L’Encéphale (2014) 39, 189-203 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN : prescription des neuroleptiques et antipsychotiques d’action prolongée Fench Society for Biological Psychiatry and Neuropsychopharmacology task force: Formal Consensus for the prescription of depot antipsychotics L. Samalina,*, M. Abbarb, P. Courtetc, S. Guillaumec, S. Lancrenond, P.-M. Llorcaa aCHU Clermont-Ferrand, EA U7280, Université d’Auvergne, Clermont-Ferrand, France Caremeau, Nîmes, France cCHRU Montpellier, INSERM U1061, Université de Montpellier, Montpellier, France dSylia-Stat, Bourg-la-Reine, France bCHU MOTS CLÉS Recommandations professionnelles ; Antipsychotiques à action prolongée ; Schizophrénie ; Trouble bipolaire Résumé Introduction.– En pratique clinique, l’utilisation des formes à action prolongée des neuroleptiques et des antipsychotiques de seconde génération, reste faible malgré leur intérêt dans les stratégies de prévention de la rechute dans la schizophrénie ou dans le trouble bipolaire. L’Association Française de Psychiatrie Biologique et Neuropsychopharmacologie a élaboré des Recommandations, dont l’objet est l’emploi de ces formes galéniques spécifiques. Le but de ce travail est de faciliter l’utilisation des antipsychotiques d’action prolongée en pratique clinique. Méthodes.– La méthodologie employée est celle dite des « Recommandations Formalisées d’Experts », basée sur les données de la littérature et le consensus formalisé d’un panel d’experts. Résultats.– Les antipsychotiques d’action prolongée sont recommandés chez les patients souffrant de schizophrénie, d’un trouble schizo-affectif, d’un trouble délirant ou d’un trouble bipolaire. Les formulations d’action prolongée des antipsychotiques de seconde génération sont préconisées comme traitement de maintenance dès le premier épisode d’une schizophrénie et en deuxième ligne comme traitement de maintenance dans le trouble bipolaire. L’emploi des neuroleptiques à action prolongée n’est pas recommandé dans la phase précoce du trouble schizophrénique et dans le trouble bipolaire. Auteur correspondant : Dr Ludovic Samalin, Psychiatrie Adulte B, CHU de Clermont-Ferrand, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand cedex 1, France Tél. +33 47 375 2124 ; Fax. +33 47 375 2126 ; Adresse e-mail : [email protected] (L. Samalin). © L’Encéphale, Paris, 2014. Tous droits réservés. 190 L. Samalin, et al. Pour le panel d’experts, les antipsychotiques à action prolongée ne doivent pas être réservés aux patients non observant ou ayant des rechutes fréquentes, mais doivent être systématiquement proposés chez tous les patients nécessitant un traitement antipsychotique au long cours. Des stratégies d’utilisation spécifiques lors d’une instauration d’une formulation à action prolongée ou lors d’un changement d’antipsychotique sont proposées. Des préconisations sont faites pour le traitement de certains groupes (femmes enceintes, sujets âgés, sujets en situation de précarité ou en détention). Conclusion.– La place des antipsychotiques à action prolongée évolue vers une utilisation plus systématique et en première intention, pour les patients nécessitant un traitement antipsychotique de maintenance dans une démarche de décision médicale partagée. © L’Encéphale, Paris, 2014. Tous droits réservés. KEYWORDS Guidelines; Long-acting injectable; Depot formulation; Antipsychotic; Schizophrenia; Bipolar disorder Summary Background.– Compliance is often partial with oral antipsychotics and underestimated for patients with serious mental illness. Despite their demonstrated advantages in terms of relapse prevention, depot formulations are still poorly used in routine. As part of a process to improve the quality of care, French Association for Biological Psychiatry and Neuropsychopharmacology (AFPBN) Task Force elaborated a Formal Consensus for the prescription of depot antipsychotics in clinical practice. Methods.– The Task Force recommends as first-line choice, the use of long-acting injectable (LAI) second-generation antipsychotics in patients with schizophrenia, schizoaffective disorder and delusional disorder. They can be considered as a second-line option as a monotherapy to prevent manic recurrence or in combination with mood stabilizer to prevent depressive recurrence in the maintenance treatment of bipolar disorder. LAI second-generation antipsychotics can also be used after a first episode of schizophrenia. Depot neuroleptics are not recommended during the early course of schizophrenia and are not appropriate in bipolar disorder. They are considered as a second-line option for maintenance treatment in schizophrenia. Results.– LAI formulations should be systematically proposed to any patients for whom maintenance antipsychotic treatment is indicated. LAI antipsychotics can be used preferentially for non-compliant patients with frequent relapses or aggressive behaviors. Conclusion.– A specific information concerning the advantages and inconveniences of the LAI formulations, in the framework of shared-decision making must be delivered to each patient. Recommendations for switching from one oral/LAI form to another LAI and for using LAI antipsychotics in specific populations (pregnant women, elderly patients, subjects in a precarious situation, and subjects having to be treated in a prison establishment) are also proposed. © L’Encéphale, Paris, 2014. All rights reserved. 