Chapitre XIV Traitement au stade métastatique Tableau 1. Les métastases du cancer du rein. PLAN Nombre I. Les facteurs pronostiques II. Les différents traitements • Hormonal • Chimiothérapie • Immunothérapie • Chirurgie multiple unique L’organe intéressé (Ritchie-1982) • Poumon 50-60% isolé + ganglion + viscères • Ganglions 15-30% • Foie • Os 30-40% • Surrénale 10-15% • Tissu mou • Cerveau 10-13% Le poumon est l'organe le plus volontiers intéressé dans 50 à 60 % des cas. Dans 70 % des cas, les sites métastatiques sont regroupés au sein d'un même organe. Le pronostic spontané de ces patients est sombre avec 10% de survie à 1 an, 2 à 5% à 5 ans. La survie moyenne est de 10 mois [22]. 70% 30% (Franklin 1996) [38] 87% 30% 25% 31% 49% 28% 14% 14% 7% 6% Tableau 2. Eléments pronostiques dans le cancer du rein métastatique [26]. Ces patients décèdent suite à l’évolution métastatique et non à la progression loco-régionale. Etat général Délai entre diagnostic et métastase Nombre de sites métastatiques Perte de poids Mauvaise tolérance à une chimiothérapie antérieure I. LES FACTEURS PRONOSTIQUES En 1988, ELSON étudie une série de 610 patients porteurs de cancer du rein métastatique et identifie 5 facteurs de risque statistiquement significatifs : 1 organe 2 organes ou plus Fréquence d’atteinte par organe au diagnostic 15 à 25% des patients présentent d'emblée une diffusion métastatique lors du diagnostic de cancer du rein, avec des localisations multiples dans la majorité des cas (Tableau 1). Le cancer du rein au stade métastatique présente un pronostic péjoratif avec 10% de survie à 1 an et 5% à 5 ans. Plusieurs facteurs pronostiques influencent la survie avec notamment l'âge, l'état général et la perte de poids. Plusieurs études ont confirmé l'existence de paramètres pronostiques et permettent de distinguer des groupes de patients présentant des évolutions fort différentes [60, 61, 66, 78, 107]. 97% 3% l'état général, le délai entre le diagnostic et la métastase, le nombre de sites métastatiques, la perte de poids, ainsi que la cytotoxicité à une chimiothérapie antérieure (Tableau 2) [26]. ELSON propose selon le nombre de facteurs de mauvais pronostic de répartir ces patients selon 5 groupes pronostiques (Figure 1). Le premier groupe présente un seul facteur de risque, la médiane de survie est de 12,8 mois. Les groupes suivants présentent de 2 à 5 facteurs associés. La survie moyenne de ces groupes est respectivement de 7, 5, 3, 2 mois [26]. 879 Figure 1. Facteurs pronostiques dans le cancer du rein métastatique. Survie selon 5 groupes pronostiques. Etude sur 610 patients [26]. MOIS Nombre de facteurs de risque 0 ou 1 2 3 4 5 Groupes pronostiques 1 2 3 4 5 Nombre de patients Survie (%) 113 141 151 123 82 880 3 mois 12 mois Médiane de survie (mois) 92 87 76 54 35 52 31 18 9 1 12,8 7,7 5,3 3,4 2,1 Le pouvoir de discrimination de ces groupes doit être considéré lors du traitement de cancer du rein métastatique. Le groupe qui présente un seul élément de mauvais pronostic a la meilleure survie avec 52% à 1 an et 24% à 2 ans. Plusieurs études ont confirmé ces données. FOSSA, en 1994, étudie une série de 295 patients traités par chimiothérapie ou interféron. En analyse mono-factorielle, les facteurs pronostiques sont les suivants : l'âge, la réalisation ou non d'une néphrectomie élargie, l'état général, la présence de métastases hépatiques, l'accélération de la vitesse de sédimentation, la perte de poids et le traitement. En analyse multi-factorielle, cet auteur retrouve 3 élément s indépendant s de mauvais pronostic : la VS supérieure à 100 à la première heure, la perte de poids supérieure à 10% en moins de 6 mois, l'état général de 2 à 3 [35]. La néphrectomie élargie apparaît dans plusieurs études en analyse mono-factorielle comme un élément pronostique. Néanmoins, en analyse de régression multivariée, la néphrectomie élargie n'apparaît plus comme un facteur indépendant, mais elle est corrélée à l'état général du patient [20, 21, 26]. Ces éléments pronostiques permettent d'orienter les indications thérapeutiques selon le groupe pronostique. D'autre part, la définition de ces paramètres pronostiques permet lors d'études prospectives randomisées de répartir les résultats selon ces groupes pronostiques. Ainsi dans la plupart des études prospectives, quelle que soit la modalité thérapeutique proposée, la survie dépend non seulement du bras thérapeutique mais aussi des différents facteurs pronostiques. Ceci pourrait dans le futur permettre d'éviter des traitements coûteux et responsables de morbidité importante chez les patients dont le pronostic est trop péjoratif pour être influencé par le traitement [23, 25, 43]. II. LES DIFFÉRENTS TRAITEMENTS A. Traitement hormonal B. Chimiothérapie C. Immunothérapie • Les Interférons • L’Interleukine 2 • Les associations • La thérapie cellulaire LAK - TIL D. Place de la chirurgie E. En pratique A. Traitement hormonal Le traitement hormonal repose sur des bases expérimentales qui n'ont pas été confirmées par de nombreuses études cliniques. Chez l'animal, une tumeur du rein présente une sensibilité hormonale avec induction tumorale chez le