Compte-rendu des 17es Journées de Laguiole, juin 2009 507
mène d’insight est un état mental dynamique qui comprend
plusieurs aspects : conscience d’être malade, attribution
causale de la maladie, conscience des différents symp-
tômes. Il dépend aussi de facteurs liés au clinicien et de
facteurs interactionnels. Prendre en compte l’insight du
patient dans sa globalité est un vecteur fondamental pour
améliorer l’efficience de la prise en charge.
La schizophrénie est une maladie chronique dont
l’évolution peut être émaillée de rechutes ou de récidives.
Chacune est génératrice d’aggravation : exacerbation des
symptômes psychotiques, persistance de symptômes néga-
tifs, troubles cognitifs, baisse de la qualité de vie, difficultés
d’insertion sociale, le risque majeur restant le suicide. Il est
donc capital de mettre en place dès le premier épisode un
projet thérapeutique personnalisé, en collaboration étroite
avec l’entourage (Van Amerongen) comprenant un traite-
ment médicamenteux efficace et bien toléré au long cours
(A. Viala), un programme de psychoéducation (N. Mages) et
une prise en charge sociale (D. Legay).
Les conférences de consensus préconisent la prescription
des APA en première intention. Ceux-ci sont efficaces et
bien tolérés : pourtant les patients les arrêtent et rechutent.
Les neuroleptiques d’action prolongée présentent de nom-
breux avantages et sont souvent réservés aux patients peu
compliants. De même classiquement l’APAP est indiqué
pour les patients gérant mal leur traitement, ambivalents
ou dans le déni de la maladie, ayant des antécédents de
rechutes, agressifs, non-coopérants, manquant d’insight ou
toxicomanes. Or l’APAP qui possède une efficacité clinique
avérée avec une bonne tolérance neurologique convient
aux critères nouveaux d’observance, de psychoéducation,
d’amélioration cognitive, de qualité de vie. Aussi doit-on le
prescrire de plus en plus souvent chez des patients jeunes,
dès le premier épisode, après stabilisation (A. Viala).
Plus la durée de psychose non traitée est courte, meilleur
est le fonctionnement social du patient, qui bénéficie en
outre des effets neuroprotecteurs prévenant les troubles
cognitifs. Les rechutes diminuent, ce qui est d’un meilleur
pronostic et d’un coût économique moindre. Le traitement
par APAP favorise le partenariat thérapeutique. Il encourage
la délivrance d’informations sur la maladie et le traitement.
Il incite à s’aider de tous les moyens à notre disposition
pour favoriser l’alliance thérapeutique et la prise régulière
du traitement (CMP, rappel téléphonique, courrier, visites à
domicile, psychoéducation...). La prise en charge cognitive
ne doit pas être oubliée avec l’Ecole à l’Hôpital pour les
plus jeunes, l’aide à la reprise des études, la remédiation
cognitive.
L’éducation thérapeutique du patient (N. Mages) fait par-
tie intégrante du projet de soin des pathologies chroniques.
Selon la définition de l’OMS, elle vise à aider le patient via
une meilleure connaissance de sa maladie, à développer les
compétences nécessaires à l’adaptation à la vie avec une
maladie chronique.
Elle doit être élaborée dans un cadre de référence adapté
à la population et à la maladie concernée, favorisée par
des partenariats entre sociétés savantes et associations de
patients, enrichie par les retours d’expérience des patients
et des proches. Elle peut être proposée à tout moment de
l’histoire thérapeutique : au décours de l’annonce diagnos-
tique, lors du suivi ou de la confrontation à des difficultés
diverses. La mise en oeuvre de l’éducation thérapeutique
du patient nécessite d’abord un diagnostic éducatif avec
une identification des attentes du patient, confrontées à
la réalité sociale, psychologique et environnementale qui
lui est propre. Puis un programme structuré est défini avec
des priorités d’apprentissage adaptées aux buts personnels.
Ensuite vient la réalisation de séances collectives ou indivi-
duelles utilisant des supports variés et diverses techniques
de communication. Les études présentées révèlent qu’en
complément du traitement pharmacologique, l’éducation
thérapeutique du patient diminue chez les schizophrènes
le taux de réhospitalisations et leur durée, permettant de
substantielles économies.
Le projet thérapeutique ne vise plus un simple apai-
sement des symptômes mais une qualité de vie jugée
satisfaisante par le patient. Ce qui traduit à quel point
les priorités de la prise en charge ont pu évoluer. Le diag-
nostic de schizophrénie ne détermine plus une désinsertion
sociale, la détérioration progressive n’est pas inéluctable.
Au contraire en agissant sur le handicap, conséquence de
l’incapacité entraînée par la maladie (modèle de Wood), le
désavantage social régresse via les stratégies de réhabilita-
tion : c’est le postulat du Recovering de W. Anthony. Il existe
en chaque individu une motivation à développer maîtrise et
compétence dans des domaines de la vie qui vont lui per-
mettre de se sentir indépendant et confiant en lui-même.
L’individu peut apprendre de nouveaux comportements, y
avoir recours et les adapter pour répondre à ses besoins de
base. Résultat de démarches soutenues par les profession-
nels du soin, la réhabilitation nécessite un travail en réseau
qui utilise tous les moyens du secteur, des structures non sec-
torisées et d’aide sociale. De nombreuses formules peuvent
alors être proposées pour résoudre le problème fondamental
du logement, l’accès aux ressources (Allocation adulte han-
dicape, revenu de solidarité active, invalidité...), au travail
(emploi en milieu protégé, ordinaire...). La mise en place
de mesures de protection, l’accompagnement à la vie quo-
tidienne, l’entraide, la lutte contre l’isolement, l’accès à
diverses occupations se développent : nous assistons à un
mouvement de société qui veut porter un autre regard sur
le handicap et mettre en place un cadre législatif en ce sens
(déstigmatisation, droits des patients).
En outre, la réhabilitation bénéficie grandement de
la participation des aidants. D’ailleurs les familles
revendiquent un rôle dans l’organisation des soins et
l’accompagnement de la personne malade. En effet via
l’UNAFAM elles déplorent d’avoir autrefois été tenue à
l’écart par le corps médical, privée de réponses aux ques-
tions et d’une écoute qui aurait permis une meilleure
réactivité face aux effets secondaires indésirables, aux
mauvaises observances. Vigilantes quant aux traitements
prescrits à leurs proches, elles réservent un accueil a
priori favorable aux APAP dans la mesure où ils s’inscrivent
dans une relation de partenariat. Cependant en termes
d’efficacité, elles s’interrogent sur les spécificités de ces
molécules.
Mesurer des paramètres cognitifs et d’imagerie cérébrale
morphologique (volumes des structures cérébrales, etc..)
et fonctionnelle (activité des régions cérébrales) pourrait
fournir les premiers éléments de réponse. La schizophré-
nie est en effet associée à une réduction du volume de la
substance grise et de la substance blanche dans les lobes
temporaux (et en particulier dans le gyrus temporal supé-