1. Introduction La schizophrénie, le trouble bipolaire ainsi que d’autres troubles mentaux (trouble délirant, trouble schizo-affectif…) sont des pathologies chroniques pour lesquelles il existe un risque de rechute élevé associé à des conséquences fonctionnelles majeures. La stratégie pharmacologique constitue la pierre angulaire de la prise en charge de ces patients. L’observance est souvent médiocre avec des conséquences délétères [1]. La majorité des patients souffrant de schizophrénie (84 %) arrête leur traitement antipsychotique durant la période de suivi (33 mois) [2]. La non-observance du traitement antipsychotique pour ces patients constitue la cause principale de rechute précoce [3]. Les formes injectables d’action prolongée des antipsychotiques font partie de la pharmacopée depuis plus de 40 ans. Les différentes méta-analyses soulignent leur intérêt comme stratégie de prévention de la rechute dans la schizophrénie [4-6]. La plupart des recommandations professionnelles préconisent ces formulations dans les populations de patients peu observant et certaines recommandent les antipsychotiques d’action prolongée comme traitement de maintenance dans la schizophrénie [7]. Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN Néanmoins, l’utilisation des antipsychotiques d’action prolongée reste faible en pratique clinique avec un taux de prescription n’excédant pas 25 % dans les différents pays d’Europe [8,9]. Les taux de prescription sont parmi les plus élevés en France (23,5 %) [10], en Grande Bretagne (29 %) et à Hongkong (37 %) [8] comparativement aux autres pays. Plusieurs facteurs explicatifs ont été identifiés auprès des psychiatres tel qu’une surestimation du niveau d’observance des patients, le refus du patient, un sentiment de coercition ou les risques d’une moins bonne tolérance [9,11]. L’objectif de cette recommandation professionnelle est de proposer un cadre de prescription au praticien lors de l’utilisation d’une forme galénique spécifique des antipsychotiques (forme injectable d’action prolongée) dans diverses indications thérapeutiques et des situations cliniques spécifiques. Le but étant de permettre aux cliniciens de proposer aux patients les stratégies pharmacologiques les plus appropriées et de faciliter l’utilisation des antipsychotiques d’action prolongée en pratique clinique. Les recommandations proposées sont élaborées à partir d’une méthodologie par Recommandation Formalisée d’Experts basée sur les données disponibles dans la littérature et le consensus formalisé d’un panel d’experts [12,13]. 2. Matériels et méthodes 191 Ces données ont été discutées et gradées par niveaux de preuve à partir des critères définis par la Haute Autorité de Santé [14]. Après cette première étape, le comité scientifique (PML, LS, MA, PC, SG, SL), a élaboré, un questionnaire constitué de 32 questions qui recouvre 539 options thérapeutiques. Les 32 questions ont été regroupées en 3 domaines jugés comme primordiaux : • population-cible : qui permet de décrire les différentes indications de ces formes galéniques mais aussi la période la plus appropriée d’instauration au cours de la maladie ; • modalités de prescription et d’utilisation : qui aborde le choix de la molécule, les modalités d’instauration, les stratégies spécifiques en fonction du trouble psychiatrique ou des comorbidités et la surveillance du traitement ; • populations spécifiques : qui aborde l’emploi de ces formes galéniques chez la femme enceinte, les sujets âgés, les sujets en situation de précarité, les sujets devant être traités dans le cadre d’un établissement carcéral. Ce questionnaire devait être rempli par un panel d’experts. Sa passation était estimée à environ 3 heures. Lors de l’élaboration, toutes les molécules à action prolongée disponibles en France ont été proposées. Elles ont été regroupées en 2 catégories : • neuroleptiques d’action prolongée (NAP) ; • antipsychotiques atypiques d’action prolongée (APAP). 2.1. Élaboration du questionnaire 2.2. L’échelle de cotation Dans un premier temps, nous avons réalisé une analyse et une synthèse de la littérature concernant les indications et les modalités d’utilisation des antipsychotiques à action prolongée. Cette recherche a utilisé les mots clefs suivants : « antipsychotic », « neuroleptic », « first-generation antipsychotic », « atypical antipsychotic », « second-generation antipsychotic », « long-acting injectable », « depot » à partir des bases de données PubMed et EMBASE afin d’identifier tous les travaux d’intérêt publiés. L’expert pouvait exprimer son niveau d’accord et de désaccord pour chacune des questions. Les règles qui définissent d’une part l’accord (ou le désaccord), et d’autre part le degré de convergence des avis des experts ont été prédéfinies. Chaque expert répond à chaque question à l’aide d’une échelle graduée de 0 à 9 (0 signifie l’existence « d’un désaccord complet » ou « d’une contre-indication formelle » et 9 celle « d’un accord complet » ou « d’une indication formelle ») (Figure 1). 0 123 456 789 3e intention 2e intention 1re intention Désaccord complet Interprétation 9 7-8 4-5-6 Contre-indication Extrêmement approprié : stratégie thérapeutique de choix Habituellement appropriée : stratégie thérapeutique 1re intention utilsée fréquemment Stratégie thérapeutique de 2e intention, que vous utilisez quelquefois (préférence du patient ou de la famille ; traitement de 1re intention inefficace ou ne convient pas 1-2-3 Habituellement peu ou inapproprié : stratégie thérapeutique rarement utilisée 0 Totalement inpproprié : stratégie thérapeutique jamais utilisée, à éviter Figure 1. L’échelle de cotation Indication formelle Accord complet 192 L. Samalin, et al. Cette échelle est issue d’une variante de la méthode « Groupe Nominal », développée par la Rand Corporation et l’Université de Californie aux USA (« RAND/UCLA appropriateness rating method »). Elle a l’avantage d’être bien codifiée, d’être utilisée en médecine et d’avoir été publiée [12,15,16]. • la zone de seconde intention était retenue si moins de 50 % des experts étaient dans la zone [7 à 9] et au moins 50 % des experts dans les zones cumulées [7 à 9] et [4 à 6] ; • la zone de troisième intention était retenue si moins de 50 % des experts étaient dans les zones cumulées [7 à 9] et [4 à 6] et moins de 20 % dans la zone 0 ; • la zone de « contre-indication » ou de désaccord était retenue si au moins 50 % des experts ayant répondu à au moins une question du paragraphe étaient dans la zone 0. Dans tous les autres cas, la question était considérée comme non consensuelle. Le tableau 1 résume le processus d’analyse des données. Un exemple est donné dans l’Annexe 2. Les résultats ont été interprétés par le Comité Scientifique et ont permis l’élaboration des recommandations. Celles-ci ont été validées par un Comité Scientifique Indépendant (EH, CL, PT) (Annexe 1). Le document final a été rédigé par deux membres du Comité Scientifique (LS, PML). 