prescription des neuroleptiques et antipsychotiques

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L’Encéphale (2014) 39, 189-203
Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com
journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN :
prescription des neuroleptiques et antipsychotiques
d’action prolongée
Fench Society for Biological Psychiatry and
Neuropsychopharmacology task force: Formal Consensus
for the prescription of depot antipsychotics
L. Samalina,*, M. Abbarb, P. Courtetc, S. Guillaumec, S. Lancrenond, P.-M. Llorcaa
aCHU
Clermont-Ferrand, EA U7280, Université d’Auvergne, Clermont-Ferrand, France
Caremeau, Nîmes, France
cCHRU Montpellier, INSERM U1061, Université de Montpellier, Montpellier, France
dSylia-Stat, Bourg-la-Reine, France
bCHU
MOTS CLÉS
Recommandations
professionnelles ;
Antipsychotiques à
action prolongée ;
Schizophrénie ;
Trouble bipolaire
Résumé
Introduction.– En pratique clinique, l’utilisation des formes à action prolongée des
neuroleptiques et des antipsychotiques de seconde génération, reste faible malgré
leur intérêt dans les stratégies de prévention de la rechute dans la schizophrénie
ou dans le trouble bipolaire. L’Association Française de Psychiatrie Biologique et
Neuropsychopharmacologie a élaboré des Recommandations, dont l’objet est l’emploi
de ces formes galéniques spécifiques. Le but de ce travail est de faciliter l’utilisation des
antipsychotiques d’action prolongée en pratique clinique.
Méthodes.– La méthodologie employée est celle dite des « Recommandations Formalisées
d’Experts », basée sur les données de la littérature et le consensus formalisé d’un panel
d’experts.
Résultats.– Les antipsychotiques d’action prolongée sont recommandés chez les
patients souffrant de schizophrénie, d’un trouble schizo-affectif, d’un trouble délirant
ou d’un trouble bipolaire. Les formulations d’action prolongée des antipsychotiques
de seconde génération sont préconisées comme traitement de maintenance dès le
premier épisode d’une schizophrénie et en deuxième ligne comme traitement de
maintenance dans le trouble bipolaire. L’emploi des neuroleptiques à action prolongée
n’est pas recommandé dans la phase précoce du trouble schizophrénique et dans le
trouble bipolaire.
Auteur correspondant : Dr Ludovic Samalin, Psychiatrie Adulte B, CHU de Clermont-Ferrand, BP 69, 63003 Clermont-Ferrand cedex 1, France
Tél. +33 47 375 2124 ; Fax. +33 47 375 2126 ; Adresse e-mail : [email protected] (L. Samalin).
© L’Encéphale, Paris, 2014. Tous droits réservés.
190
L. Samalin, et al.
Pour le panel d’experts, les antipsychotiques à action prolongée ne doivent pas
être réservés aux patients non observant ou ayant des rechutes fréquentes, mais
doivent être systématiquement proposés chez tous les patients nécessitant un
traitement antipsychotique au long cours. Des stratégies d’utilisation spécifiques lors
d’une instauration d’une formulation à action prolongée ou lors d’un changement
d’antipsychotique sont proposées. Des préconisations sont faites pour le traitement de
certains groupes (femmes enceintes, sujets âgés, sujets en situation de précarité ou en
détention).
Conclusion.– La place des antipsychotiques à action prolongée évolue vers une utilisation
plus systématique et en première intention, pour les patients nécessitant un traitement
antipsychotique de maintenance dans une démarche de décision médicale partagée.
© L’Encéphale, Paris, 2014. Tous droits réservés.
KEYWORDS
Guidelines;
Long-acting
injectable;
Depot formulation;
Antipsychotic;
Schizophrenia;
Bipolar disorder
Summary
Background.– Compliance is often partial with oral antipsychotics and underestimated
for patients with serious mental illness. Despite their demonstrated advantages in terms
of relapse prevention, depot formulations are still poorly used in routine. As part of a
process to improve the quality of care, French Association for Biological Psychiatry and
Neuropsychopharmacology (AFPBN) Task Force elaborated a Formal Consensus for the
prescription of depot antipsychotics in clinical practice.
Methods.– The Task Force recommends as first-line choice, the use of long-acting injectable
(LAI) second-generation antipsychotics in patients with schizophrenia, schizoaffective
disorder and delusional disorder. They can be considered as a second-line option as a
monotherapy to prevent manic recurrence or in combination with mood stabilizer to
prevent depressive recurrence in the maintenance treatment of bipolar disorder. LAI
second-generation antipsychotics can also be used after a first episode of schizophrenia.
Depot neuroleptics are not recommended during the early course of schizophrenia and
are not appropriate in bipolar disorder. They are considered as a second-line option for
maintenance treatment in schizophrenia.
Results.– LAI formulations should be systematically proposed to any patients for whom
maintenance antipsychotic treatment is indicated. LAI antipsychotics can be used
preferentially for non-compliant patients with frequent relapses or aggressive behaviors.
Conclusion.– A specific information concerning the advantages and inconveniences of
the LAI formulations, in the framework of shared-decision making must be delivered
to each patient. Recommendations for switching from one oral/LAI form to another
LAI and for using LAI antipsychotics in specific populations (pregnant women, elderly
patients, subjects in a precarious situation, and subjects having to be treated in a prison
establishment) are also proposed.
© L’Encéphale, Paris, 2014. All rights reserved.
1. Introduction
La schizophrénie, le trouble bipolaire ainsi que d’autres
troubles mentaux (trouble délirant, trouble schizo-affectif…) sont des pathologies chroniques pour lesquelles il
existe un risque de rechute élevé associé à des conséquences fonctionnelles majeures. La stratégie pharmacologique constitue la pierre angulaire de la prise en charge
de ces patients. L’observance est souvent médiocre avec
des conséquences délétères [1]. La majorité des patients
souffrant de schizophrénie (84 %) arrête leur traitement
antipsychotique durant la période de suivi (33 mois) [2].
La non-observance du traitement antipsychotique pour
ces patients constitue la cause principale de rechute
précoce [3].
Les formes injectables d’action prolongée des antipsychotiques font partie de la pharmacopée depuis plus
de 40 ans. Les différentes méta-analyses soulignent leur
intérêt comme stratégie de prévention de la rechute dans la
schizophrénie [4-6]. La plupart des recommandations professionnelles préconisent ces formulations dans les populations
de patients peu observant et certaines recommandent les
antipsychotiques d’action prolongée comme traitement de
maintenance dans la schizophrénie [7].