hamster traité de façon prolongé par du Diethylstilbestrol [63]. Ces tumeurs diminuent de volume après l'arrêt des oestrogènes ou par utilisation de traitement antioestrogène ou de progestérone. Ces bases expérimentales ont été suivies par de nombreuses études cliniques utilisant la progestérone dans le traitement du cancer du rein métastatique. Les résultats sont décevants tant en ce qui concerne la progestérone, les androgènes ou les anti-oestrogènes isolés ou en association. Le taux de réponse est situé entre 5 et 10% dans la plupart des séries de phase II ou les études randomisées phase III [45, 119]. Durant les années 80, l'explication de ces mauvais résultats était difficile à donner dans la mesure où il existait de nombreux récepteurs d'oestrogène, de progestérone et d'androgène dans les tumeurs du rein. Néanmoins, l'expression de ces récepteurs est d'autant plus grande que la différenciation cellulaire est importante. Ainsi, le rôle des récepteurs hormonaux a certainement été surévalué. Des études récentes retrouvent un nombre de tumeurs présentant des récepteurs aux oestrogènes moins important que sur les études historiques [49]. Des essais cliniques ont étudié l'effet de fortes doses de Tamoxifen (100 à 150 milligrammes par m 2 et par jour) avec 12% de réponses [105] Ces résultats sont décevants et ne sont pas les résultats obtenus par cet antioestrogène dans le cancer du sein [88]. Des études sont actuellement en cours évaluant le Tamoxifen associé aux agents cytotoxiques telle la Vinblastine. Enfin, l'existence de récepteurs à la Somatostatine pourrait peut-être redonner espoir à la modulation immunologique des tumeurs du rein par traitement hormonal [89]. B. Chimiothérapie Lors des 20 dernières années, de nombreuses études ont utilisé plus de 70 agents cytotoxiques de façon isolée ou associée lors d'études en phase II [45, 118, 119]. Seules la Vinblastine et la Floxuridin (FUDR) ont montré une activité reproductible. Ces études sont néanmoins anciennes et les critères d'inclusion ne sont pas toujours clairement identifiés avec des facteurs pronos881 tiques non rapportés. Ceci explique que les bons résultats rapportés par M URPHY en 1977 avec 25% de réponses n'ont pas été retrouvés sur les séries plus récentes. Actuellement, ces études font état de 10 à 15 % de réponses avec une médiane de survie de 8 mois [13, 20] Un traitement original a été proposé par HRUSHESKI , utilisant la Floxuridin [47]. Cet auteur a rapporté 19% de réponse. La durée de rémission était de 11 mois et la durée moyenne de survie de 14 mois. Tous les patients étaient néphrectomisés et avaient pour 1/3 d'entre-eux des facteurs de bon pronostic. Ces données ont été confirmées par WILKINSON [115]. RICHARDS utilisant une perfusion sur 5 jours ne rapporte aucune réponse dans une étude de 29 patients traités par Floxuridin [91]. ments différents de la résistance MDR (agent alkylant et platine). Des enzymes conjuguent des substances toxiques avec le Glutathion (Glutathion S Transférase). Des études expérimentales démontrent une concentration de Glutathion plus importante dans les tumeurs résistantes au Cisplatyl que dans celles exprimant le gène MDR résistant à la Vinblastine. Un inhibiteur spécifique du système Glutathion est le Buthioninesulfoximine (BSO) [54]. Au total, le cancer du rein est par essence chimiorésistant. Cette chimio-résistance est bien étudiée sur le plan biologique, et pourrait permettre dans un avenir proche d'être modulée grâce à des molécules bloquant spécifiquement un ou les deux éléments majeurs de chimio-résistance connus actuellement [17, 80]. Le cancer du rein est une des rares tumeurs chimio résistantes. Cette originalité réside certainement dans l'existence d'une chimio-résistance spontanée des cellules tumorales du cancer du rein. Cette résistance à la chimiothérapie est due à l'expression d'un double phénotype : • Résistance multidrogue liée à l'expression de la P Glycoprotéine. Les agents anticancéreux concernés par ce phénomène sont les Anthracyclines, les Vinkaloïdes, le Taxol ainsi que les Epipodophylotoxines et la Mitoxantrone. LING a isolé une glycoprotéine membranaire, la Glycoprotéine P, qui est l'expression de la chimio-résistance MDR. Cette Glycoprotéine P est codée par le gène MDR1 localisé sur le chromosome 7. Ce mécanisme fait appel a une pompe d'efflux permettant l'explusion de certains agents anticancéreux, diminuant ainsi leur concentration intracellulaire [82]. Cette Glycoprotéine peut être détectée par les anticorps spécifiques tel GSB1. La Glycoprotéine P est présente dans le tissu rénal sain et tumoral au niveau des cellules du tube contourné proximal du rein. Cette chimiorésistance spontanée du cancer du rein pourrait correspondre à une fonction augmentée de cette protéine présente dans le tissu normal. C. Immunothérapie Les défaillances du système immunitaire sont connues depuis longtemps comme facteur déterminant dans l'apparition d'un cancer. Ceci est illustré par les régressions spontanées de certaines tumeurs et l'efficacité de la BCG thérapie dans les tumeurs de vessie. En ce qui concerne le cancer du rein, l'observation de