2.3. Sélection des experts Le Comité scientifique (Annexe 1) a sélectionné 53 experts français de l’utilisation des antipsychotiques à action prolongée. Les critères de sélection étaient : • exercice d’une activité clinique dans le domaine de la schizophrénie ou du trouble bipolaire ; • publication ou communication de travaux de recherche dans des congrès nationaux ou internationaux sur le thème des neuroleptiques d’action prolongée ou des antipsychotiques à action prolongée. Chaque expert a été consulté individuellement pour fournir son expertise à partir du questionnaire fourni. Un suivi a été mis en place pour assurer, notamment, l’envoi et le retour des documents et le respect des délais. Un rappel de la mission des experts a été effectué. L’engagement écrit de chacun des experts a été demandé. Les experts participant à ce projet n’étaient pas rémunérés. 3. Résultats Cette partie résume les principales recommandations. L’ensemble des données est disponible sur le site de l’Association Française de Psychiatrie Biologique et Neuropsychopharmacologie (http// : www.afpb.org). 2.4. Analyse des données 3.1. Description de la population des experts Les réponses à chaque question ou proposition ont été analysées en tenant compte dans un premier temps de l’analyse descriptive (médiane, moyenne et écart-type, minimum, maximum et effectif pour chacune des modalités de 0 à 9) : • la zone de première intention était retenue si au moins 50 % des experts ayant répondu à la question étaient dans la zone [7 à 9]. Dans cette zone, le traitement de choix était retenu si au moins 50 % des experts avaient coté 9 ; Le nombre total d’experts ayant complété le questionnaire est de 42 (Annexe 3), soit 79 % des experts contactés. Les motifs de non-participation des 11 experts étaient un travail d’expertise trop important ou des disponibilités insuffisantes pour répondre dans les délais impartis. Les données sociodémographiques et d’activités professionnelles du panel d’experts sont présentées dans le Tableau 2. Tableau 1. Analyse des données. Pourcentages de réponses dans les zones… [0] [1-3] [4-6] [7-9] < 20 % – < 50 % ≥ 50 % < 20 % < 50 % ≥ 50 % et < 100 % ● 2e intention < 20 % – < 50 % ● 3e intention ≥ 50 % – – Pour toutes les cases (-), la question était considérée comme non consensuelle. – ● 1re intention ● Contre-indication Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN 193 Tableau 2. Données sociodémographiques et d’activités professionnelles du panel d’experts (N = 42). Âge (années) Années d’exercice (années) Prise en charge de patients ambulatoire (%) Prise en charge de patients en milieu hospitalier (%) Au cours des 5 dernières années, dans le domaine des NAP/ APAP Communications 3.2. Population cible 3.2.1. Indications (Tableau 3) L’emploi des APAP est recommandé en 1re intention (avant celui des NAP) dans : • la schizophrénie ; • le trouble délirant ; • le trouble schizo-affectif. • • Pour le trouble bipolaire : les APAP ne sont recommandés qu’en 2e intention après les stratégies pharmacologiques habituelles [15] ; les NAP ne sont pas recommandés. N 42 Moyenne ± ET 46,81 ± 9,82 Min ; Max 31 ; 63 Médiane 46 N 41 Moyenne ± ET 17,29 ± 10,20 Min ; Max 2 ; 37 Médiane 16 N 41 Moyenne ± ET 68,90 ± 22,43 Min ; Max 25 ; 100 Médiane 75 N 41 Moyenne ± ET 31,10 ± 22,43 Min ; Max 0 ; 75 Médiane 25 N 42 Activité clinique 42 (100,0 %) Projets de recherche 18 (42,9 %) Publications 12 (28,6 %) N 36 Conférences 22 (61,1 %) Congrès Enseignement 24 (66,7 %) 22 (61,1 %) Tableau 3. Indications d’un NAP ou APAP selon les critères du DSM-IV-TR. NAP APAP 1re intention – Schizophrénie – Trouble délirant – Trouble schizoaffectif 2e intention – Schizophrénie – Trouble délirant – Trouble schizoaffectif – Trouble de personnalité – Trouble bipolaire – Trouble de personnalité 194 L. Samalin, et al. Dans les troubles de personnalité, APAP et NAP ne sont recommandés qu’en 2e intention après les stratégies pharmacologiques habituelles [17]. Dans le trouble dépressif récurrent, l’utilisation d’un NAP (même en association) est à éviter. Les troubles du comportement sur troubles mentaux organiques (démence Alzheimer, vasculaire…) sont des contre-indications à l’utilisation d’un NAP ou APAP. 3.2.2. Période la plus appropriée d’instauration au cours de la maladie (Tableau 4) Seuls les APAP sont considérés comme une option thérapeutique lors de la phase initiale de la maladie schizophrénique : • • ils sont recommandés dès le 1er épisode psychotique ; il est préconisé d’instaurer dès la 1re récurrence d’épisode psychotique un APAP (si le patient n’était pas traité par une formulation retard). Les NAP ne sont pas recommandés dans la phase initiale du trouble schizophrénique (patient ayant été nouvellement diagnostiqué, patient naïf de traitement antipsychotique…). Ils doivent être utilisés comme traitement de maintenance, lors de l’évolution au long cours de la maladie en cas d’efficacité de la forme orale et lorsque le rapport bénéfice/risque est considéré comme satisfaisant. 3.2.3. Critères de choix d’un NAP ou d’un APAP en fonction des caractéristiques cliniques des patients (tableau 5) Tableau 4. Période d’instauration d’un NAP ou APAP. NAP APAP Schizophrénie Les NAP ne sont pas recommandés dans la phase débutante du trouble. Les NAP peuvent être employés lors du traitement de maintenance en cas d’efficacité de la forme orale et lorsque le rapport bénéfice/risque est considéré comme satisfaisant Il est recommandé d’instaurer très précocement (dès le 1er épisode psychotique) un APAP. Il est préconisé d’instaurer dès la 1re récurrence d’épisode psychotique un APAP (si le patient n’était pas traité par une formulation retard). Trouble bipolaire Les NAP ne sont pas recommandés. Les APAP ne sont pas recommandés dans la phase débutante du trouble bipolaire. Tableau 5. Indications d’un NAP ou APAP en fonction des caractéristiques cliniques du trouble. 