Mémoire de DIU de Pédagogie Médicale Année universitaire 2006/2007 Annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle : Points de vue d’étudiants de médecine de DCEM4 sur l’enseignement reçu et les difficultés rencontrées Nathalie DHEDIN Faculté de Médecine Pierre et Marie Curie Site Pitié-Salpêtrière Service d’Hématologie Clinique Hôpital de la Pitié-Salpêtrière 1 Sommaire Résumé ………………………………………………………………….…3 Introduction……………………………………………………………….4 Matériels et méthodes……………………………………………………..5 ¾ Descriptif de l'étude …………………………………………………….5 ¾ Contenu du questionnaire……………………………………………......5 ¾ Enseignement théorique concernant l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle……………… ……………………………6 Résultats ………………………………………… ……………………... .7 ¾ Importance accordée par les étudiants aux problèmes d’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle ….………………..….7 ¾ Evaluation de l’enseignement concernant l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle …………………… ……………… 7 a) Enseignement réalisé à la faculté ………………………………..……………8 b) Cas clinique dans les services hospitaliers et groupes de parole ……..……….8 c) Entretiens médecin malade ………………………………………… ……….8 d) Synthèse concernant l'enseignement théorique et pratique ………………...…9 ¾ Difficultés rencontrées dans la pratique de la relation médecin malade...10 Discussion ………………………………………………………………….11 Conclusion …………………………………………………………………13 Références bibliographiques …………………………………………….. 14 Annexe 1 ……………………………………………………………………15 Annexe 2 ……………………………………………………………………16 2 Résumé L’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle constitue un acte médical difficile et fréquent. Un enseignement spécifique y est consacré dans les facultés de médecine. L’objectif de ce travail est d’évaluer cet enseignement et d’analyser les difficultés rencontrées par les étudiants dans la relation médecin malade. Entre avril et septembre 2007, vingt deux étudiants de DCEM4 de la faculté de médecine Pierre et Marie Curie, site Pitié-Salpêtrière ont participé à une enquête en remplissant un questionnaire intitulé « l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle ». Tous les étudiants interrogés se sont sentis concernés par ce problème. Soixante douze pour cent d’entre eux disent avoir assisté aux cours magistraux, 54% aux enseignements dirigés (ED) réalisés en DCEM2, dans le cadre du module 1 du programme de l’ examen national classant (ECN). La majorité des étudiants (63%) ont assisté à des entretiens d’annonce, alors que 23% seulement d’entre eux ont participé à d’autres modalités d’enseignements pratiques telles que des cas cliniques, des jeux de rôle, ou des groupes de parole. Les étudiants sont presque unanimes à estimer que l’enseignement en cours est trop théorique et à souhaiter un enseignement plus pratique, leur permettant de mieux partager l’expérience des praticiens. Ils demandent également, qu’au sein des services, ils puissent assister de manière plus régulière aux entretiens médecin malade, et participer aux groupes de parole. Tous les étudiants interrogés à l’exception d’un, ont déjà éprouvé des difficultés devant des patients les interrogeant sur leur diagnostic ou leur pronostic. Ils ont conscience des difficultés que représente la pratique de la relation médecin malade. En conclusion, cette enquête montre l’intérêt porté par les étudiants aux questions en lien avec la relation médecin malade, dont ils comprennent la complexité. Ils souhaitent, par ailleurs, recevoir un enseignement plus pratique sur le sujet. 3 Annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle : Points de vue d’étudiants de médecine de DCEM4 sur l’enseignement reçu et les difficultés rencontrées Introduction. L’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle est une situation fréquente et difficile de la pratique médicale [1]. L’information du patient est une obligation légale et déontologique régie par l’article 35 du code de déontologie (Annexe 1) et répond également à un souhait des patients [2, 3]. Pour un médecin, l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle n’est pas un acte neutre. Elle va provoquer des réactions émotionnelles liées au patient, à la maladie et au médecin lui-même. Le médecin peut éprouver des difficultés à annoncer une nouvelle qui sera très probablement vécue de manière très violente par le patient. L’annonce peut prendre une dimension plus dramatique pour le médecin, lorsqu’il se sent proche du patient ou s’identifie à lui. Le médecin peut également se sentir confronté à sa propre vulnérabilité et au problème de la mort [4]. L’annonce d’une mauvaise nouvelle peut être ressentie comme un échec par le médecin dont le rôle est de soulager et dans la mesure du possible de guérir les patients. Malgré ces difficultés, le médecin se doit de réaliser cet acte médical le mieux possible. La qualité de l’annonce peut permettre d’atténuer l’impact négatif du message et influencer le vécu de la maladie par le patient. Elle est déterminante pour la relation médecin malade et facilite la prise en charge médicale [5,6]. La réalisation satisfaisante de cet acte médical nécessite