diminution spontanée du volume métastatique ainsi que l'évolution rapide des tumeurs du rein découvertes dans les suites d'une grossesse confirme l'existence d'une relation entre système immunitaire et apparition du cancer [39]. Le système immunologique réalise une surveillance permanente au sein de notre organisme qui prévient le développement de cellules tumorales grâce à la participation de lymphocytes T cytotoxiques, de natural killers et de macrophages. Ce mécanisme est efficace car le cancer est reconnu comme un élément étranger à notre organisme. Cette reconnaissance est due à l'expression de l'identité des cellules tumorales sous la forme d'antigènes tumoraux et à l'expression d'antigènes de classe I déterminants dans le mécanisme de présentation de l'antigène. L'activation des lymphocytes T type cytotoxique (CD 8) nécessite la présence de cellules de classe I et la production de lymphokines par des lymphocytes T (CD 4). L'expression du gène MDR ou de la Glycoprotéine P est retrouvée dans la presque totalité des tumeurs, avec une expression du gène MDR entre 54 et 100 % selon les études [34, 51, 52, 64]. Ce mécanisme complexe de la résistance à la chimiothérapie, explique la résistance notamment à la Vinblastine ou à l'Adriamycine. Sur le plan thérapeutique, il est possible in-vitro de moduler la chimio-résistance notamment par introduction d'inhibiteurs de canaux calciques tel le R-Verapamil [64]. Des études cliniques sont actuellement en cours [67]. Les défaillances du système de surveillance immunologique peuvent être multiples. Un des mécanismes essentiels est constitué par la mauvaise reconnaissance des cellules tumorales du fait de la faible expression ou de l'absence d'expression de molécules de surface de classe I. Ceci perturbe la reconnaissance de l'antigène tumoral par les lymphocytes T. • Un deuxième mécanisme de chimio-résistance est illustré par le rôle du système du Glutathion dans le cancer du rein. Ce deuxième mécanisme a été mis en évidence par MICKISCH [64]. Le système du Glutathion induit une résistance à certains médica- Parmi ces différentes voies thérapeutiques, le traitement adapté actuellement au cancer du rein utilise les cytokines, les LAK ou les TIL [27, 42, 69, 117]. 882 Tableau 3. Principales caractéristiques de l’Interféron et de l’Interleukine 2. Interféron Interleukine 2 Classe Cytokines Cytokines Nom déposé INTRONA ROFERON Origine Protéine produite par macrophages et lymphocytes non T -non B Glycoprotéine sécrétée par les lymphocytes T Synthèse inhibée par la ciclosporine et les corticoïdes . Antivirale . . Immunomodulatrice - cellulaire l'activité NK - macrophage favorise présentation de l’antigène . Antiproliférative : allonge le cycle cellulaire • Prolifération des lymphocytes activés T4-T8 • Augmente l’effet cytotoxique des lymphocytes T • Prolifération des lymphocytes T-NK • Activité LAK-TIL • Production de cytokines INF , TFN 18 millions U/j 3 j/sem. pendant 6 mois 1 an par voie sous-cutanée 18 millions UI/m 2/j en perfusion continue sur 5 jours Cure à répéter après 1 semaine de repos Linéaire T maximum : 3 à 6 h Demi-vie : 1 à 4 heures Elimination urinaire Biphasique T maximum : 3-4 heures Demi-vie : 3-5 heures Elimination urinaire Intra-musculaire ou sous-cutanée Intraveineuse, intramusculaire ou sous-cutanée . Dose-dépendants . Syndrome pseudo-grippal . Anorexie, nausée, diarrhées . Troubles de la vigilance . Neutropénie . Thrombopénie . Elévation des transaminases . Erythème, prurit . Dose-dépendants . Hypotension, rétention hydrique . Troubles du rythme, ischémie . Dyspnée, oedème pulmonaire . Hypersensibilité : fièvre, frissons, prurit, rash . Nausées, vomissements, mucite . Thrombopénie, anémie . Insuffisance rénale Actions Posologie Administration selon AMM Pharmacocinétique Voie d’administration Effets indésirables Interféron Interféron 1. Les interférons 2-b 2-a PROLEUKIN 18 MUi breux virus et une activité anti-proliférative sur les lignées de cellules cancéreuses à une posologie plus importante. D’autre part, ils bloquent la traduction des ARN messagers et accélèrent la cinétique de leur catabolisme ; ils activent les lymphocytes natural killers et les macrophages assurant ainsi une activité anti-tumorale (Tableau 3) [71]. La cinétique varie en fonction du mode d'administration : intraveineuse, intramusculaire ou sous-cutanée. En moyenne, la demi vie d'élimination varie entre 5 et 15 heures. L'élimination est urinaire, il n'est pas nécessaire de modifier la posologie chez l'insuffisant rénal. La toxicité est essentiellement marquée par l'existence d'un syndrome pseudo-grippal, d'une asthénie intense, d'anorexie ou d'incidents cardiaques ou neurologiques qui peuvent nécessiter une diminution de la posologie. • Il existe 3 Interférons : . Ils constituent un ensemble de protéines hétérogènes dont le point commun est de bloquer la réplication virale et il constituent d'autre part des facteurs de croissance et de puissants immunorégulateurs. L'interféron est produit par les lymphocytes en réponse à des virus ou à des acides nucléiques. Il a été très largement utilisé dans les quinze dernières années dans le traitement