2e intention NAP ou APAP – Rechute fréquente – Mauvaise observance, non acceptation du traitement – Dangerosité connue – Faible niveau d’insight – Souhait du patient, ATCD de NAP/APAP efficace APAP – Troubles cognitifs impactant – Isolement socio familial – SSC ambulatoire NAP ou APAP – Symptomatologie positive APAP – Symptomatologie négative – Suicidalité 1re intention Trouble bipolaire Schizophrénie 1re intention 2e intention APAP – Mauvaise observance, non acceptation du traitement – Souhait du patient, ATCD de NAP/APAP efficace – TB I, polarité maniaque, cycle rapide – Dangerosité connue – Faible niveau d’insight Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN 3.2.3.1. Schizophrénie Les critères de choix préférentiels d’une formulation à action prolongée (traitement de 1re intention) chez les patients souffrant d’une schizophrénie sont : – Patients présentant des rechutes fréquentes, une mauvaise observance ou une non-acceptation d’un traitement au long cours Les NAP ou APAP sont préconisés en traitement de 1re intention. En cas de mauvaise observance, les APAP sont considérés comme le traitement de choix. – Patients présentant une dangerosité connue Les NAP et APAP sont recommandés en traitement de 1re intention. – Patients présentant un faible niveau de conscience du trouble et de la nécessité d’un traitement Les NAP et APAP sont recommandés en 1re intention. – Patients souhaitant un traitement par un NAP ou un APAP et/ou ayant une histoire de traitement efficace par NAP ou APAP Les NAP ou APAP sont recommandés en traitement de 1re intention. – Patients présentant des troubles cognitifs ayant un retentissement sur les capacités de gestion de la vie quotidienne Les APAP sont préconisés en traitement de 1re intention. Les NAP ne sont pas recommandés. – Patients isolés sur le plan socio-familial Il est recommandé de proposer un APAP en traitement de 1re ligne (NAP en 2e ligne) chez les patients ayant un faible support social et familial. – Patients recevant des soins sans consentement en ambulatoire Lorsqu’un programme de soins ambulatoire est envisagé, il est préconisé de proposer un APAP en thérapeutique de 1re intention. Les NAP peuvent être proposés en 2 e intention. Les groupes suivants n’ont pas fait l’objet d’un consensus favorable entre les experts pour l’utilisation préférentielle (traitement de 1re intention) d’une forme galénique à action prolongée. Cependant, ils ont précisé le type d’antipsychotique à action prolongée (NAP ou APAP) à préconiser pour chacun de ces groupes. – Patients présentant une dimension clinique prédominante La prédominance d’une symptomatologie positive ou négative n’est pas un facteur de choix spécifique pour l’utilisation d’une formulation retard. 195 Si le choix d’une formulation retard est fait : * les APAP et les NAP peuvent être proposés pour les formes cliniques où prédomine la symptomatologie positive (2e intention). * seuls les APAP peuvent être proposés en cas de symptomatologie négative prédominante (2e intention). – Patients présentant un niveau élevé d’intentionnalité suicidaire Seuls les APAP peuvent être envisagés (en 2e intention) pour les patients présentant des conduites suicidaires lors des épisodes aigus. – Patients présentant un niveau élevé de conscience du trouble Un niveau de conscience du trouble élevé peut être une indication à la proposition d’un APAP en 2e intention. Les NAP ne sont pas recommandés. 3.2.3.2. Trouble bipolaire Les APAP sont proposés comme traitement de 2e intention chez les patients souffrant d’un trouble bipolaire. Ils sont proposés de façon spécifique chez des patients présentant les caractéristiques suivantes : – Patients présentant une mauvaise observance, avec une non-acceptation d’un traitement au long cours Les APAP peuvent être proposés comme une thérapeutique de 1re intention (en monothérapie ou association). – Patients souhaitant un traitement par un APAP et/ ou ayant une histoire de traitement efficace par APAP sur la symptomatologie du trouble bipolaire Remarque : du fait d’autres classes médicamenteuses disponibles dans le trouble bipolaire (lithium et anticonvulsivants) nous retrouvons un niveau de consensus moins élevé que celui observé chez les patients souffrant de schizophrénie. Quelle que soit la situation clinique, les NAP ne sont jamais recommandés dans le traitement de maintenance du trouble bipolaire. Les groupes suivants n’ont pas fait l’objet d’un consensus favorable entre les experts pour l’utilisation préférentielle (traitement de 1re intention) d’une forme galénique à action prolongée. Cependant, ils ont précisé le type d’antipsychotique à action prolongée (NAP ou APAP) à préconiser pour chacun de ces groupes. 196 L. Samalin, et al. – Patient présentant des caractéristiques cliniques particulières Avec les molécules actuellement disponibles en France, les APAP sont préconisés (en traitement de 2e intention) chez les patients présentant un trouble bipolaire de type I et/ou une polarité maniaque prédominante et/ ou à cycle rapide. – Patients présentant une dangerosité avérée ou des antécédents de conduites impulsives Ces patients peuvent bénéficier d’un APAP en traitement de 2e intention. – Patients présentant un faible niveau de conscience de la nécessité d’un traitement Les APAP sont préconisés en 2e intention Tableau 6. Balance bénéfice/risque des NAP et APAP dans le trouble schizophrénique. Prévention des récidives psychotiques 1re intention Risperidone à action prolongée 2e intention Olanzapine pamoate 3.2.4. Balance bénéfice/risque des NAP et APAP en fonction du trouble psychiatrique 3.2.4.1. Chez un patient souffrant d’une schizophrénie L’évaluation du bénéfice/risque pour chacune des formulations à action prolongée dans le traitement préventif des récidives psychotiques est présentée dans le Tableau 6. La gradation des molécules apparait directement liée au niveau de tolérance de chaque APAP ou NAP. Les APAP sont recommandés en 1re ligne sauf l’olanzapine pamoate du fait du risque de syndrome post-injection. 