D. Dassa, M. Lacambre, M.N VacheronS110
n’étant qu’un des piliers de la prise en charge. Ainsi, le
patient et ses proches pourront percevoir la cohérence des
options thérapeutiques. L’information est renouvelée et
enrichie tout au long de la prise en charge. En effet la
pathologie psychotique évolue au long cours, ce qui
demande souvent plusieurs années pour la compréhension
des troubles et leur acceptation par le patient et à son
entourage. Plus le déni est important, plus il faut persévé-
rer, répéter les mêmes arguments, insister sur les change-
ments bénéfi ques induits par le traitement et les autres
éléments de la prise en charge [16]. L’objectif est aussi de
développer chez le patient une attitude critique face à sa
maladie, et le prémunir de suggestions malencontreuses
inopportunes de l’entourage, telles que la prise de drogues,
l’arrêt de la thérapeutique souvent assimilée à une drogue
par les proches, le déni ou la banalisation des troubles.
L’information délivrée permet d’humaniser les soins. Elle
devient un enjeu contribuant à améliorer « l’insight », elle
aide le patient à prendre de la distance vis-à-vis de ses
troubles [5].
L’information sur le traitement
Les explications données par le psychiatre sur les thérapeu-
tiques sont essentielles et très attendues. L’information
portera sur : l’évolution du trouble en l’absence de traite-
ment, les alternatives éventuelles aux traitements médica-
menteux (psychothérapies, électroconvulsivothérapie…),
les effets recherchés sur les symptômes les plus gênants
(hallucinations, angoisse…) en s’appuyant sur la souffrance
perçue avant le traitement, et le délai d’action des théra-
peutiques. Les mécanismes d’action des médicaments sont
abordés de manière simplifi ée. Les effets indésirables
éventuels sont évoqués de façon adaptée, qu’ils soient fré-
quents ou exceptionnels, en insistant sur les effets secon-
daires qui pourraient limiter l’observance tels que la prise
de poids ou la sédation. Un patient ne pourra accepter le
traitement que s’il connaît les effets bénéfi ques de la
molécule proposée et les effets secondaires qu’il est en
mesure d’accepter. Dans tous les cas, le médecin aménage
l’information en ayant une préoccupation essentielle : l’in-
térêt de la personne soignée. Les risques liés au traitement
doivent toujours être inférieurs au bénéfi ce retiré quant à
l’évolution spontanée de la maladie. L’information sera
d’autant plus importante que le rapport bénéfi ce/risque
sera plus faible [11]. Les objectifs de la thérapeutique
seront clairement expliqués, répétés et adaptés à diffé-
rents moments du suivi du patient : reprise de l’autonomie,
maintien ou réinvestissement d’un projet social, familial
ou professionnel. Le malade bien informé comprend mieux
ses troubles et accepte plus volontiers le fait que les trai-
tements, loin de le déposséder de sa liberté et de sa per-
sonnalité, puissent au contraire lui permettre une
réappropriation de sa vie par le contrôle de sa maladie. Il
devient capable d’expliquer son état et les effets indésira-
bles éventuels de son traitement [7]. L’important est qu’il
se sente écouté par le médecin et les soignants dans son
vécu du traitement et qu’il perçoive que celui-ci est régu-
lièrement adapté et réévalué.
L’observance médicamenteuse des patients souffrant
de troubles psychotiques est problématique. Alors que les
soins psychiatriques sont devenus essentiellement extra-
hospitaliers, on ne peut plus contraindre le patient à un
traitement régulier, mais on doit l’en convaincre et recher-
cher avec lui la forme galénique la plus appropriée. Dans ce
cadre, le traitement à action prolongée est négocié avec le
patient et avec son entourage, au même titre que le traite-
ment par voie orale, dès le premier épisode [12]. L’entourage
est souvent réticent aux injections du fait d’une représen-
tation de la piqûre associée à un état grave. L’information
portant sur cette forme d’administration insiste sur les
avantages : arrêt du traitement quotidien qui rappelle la
maladie, administration facilitée du médicament au patient
qui présente des troubles cognitifs ou un déni partiel des
troubles, réduction des risques d’oubli, diminution des
effets secondaires du fait d’une diminution de la dose
totale administrée, simplifi cation du schéma thérapeuti-
que, diversifi cation des contacts avec les soignants plus
nombreux à être investis dans la prise en charge et amélio-
ration du contrôle des symptômes [10, 18]. Les effets
secondaires liés à la forme injectable sont également abor-
dés avec les patients en leur indiquant les moyens de les
éviter : douleurs, induration, abcès au site de l’injection
évités par des doses plus faibles, utilisation de crèmes
anesthésiques au site de l’injection et rappel des règles
d’hygiène inhérentes à toute pratique d’injection intra-
musculaire [8].
Les informations délivrées par le médecin de façon
spontanée, régulière, informelle et relayées par l’équipe
soignante, sont essentielles pour construire l’alliance thé-
rapeutique avec le patient. Cependant elles ne semblent
pas suffi santes pour garantir l’observance à long terme.
Quelle pédagogie mettre en œuvre alors pour faciliter la
compréhension de l’information délivrée afi n que le patient
soit plus autonome dans la gestion de son traitement et de
sa maladie ?
Place des programmes psycho-éducatifs
Dès le début des années 80, les psychiatres nord-améri-
cains se sont penchés sur la question de l’information à
délivrer au patient, du fait de l’augmentation du nombre
de procès à leur encontre et de l’obligation d’obtenir un
consentement éclairé de leur part avant toute prescrip-
tion. Un certain nombre d’études ont été alors développées
concernant l’évaluation de l’information des patients.
L’ensemble des données, bien qu’il n’existe pas de vérita-
ble méta-analyse de ces travaux parfois hétérogènes, indi-
que qu’une procédure d’information structurée des patients
peut améliorer leur observance médicamenteuse, voire
infl uencer leur symptomatologie et diminuer la fréquence
de leurs rechutes [15]. L’éducation thérapeutique peut
ainsi s’effectuer autour de programmes éducatifs stratégi-
ques intégrant des notions pharmacologiques, socio-psy-
chologiques et pédagogiques, en complément de
l’information délivrée par le médecin et l’équipe soignante
et des supports que représentent internet, les notices de
produits, les brochures éditées sur la maladie par les labo-