du cancer du rein métastatique. Les premiers essais ont débuté en 1983. De très nombreux protocoles ont été proposés. L'interféron est commercialisé sous 2 présentations : Roféron pour l'interféron 2 a et Introna pour l'interféron 2 b. Les caractéristiques principales de ces molécules sont l'inhibition de la réplication de nom883 Tableau 4. Résultats de méta-analyses du traitement du can cer du rein métastatique par Interféron, Interleukine 2 et association. Nombre d’études Tableau 5. Interféron : données de la littérature. • L’interféron a un taux de réponses de 14% (5-20%). • Il existe un effet dose : 27% de réponses à 20 MU/m2 IM 0% de réponse à 2 MU/m2 [86] Nombre de Réponses complètes patients et partielles Interféron Alpha (Wirth) 29 1042 12 • Il existe une synergie in vitro des Interférons mée par des études cliniques Interféron Bêta (Wirth) 3 56 14 • L’association à la Vinblastine améliore le taux de réponse sans modifier la survie Interféron Gamma (Wirth) 10 234 12 Interleukine 2 - bolus - haute dose (Law) - faible dose (Law) Interféron + Interleukine 2 (Vogelzang) 10 537 19 6 104 20 23 607 19 et , non confir- cancer du rein métastatique avec un taux de réponse situé entre 10 et 30%. Les réponses cliniques semblent être obtenues avec les protocoles longs. Une méta-analyse portant sur 500 patients traités par Interféron dans 11 études successives rapporte un taux de réponse global de 14% avec une moyenne de rémission de 3 à 16 mois et une survie médiane de 9 à 18 mois [70]. Deux essai s randomisés ont test é l'efficacité de l'Interféron associé ou non à la Vinblastine. Un premier essai portant sur 145 patients montre un taux de réponse de 24% pour le bras associant les deux traitements contre 11% pour l'Interféron seul. Néanmoins, la survie à 5 ans est identique (9 %) [36]. Une autre étude randomisée ne montre aucune différence significative pour le traitement par Interféron associé ou non à la Vinblastine (Tableau 5) [77]. L'interféron est produit par les fibroblastes en réponse à des virus ou à des acides nucléiques. L'interféron est une protéine produite par les lymphocytes T en réponse à des stimulus immunologiques. Il est produit par des cellules T activées et des cellules natural killers. L'interféron possède des activités antivirale et antiproliférative moindres que l'interféron et . Cependant, il est un puissant activateur des macrophages et le plus puissant inducteur de l'expression de molécules de classe II sur les cellules. D'autres études ont porté sur les Interféron ou . En ce qui concerne l'Interféron , les taux de réponses sont superposables à l'Interféron . Pour l'Interféron , les taux de réponse sont légèrement plus favorables avec des doses plus faibles. Le taux de réponse se situe entre 6 et 33% [6, 59]. • Les différents protocoles : Il existe un effet dose et les traitements offrant une efficacité dépassent la posologie de 15 millions d'unités par semaine. Au dessus de cette valeur, les taux de réponses obtenus varient entre 5 et 25%. Le taux moyen est de 17% avec environ 2% de réponses complètes [35, 37, 56, 74, 116]. 2. L'Interleukine 2 • L'Interleukine 2 a été découverte par MORGAN en 1976 qui l'a décrit comme un facteur de croissance des cellules T. En 1983, ROSENBERG a proposé pour la première fois cette molécule dans le traitement du cancer du rein métastatique [93]. Les résultats de méta-analyse du traitement du cancer du rein métastatique par interféron isolé ou associé sont rapportés dans le Tableau 4. L'Interleukine 2 est commercialisée sous la forme de Proleukin 1 milligramme. Il s'agit d'un polypeptide de 133 acides aminés commercialisé sous forme recombinante. Cette protéine est sécrétée par des lymphocytes T stimulés par un antigène. La synthèse de l'interleukine 2 est inhibée par la ciclosporine et les corticoïdes. L'Interleukine 2 amplifie de façon globale la réponse immunitaire. Elle transforme notamment les lymphocytes en cellules activées capables de tuer les cellules cancéreuses. La pharmacocinétique du produit est très rapide avec un maximum atteint au niveau du plasma en quelques minutes et une durée d'élimination Les différents protocoles utilisent comme variables: la posologie (5 à 60 millions d'unités internationales par injection), les 3 sous-types d'interféron ( ), l'association thérapeutique (Vinblastine - Interleukine) et la voie d'administration (intraveineuse, intramusculaire, sous-cutanée). Ceci explique le grand nombre d'études et la difficulté d'interprétation des résultats des études entre-elles [10, 65, 81, 86]. Néanmoins, l'Interféron a sa place dans le traitement du 884 Tableau 6. Toxicité observée au cours du traitement par IL 2 en perfusion continue chez des patients porteurs de cancer du rein métastatique [74]. Tableau 7. Protocoles d’administration de l’Interféron et de l’Interleukine. Interféron Toxicité Interleukine Incidence (%) Fièvre Erythème Prise de poids 5 à 10% Sup. 10% Vomissements Diarrhée Prurit Somnolence Oligurie Hypotension* Insuffisance rénale aiguë** Dyspnée Troubles du rythme cardiaque Alopécie Douleurs thoraciques Cyanose diffuse Stomatite Ventilation assistée Sepsis Coma Mort toxique Patients - 18 à 20 MUi, 3 fois par semaine pendant 6 mois 100% 74% 61% 52% 9% 52% 59% 56% 54% 48% 50% 24% 30% 23% 15% 6% 19% 6% 3% 5% 3% 0% • Weiss : perfusion continue . 