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN
Néanmoins, l’utilisation des antipsychotiques d’action
prolongée reste faible en pratique clinique avec un taux
de prescription n’excédant pas 25 % dans les différents
pays d’Europe [8,9]. Les taux de prescription sont parmi
les plus élevés en France (23,5 %) [10], en Grande Bretagne
(29 %) et à Hongkong (37 %) [8] comparativement aux
autres pays. Plusieurs facteurs explicatifs ont été identifiés auprès des psychiatres tel qu’une surestimation du
niveau d’observance des patients, le refus du patient, un
sentiment de coercition ou les risques d’une moins bonne
tolérance [9,11].
L’objectif de cette recommandation professionnelle
est de proposer un cadre de prescription au praticien lors
de l’utilisation d’une forme galénique spécifique des antipsychotiques (forme injectable d’action prolongée) dans
diverses indications thérapeutiques et des situations cliniques spécifiques. Le but étant de permettre aux cliniciens
de proposer aux patients les stratégies pharmacologiques les
plus appropriées et de faciliter l’utilisation des antipsychotiques d’action prolongée en pratique clinique.
Les recommandations proposées sont élaborées à partir
d’une méthodologie par Recommandation Formalisée d’Experts basée sur les données disponibles dans la littérature et
le consensus formalisé d’un panel d’experts [12,13].
2. Matériels et méthodes
191
Ces données ont été discutées et gradées par niveaux
de preuve à partir des critères définis par la Haute Autorité
de Santé [14].
Après cette première étape, le comité scientifique (PML,
LS, MA, PC, SG, SL), a élaboré, un questionnaire constitué
de 32 questions qui recouvre 539 options thérapeutiques.
Les 32 questions ont été regroupées en 3 domaines jugés
comme primordiaux :
• population-cible : qui permet de décrire les différentes
indications de ces formes galéniques mais aussi la période
la plus appropriée d’instauration au cours de la maladie ;
• modalités de prescription et d’utilisation : qui aborde
le choix de la molécule, les modalités d’instauration, les
stratégies spécifiques en fonction du trouble psychiatrique
ou des comorbidités et la surveillance du traitement ;
• populations spécifiques : qui aborde l’emploi de ces
formes galéniques chez la femme enceinte, les sujets
âgés, les sujets en situation de précarité, les sujets devant
être traités dans le cadre d’un établissement carcéral.
Ce questionnaire devait être rempli par un panel d’experts. Sa passation était estimée à environ 3 heures.
Lors de l’élaboration, toutes les molécules à action
prolongée disponibles en France ont été proposées. Elles
ont été regroupées en 2 catégories :
• neuroleptiques d’action prolongée (NAP) ;
• antipsychotiques atypiques d’action prolongée (APAP).
2.1. Élaboration du questionnaire
2.2. L’échelle de cotation
Dans un premier temps, nous avons réalisé une analyse et
une synthèse de la littérature concernant les indications
et les modalités d’utilisation des antipsychotiques à action
prolongée. Cette recherche a utilisé les mots clefs suivants :
« antipsychotic », « neuroleptic », « first-generation antipsychotic », « atypical antipsychotic », « second-generation
antipsychotic », « long-acting injectable », « depot » à partir
des bases de données PubMed et EMBASE afin d’identifier
tous les travaux d’intérêt publiés.
L’expert pouvait exprimer son niveau d’accord et de désaccord pour chacune des questions. Les règles qui définissent
d’une part l’accord (ou le désaccord), et d’autre part le degré
de convergence des avis des experts ont été prédéfinies.
Chaque expert répond à chaque question à l’aide d’une
échelle graduée de 0 à 9 (0 signifie l’existence « d’un
désaccord complet » ou « d’une contre-indication formelle »
et 9 celle « d’un accord complet » ou « d’une indication
formelle ») (Figure 1).
0
123
456
789
3e intention
2e intention
1re intention
Désaccord complet
Interprétation
9
7-8
4-5-6
Contre-indication
Extrêmement approprié : stratégie thérapeutique de choix
Habituellement appropriée : stratégie thérapeutique 1re intention utilsée fréquemment
Stratégie thérapeutique de 2e intention, que vous utilisez quelquefois (préférence du patient ou de la famille ;
traitement de 1re intention inefficace ou ne convient pas
1-2-3 Habituellement peu ou inapproprié : stratégie thérapeutique rarement utilisée
0
Totalement inpproprié : stratégie thérapeutique jamais utilisée, à éviter
Figure 1. L’échelle de cotation
Indication formelle
Accord complet
192
L. Samalin, et al.
Cette échelle est issue d’une variante de la méthode
« Groupe Nominal », développée par la Rand Corporation
et l’Université de Californie aux USA (« RAND/UCLA
appropriateness rating method »). Elle a l’avantage d’être
bien codifiée, d’être utilisée en médecine et d’avoir été
publiée [12,15,16].
•
la zone de seconde intention était retenue si moins de
50 % des experts étaient dans la zone [7 à 9] et au moins
50 % des experts dans les zones cumulées [7 à 9] et [4
à 6] ;
• la zone de troisième intention était retenue si moins de
50 % des experts étaient dans les zones cumulées [7 à 9]
et [4 à 6] et moins de 20 % dans la zone 0 ;
• la zone de « contre-indication » ou de désaccord était
retenue si au moins 50 % des experts ayant répondu à
au moins une question du paragraphe étaient dans la
zone 0.
Dans tous les autres cas, la question était considérée
comme non consensuelle.
Le tableau 1 résume le processus d’analyse des données.
Un exemple est donné dans l’Annexe 2.
Les résultats ont été interprétés par le Comité Scientifique
et ont permis l’élaboration des recommandations. Celles-ci
ont été validées par un Comité Scientifique Indépendant (EH,
CL, PT) (Annexe 1). Le document final a été rédigé par deux
membres du Comité Scientifique (LS, PML).
2.3. Sélection des experts
Le Comité scientifique (Annexe 1) a sélectionné 53 experts
français de l’utilisation des antipsychotiques à action
prolongée.
Les critères de sélection étaient :
• exercice d’une activité clinique dans le domaine de la
schizophrénie ou du trouble bipolaire ;
• publication ou communication de travaux de recherche
dans des congrès nationaux ou internationaux sur le
thème des neuroleptiques d’action prolongée ou des
antipsychotiques à action prolongée.