3.2.4.2. Chez un patient souffrant d’un trouble bipolaire Seuls 2 APAP sont recommandés 2e intention : rispéridone à action prolongée et olanzapine pamoate (Tableau 7). Les NAP sont contre-indiqués dans le traitement au long cours du trouble bipolaire. Haloperidol decanoate Zuclopenthixol decanoate 3.3. Modalités de prescription et d’utilisation Flupentixol decanoate Fluphenazine decanoate 3.3.1. Chez un patient stabilisé par un traitement antipsychotique Pipotiazine palmitate Tableau 7. Balance bénéfice/risque des NAP et APAP dans le trouble bipolaire. Prévention des récidives maniaques Prévention des récidives dépressives 1re intention – – 2e intention En monothérapie ou association avec un SH Toujours en association avec un SH Risperidone à action prolongée Olanzapine pamoate Risperidone à action prolongée Olanzapine pamoate 3.3.1.1. Passage d’un antipsychotique (neuroleptique ou antipsychotique de seconde génération) sous forme orale à une forme à action prolongée Débuter de préférence par la forme orale de l’antipsychotique à action prolongée, pendant la durée nécessaire à l’obtention d’une posologie efficace et bien tolérée avant de passer à la forme à action prolongée. Cependant, seule la rispéridone microsphère possède des caractéristiques pharmacocinétiques nécessitant de façon impérative une supplémentation orale initiale. La prescription d’APAP doit se faire en prenant en compte les caractéristiques pharmacocinétiques de chaque produit. La posologie de la forme à action prolongée instaurée correspondra à un équivalent de la posologie utilisée par voie orale (données de l’enregistrement du produit). Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN 3.3.1.2. Passage d’un antipsychotique (neuroleptique ou antipsychotique de seconde génération) à action prolongée à une autre molécule à action prolongée L’instauration de la molécule à action prolongée se fera après arrêt du NAP ou de l’APAP en cours (lorsque le délai écoulé avec la dernière injection correspond à l’intervalle entre 2 injections). En 2e intention, l’instauration d’un APAP en relais au NAP ou APAP en cours peut être envisagée directement après avoir utilisé une dose test per os du nouvel APAP instauré afin d’éliminer une hypersensibilité. La posologie d’instauration de la forme per os ou du nouvel APAP envisagé correspondra (si possible) à un équivalent posologique du précédent NAP ou APAP. 3.3.2. Modalités pratique d’instauration et de rappel des injections Afin d’aider à l’acceptation et à la compréhension des bénéfices d’un traitement à action prolongée, il est recommandé à l’unanimité des experts de communiquer au patient les informations spécifiques concernant les avantages et inconvénients du NAP ou APAP envisagé dans le cadre d’une décision médicale partagée. Il est recommandé lors de l’instauration du traitement de mettre en place la forme à action prolongée avant la fin d’une hospitalisation temps plein pour l’épisode aigu. L’instauration peut également être envisagée lors d’une prise en charge ambulatoire. La réalisation des injections lors du traitement de maintenance dans les Centres Médico-Psychologiques avec les consultations de suivi psychiatrique coordonnées avec les dates d’injection est la modalité de choix. Les injections peuvent être aussi réalisées par une infirmière en hôpital de jour, en CATTP ou à domicile. Remarque : ces modalités d’injections ne sont pas applicables à l’olanzapine pamoate puisque ce traitement nécessite une surveillance post-injection spécifique en milieu hospitalier. Afin d’améliorer l’observance des patients, il est recommandé de mettre en place des techniques de rappel. En 1re intention par rappels téléphoniques et par l’intermédiaire d’un agenda remis au patient (carnet de suivi). En 2e intention par courrier ou éventuellement par SMS. 197 La prévention des complications locales nécessite de réaliser les injections : – en IM profonde (muscle glutéal ou deltoïde) Les experts ne se sont pas prononcés sur la préférence du site d’injection, dans la mesure où il dépend en premier lieu de la préférence du patient. – en changeant de site d’injection à chaque injection – en proposant systématiquement un anesthésique local transdermique (crème, patch) avant l’injection afin de diminuer la douleur au point d’injection. 3.3.3. Stratégies thérapeutiques spécifiques en fonction du trouble psychiatrique ou de ses comorbidités 3.3.3.1. Schizophrénie et délire chronique Décompensation psychotique aigüe au cours d’un traitement par NAP ou APAP À la phase aiguë Plusieurs adaptations thérapeutiques sont préconisées en 1re intention : – Optimiser le traitement par NAP ou APAP en cours : * soit par optimisation posologique du NAP ou APAP en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance * soit pour les NAP : réduction de la durée entre 2 injections – Associer au NAP ou APAP en cours un antipsychotique per os L’arrêt du NAP ou APAP en cours suivi du passage à un antipsychotique per os n’est recommandé qu’en tant que stratégie thérapeutique de 2e intention à la phase aiguë. Après stabilisation de l’épisode psychotique Il est recommandé de poursuivre au long cours le traitement ayant permis la réduction des symptômes et la stabilisation de l’état clinique. En cas de passage à un traitement antipsychotique per os lors de la phase aiguë, il est préconisé au long cours de proposer un relais vers une formulation à action prolongée. En cas d’association d’un antipsychotique per os à un NAP ou APAP à la phase aiguë, il est recommandé, si cela est possible, d’optimiser la posologie de la formulation à action prolongée et d’arrêter progressivement l’antipsychotique par voie orale sous contrôle de l’état clinique. 