2 cures ± LAK . 18 MUi, 4 à 5 jours . 7 jours : repos . 18 MUi, 4 à 5 jours • Rosenberg : 3 perfusions de 15 minutes . 3 injections de 0,6 MUi/kg/j . 5 jours . 7 jours : repos . 5 jours de traitement • Atzpodien : sous-cutané faible dose Interféron et Interleukine 2 1 à 2 MUi, 2 fois par jour 4 à 6 semaines Tableau 8. Interleukine 2 et Interféron du cancer du rein métastatique. 37 * Hypotension nécessitant la mise sous vasopresseurs ** Créatinine sup. 400 mol/l dans le traitement Nombre Voie Réponse (%) Rosenberg 1988 46 IV 32 de 15 minutes. Le métabolisme est presque exclusivement rénal (Tableau 3). Dillman 1993 83 IV 8 Elson 1992 34 IV-SC 12 La morbidité du traitement engage le pronostic vital avec 3 à 5% de décès iatrogènes [50]. La morbidité est essentiellement illustrée par la rétention liquidienne, l'oedème pulmonaire par fuite capillaire, l'insuffisance respiratoire et le syndrome grippal. Le traitement peut entraîner une aggravation de la symptomatologie due à la présence de métastases cérébrales qui sont une contre-indication absolue au traitement. Il en est de même pour les infections bactériennes. La morbidité est rappelée dans le tableau 6 [74]. La voie d'administration s'effectue selon différents schémas : bolus intraveineux, voie intraveineuse, voie sous-cutanée, nasale [48, 73, 75]. Figlin 1992 30 IV 30 Atzopodien 1995 34 SC 29 Tableau 9. Interleukine II dans le traitement du cancer du rein métastatique. Nombre Administration Voie Réponse % Rosenberg 1988 38 0,1 MUi/kg 8h 5 jours/2 semaines IV 18 Négrier 1989 42 18 MUi/m2/j 5 jours/2 semaines IV 14 Bukowski 1990 41 10 MUi/m2 12 h 3 jours/3 semaines IV 12 9MUi/m2 12 h 2 jours SC 31 • Les différents protocoles : L'interleukine est utilisée en monothérapie ou en association avec l'interféron (Tableaux 7 et 8) ou pour manipulation de lymphocytes in-vitro (LAK ou TIL) [2, 3, 8, 11, 12, 41, 114]. Lissoni 1992 a) L'interleukine 2 en monothérapie : Sur une méta-analyse de 592 patients traités par Interleukine seule, selon différents protocoles, le taux de réponse est de 17,2% (Tableau 9) [116]. 885 Fyfe 1995 225 600.000 Ui/kg 8h IV 14 Yang 1994 65 720 000 Ui/kg 8h IV 20 Du fait de la morbidité, plusieurs auteurs ont proposé des traitements d' Interl eukine II avec des doses réduites, situées autour de 0,6 millions d'unités internationales par kilo toutes les 8 heures pendant 5 jours et répétées après 10 jours de repos. YANG a étudié de façon randomisée des patients traités par doses habituel les ou doses rédui tes d'Interleukine. Sur 125 patients, il trouve 52 % d'hypotension nécessitant un traitement chez les patients traités à fortes doses d'Interleukine 2, alors que le groupe de patients traité par petites doses présentait une hypotension justifant un traitement médical dans 3% des cas seulement. Les réponses objectives étaient de 20% pour le traitement par Interleukine fortes doses et de 15% pour le traitement à doses réduites (Tableau 9) [120]. Ces résultats étaient donc encourageants pour poursuivre dans cette voie tout en conservant un taux de réponse satisfaisant et permettre un traitement ambulatoire avec une qualité de vie satisfaisante [58]. Plusieurs essais ont utilisé de l'Interleukine 2 par voie sous-cutanée à petites doses, de 0,05 à 1,8 millions d' unités internationales par m2 et par jour, 5 jours par semaine. Les réponses se situent autours de 19% avec une morbidité réduite [4, 44]. Poursuivant dans cette voie de faible morbidité par petites doses, ATZPODIEN utilise un protocole d'Interleukine 2 et d'Interféron sous-cutané délivré de façon ambulatoire. Cet auteur rapporte 28 % de réponses avec une durée moyenne de 23 mois pour les réponses complètes [5]. Actuellement, l'I nterleukine 2 peut être délivrée selon des posologies et des administrations compatibles avec un traitement ambulatoire. Ceci est possible pour un traitement par Interleukine isolé ou associé à l'Interféron, en offrant des réponses objectives situées entre 15 et 25% chez des patients porteurs de cancer du rein métastatique. La majorité des réponses obtenues par faibles doses d'Interleukine intéresse surtout les sites métastatiques pulmonaires et ganglionnaires avec peu de réponse concernant les autres sites (foie, loge rénale et os) [103]. Cette évolution dans les modifications de posologie est parfaitement dans les objectifs de la cancérologie actuelle qui est de maintenir des taux de réponses élevés tout en permettant un traitement ambulatoire favorisant au maximum le maintien d'une qualité de vie satisfaisante [112]. b) L'association Interleukine - Interféron : Les résultats de l'association Interleukine-Interféron sont rapportés dans le tableau 8. Il s'agit d'études non randomisées avec 10 à 30 % de réponses [26, 30]. Le protocole Crecy démontre sur une large étude randomisée la supériorité de l'association : la survie sans récidive à 1 an est de 20 % pour l'association Tableau 10. Protocole Crécy : 425 patients. Interleukine en