Chaque expert a été consulté individuellement pour
fournir son expertise à partir du questionnaire fourni. Un
suivi a été mis en place pour assurer, notamment, l’envoi et
le retour des documents et le respect des délais. Un rappel
de la mission des experts a été effectué. L’engagement
écrit de chacun des experts a été demandé. Les experts
participant à ce projet n’étaient pas rémunérés.
3. Résultats
Cette partie résume les principales recommandations.
L’ensemble des données est disponible sur le site de
l’Association Française de Psychiatrie Biologique et
Neuropsychopharmacologie (http// : www.afpb.org).
2.4. Analyse des données
3.1. Description de la population des experts
Les réponses à chaque question ou proposition ont été analysées en tenant compte dans un premier temps de l’analyse
descriptive (médiane, moyenne et écart-type, minimum,
maximum et effectif pour chacune des modalités de 0 à 9) :
• la zone de première intention était retenue si au moins
50 % des experts ayant répondu à la question étaient
dans la zone [7 à 9]. Dans cette zone, le traitement de
choix était retenu si au moins 50 % des experts avaient
coté 9 ;
Le nombre total d’experts ayant complété le questionnaire
est de 42 (Annexe 3), soit 79 % des experts contactés.
Les motifs de non-participation des 11 experts étaient
un travail d’expertise trop important ou des disponibilités
insuffisantes pour répondre dans les délais impartis.
Les données sociodémographiques et d’activités professionnelles du panel d’experts sont présentées dans le
Tableau 2.
Tableau 1. Analyse des données.
Pourcentages de réponses dans les zones…
[0]
[1-3]
[4-6]
[7-9]
< 20 %
–
< 50 %
≥ 50 %
< 20 %
< 50 %
≥ 50 % et < 100 %
● 2e intention
< 20 %
–
< 50 %
● 3e intention
≥ 50 %
–
–
Pour toutes les cases (-), la question était considérée comme non consensuelle.
–
● 1re intention
● Contre-indication
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN
193
Tableau 2. Données sociodémographiques et d’activités professionnelles du panel d’experts (N = 42).
Âge (années)
Années d’exercice (années)
Prise en charge de patients ambulatoire (%)
Prise en charge de patients en milieu hospitalier (%)
Au cours des 5 dernières années, dans le domaine des NAP/
APAP
Communications
3.2. Population cible
3.2.1. Indications (Tableau 3)
L’emploi des APAP est recommandé en 1re intention (avant
celui des NAP) dans :
• la schizophrénie ;
• le trouble délirant ;
• le trouble schizo-affectif.
•
•
Pour le trouble bipolaire :
les APAP ne sont recommandés qu’en 2e intention après
les stratégies pharmacologiques habituelles [15] ;
les NAP ne sont pas recommandés.
N
42
Moyenne ± ET
46,81 ± 9,82
Min ; Max
31 ; 63
Médiane
46
N
41
Moyenne ± ET
17,29 ± 10,20
Min ; Max
2 ; 37
Médiane
16
N
41
Moyenne ± ET
68,90 ± 22,43
Min ; Max
25 ; 100
Médiane
75
N
41
Moyenne ± ET
31,10 ± 22,43
Min ; Max
0 ; 75
Médiane
25
N
42
Activité clinique
42 (100,0 %)
Projets de recherche
18 (42,9 %)
Publications
12 (28,6 %)
N
36
Conférences
22 (61,1 %)
Congrès
Enseignement
24 (66,7 %)
22 (61,1 %)
Tableau 3. Indications d’un NAP ou APAP selon les critères
du DSM-IV-TR.
NAP
APAP
1re intention
– Schizophrénie
– Trouble délirant
– Trouble schizoaffectif
2e intention
– Schizophrénie
– Trouble délirant
– Trouble schizoaffectif
– Trouble de personnalité
– Trouble bipolaire
– Trouble de personnalité
194
L. Samalin, et al.
Dans les troubles de personnalité, APAP et NAP ne sont
recommandés qu’en 2e intention après les stratégies pharmacologiques habituelles [17].
Dans le trouble dépressif récurrent, l’utilisation d’un
NAP (même en association) est à éviter.
Les troubles du comportement sur troubles mentaux
organiques (démence Alzheimer, vasculaire…) sont des
contre-indications à l’utilisation d’un NAP ou APAP.
3.2.2. Période la plus appropriée d’instauration
au cours de la maladie (Tableau 4)
Seuls les APAP sont considérés comme une option
thérapeutique lors de la phase initiale de la maladie
schizophrénique :
•
•
ils sont recommandés dès le 1er épisode psychotique ;
il est préconisé d’instaurer dès la 1re récurrence d’épisode psychotique un APAP (si le patient n’était pas traité
par une formulation retard).
Les NAP ne sont pas recommandés dans la phase initiale
du trouble schizophrénique (patient ayant été nouvellement diagnostiqué, patient naïf de traitement antipsychotique…). Ils doivent être utilisés comme traitement
de maintenance, lors de l’évolution au long cours de la
maladie en cas d’efficacité de la forme orale et lorsque le
rapport bénéfice/risque est considéré comme satisfaisant.
3.2.3. Critères de choix d’un NAP ou d’un APAP
en fonction des caractéristiques cliniques
des patients (tableau 5)
Tableau 4. Période d’instauration d’un NAP ou APAP.
NAP
APAP
Schizophrénie
Les NAP ne sont pas recommandés dans la phase
débutante du trouble.
Les NAP peuvent être employés lors du traitement de
maintenance en cas d’efficacité de la forme orale et
lorsque le rapport bénéfice/risque est considéré comme
satisfaisant
Il est recommandé d’instaurer très précocement
(dès le 1er épisode psychotique) un APAP.
Il est préconisé d’instaurer dès la 1re récurrence
d’épisode psychotique un APAP (si le patient n’était pas
traité par une formulation retard).
Trouble bipolaire
Les NAP ne sont pas recommandés.
Les APAP ne sont pas recommandés dans la phase
débutante du trouble bipolaire.
Tableau 5. Indications d’un NAP ou APAP en fonction des caractéristiques cliniques du trouble.