à la fois des connaissances médicales précises concernant le diagnostic et le pronostic de la maladie, des qualités humaines et un savoir théorique et pratique concernant la relation médecin malade. Si la relation médecin malade est considérée, depuis longtemps, comme un acte important de la pratique médicale, elle n’était auparavant pas enseignée dans les facultés de médecine. L’acquisition de sa pratique se faisait, de manière assez inégale, au cours de l’apprentissage médical. Depuis un peu plus de dix ans en France, un intérêt croissant a été observé pour 4 les questions intéressant l’éthique médicale et la relation médecin malade; certaines facultés ont alors intégré cet enseignement au programme des études médicales sous forme d’un enseignement théorique ou de travaux pratiques. Actuellement, le programme officiel de l’examen national classant (ECN) consacre plusieurs questions à l’éthique et la déontologie médicale, la relation médecin malade, l’accompagnement du patient en fin de vie, reconnaissant leur importance dans la pratique médicale. Il s’agit cependant d’un enseignement particulier qui doit transmettre non seulement des connaissances théoriques, mais une aptitude à communiquer et à faire preuve de qualités relationnelles et humaines. A la faculté de médecine Pierre et Marie Curie, site Pitié-Salpêtrière, cet enseignement est dispensé à la fois sous forme de cours et sous formes d’enseignement dirigés (ED). L’objectif de ce travail est d’évaluer l’enseignement théorique et pratique reçu sur la question de « l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle » et de faire un état de lieux des difficultés rencontrées par les étudiants dans leur pratique médicale. Matériels de méthodes. Descriptif de l’étude : Il s’agit d’une étude prospective réalisée entre avril et septembre 2007 dans le service d’hématologie de la Pitié-Salpêtrière. Vingt deux étudiants de DCEM4 ont répondu à un questionnaire intitulé « Annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle: points de vue d’étudiants de médecine de DCEM4 sur l’enseignement reçu et les difficultés rencontrées ». Nous avons limité cette étude aux étudiants de DCEM4, afin d’évaluer leurs connaissances et réflexions sur le sujet, quelques mois seulement avant leur pratique médicale d’interne. Vingt deux étudiants ont répondu à ce questionnaire, dix neuf d’entre eux étaient alors externes dans le service d’hématologie. Pour répondre au questionnaire, les étudiants du service d’hématologie étaient réunis dans une salle pendant une durée de 30 à 45 minutes. Les questionnaires étaient anonymes et nous avons insisté sur l’importance du caractère personnel des réponses. Ce questionnaire (annexe 2) était composé de questions à choix multiples pour faciliter le remplissage et l’analyse, et de questions rédactionnelles courtes pour recueillir des données qualitatives personnelles. 5 Contenu du questionnaire (annexe 2) : Le questionnaire a eu pour objectifs d’évaluer : a) L’importance accordée par les étudiants aux problèmes concernant l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle. b) L’enseignement théorique et pratique dispensé aux étudiants sur ce sujet, ainsi que leurs propositions ou demandes c) Les difficultés rencontrées par les étudiants dans leur pratique de la relation médecin malade Enseignement théorique concernant l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle. Ce sujet peut être abordé dans différentes questions du programme de l’ECN : Intitulé des modules et des questions Module 1 : Apprentissage de l’exercice médical ¾ Q1. Relation médecin malade. Annonce d’une maladie grave. La formation du patient atteint de maladie chronique. La personnalisation de la prise en charge médicale. ¾ Q 7. Ethique et déontologie médicale : droits du malade ; problèmes liés au diagnostic, au respect de la personne et de la mort. Module 6 : Douleur- Soins palliatifs- Accompagnement. ¾ Q 69. Soins palliatifs pluridisciplinaires chez un malade en fin de vie. Accompagnement d’un mourant et de son entourage Module 10 : Cancérologie. Oncohématologie ¾ Q 142. Prise en charge et accompagnement d’un malade cancéreux à tous les stades de sa maladie. Traitements symptomatiques. Modalités de surveillance. Problèmes psychologiques, éthiques et sociaux. 6 A la faculté Pierre et Marie Curie, site Pitié-Salpêtrière, les enseignements se rapportant à cette thématique sont les suivants: Année Cadre et type de Intitulé et type d’enseignement l’enseignement PCEM2 DCEM2 Ethique biomédicale : - 1 ED : Annonce du diagnostic et décisions TD. Présence obligatoire thérapeutiques en fin de vie Module 1 : Apprentissage de - 1 cours : Ethique et déontologie médicale : l’exercice médical : Cours et ED droits du malade ; problèmes liés au diagnostic, au respect de la personne et de la mort. - 2 ED : Relation médecin malade DCEM3 Module 6 : Douleur- Soins - 3 cours : Identification d’une situation palliatifs-Accompagnement:Cours relevant des soins palliatifs. Aspects décisionnels médicaux, aspects psychiques liés à l’annonce/ Prise en charge globale d’un malade en fin de vie/ Problèmes éthiques posés