perfusion continue Interféron en sous-cutané Interleukine + Interféron [72] IL2 INF IL2 + INF Nombre Réponse objective 138 9 (6,5%) 147 11 (7,5%) Survie sans récidive à 1 an Décès iatrogène 13,8% 9,7% 140 26 (18,6%) p< 0,01 20,9% p= 0,01 3,6% 7,9% 0,7% Interleukine - Interféron, 13,8 % pour l'Interleukine 2 et 9,7 % pour l'Interféron (Tableau 10) [72]. c) L'interleukine associée aux LAK (Lymphokine Acti vated Killer) et TIL (Tumor Infiltrative Lymphocyte) : Une des applications les plus originales de l'efficacité de l'Interleukine 2 est la sensibilitation de lymphocytes spécifiques ou non de la tumeur [84, 100]. Ainsi est née la thérapie cellulaire (Figure 2) utilisant deux concepts différents. • Le premier concept de thérapie cellulaire est le recueil et l'activation de lymphocytes circulant par l'Interleukine 2. Ces lymphocytes activés sont réinjectés 2 à 3 jours plus tard chez le même patient. Il n'existe pas de spécificité d'organe et la répartition au sein de l'organisme est aléatoire [28, 40, 76, 94]. Malgré des résultats initiaux encourageants, 3 études randomisées avec ou sans LAK n'ont pas montré d'avantage à l'association de LAK en terme de réponse et de survie [57, 95, 113]. • La réalisation de TIL nécessite le prélèvement de lymphocytes au niveau de la tumeur. Une suspension cellulaire est réalisée et mise en culture avec de l'IL2. Les cellules rénales tumorales meurent dans les jours suivants et le surnageant de la culture contient un grand nombre de lymphocytes T. Cette population cellulaire homogène peut être multipliée par cultures cellulaires successives avec de l'IL2. Cette technologie permet de recueillir dans les meilleurs cas 2x1011 lymphocytes. Deux à trois semaines après le prélèvement tumoral, cette suspension cellulaire est réinjectée chez le même patient. Les TIL présentent une migration spécifique au niveau de la zone tumorale (ceci n’a pas été retrouvé par d’autres auteurs) [63] (Figure 2). L'activité serait 50 à 100 fois plus importante que l'activité des LAK [20]. FRANKLIN rapporte, en 1996, une série de 56 patients qui reçoivent après néphrectomie élargie un traitement par Interleukine 2 intra-veineuse (2 MU) et TIL, associé ou non à de l'interféron [38]. 886 Figure 2 : • Activation spécifique des lymphocytes infiltrant la tumeur en présence de cellules tumorales et d’IL2 : TIL (tumor infiltrating lymphocytes). • Activation non spécifique de lymphocytes ciculants en présence d’IL 2 : LAK (lymphokine activated killer). TIL LAK lymphocytes T activité «natural killer» lymphocytes Infiltrant la tumeur + cellules tumorales + IL-2 lymphocytes totaux circulants + IL-2 culture 21 jours culture 5 jours LAK TIL Lymphokine Activated Killer Tumor Infiltrating Lymphocytes 887 Tableau 11. Protocoles d’immunothérapie dans le cancer du rein métastatique [11]. Tableau 13. La néphrectomie dans le cancer du rein méta statique. SCAPP I Proleukin 18 MUi (sous-cutané) 5 jours/sem. puis 2 jours/sem. pendant 1 mois IL2 18 MUi/m 2 en 2 injections, sous-cutané J 1-5, 15-19, 43-47, 57-61 1 - La néphrectomie en cas de métastase unique IFN 6 MUi/jour sous-cutané 1 jour sur 2 3 - La néphrectomie adjuvante après immunothérapie CYSCCO 2 - La néphrectomie de réduction tumorale avant immunothérapie 4 - La néphrectomie palliative IL2 18 MUi/m 2/j pendant 5 jours, perfusion continue IFN sous-cutané 18 MUiU 3/sem., en association CRECY ATZPODIEN IL2 + IFN + 5FU SCAPP II IL2/sous-cutané IFN 5 FU BELLDEGRUN IL2 + TIL Tableau 12. Interleukine 2 : données de la littérature. • Une méta-analyse sur 342 cas rapporte 18% de réponse (14 à 22%) avec une durée de rémission de 5 à 19 mois pour les réponses complètes, 2 à 6 mois pour les réponses partielles. • La morbidité est essentiellement constituée par le syndrome de perméabilité capillaire dose-dépendante. • Le protocole CRECY démontre la supériorité de l’association Interféron et Interleukine 2 comparée à Interféron seul ou Interleukine 2 seule, avec des réponses respectivement de 18,5%, 7,5% et 6,5% [72]. • L’adjonction de LAK n’apporte pas de gain de réponse comparé à l’Interleukine 2 seule. • Même conclusion pour les TIL, excepté l’expérience de B ELLDEGRUN qui rapporte 33% de réponses dont 12% complètes [8]. La morbidité est faible avec 16% de patients nécessitant une diminution de doses. Le taux de réponse est de 33,9 % (12,5 % de réponses complètes et 21,4% de réponses partielles). La survie est de 43% à 2 ans et de 38% à 3 ans [38] (Tableaux 11 et 12). D. Place de la chirurgie L'indication chirurgicale doit tenir compte de l'état général du patient, du pronostic, de l'existence de symptômes et de la qualité de vie. 1. La place de la néphrectomie 2. La chirugie des métastases 3. La chirurgie des récidives locales 1. Place de la néphrectomie Quatre circonstances peuvent amener à discuter ce geste (Tableau 13): a) La néphrectomie en cas de métastase unique: Parmi les formes métastatiques, certaines présentent un meilleur pronostic avec des métastases dans un même site ou une métastase unique [16]. Dans ces cas, le traitement chirurgical de la lésion primitive peut être associé à celui du site métastatique unique. TOLIA (1975, 17 patients) rapporte une survie de 35% à 5 ans quand le traitement chirurgical de la lésion primitive est associée à celui d'une métastase pulmonaire unique [110]. DE KERNION (1983, 12 patients) rapporte une survie de 42% à 3 ans et de 25% à 5 ans en cas de traitement concomitant de localisation pulmonaire unique ou multiple [19]. Pour RICHARD (1988, 27 patients), la survie est de 24% à 5 ans [90]. Pour DINEEN (1988, 29 patients), la survie est de 13% à 5 ans en cas de métastase unique [24]. Dans la série de K IERNEY (1993, 41 patients), la survie est de 31% à 5 ans, la métastase est unique dans 64% des cas et le traitement concomitant de la tumeur primitive et de la localisation secondaire est possible dans 88% des cas [55]. Ces résultats encourageants sont à interpréter avec prudence. L'impression de bon pronostic n'est souvent que le reflet d'une sélection des patients en bon état général les plus aptes à être opérés. b) La néphrectomie immunothérapie de réduction tumorale avant La néphrectomie a été associée à de nombreux essais de traitement systémique dans le but de réduire la masse tumorale ou pour disposer du matériel nécessaire à la réalisation de ces traitements. Seule l'immunothérapie a démontré une efficacité relative dans le traitement du carcinome rénal métastasé. L'association chirurgie-immunothérapie ne se justifie 888 Tableau 14. Impact de la néphrectomie élargie avant immu nothérapie sur la réponse au traitement. Références Nombre de patients Immunothérapie Néphrectomie Taux de réponses (%) Mais il n'y a pas encore eu d'étude randomisée prospective comparant les taux de réponse et de survie de deux groupes de patients recevant la même immunothérapie avec ou sans néphrectomie première. c) La néphrectomie adjuvante à l'immunothérapie Sosma 1988 15 2 IL-2 oui non 20 0 Dans les réponses partielles après immunothérapie, la chirurgie s'adresse aux tumeurs résiduelles. Fisher 1988 26 9 IL-2/LAK oui non 26 7 Wang 1987 11 2 IL-2/LAK oui non 45,6 50 Certains auteurs proposent une immunothérapie préalable à la chirurgie des masses résiduelles. Ces séries courtes (15 cas), non contrôlées et non randomisées ne permettent pas de conclure sur l'efficacité en terme de survie. Belldegrun 1990 33 12 IFN- oui non 24,3 8,3 que si l'on démontre que la réduction de la masse tumorale potentialise l'immunothérapie [7, 62, 92]. La néphrectomie de réduction tumorale préalable à l'immunothérapie a démontré une supériorité en terme de survie par rapport à l'immunothérapie seule (Tableau 14). MUSS (1987) a un taux de réponse de 23% avec néphrectomie première et de 8% sans néphrectomie [69]. UMEDA (1986), dans une étude multicentrique japonaise de 371 patients, a un taux de réponse supérieur en cas de néphrectomie préalable [111]. De même, les patients métastatiques traités avec IL - 2 et LAK ont peu de réponse objective quand la tumeur primitive est en place. FISHER (1988) a un taux de réponse objective de 26% avec néphrectomie préalable et de 7% sans néphrectomie [31]. Des essais récents multicentriques utilisent les TIL, lymphocytes présents à l'intérieur de la tumeur. Les patients reçoivent de l'interféron avant la néphrectomie, les TIL sont extraits, stimulés in vitro avec de l'IL - 2 et réintroduits aux patients. Dans la plupart des cas, un traitement adjuvant est utilisé avec IL - 2 et interféron . Pour FLEISCHMANN (1991), ce type de protocole améliorerait la survie des patients (médiane = 12 mois) [33]. SPENCER (1992) propose une néphrectomie secondaire en cas de réponse à l'immunothérapie, mais aucune réponse n'est notée sur la tumeur rénale primitive [104]. La survie des patients répondeurs (IL - 2) est meilleure (75% à 18 mois) que celle des non répondeurs (SHERRY, 1992) [102]. Pour SELLA (1993), il persiste du tissu viable dans la tumeur principale dans 88% des cas après immunothérapie (IFN) [101]. L'immunothérapie permet de sélectionner les patients qui pourront bénéficier de la chirurgie. La chirurgie chez les répondeurs traiterait le tissu tumoral insensible à l'immunothérapie. d) La néphrectomie palliative Les tumeurs symptomatiques sont peu fréquentes (1/3). Les symptômes peuvent être cliniques (hématurie invalidante, douleur rebelle) ou biologiques (insuffisance hépatique, anémie inflammatoire, polyglobulie, hypercalcémie). La néphrectomie n'allonge pas la survie des patients métastatiques (10% à 1 an et 5% à 3 ans) avec 50% de décès dans les quatre mois [20]. Cette chirurgie a une morbidité et une mortalité importante dans ce contexte (13 à 50% des cas pour BELLDEGRUN) [8]. BELLDEGRUN (1995) rapporte des résultats préliminaires encourageants avec 36% de réponse objective chez 61 patients (7 réponses complètes et 12 réponses partielles) [84]. Ces tumeurs symptomatiques peuvent être contrôlées par le traitement médical ou traitées par embolisation rénale [32]. Dans ces études, 10 à 23% des patients, qui ont eu une néphrectomie première, ne reçoivent pas d'immunothérapie du fait de la progression intercurrente de la maladie [9, 38, 87]. e) Conclusion Basée sur ces résultats, un essai multicentrique de phase III a été mis en place pour comparer les TIL à des hautes doses d'IL - 2. Les syndromes paranéoplasiques peuvent persister du fait de la présence de métastases. Dans le carcinome rénal métastatique, la néphrectomie est indiquée dans quatre situations: - dans les métastases uniques: traitement concomitant de la lésion primitive et du site métastatique. 