2e intention
NAP
ou APAP
– Rechute fréquente
– Mauvaise observance, non
acceptation du traitement
– Dangerosité connue
– Faible niveau d’insight
– Souhait du patient, ATCD de
NAP/APAP efficace
APAP
– Troubles cognitifs impactant
– Isolement socio familial
– SSC ambulatoire
NAP
ou APAP
– Symptomatologie positive
APAP
– Symptomatologie négative
– Suicidalité
1re intention
Trouble bipolaire
Schizophrénie
1re intention
2e intention
APAP
– Mauvaise observance,
non acceptation du
traitement
– Souhait du patient,
ATCD de NAP/APAP
efficace
– TB I, polarité
maniaque, cycle rapide
– Dangerosité connue
– Faible niveau d’insight
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN
3.2.3.1. Schizophrénie
Les critères de choix préférentiels d’une formulation à action
prolongée (traitement de 1re intention) chez les patients
souffrant d’une schizophrénie sont :
– Patients présentant des rechutes fréquentes, une
mauvaise observance ou une non-acceptation d’un
traitement au long cours
Les NAP ou APAP sont préconisés en traitement de
1re intention. En cas de mauvaise observance, les APAP
sont considérés comme le traitement de choix.
– Patients présentant une dangerosité connue
Les NAP et APAP sont recommandés en traitement de
1re intention.
– Patients présentant un faible niveau de conscience
du trouble et de la nécessité d’un traitement
Les NAP et APAP sont recommandés en 1re intention.
– Patients souhaitant un traitement par un NAP ou un
APAP et/ou ayant une histoire de traitement efficace
par NAP ou APAP
Les NAP ou APAP sont recommandés en traitement de
1re intention.
– Patients présentant des troubles cognitifs ayant un
retentissement sur les capacités de gestion de la vie
quotidienne
Les APAP sont préconisés en traitement de 1re intention.
Les NAP ne sont pas recommandés.
– Patients isolés sur le plan socio-familial
Il est recommandé de proposer un APAP en traitement
de 1re ligne (NAP en 2e ligne) chez les patients ayant un
faible support social et familial.
– Patients recevant des soins sans consentement en
ambulatoire
Lorsqu’un programme de soins ambulatoire est
envisagé, il est préconisé de proposer un APAP en
thérapeutique de 1re intention. Les NAP peuvent être
proposés en 2 e intention.
Les groupes suivants n’ont pas fait l’objet d’un consensus
favorable entre les experts pour l’utilisation préférentielle
(traitement de 1re intention) d’une forme galénique à action
prolongée. Cependant, ils ont précisé le type d’antipsychotique à action prolongée (NAP ou APAP) à préconiser pour
chacun de ces groupes.
– Patients présentant une dimension clinique
prédominante
La prédominance d’une symptomatologie positive ou
négative n’est pas un facteur de choix spécifique pour
l’utilisation d’une formulation retard.
195
Si le choix d’une formulation retard est fait :
* les APAP et les NAP peuvent être proposés pour les
formes cliniques où prédomine la symptomatologie
positive (2e intention).
* seuls les APAP peuvent être proposés en cas
de symptomatologie négative prédominante
(2e intention).
– Patients présentant un niveau élevé
d’intentionnalité suicidaire
Seuls les APAP peuvent être envisagés (en 2e intention)
pour les patients présentant des conduites suicidaires
lors des épisodes aigus.
– Patients présentant un niveau élevé de conscience
du trouble
Un niveau de conscience du trouble élevé peut
être une indication à la proposition d’un APAP en
2e intention. Les NAP ne sont pas recommandés.
3.2.3.2. Trouble bipolaire
Les APAP sont proposés comme traitement de 2e intention
chez les patients souffrant d’un trouble bipolaire.
Ils sont proposés de façon spécifique chez des patients
présentant les caractéristiques suivantes :
– Patients présentant une mauvaise observance, avec
une non-acceptation d’un traitement au long cours
Les APAP peuvent être proposés comme une thérapeutique
de 1re intention (en monothérapie ou association).
– Patients souhaitant un traitement par un APAP et/
ou ayant une histoire de traitement efficace par
APAP sur la symptomatologie du trouble bipolaire
Remarque : du fait d’autres classes médicamenteuses
disponibles dans le trouble bipolaire (lithium et
anticonvulsivants) nous retrouvons un niveau de
consensus moins élevé que celui observé chez les
patients souffrant de schizophrénie.
Quelle que soit la situation clinique, les NAP ne sont
jamais recommandés dans le traitement de maintenance
du trouble bipolaire.
Les groupes suivants n’ont pas fait l’objet d’un consensus
favorable entre les experts pour l’utilisation préférentielle
(traitement de 1re intention) d’une forme galénique à action
prolongée. Cependant, ils ont précisé le type d’antipsychotique à action prolongée (NAP ou APAP) à préconiser pour
chacun de ces groupes.
196
L. Samalin, et al.
– Patient présentant des caractéristiques cliniques
particulières
Avec les molécules actuellement disponibles en France,
les APAP sont préconisés (en traitement de 2e intention)
chez les patients présentant un trouble bipolaire de
type I et/ou une polarité maniaque prédominante et/
ou à cycle rapide.
– Patients présentant une dangerosité avérée ou des
antécédents de conduites impulsives
Ces patients peuvent bénéficier d’un APAP en
traitement de 2e intention.
– Patients présentant un faible niveau de conscience
de la nécessité d’un traitement
Les APAP sont préconisés en 2e intention
Tableau 6. Balance bénéfice/risque des NAP et APAP dans
le trouble schizophrénique.
Prévention des récidives
psychotiques
1re intention
Risperidone à action prolongée
2e intention
Olanzapine pamoate
3.2.4. Balance bénéfice/risque des NAP et APAP
en fonction du trouble psychiatrique
3.2.4.1. Chez un patient souffrant d’une
schizophrénie
L’évaluation du bénéfice/risque pour chacune des formulations à action prolongée dans le traitement préventif des
récidives psychotiques est présentée dans le Tableau 6.
La gradation des molécules apparait directement liée au
niveau de tolérance de chaque APAP ou NAP.
Les APAP sont recommandés en 1re ligne sauf l’olanzapine
pamoate du fait du risque de syndrome post-injection.
3.2.4.2. Chez un patient souffrant d’un trouble
bipolaire
Seuls 2 APAP sont recommandés 2e intention : rispéridone à
action prolongée et olanzapine pamoate (Tableau 7).
Les NAP sont contre-indiqués dans le traitement au long
cours du trouble bipolaire.