198 Symptomatologie résiduelle sous NAP ou APAP justifiant une réévaluation thérapeutique Il est préconisé successivement : – en 1re intention : d’optimiser le traitement par NAP ou APAP : * soit par optimisation posologique du NAP ou APAP en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance observée * soit pour les NAP : réduction de la durée entre 2 injections – en 2e intention : * soit d’associer au NAP ou APAP en cours un antipsychotique per os * soit de changer le NAP ou APAP en cours pour une autre formulation à action prolongée (de préférence un APAP) 3.3.3.2. Trouble bipolaire Épisode maniaque sous APAP À la phase aiguë Si monothérapie en cours, il est préconisé successivement : – en 1re intention : d’associer à l’APAP en cours un Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque per os (sans recommandation de molécule particulière) – en 2e intention : * soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance observée * soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à une monothérapie de Stabilisateur de l’Humeur ayant un effet antimaniaque per os (sans recommandation de molécule particulière) Si bithérapie en cours (APAP + Li ou AC), il est recommandé successivement : – en 1re intention : d’optimiser la posologie du Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque per os – en 2e intention, plusieurs stratégies sont préconisées : * soit d’associer à l’APAP en cours un autre Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque per os (sans recommandation de molécule particulière) * soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance observée * soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à une bithérapie de Stabilisateurs de l’Humeur antimaniaques per os (sans recommandation de molécules particulières) * soit de poursuivre le traitement en cours et d’associer un 2e Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque per os (sans recommandation de molécule particulière) ou de réaliser une série d’ECT L. Samalin, et al. Après guérison de l’épisode maniaque Il est recommandé de poursuivre au long cours le traitement ayant permis la réduction des symptômes et la stabilisation de l’état clinique (pas de précision de durée). Épisode dépressif bipolaire À la phase aiguë Si monothérapie en cours, il est préconisé successivement : – en 1re intention : d’associer à l’APAP en cours un Stabilisateur de l’Humeur ayant un effet antidépresseur per os (ex : lamotrigine, quétiapine, lithium) – en 2e intention : * soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance observée * soit d’associer à l’APAP en cours un antidépresseur per os ou une série d’ECT * soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à une monothérapie de Stabilisateur de l’Humeur ayant un effet antidépresseur per os Si bithérapie en cours (APAP + AD), il est recommandé successivement : – en 1re intention : * soit d’optimiser la posologie de l’antidépresseur per os en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance observée * soit de poursuivre l’association APAP + antidépresseur et d’associer un Stabilisateur de l’Humeur ayant un effet antidépresseur per os (ex : lamotrigine, quétiapine, lithium) – en 2e intention, plusieurs stratégies sont préconisées : * soit d’associer à l’APAP en cours un autre antidépresseur per os * soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours : augmentation de la posologie, sous contrôle de la tolérance observée * soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à une bithérapie de Stabilisateur de l’Humeur + antidépresseur per os * soit de poursuivre le traitement en cours et de réaliser une série d’ECT Après guérison de l’épisode dépressif Il est recommandé de poursuivre au long cours le traitement ayant permis la réduction des symptômes et la stabilisation de l’état clinique (pas de précision de durée). En 2e intention, en cas d’association d’un AD per os à un APAP à la phase aiguë, il est recommandé, si cela est possible, d’optimiser la posologie de l’APAP et d’arrêter progressivement l’AD per os en fonction de l’état clinique du patient. Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN 3.3.3.3. Comorbidités psychiatriques associées à un trouble schizophrénique ou bipolaire sous NAP ou APAP Manifestations anxieuses (symptômes anxieux ou troubles anxieux) Il est recommandé en 1re intention d’associer une benzodiazépine per os, en 2e intention d’associer un antidépresseur (inhibiteur de la Recapture de la Sérotonine ou Inhibiteur de la Recapture de la Sérotonine et de la Noradrénaline de préférence). Addiction à une substance psycho-active (alcool, opiacés…) Le traitement par NAP ou APAP peut être poursuivi. La prise de substituts aux opiacés (buprénorphine ou méthadone) ou de disulfiram, acamprosate ou naltrexone en fonction de l’addiction, est envisageable sous NAP ou APAP. 3.3.4. Modalités de suivi et de surveillance 3.3.4.1. Bilan pré thérapeutique NAP/APAP Il est recommandé de rechercher systématiquement les éléments cliniques suivants : – Antécédents médicaux personnels et familiaux (HTA, diabète, dyslipidémie…) – Hygiène de vie (habitudes alimentaires, activité physique, consommation de toxiques, tabagisme…) – Poids, calcul de l’IMC, mesure du périmètre ombilical – Pression Artérielle Il est préconisé de réaliser le bilan paraclinique suivant : en 1re intention ◦ NFS, ionogramme sanguin (+ urée, créatinémie, glycémie à jeun) ; ◦ bilan hépatique (9Gt, ASAT, ALAT) ; ◦ bilan lipidique (Triglycérides, HDL et LDL cholestérol) ; ◦ bêta-HCG ; ◦ ECG ; • en fonction de l’état clinique du patient (2e intention) : ◦ bilan thyroïdien (TSHus) ; ◦ prolactinémie ; ◦ EEG. L’ensemble des experts recommande d’informer le patient et l’entourage des risques de survenue d’effets indésirables (métaboliques, neurologiques…) ainsi que de prodiguer des conseils hygiéno-diététiques (régime alimentaire équilibré, activité physique régulière, diminution ou aide à l’arrêt des consommations de toxiques…). • 3.3.4.2. Modalités de surveillance La surveillance clinique et paraclinique d’un NAP ou APAP est la même que pour les antipsychotiques per os. 199 La fréquence spécifique de surveillance va dépendre des facteurs de risque retrouvés chez le patient ainsi que des signes cliniques apparaissant pendant le traitement [18]. Sous traitement neuroleptique, il conviendra d’être plus particulièrement attentif au risque de syndrome malin. 