alors, pour hE,
kf(0 + h)f(0)k=kf(h)k6αkhk −
h00
donc fest continue en 0.
Enfin, montrons la réciproque (2) =(3). Supposons donc fcontinue en 0et soit
x0E. L’assertion (3) étant triviale pour x= 0, supposons x6= 0.
Appliquons la définition de la continuité en 0avec ε= 1 : il existe η > 0tel que, pour
tout hEtel que khk< η, on ait kf(h)k<1. Fixons un tel η.
Introduisons le vecteur h=η
2kxkx. Par construction, khk=η
2< η donc, d’après la
propriété précédente, kf(h)k61. Remplaçons hpar sa valeur et utilisons la linéarité de
fet l’homogénéité de la norme :
f η
2kxkx!
=η
2kxkkf(x)k61
de sorte que finalement
kf(x)k62
ηkxk.
Le réel α=2
ηconvient donc et l’assertion (3) est vraie.
Enfin, l’implication (3) =(4) est évidente (il suffit de diviser par kxk— qui est non
nul si xE\{0}), tout comme l’est la réciproque (4) =(3) une fois que l’on a remarqué
que le cas x= 0 était trivial.
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