Haloperidol decanoate
Zuclopenthixol decanoate
3.3. Modalités de prescription et d’utilisation
Flupentixol decanoate
Fluphenazine decanoate
3.3.1. Chez un patient stabilisé par un traitement
antipsychotique
Pipotiazine palmitate
Tableau 7. Balance bénéfice/risque des NAP et APAP
dans le trouble bipolaire.
Prévention
des récidives
maniaques
Prévention
des récidives
dépressives
1re intention
–
–
2e intention
En monothérapie
ou association
avec un SH
Toujours en
association avec
un SH
Risperidone à
action prolongée
Olanzapine
pamoate
Risperidone à
action prolongée
Olanzapine
pamoate
3.3.1.1. Passage d’un antipsychotique
(neuroleptique ou antipsychotique de seconde
génération) sous forme orale à une forme à action
prolongée
Débuter de préférence par la forme orale de
l’antipsychotique à action prolongée, pendant la durée
nécessaire à l’obtention d’une posologie efficace et bien
tolérée avant de passer à la forme à action prolongée.
Cependant, seule la rispéridone microsphère possède
des caractéristiques pharmacocinétiques nécessitant de
façon impérative une supplémentation orale initiale.
La prescription d’APAP doit se faire en prenant en
compte les caractéristiques pharmacocinétiques de
chaque produit.
La posologie de la forme à action prolongée instaurée
correspondra à un équivalent de la posologie utilisée
par voie orale (données de l’enregistrement du
produit).
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN
3.3.1.2. Passage d’un antipsychotique
(neuroleptique ou antipsychotique de seconde
génération) à action prolongée à une autre
molécule à action prolongée
L’instauration de la molécule à action prolongée se
fera après arrêt du NAP ou de l’APAP en cours (lorsque
le délai écoulé avec la dernière injection correspond à
l’intervalle entre 2 injections).
En 2e intention, l’instauration d’un APAP en relais au
NAP ou APAP en cours peut être envisagée directement
après avoir utilisé une dose test per os du nouvel APAP
instauré afin d’éliminer une hypersensibilité.
La posologie d’instauration de la forme per os ou du
nouvel APAP envisagé correspondra (si possible) à un
équivalent posologique du précédent NAP ou APAP.
3.3.2. Modalités pratique d’instauration
et de rappel des injections
Afin d’aider à l’acceptation et à la compréhension des
bénéfices d’un traitement à action prolongée, il est
recommandé à l’unanimité des experts de communiquer
au patient les informations spécifiques concernant les
avantages et inconvénients du NAP ou APAP envisagé
dans le cadre d’une décision médicale partagée.
Il est recommandé lors de l’instauration du
traitement de mettre en place la forme à action
prolongée avant la fin d’une hospitalisation temps
plein pour l’épisode aigu. L’instauration peut
également être envisagée lors d’une prise en charge
ambulatoire.
La réalisation des injections lors du traitement de
maintenance dans les Centres Médico-Psychologiques
avec les consultations de suivi psychiatrique coordonnées
avec les dates d’injection est la modalité de choix. Les
injections peuvent être aussi réalisées par une infirmière
en hôpital de jour, en CATTP ou à domicile.
Remarque : ces modalités d’injections ne sont pas
applicables à l’olanzapine pamoate puisque ce
traitement nécessite une surveillance post-injection
spécifique en milieu hospitalier.
Afin d’améliorer l’observance des patients, il est
recommandé de mettre en place des techniques de
rappel. En 1re intention par rappels téléphoniques
et par l’intermédiaire d’un agenda remis au patient
(carnet de suivi). En 2e intention par courrier ou
éventuellement par SMS.
197
La prévention des complications locales nécessite de
réaliser les injections :
– en IM profonde (muscle glutéal ou deltoïde)
Les experts ne se sont pas prononcés sur la préférence
du site d’injection, dans la mesure où il dépend en
premier lieu de la préférence du patient.
– en changeant de site d’injection à chaque injection
– en proposant systématiquement un anesthésique local
transdermique (crème, patch) avant l’injection afin de
diminuer la douleur au point d’injection.
3.3.3. Stratégies thérapeutiques spécifiques
en fonction du trouble psychiatrique
ou de ses comorbidités
3.3.3.1. Schizophrénie et délire chronique
Décompensation psychotique aigüe au cours
d’un traitement par NAP ou APAP
À la phase aiguë
Plusieurs adaptations thérapeutiques sont préconisées
en 1re intention :
– Optimiser le traitement par NAP ou APAP en cours :
* soit par optimisation posologique du NAP ou APAP en
cours : augmentation de la posologie, sous contrôle
de la tolérance
* soit pour les NAP : réduction de la durée entre 2
injections
– Associer au NAP ou APAP en cours un antipsychotique
per os
L’arrêt du NAP ou APAP en cours suivi du passage à un
antipsychotique per os n’est recommandé qu’en tant que
stratégie thérapeutique de 2e intention à la phase aiguë.
Après stabilisation de l’épisode psychotique
Il est recommandé de poursuivre au long cours le
traitement ayant permis la réduction des symptômes et
la stabilisation de l’état clinique.
En cas de passage à un traitement antipsychotique per
os lors de la phase aiguë, il est préconisé au long cours
de proposer un relais vers une formulation à action
prolongée.
En cas d’association d’un antipsychotique per os à
un NAP ou APAP à la phase aiguë, il est recommandé,
si cela est possible, d’optimiser la posologie de
la formulation à action prolongée et d’arrêter
progressivement l’antipsychotique par voie orale sous
contrôle de l’état clinique.