par les situations en fin de vie. Résultats : Importance accordée par les étudiants aux problèmes d’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle. Tous les étudiants interrogés se sont sentis concernés par ce problème : 91% d’entre eux pensent qu’il s’agit d’un aspect « important » de leur pratique médicale actuelle et future, 9% d’un aspect « assez important ». Ils justifient leur réponse en expliquant que tous les médecins cliniciens sont confrontés à de telles situations lors de leur exercice médical; pour eux, il s’agit d’un aspect de la relation médecin malade difficile nécessitant un enseignement et un apprentissage spécifique. Evaluation de l’enseignement concernant l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle 7 a) Enseignement réalisé à la faculté Quatre vingt un pour cent des étudiants se souviennent avoir reçu un enseignement, concernant le problème de « l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle » sous la forme de cours magistraux, 54% se souviennent de l’existence d’enseignements dirigés (ED) sur le sujet. Cinquante pour cent des étudiants peuvent dire que ces cours et ces ED ont été réalisés en DCEM2 au cours du module 1. Soixante douze pour cent des étudiants disent avoir assisté aux cours magistraux, 54% aux ED. Seuls 2 étudiants se souviennent avoir assisté aux TD obligatoires d’éthique biomédicale en PCEM2 traitant de « L’annonce du diagnostic et décisions thérapeutiques en fin de vie ». Aucun étudiant ne fait allusion aux cours du Module 6 : Douleur- Soins palliatifs- Accompagnement. Parmi les étudiants ayant assisté aux cours, 25% ont été intéressés, 50% assez intéressés, 19% peu intéressés et 6% n’ont pas été intéressés. Selon certains d’entre eux, cet enseignement permet d’apporter les bases théoriques minimales concernant la relation médecin malade; mais reste trop théorique, d’autant qu’il n’est pas réalisé par des médecins confrontés à ce problème dans leur pratique (enseignants de santé publique). A leur avis, ces cours permettent l’acquérir les connaissances requises pour l’examen national classant, (utilisation d’un vocabulaire et de mots clés spécifiques), mais ne permettent pas de se représenter et d’aborder les situations réelles. Soixante trois pour cent des étudiants estiment que ces cours ne les ont pas ou peu aidés dans leur relation avec les patients. En revanche, la majorité des 12 étudiants qui ont participé aux enseignements dirigés de ce module, en ont une opinion positive. Cela leur a permis de partager l’expérience des enseignants, de débattre avec eux et d’aborder des situations plus concrètes. b) Cas cliniques dans les services hospitaliers ou groupes de parole Vingt trois pour cent des étudiants ont participé au moins une fois à ce type d’enseignement, dans divers services : pneumologie, diabétologie, hématologie, maladies infectieuses, pédiatrie. Ils considèrent ce type d’approche très adaptée au problème de « l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle ». Ils ont apprécié la participation des psychologues. c) Entretiens médecin malade Soixante trois pour cent des étudiants ont déjà assisté à des entretiens d’annonce : moins de 5 fois pour 71% d’entre eux, au moins 5 fois 29% d’entre eux. Il s’agissait d’entretiens réalisés avec des patients hospitalisés dans 75% des cas, avec des patients vus en 8 consultation dans 25% des cas. Ceux qui n’ont jamais assisté à ce type d’entretien le regrettent, estimant que c’est un apprentissage indispensable pour une prise en charge correcte du patient. Les points positifs, les plus fréquemment relevés par les étudiants lors de ces entretiens étaient les suivants : 1) Importance donnée à l’entretien d’annonce : entretien suffisamment long réalisé par un médecin sénior, permettant une annonce progressive, parfois au cours de plusieurs entretiens 2) Discours adapté aux particularités socioculturelles des patients, 3) Emploi d’un vocabulaire simple excluant des termes médicaux compliqués. 4) Ecoute du patient et empathie à son égard 5) Mise en avant des perspectives thérapeutiques, pour ne pas ôter tout espoir. Les points négatifs les plus fréquemment relevés étaient les suivants : 1) Insuffisance du temps consacré à l’annonce, la rendant brutale, ne laissant pas au patient la possibilité de poser des questions 2) Cadre non adapté : durant la visite, en présence d’un nombre important de personnes. 