3.4. Populations spécifiques 3.4.1. Femme enceinte En cas de grossesse programmée chez une femme traitée par NAP ou APAP L’attitude thérapeutique dans cette situation clinique n’a pas fait l’objet d’un consensus auprès des experts. Une majorité relative (stratégie de 2e intention) préconise l’arrêt du NAP ou APAP en cours avec relais de la forme orale (à la dose minimale efficace). En cas de découverte d’une grossesse – Au 1er/2e/3e trimestre : l’attitude thérapeutique dans cette situation clinique n’a pas fait l’objet d’un consensus auprès des experts. Une majorité relative (stratégie de 2e intention) préconise la poursuite du NAP ou APAP en cours ou le relais vers la forme orale (à dose minimale efficace). 3.4.2. Sujet âgé Chez un patient âgé de plus de 65 ans, l’utilisation d’un NAP ou APAP est envisageable. Certaines précautions lors de la prescription d’une formulation retard sont recommandées : – Adaptation posologique en fonction du poids, du bilan hépatique ou rénal – Titration plus lente que chez l’adulte avec posologie « cible » inférieure – Suivi médical rapproché – Surveillance de la tolérance plus rapprochée que chez l’adulte – Prescription par un psychiatre uniquement 3.4.3. Sujet en situation de précarité Chez un sujet en situation de précarité l’utilisation d’un APAP est considérée comme une modalité préférentielle de traitement (NAP en 2e intention). 200 3.4.4. Sujet traité dans un établissement carcéral Chez un patient incarcéré l’utilisation d’un NAP ou APAP peut être envisagé. Cette prescription ne diffère pas en fonction de la durée du séjour ou du lieu d’incarcération. Les indications psychiatriques sont les mêmes qu’en population non carcérale, à la seule différence que les APAP apparaissent comme le traitement de choix du trouble schizophrénique. La présence des caractéristiques cliniques suivantes : agressivité, antécédents de passage à l’acte violent ou risque d’hétéro-agressivité oriente le choix thérapeutique en faveur d’un APAP ou d’un NAP dans le trouble schizophrénique et vers un APAP dans le trouble bipolaire (1re intention). Points clés 1. Les antipsychotiques injectables à action prolongée sont indiqués chez les patients atteints de schizophrénie, d’un trouble schizo-affectif, d’un trouble délirant et d’un trouble bipolaire. 2. Les antipsychotiques de deuxième génération à action prolongée (APAP) sont recommandés comme traitement d’entretien dès le premier épisode de schizophrénie. Les neuroleptiques à action prolongée (NAP) ne sont pas recommandés lors de la phase précoce de la schizophrénie et doivent être évités dans le trouble bipolaire. 3. Les antipsychotiques injectables à action prolongée ont longtemps été considérés comme un traitement ne pouvant être utilisé que pour un sous-groupe de patients non-observants, dont les rechutes sont fréquentes ou présentant une dangerosité éventuelle. Le panel d’experts estime que les antipsychotiques injectables à action prolongée doivent être envisagé et proposé systématiquement à tous les patients pour lesquels un traitement d’entretien antipsychotique est indiqué. 4. Selon leur efficacité et la tolérance : • Les APAP sont recommandés en 1re intention et les NAP comme thérapeutique de deuxième ligne dans le traitement d’entretien de la schizophrénie. • Les APAP sont recommandés en 2e intention en monothérapie ou en association avec un stabilisateur d’Humeur pour prévenir les récidives L. Samalin, et al. maniaques ou uniquement en association avec un stabilisateur de l’humeur pour prévenir la récidive dépressive dans le traitement d’entretien de trouble bipolaire. 5. Afin d’améliorer l’acceptation et la compréhension des avantages d’un antipsychotique injectable d’action prolongée, il est recommandé de fournir à chaque patient une information précise concernant les avantages et les inconvénients de cette formulation, dans le cadre d’une démarche de la prise de décision médicale partagée. 6. Prescription d’un antipsychotiques injectables à action prolongée. Deux situations principales sont identifiées : • À partir d’un antipsychotique oral : ◊ Prescrire la formulation orale de l’antipsychotique injectable à action prolongée afin d’établir la tolérance/efficacité ◊ Utiliser une dose initiale d’antipsychotique injectable à action prolongée équivalente à celle employée avec la forme orale • À partir d’un autre antipsychotique à action prolongée : ◊ Utiliser plusieurs doses d’essai de la formulation orale de l’antipsychotique si le patient n’a jamais pris ce médicament auparavant (pour écarter une hypersensibilité) ◊ Administrer le nouvel antipsychotique d’action prolongée à la date prévue de la prochaine injection ◊ Utiliser une dose initiale d’antipsychotique d’action prolongée équivalente à celle de l’antipsychotique d’action prolongée précédent. 