198
Symptomatologie résiduelle sous NAP ou APAP justifiant
une réévaluation thérapeutique
Il est préconisé successivement :
– en 1re intention : d’optimiser le traitement par NAP
ou APAP :
* soit par optimisation posologique du NAP ou APAP en
cours : augmentation de la posologie, sous contrôle
de la tolérance observée
* soit pour les NAP : réduction de la durée entre 2
injections
– en 2e intention :
* soit d’associer au NAP ou APAP en cours un
antipsychotique per os
* soit de changer le NAP ou APAP en cours pour une
autre formulation à action prolongée (de préférence
un APAP)
3.3.3.2. Trouble bipolaire
Épisode maniaque sous APAP
À la phase aiguë
Si monothérapie en cours, il est préconisé
successivement :
– en 1re intention : d’associer à l’APAP en cours un
Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque per os (sans
recommandation de molécule particulière)
– en 2e intention :
* soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours :
augmentation de la posologie, sous contrôle de la
tolérance observée
* soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à une
monothérapie de Stabilisateur de l’Humeur ayant un
effet antimaniaque per os (sans recommandation de
molécule particulière)
Si bithérapie en cours (APAP + Li ou AC), il est
recommandé successivement :
– en 1re intention : d’optimiser la posologie du
Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque per os
– en 2e intention, plusieurs stratégies sont préconisées :
* soit d’associer à l’APAP en cours un autre
Stabilisateur de l’Humeur antimaniaque
per os (sans recommandation de molécule
particulière)
* soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours :
augmentation de la posologie, sous contrôle de la
tolérance observée
* soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à
une bithérapie de Stabilisateurs de l’Humeur
antimaniaques per os (sans recommandation de
molécules particulières)
* soit de poursuivre le traitement en cours
et d’associer un 2e Stabilisateur de l’Humeur
antimaniaque per os (sans recommandation de
molécule particulière) ou de réaliser une série
d’ECT
L. Samalin, et al.
Après guérison de l’épisode maniaque
Il est recommandé de poursuivre au long cours le
traitement ayant permis la réduction des symptômes et la
stabilisation de l’état clinique (pas de précision de durée).
Épisode dépressif bipolaire
À la phase aiguë
Si monothérapie en cours, il est préconisé
successivement :
– en 1re intention : d’associer à l’APAP en cours un
Stabilisateur de l’Humeur ayant un effet antidépresseur
per os (ex : lamotrigine, quétiapine, lithium)
– en 2e intention :
* soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours :
augmentation de la posologie, sous contrôle de la
tolérance observée
* soit d’associer à l’APAP en cours un antidépresseur
per os ou une série d’ECT
* soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à une
monothérapie de Stabilisateur de l’Humeur ayant un
effet antidépresseur per os
Si bithérapie en cours (APAP + AD), il est recommandé
successivement :
– en 1re intention :
* soit d’optimiser la posologie de l’antidépresseur
per os en cours : augmentation de la posologie, sous
contrôle de la tolérance observée
* soit de poursuivre l’association APAP
+ antidépresseur et d’associer un Stabilisateur de
l’Humeur ayant un effet antidépresseur per os (ex :
lamotrigine, quétiapine, lithium)
– en 2e intention, plusieurs stratégies sont préconisées :
* soit d’associer à l’APAP en cours un autre
antidépresseur per os
* soit d’optimiser la posologie de l’APAP en cours :
augmentation de la posologie, sous contrôle de la
tolérance observée
* soit d’arrêter l’APAP en cours et de passer à
une bithérapie de Stabilisateur de l’Humeur
+ antidépresseur per os
* soit de poursuivre le traitement en cours et de
réaliser une série d’ECT
Après guérison de l’épisode dépressif
Il est recommandé de poursuivre au long cours le
traitement ayant permis la réduction des symptômes et la
stabilisation de l’état clinique (pas de précision de durée).
En 2e intention, en cas d’association d’un AD per os à
un APAP à la phase aiguë, il est recommandé, si cela
est possible, d’optimiser la posologie de l’APAP et
d’arrêter progressivement l’AD per os en fonction de
l’état clinique du patient.
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFBN
3.3.3.3. Comorbidités psychiatriques associées
à un trouble schizophrénique ou bipolaire
sous NAP ou APAP
Manifestations anxieuses (symptômes anxieux ou
troubles anxieux)
Il est recommandé en 1re intention d’associer une
benzodiazépine per os, en 2e intention d’associer
un antidépresseur (inhibiteur de la Recapture de
la Sérotonine ou Inhibiteur de la Recapture de la
Sérotonine et de la Noradrénaline de préférence).
Addiction à une substance psycho-active (alcool,
opiacés…)
Le traitement par NAP ou APAP peut être poursuivi.
La prise de substituts aux opiacés (buprénorphine
ou méthadone) ou de disulfiram, acamprosate
ou naltrexone en fonction de l’addiction, est
envisageable sous NAP ou APAP.
3.3.4. Modalités de suivi et de surveillance
3.3.4.1. Bilan pré thérapeutique NAP/APAP
Il est recommandé de rechercher systématiquement les
éléments cliniques suivants :
– Antécédents médicaux personnels et familiaux (HTA,
diabète, dyslipidémie…)
– Hygiène de vie (habitudes alimentaires, activité
physique, consommation de toxiques, tabagisme…)
– Poids, calcul de l’IMC, mesure du périmètre ombilical
– Pression Artérielle
Il est préconisé de réaliser le bilan paraclinique suivant :
en 1re intention
◦ NFS, ionogramme sanguin (+ urée, créatinémie, glycémie à jeun) ;
◦ bilan hépatique (9Gt, ASAT, ALAT) ;
◦ bilan lipidique (Triglycérides, HDL et LDL cholestérol) ;
◦ bêta-HCG ;
◦ ECG ;
• en fonction de l’état clinique du patient (2e intention) :
◦ bilan thyroïdien (TSHus) ;
◦ prolactinémie ;
◦ EEG.
L’ensemble des experts recommande d’informer le
patient et l’entourage des risques de survenue d’effets
indésirables (métaboliques, neurologiques…) ainsi que de
prodiguer des conseils hygiéno-diététiques (régime alimentaire équilibré, activité physique régulière, diminution ou
aide à l’arrêt des consommations de toxiques…).
•
3.3.4.2. Modalités de surveillance
La surveillance clinique et paraclinique d’un NAP ou APAP
est la même que pour les antipsychotiques per os.
199
La fréquence spécifique de surveillance va dépendre
des facteurs de risque retrouvés chez le patient ainsi
que des signes cliniques apparaissant pendant le traitement [18]. Sous traitement neuroleptique, il conviendra
d’être plus particulièrement attentif au risque de syndrome malin.
3.4. Populations spécifiques
3.4.1. Femme enceinte
En cas de grossesse programmée chez une femme traitée
par NAP ou APAP
L’attitude thérapeutique dans cette situation
clinique n’a pas fait l’objet d’un consensus auprès
des experts. Une majorité relative (stratégie de
2e intention) préconise l’arrêt du NAP ou APAP
en cours avec relais de la forme orale (à la dose
minimale efficace).