3) Absence de soutien psychologique proposé 4) Absence de prise en compte du niveau socioculturel du patient 5) Informations incomplètes voir erronées sur le diagnostic et le pronostic. Banalisation de la maladie. A l’issue de ces entretiens, 64% des étudiants ont éprouvé un sentiment de malaise, 42% de tristesse. Dans un cas cela a permis d’établir une relation de confiance entre l’étudiant et le patient. d) Synthèse concernant l’enseignement théorique et pratique A la question, « pouvez vous résumer les principaux messages de cet enseignement ? », les étudiants ont majoritairement répondu par des termes concernant les modalités et la forme de l’annonce plutôt que son contenu: Le terme d’empathie est très largement utilisé (dans 68% des réponses). Les étudiants soulignent par ailleurs l’importance de prendre son temps, d’être disponible et de réaliser l’annonce lors d’un entretien spécifique. Selon eux, l’annonce doit être réalisée par un médecin senior, fournissant des informations claires aux patients. Le médecin doit s’assurer de la bonne compréhension du message et laisser la possibilité aux patients de poser des questions. En revanche, d’une manière assez surprenante, 41% des étudiants ne font pas ou très peu allusion au contenu propre de l’entretien. Les autres mentionnent l’importance d’établir un projet thérapeutique ou de transmettre un message d’espoir. Ils soulignent aussi l’importance de s’adapter aux patients, en respectant leur droit à nier partiellement la vérité, et en intégrant leurs mécanismes de défense. Pour 6 d’entre eux, l’entretien doit être « loyal », le médecin ne 9 devant pas « mentir » aux patients, les informations concernant la gravité de la maladie ne doivent pas être dites à la famille et cachées au patient. Au total 72% se disent assez satisfaits de l’enseignement reçu, 4% très satisfaits et 24% peu satisfaits. Soixante douze pourcent estiment que cet enseignement devrait leur permettre d’améliorer leur relation avec les patients dans leur pratique future (réponse oui et assez à la question 2-4.d). Cependant, la majorité d’entre eux (86%) reproche à l’enseignement actuel d’être trop théorique. Ils souhaiteraient un enseignement leur permettant de mieux partager l’expérience des praticiens : débats en ED, jeux de rôles, utilisation de vidéos. Ils demandent également, d’assister, au sein des services, de manière plus régulière aux entretiens médecin malade, et de participer aux groupes de parole organisés avec les équipes soignantes et les psychologues. Quelques étudiants (13%) demandent à ce qu’un temps plus important soit consacré à l’enseignement de la relation médecin malade. Difficultés rencontrées dans la pratique de la relation médecin malade Tous les étudiants interrogés à l’exception d’un, ont déjà éprouvé des difficultés (souvent pour 54% d’entre eux, rarement pour 41%) devant des patients les interrogeant sur leur diagnostic ou leur pronostic. Il s’agissait surtout de patients hospitalisés en pneumologie, hématologie, neurologie médicale et chirurgicale, diabétologie, maladies infectieuses, gériatrie. Les raisons invoquées et les situations étaient les suivantes : manque de connaissances médicales et d’expérience de la relation médecin malade, malaise devant des patients posant des questions beaucoup plus directes sur le pronostic qu’ils ne l’avaient fait avec leur médecin référent, prise de conscience de la difficulté à concilier la vérité et l’espoir. Un malaise est très souvent ressenti par les étudiants, lorsque les patients abordent le problème de la mort, de l’euthanasie ou lorsqu’ils sont face à des attitudes de déni. Au cours d’entretiens médecin malade, 68% des étudiants ont perçus des différences entre le discours tenu au patient et la réalité, particulièrement en terme de pronostic. A la question, « approuvez vous cette attitude ou auriez vous agi autrement ? », 33% ne répondent pas, 33% répondent qu’ils auraient agi de la même manière pour laisser de l’espoir aux patients, et pour respecter leur droit de ne pas connaître la totalité de la vérité. Les 33 autres % répondent qu’ils auraient, dans certaines les circonstances, agi autrement. Ils reprochent principalement aux médecins de ne pas avoir été assez explicites sur la sévérité du pronostic : banalisation de la situation, fuite les questions, par manque de courage ou d’expérience. Ils pensent que des informations plus vraies auraient pu améliorer la prise en charge du patient : travail de deuil, rapprochement familial. 10 Finalement 23% se sentent préparés à annoncer prochainement à des patients une maladie grave ou une mauvaise nouvelle. Soixante dix sept pour cent ne se sentent pas prêts et estiment qu’il s’agit d’une pratique qu’il s’apprend progressivement au cours de l’exercice médical. Discussion Le premier point révélé par cette enquête est l’intérêt des étudiants pour les sujets concernant la relation médecin malade et la question de « l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle ». Cela est en adéquation avec notre pratique dans les services hospitaliers où ils nous questionnent souvent à ce sujet. Nous soulignons, à ce propos, leur disponibilité et l’intérêt qu’ils ont manifesté à la réalisation de l’enquête et la connaissance de ses résultats. Tous les étudiants interrogés, se sentent concernés par cet acte qui fait partie de la pratique médicale et aimeraient, pour certains d’entre eux, plus d’enseignement sur ce sujet. Leur intérêt pour cette question est aussi illustrée, par les émotions ressenties lors des entretiens médecin malade; malaise et/ ou de la tristesse chez la plupart d’entre eux. Malgré cela, et malgré une assiduité importante aux cours, les étudiants ne gardent qu’un souvenir imprécis de l’enseignement réalisé à la faculté, sur les sujets concernant la relation médecin malade. Ainsi, la moitié seulement des étudiants se