7. Gestion des traitements : • Les rappels de date d’injection doivent être utilisés pour améliorer l’observance : ◊ 1re intention : appel téléphonique et agenda ◊ 2e intention : lettre ou un message SMS • Coordonner les dates des consultations médicales avec les dates prévues des injections d’antipsychotiques • Respecter la prévention des complications locales lors de l’injection : ◊ administration par un professionnel formé (infirmière, psychiatre, Médecin généraliste), ◊ Vérifier la longueur de l’aiguille pour pratiquer une injection intra-musculaire profonde, ◊ Choisir le site d’injection selon la préférence du patient, ◊ Changer de site d’injection à chaque injection ◊ Proposer systématiquement une anesthésie locale pour réduire la douleur au site d’injection Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN 201 Ce travail a été réalisé avec le soutien financier indépendant de l’Association Française de Psychiatrie Biologique et de Neuropsychopharmacologie. Coordination Remerciements Comité Scientifique du projet (CS) Professeur Pierre-Michel Llorca / Docteur Ludovic Samalin Le comité de pilotage remercie chaleureusement : • les Experts pour leur implication et la qualité de leur travail • Sylia-Stat pour la qualité de son apport méthodologique. Liens d’intérêts Le Dr Samalin déclare avoir participé à des réunions d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Bristol-Myers Squibb, Janssen, Lundbeck, Otsuka ; être impliqué dans des études cliniques dont les promoteurs sont les laboratoires Janssen, Lundbeck, Roche, Sunovion. Le Dr Abbar déclare avoir participé à des réunions d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Bristol-MyersSquibb et Eli Lilly ; être impliqué dans des études cliniques dont les promoteurs sont les laboratoires Janssen, Lundbeck, Otsuka et Sunovion Le Pr Courtet déclare avoir participé à des réunions d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Lundbeck, Roche, Servier ; être impliqué dans des études cliniques dont les promoteurs sont les laboratoires Bristol-Myers Squibb, Janssen, Lundbeck ; avoir reçu des financements de recherche, des honoraires, des financements de déplacement pour les laboratoires Astra-Zeneca, Janssen, Lundbeck, Otsuka, Pfizer, Roche, Servier. Le Pr Guillaume déclare avoir participé à des réunions d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Lundbeck, Bristol-Myers Squibb, Servier ; avoir reçu des financements de recherche, des honoraires, des financements de déplacement pour le laboratoire Servier. Le Pr Llorca déclare avoir participé à des réunions d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Lundbeck, Otsuka, Roche, Servier, Takeda ; être impliqué dans des études cliniques dont les promoteurs sont les laboratoires Janssen, Lundbeck, Roche, Sunovion ; Avoir reçu des financements de recherche, des honoraires, des financements de déplacement et avoir des activités de consultant pour les laboratoires Astra-Zeneca, Eli Lilly, Janssen, Lundbeck, Otsuka, Roche, Sanofi, Servier, Takeda. Annexe 1 : Encadrement scientifique du projet Initiation de la RFE Association Française de Psychiatrie Biologique et Neuropsychopharmacologie Docteur Mocrane Abbar Professeur Philippe Courtet Professeur Pierre-Michel Llorca Docteur Sébastien Guillaume Docteur Ludovic Samalin Méthodologie du projet Sylvie Lancrenon Comité Scientifique Indépendant (CSI) Professeur Emmanuel Haffen Professeur Christophe Lançon Professeur Pierre Thomas Annexe 2 : Interprétation d’une question Parmi les troubles psychiatriques suivants quels sont ceux qui selon vous, pourraient bénéfi cier d’un traitement médicamenteux par NAP ou APAP (en monothérapie ou association) ? Interprétation Neuroleptiques d’Action Prolongée Ils sont recommandés : en 2 e intention (> 50 % dans la zone 4-9) : dans la schizophrénie, le trouble délirant, le trouble schizoaffectif et les troubles de personnalité • en 3e intention (< 50 % dans la zone 4-9, < 20 % dans la zone 0) : dans le trouble bipolaire Ils sont contre-indiqués (> 50 % dans la zone 0) : dans le trouble dépressif récurrent, les addictions (autres que l’alcoolo-dépendance) et les troubles du comportement sur trouble mentaux organiques. • Antipsychotiques d’Action Prolongée Ils sont recommandés : • en 1re intention (> 50 % dans la zone 7-9) : dans la schizophrénie, le trouble délirant et le trouble schizoaffectif ; • en 2e intention (> 50 % dans la zone 4-9) : dans le trouble bipolaire et les troubles de personnalité. NAP APAP Troubles de personnalité (paranoïaque, borderline, antisociale, schizotupique...) (N = 42) 14,6 % 43,6 % 51,3 % 38,5 % 54,8 % 54,8 % [7 à 9] [1 à 3] 38,1 % [0] 50 % 37,9 % 34,5 % 61,9 % 54,8 % 85,7 % 46,3 % 30,8 % 23,1 % [4 à 6] 27,6 % 24,1 % 46,3 % Troubles du comportement sur 12,8 % NAP troubles mentaux organiques 2,6 % 20,5 % (démenche Alzheimer, vasculaire...) APAP (N = 39) 0% 5,1 % 2,6 % 7,7 % 2,6 % 12,8 % 3,4 % 10,3 % 11,9 % 7,1 % 2,4 % 14,3 % 69,0 % 69,0 % 35,9 % NAP APAP Autres addictions (N = 39) 4,8 % 26,2 % 38,1 % 45,2 % 47,6 % 12,8 % NAP APAP Alcoolodépendance (N = 39) NAP APAP NAP APAP Trouble dépressif récurrent (N = 41) Paraphilies (N = 29) NAP APAP NAP APAP NAP APAP NAP APAP Trouble bipolaire (N = 42) Trouble schizo-affectif (N = 42) Trouble délirant (N = 42) schizophrémie (N = 42) DM 40,5 % 40,5 % 53,7 % 36,6 % 56,4 % 53,8 % 48,7 % 38,5 % 43,6 % 19,0 % 23,8 % 21,4 % 43,6 % 27,6 % 27,6 % 11,9 % 11,9 % 100 % 2,4 % 2,4 % 2,4 % 11,9 % 19,0 % 16,7 % 26,0 % 26,2 % 11,9 % 14,3 % 202 L. Samalin, et al. Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN 203 Ils sont contre-indiqués (> 50 % dans la zone 0) : dans les troubles du comportement sur trouble mentaux organiques. [5] Annexe 3 : Liste des experts psychiatres [6] ALAMOME Isabelle ATTAL Jérôme BARTOLI Jean-Luc BEAUFILS Béatrice BELZEAUX Raoul BILLARD Stéphane BOTTAÏ Thierry CANCEIL Olivier CAPDEVIELLE Delphine CHARLES Eric CHÉREAU-BOUDET Isabelle COUSIN François-Régis De BEAUREPAIRE Renaud DELAMILLIEURE Pascal DELAUNAY Vincent DUFUMIER Emmanuel FREMONT Patrick GIORDANA Bruno GIORDANA Jean-Yves GIRAUD-BARO Elizabeth GUILLAUME Agnès HODE Yann LACAMBRE Mathieu LOMBERTIE Emile-Roger MARON Michel MEARY Alexandre MISDRAHI David MONIE Jacques MURRY Pierre NOURRY Patrick NUBUKPO Philippe PAULET Catherine PETIT Marion PICARD Valérie PRETERRE Philippe PROSPERI Antoine SAUTEREAU Marie TALEB Mohammed TRYSTRAM VACHERON Marie Noëlle VIALA Annie VILAIN Jeanne ZIMMERMANN Marie-Agathe Références [1] [2] [3] [4] Velligan DI, Weiden PJ, Sajatovic M, Scott J, Carpenter D, Ross R, et al. 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