En cas de découverte d’une grossesse
– Au 1er/2e/3e trimestre : l’attitude thérapeutique
dans cette situation clinique n’a pas fait l’objet d’un
consensus auprès des experts. Une majorité relative
(stratégie de 2e intention) préconise la poursuite du
NAP ou APAP en cours ou le relais vers la forme orale (à
dose minimale efficace).
3.4.2. Sujet âgé
Chez un patient âgé de plus de 65 ans, l’utilisation d’un
NAP ou APAP est envisageable. Certaines précautions
lors de la prescription d’une formulation retard sont
recommandées :
– Adaptation posologique en fonction du poids, du bilan
hépatique ou rénal
– Titration plus lente que chez l’adulte avec posologie
« cible » inférieure
– Suivi médical rapproché
– Surveillance de la tolérance plus rapprochée que chez
l’adulte
– Prescription par un psychiatre uniquement
3.4.3. Sujet en situation de précarité
Chez un sujet en situation de précarité l’utilisation d’un
APAP est considérée comme une modalité préférentielle de
traitement (NAP en 2e intention).
200
3.4.4. Sujet traité dans un établissement carcéral
Chez un patient incarcéré l’utilisation d’un NAP ou APAP peut
être envisagé. Cette prescription ne diffère pas en fonction
de la durée du séjour ou du lieu d’incarcération.
Les indications psychiatriques sont les mêmes qu’en
population non carcérale, à la seule différence que les
APAP apparaissent comme le traitement de choix du trouble
schizophrénique.
La présence des caractéristiques cliniques suivantes :
agressivité, antécédents de passage à l’acte violent ou
risque d’hétéro-agressivité oriente le choix thérapeutique en faveur d’un APAP ou d’un NAP dans le trouble
schizophrénique et vers un APAP dans le trouble bipolaire
(1re intention).
Points clés
1. Les antipsychotiques injectables à action prolongée
sont indiqués chez les patients atteints de
schizophrénie, d’un trouble schizo-affectif, d’un
trouble délirant et d’un trouble bipolaire.
2. Les antipsychotiques de deuxième génération à
action prolongée (APAP) sont recommandés comme
traitement d’entretien dès le premier épisode de
schizophrénie. Les neuroleptiques à action prolongée
(NAP) ne sont pas recommandés lors de la phase
précoce de la schizophrénie et doivent être évités
dans le trouble bipolaire.
3. Les antipsychotiques injectables à action
prolongée ont longtemps été considérés comme
un traitement ne pouvant être utilisé que pour
un sous-groupe de patients non-observants,
dont les rechutes sont fréquentes ou présentant
une dangerosité éventuelle. Le panel d’experts
estime que les antipsychotiques injectables à
action prolongée doivent être envisagé et proposé
systématiquement à tous les patients pour lesquels
un traitement d’entretien antipsychotique est
indiqué.
4. Selon leur efficacité et la tolérance :
• Les APAP sont recommandés en 1re intention
et les NAP comme thérapeutique de deuxième
ligne dans le traitement d’entretien de la
schizophrénie.
• Les APAP sont recommandés en 2e intention
en monothérapie ou en association avec un
stabilisateur d’Humeur pour prévenir les récidives
L. Samalin, et al.
maniaques ou uniquement en association avec un
stabilisateur de l’humeur pour prévenir la récidive
dépressive dans le traitement d’entretien de
trouble bipolaire.
5. Afin d’améliorer l’acceptation et la compréhension
des avantages d’un antipsychotique injectable
d’action prolongée, il est recommandé de fournir à
chaque patient une information précise concernant
les avantages et les inconvénients de cette
formulation, dans le cadre d’une démarche de la
prise de décision médicale partagée.
6. Prescription d’un antipsychotiques injectables à
action prolongée. Deux situations principales sont
identifiées :
• À partir d’un antipsychotique oral :
◊ Prescrire la formulation orale de
l’antipsychotique injectable à action prolongée
afin d’établir la tolérance/efficacité
◊ Utiliser une dose initiale d’antipsychotique
injectable à action prolongée équivalente à celle
employée avec la forme orale
• À partir d’un autre antipsychotique à action
prolongée :
◊ Utiliser plusieurs doses d’essai de la formulation
orale de l’antipsychotique si le patient n’a jamais
pris ce médicament auparavant (pour écarter une
hypersensibilité)
◊ Administrer le nouvel antipsychotique d’action
prolongée à la date prévue de la prochaine
injection
◊ Utiliser une dose initiale d’antipsychotique
d’action prolongée équivalente à celle
de l’antipsychotique d’action prolongée
précédent.
7. Gestion des traitements :
• Les rappels de date d’injection doivent être utilisés
pour améliorer l’observance :
◊ 1re intention : appel téléphonique et agenda
◊ 2e intention : lettre ou un message SMS
• Coordonner les dates des consultations
médicales avec les dates prévues des injections
d’antipsychotiques
• Respecter la prévention des complications locales
lors de l’injection :
◊ administration par un professionnel formé
(infirmière, psychiatre, Médecin généraliste),
◊ Vérifier la longueur de l’aiguille pour pratiquer
une injection intra-musculaire profonde,
◊ Choisir le site d’injection selon la préférence du
patient,
◊ Changer de site d’injection à chaque injection
◊ Proposer systématiquement une anesthésie locale
pour réduire la douleur au site d’injection
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN
201
Ce travail a été réalisé avec le soutien financier indépendant de l’Association Française de Psychiatrie Biologique et
de Neuropsychopharmacologie.
Coordination
Remerciements
Comité Scientifique du projet (CS)
Professeur Pierre-Michel Llorca / Docteur Ludovic Samalin
Le comité de pilotage remercie chaleureusement :
• les Experts pour leur implication et la qualité de leur
travail
• Sylia-Stat pour la qualité de son apport méthodologique.
Liens d’intérêts
Le Dr Samalin déclare avoir participé à des réunions d’experts
pour les laboratoires Astra-Zeneca, Bristol-Myers Squibb,
Janssen, Lundbeck, Otsuka ; être impliqué dans des études
cliniques dont les promoteurs sont les laboratoires Janssen,
Lundbeck, Roche, Sunovion.