souvient que les cours et les enseignements dirigés traitant de ce sujet, ont été réalisés en DCEM2 (au cours du module 1). Très peu d’entre eux (9%) se souviennent de l’enseignement obligatoire d’éthique biomédicale de PCEM2, réalisé, en petits groupes, sous forme d’enseignements dirigés, par des médecins cliniciens et des médecins de l’Unité de Soins Palliatifs. Cela est peut-être du au fait que cet enseignement a lieu trop précocement dans le cursus médical, à un moment où les étudiants n’ont pas eu une pratique médicale suffisante pour être sensibilisés à ce problème. L’analyse des résultats révèle certains points contradictoires dans l’évaluation de l’enseignement réalisé à la faculté. Il existe une importante participation à l’enseignement théorique de DCEM2 (81% pour les cours et 54% pour les ED dans l’enquête), et un taux de satisfaction des étudiants assez élevé (75 % des étudiants ont été « intéressés » ou « assez intéressés » par les cours magistraux), contrastant avec le fait que, pour deux tiers 11 des étudiants, les cours ne les ont peu ou pas aidés dans leur relation avec les patients. Par ailleurs, leurs commentaires révèlent, d’une façon presque unanime que les cours constituent un mode d’enseignement trop théorique et abstrait; ne leur permettant pas d’appréhender les problèmes pratiques, ni de les aider dans leur relation avec les patients. En revanche, la majorité des étudiants ont apprécié l’enseignement sous forme de travaux dirigés, plus concret et propice aux échanges avec les enseignants. La majorité des étudiants (63%) ont assisté à des entretiens d’annonce, alors que 23% seulement d’entre eux ont participé à d’autres modes d’enseignement pratique tel que les cas cliniques, les jeux de rôle, ou les groupes de parole. La participation aux entretiens d’annonce leur parait la manière la plus intéressante et pertinente d’appréhender la relation médecin malade. Au total, les étudiants sont quasiment unanimes pour proposer des modalités d’enseignement donnant plus de place à la pratique médicale : participation aux entretiens médecin malade, aux groupes de parole, débats avec des médecins ayant la pratique de la relation médecin malade et avec des enseignants d’éthique, jeux de rôle, projections de vidéos. Le besoin d’un enseignement plus pratique est bien illustré par les réponses des étudiants à la dernière question de l’enquête « Quels sont, pour vous les messages les plus importants lors de l’annonce d’une maladie grave (dans le contenu et la manière de le formuler) ? ». Les étudiants répondent par les mots clés du programme de l’ECN, insistant surtout sur la forme et non le contenu de l’annonce, ce qui témoigne que leur connaissance du sujet reste principalement théorique. Les étudiants ont conscience des difficultés potentiellement rencontrées dans la pratique de la relation médecin malade. La majorité d’entre eux ont assisté à des entretiens médecin malade, au cours desquels ont été perçu des différences entre le discours tenu au patient et la réalité, particulièrement en terme de pronostic. La moitié des étudiants qui analysent cette attitude, la trouve justifiée. Elle témoigne de l’ambivalence entre le devoir de loyauté et celui de préserver l’espoir des patients [7]. Les critiques des autres étudiants concernent le plus souvent les modalités de l’annonce plus que le contenu. Au total, il semble que la majorité des étudiants comprend que les difficultés rencontrées dans la relation médecin malade ne s’expliquent pas seulement par un manque de connaissances médicales ou d’expérience. Ils ont conscience que l’annonce d’une mauvaise nouvelle, reste, tout au long de la pratique médicale un acte difficile, chaque fois différent, au cours duquel il est faut concilier espoir et réalisme [8]. 12 Conclusion Cette enquête montre l’intérêt porté par les étudiants aux questions en lien avec la relation médecin malade. La majorité d’entre eux ont déjà été confrontés, dans leur pratique médicale à des difficultés en rapport avec ce problème; ils ont conscience des difficultés que représente un entretien d’annonce de maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle. Ils souhaiteraient un mode d’enseignement plus pratique, permettant de partager l’expérience de médecins praticiens. Ils aimeraient également, participer plus largement aux entretiens médecin malade, dans les services hospitaliers. Nous avons prévu d’intégrer des thèmes concernant la relation médecin malade, aux enseignements dispensés, au sein du service, aux étudiants. Cet enseignement serait réalisé sous la forme de cas cliniques ou de jeux de rôle en collaboration avec l’unité de soins palliatifs. 13 Références bibliographiques : 1. Buckman R (1984). Breaking bad news : why is it still so difficult ? Br Med J 288: 15971599. 2. Buckman R (1996). Talking to patients about cancer. No excuse now for not doing it. Br Med J 313: 699-700 3. Shattner A (2002). What do patients really want to know? QJ Med 95: 135-136 4. Ollivier MP (1998). La maladie grave, une épreuve de vie. Edition l’Harmattan. 5. Boon H, Stewart M (1998). Patient-physician communication assessment instruments : 1986 to 1996 review. Patient education and counselling. 