Le Dr Abbar déclare avoir participé à des réunions
d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Bristol-MyersSquibb et Eli Lilly ; être impliqué dans des études cliniques
dont les promoteurs sont les laboratoires Janssen, Lundbeck,
Otsuka et Sunovion
Le Pr Courtet déclare avoir participé à des réunions
d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Lundbeck,
Roche, Servier ; être impliqué dans des études cliniques
dont les promoteurs sont les laboratoires Bristol-Myers
Squibb, Janssen, Lundbeck ; avoir reçu des financements
de recherche, des honoraires, des financements de déplacement pour les laboratoires Astra-Zeneca, Janssen, Lundbeck,
Otsuka, Pfizer, Roche, Servier.
Le Pr Guillaume déclare avoir participé à des réunions
d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Lundbeck,
Bristol-Myers Squibb, Servier ; avoir reçu des financements
de recherche, des honoraires, des financements de déplacement pour le laboratoire Servier.
Le Pr Llorca déclare avoir participé à des réunions
d’experts pour les laboratoires Astra-Zeneca, Lundbeck,
Otsuka, Roche, Servier, Takeda ; être impliqué dans des
études cliniques dont les promoteurs sont les laboratoires
Janssen, Lundbeck, Roche, Sunovion ; Avoir reçu des financements de recherche, des honoraires, des financements
de déplacement et avoir des activités de consultant pour
les laboratoires Astra-Zeneca, Eli Lilly, Janssen, Lundbeck,
Otsuka, Roche, Sanofi, Servier, Takeda.
Annexe 1 : Encadrement scientifique
du projet
Initiation de la RFE
Association Française de Psychiatrie Biologique et Neuropsychopharmacologie
Docteur Mocrane Abbar
Professeur Philippe Courtet
Professeur Pierre-Michel Llorca
Docteur Sébastien Guillaume
Docteur Ludovic Samalin
Méthodologie du projet
Sylvie Lancrenon
Comité Scientifique Indépendant (CSI)
Professeur Emmanuel Haffen
Professeur Christophe Lançon
Professeur Pierre Thomas
Annexe 2 : Interprétation
d’une question
Parmi les troubles psychiatriques suivants quels sont ceux
qui selon vous, pourraient bénéfi cier d’un traitement
médicamenteux par NAP ou APAP (en monothérapie ou
association) ?
Interprétation
Neuroleptiques d’Action Prolongée
Ils sont recommandés :
en 2 e intention (> 50 % dans la zone 4-9) : dans la
schizophrénie, le trouble délirant, le trouble schizoaffectif et les troubles de personnalité
• en 3e intention (< 50 % dans la zone 4-9, < 20 % dans la
zone 0) : dans le trouble bipolaire
Ils sont contre-indiqués (> 50 % dans la zone 0) : dans
le trouble dépressif récurrent, les addictions (autres que
l’alcoolo-dépendance) et les troubles du comportement sur
trouble mentaux organiques.
•
Antipsychotiques d’Action Prolongée
Ils sont recommandés :
• en 1re intention (> 50 % dans la zone 7-9) : dans la schizophrénie, le trouble délirant et le trouble schizoaffectif ;
• en 2e intention (> 50 % dans la zone 4-9) : dans le trouble
bipolaire et les troubles de personnalité.
NAP
APAP
Troubles de personnalité
(paranoïaque, borderline,
antisociale, schizotupique...)
(N = 42)
14,6 %
43,6 %
51,3 %
38,5 %
54,8 %
54,8 %
[7 à 9]
[1 à 3]
38,1 %
[0]
50 %
37,9 %
34,5 %
61,9 %
54,8 %
85,7 %
46,3 %
30,8 %
23,1 %
[4 à 6]
27,6 %
24,1 %
46,3 %
Troubles du comportement sur
12,8 %
NAP
troubles mentaux organiques
2,6
% 20,5 %
(démenche Alzheimer, vasculaire...) APAP
(N = 39)
0%
5,1 %
2,6 %
7,7 %
2,6 %
12,8 %
3,4 %
10,3 %
11,9 %
7,1 %
2,4 %
14,3 %
69,0 %
69,0 %
35,9 %
NAP
APAP
Autres addictions
(N = 39)
4,8 %
26,2 %
38,1 %
45,2 %
47,6 %
12,8 %
NAP
APAP
Alcoolodépendance
(N = 39)
NAP
APAP
NAP
APAP
Trouble dépressif récurrent
(N = 41)
Paraphilies
(N = 29)
NAP
APAP
NAP
APAP
NAP
APAP
NAP
APAP
Trouble bipolaire
(N = 42)
Trouble schizo-affectif
(N = 42)
Trouble délirant
(N = 42)
schizophrémie
(N = 42)
DM
40,5 %
40,5 %
53,7 %
36,6 %
56,4 %
53,8 %
48,7 %
38,5 %
43,6 %
19,0 %
23,8 %
21,4 %
43,6 %
27,6 %
27,6 %
11,9 %
11,9 %
100 %
2,4 %
2,4 %
2,4 %
11,9 %
19,0 %
16,7 %
26,0 %
26,2 %
11,9 %
14,3 %
202
L. Samalin, et al.
Recommandations Formalisées d’Experts de l’AFPBN
203
Ils sont contre-indiqués (> 50 % dans la zone 0) : dans les
troubles du comportement sur trouble mentaux organiques.
[5]
Annexe 3 : Liste des experts psychiatres
[6]
ALAMOME Isabelle
ATTAL Jérôme
BARTOLI Jean-Luc
BEAUFILS Béatrice
BELZEAUX Raoul
BILLARD Stéphane
BOTTAÏ Thierry
CANCEIL Olivier
CAPDEVIELLE Delphine
CHARLES Eric
CHÉREAU-BOUDET Isabelle
COUSIN François-Régis
De BEAUREPAIRE Renaud
DELAMILLIEURE Pascal
DELAUNAY Vincent
DUFUMIER Emmanuel
FREMONT Patrick
GIORDANA Bruno
GIORDANA Jean-Yves
GIRAUD-BARO Elizabeth
GUILLAUME Agnès
HODE Yann
LACAMBRE Mathieu
LOMBERTIE Emile-Roger
MARON Michel
MEARY Alexandre
MISDRAHI David
MONIE Jacques
MURRY Pierre
NOURRY Patrick
NUBUKPO Philippe
PAULET Catherine
PETIT Marion
PICARD Valérie
PRETERRE Philippe
PROSPERI Antoine
SAUTEREAU Marie
TALEB Mohammed
TRYSTRAM VACHERON Marie Noëlle
VIALA Annie
VILAIN Jeanne
ZIMMERMANN Marie-Agathe
Références
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