35 : 161-176 6. Branch WT (2001). Teaching the human dimensions of care in clinical setting. JAMA 286: 1067-1074 7. Brewin TB (1991). Three ways of giving bad news. The lancet 337 : 1207-1209 8. Hagerty RG (2005). Communicating with realism and hope : incurable cancer patients’views on the disclosure of prognosis. J clin Oncol 23: 1278-1298 14 Annexe 1 : Article 35 du code de déontologie Le médecin doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les investigations et les soins qu’il lui propose. Tout au long de la maladie, il tient compte de la personnalité du patient dans ces explications et veille à leur compréhension. Toutefois, dans l’intérêt des malades et pour des raisons légitimes que le praticien apprécie en conscience, un malade peut être tenu dans l’ignorance d’un diagnostic ou d’un pronostic grave. Un pronostic fatal doit être révélé qu’avec circonspection, mais les proches doivent être prévenus, sauf exception ou si le malade a préalablement interdit cette révélation ou désigné les tiers auxquels elle doit être faite. 15 Annexe 2 Annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle : Points de vue d’étudiants de médecine de DCEM4 sur l’enseignement reçu et les difficultés rencontrées 1- L’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle : pensez-vous qu’il s’agisse d’un aspect important de votre pratique médicale actuelle et future ? oui assez cela dépend de la spécialité exercée non ne sait pas Justifiez : ........................................................................................................................................................................... ................................................................................................................................................................................................ 2- L’enseignement de l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle au cours des études médicales 2-1- Cours magistraux : a- Ces sujets ont-ils été traités lors d’un enseignement magistral ? oui non ne sait pas Si oui, à quel moment de votre cursus ? .................................................................................................................. b- Avez-vous assisté à ces cours ? oui non Si non, pourquoi ? ........................................................................................................................................................ . Si oui, vous ont-ils intéressés ? oui assez peu non Justifiez ......................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... c- Cet enseignement vous a-t-il aidé dans votre relation avec les patients dans les services cliniques ? 16 oui peu non Commentaires éventuels : ........................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... 2-2- Autres formes d’enseignements Travaux dirigés oui non Si oui, à quel moment de votre cursus ? ....................................................................................................... ................................................................................................................................................................................ Qu’en avez-vous pensé ? ................................................................................................................................... ................................................................................................................................................................................ ................................................................................................................................................................................ Cas cliniques dans les services ou groupes de parole : oui non Si oui, dans quels services ? ........................................................................................................................................ Qu’en avez-vous pensé ? ............................................................................................................................................. ........................................................................................................................................................................................... 2-3- Au cours d’entretien médecin patient en stage : Avez-vous déjà assisté à un entretien d’annonce d’une maladie grave ? oui non a- Si non : l’auriez vous souhaité ? oui non Justifiez : ........................................................................................................................................................................... ................................................................................................................................................................................................ b- Oui, vous avez assisté à un entretien d’annonce d’une maladie grave : - Combien de fois environ ? ................ - Dans quelles circonstances ? annonce lors d’une consultation annonce lors d’une hospitalisation - Quel regard avez-vous porté sur la manière dont cette annonce a été réalisée : points positifs ................................................................................................................................................ ................................................................................................................................................................................ points négatifs ............................................................................................................................................... 17 ................................................................................................................................................................................ - Quels sentiments avez-vous éprouvés lors et après cet entretien ? ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... - En avez-vous parlé avec le médecin qui avait réalisé l’entretien ? ................................................................. Commentaires : .............................................................................................................................................................. ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... 2-4- Synthèse concernant l’enseignement que vous avez reçu concernant l’annonce d’une maladie grave ou d’une mauvaise nouvelle. a- Pouvez vous résumer les principaux messages de cet enseignement ? ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... b- Quelle est votre évaluation globale de cet enseignement : Très satisfaisant Assez satisfaisant Peu satisfaisant Pas satisfaisant d- Pensez vous que cet enseignement permettra d’améliorer votre relation avec les patients dans votre pratique future ? oui assez peu non Commentaires éventuels : ........................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... c- Quel type d’enseignement (cf paragraphes 2.1, 2.2, 2.3) vous a paru le plus adapté ? ........................................................................................................................................................................................... d- Quelles propositions feriez vous pour cet enseignement ? ........................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... 18 ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... 3- Difficultés rencontrées dans la relation médecin malade. 3-1- Avez-vous déjà éprouvé des difficultés devant des patients qui vous posaient des questions concernant leur diagnostic ou leur pronostic ? oui souvent oui rarement non Si oui, décrivez (dans quels services, les questions des patients, vos réponses, vos difficultés) : ......................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... 3-2- Avez-vous déjà assisté à des entretiens médecin malade au cours desquels vous avez perçu des différences entre le discours tenu au patient et la réalité, particulièrement en terme de pronostic ? oui non Si oui : dans quels services ? : ................................................................................................................................... Comment expliquez-vous cette attitude ? .............................................................................................................. ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... Qu’en pensez vous, auriez-vous agi différemment ? Justifiez : ....................................................................... ........................................................................................................................................................................................... ........................................................................................................................................................................................... 3-3- Vous sentez-vous préparé à annoncer prochainement (quand vous serez interne) à des patients une maladie grave ou une mauvaise nouvelle ? oui non pas vraiment, cela s’apprend progressivement au cours de la pratique médicale 4- Quels sont, pour vous les messages les plus importants lors de l’annonce d’une maladie grave (dans le contenu et la manière de le formuler) ? 1 : ........................................................................................................................................................................................ 2 : ........................................................................................................................................................................................ 3 : ........................................................................................................................................................................................ 19 4 : ........................................................................................................................................................................................ 5 : ........................................................................................................................................................................................ 20