889 - dans les faibles volumes métastatiques: néphrectomie première puis immunothérapie. La métastasectomie est réservée aux patients en bon état général, répondeurs et s'il s'agit de sites pulmonaires en faible nombre, unique si possible. - dans les gros volumes métastatiques: un traitement complémentaire est indiqué avant la néphrectomie. Ces patients doivent être inclus dans des protocoles randomisés prospectifs car aucune étude n'a démontré l'intérêt de la néphrectomie dans cette situation. - dans les rares formes symptomatiques: la néphrectomie palliative a un intérêt limité avec 10% de survie à 1 an. L'embolisation rénale permet de réduire les symptômes à moindre frais, au prix d'un syndrome post-embolisation. 2. La chirurgie des métastases Le traitement chirurgical d'une métastase unique a un taux de survie à 5 ans de 35 à 50% [83]. Le traitement sera envisagé en fonction de chaque site métastatique. a) Métastases pulmonaires Que la métastase soit unique (30%) ou multiple (70%), les poumons sont le site métastatique le plus fréquent. Les métastases sont le plus souvent sous -pleurales et accessibles à une résection cunéiforme, éventuellement par thoracoscopie [109]. La majorité des patients a une immunothérapie première (80%). La médiane de survie est de 43 mois. Elle est indépendante du nombre de nodules pulmonaires sur la TDM pré-opératoire, du nombre de métastases réséquées et du délai de survenue des métastases. Par contre, elle est influencée par le caractère complet de l'exérèse (49 mois versus 16 mois) [85]. Seule une étude prospective confirmera l'intérêt de l'exérèse de métastases pulmonaires multiples résiduelles en cas de réponse partielle après immunothérapie. b) Métastases osseuses Les métastases osseuses sont uniques dans 15 à 30% des cas de métastases osseuses [106]. En cas de fracture, la chirurgie est indiquée si la survie est supérieure à 6 semaines, en l'absence d'alternative thérapeutique, en fonction de l'état général et des possibilités de mobilisation précoce. La radiothérapie (30 à40 Grays) a un effet antalgique chez la plupart des patients. Cette option est choisie s'il s'agit d'un site douloureux unique et si l'état général n'autorise pas un traitement chirurgical [79]. En cas de compression médullaire, une laminectomie avec stabilisation osseuse est indiquée. Le traitement chirurgical donne les meilleurs résultats si la métastase osseuse est unique et de siège périphérique [1]. c) Métastases hépatiques Les métastases hépatiques sont isolées dans 5 % des cas. Dans ce contexte, un traitement chirurgical peut être proposé. Une échographie per-opératoire recherche des foyers métastatiques infra-cliniques. Un nombre de foyers supérieur à 3 est une contre-indication relative à toute exérèse chirurgicale. La technique est fonction de la taille de la lésion : résection cunéiforme pour une métastase inférieure à 4 cm, lobectomie si la métastase est supérieure à 4 cm [55]. d) Métastases cérébrales La métastase cérébrale est unique dans 8% des cas [98]. Le carcinome rénal est le carcinome qui donne le plus de métastase cérébrale unique. La plupart intéresse les lobes frontal ou pariétal. La radiothérapie (30Gy en 2 semaines) associée à la corticothérapie est le traitement de référence. Actuellement, la chirurgie est le traitement de première intention en cas de métastase unique associé à une radiothérapie post-opératoire (36 Gy) pour améliorer le contrôle local [99]. En cas de lésion inaccessible, la chirurgie stéréotaxique est indiquée en utilisant un accélérateur linéaire ou un gamma-unit. La suvie moyenne est de 7 mois. Les patients en bon état général et de moins de 60 ans ont les meilleurs résultats avec une moyenne de survie de 14 mois avec la chirurgie et de 9 mois avec la radiothérapie [18]. e) Métastases de la région de la tête et du cou La plupart des métastases osseuses (80%) sont sur le squelette axial et parfois sur la partie proximale des os longs. Les sites métastatiques les plus fréquents sont les sinus maxillaires, la glande thyroïde et les glandes salivaires. La chirurgie associée à une radiothérapie en cas de marge positive a une survie moyenne de 20 mois [53]. L'aspect est le plus souvent lytique et intéresse le corps vertébral dorsal ou lombaire [79]. f) Métastases cutanées En cas de risque de fracture, la chirurgie ne se justifie que s'il s'agit d'un os portant avec une lyse supérieure à 3 cm de diamètre et une destruction de la corticale supérieure à 50%. Le pronostic est mauvais car elles sont souvent associées à d'autres métastases. La métastase cutanée est unique dans 1,4% des cas autopsiques [98]. 890 Tableau 15. Traitement du cancer du rein métastatique : en pratique. 1 - Patients avec facteurs de mauvais pronostic : • Abstention - Surveillance • Chirurgie palliative? • Protocoles ambulatoire faible dose - IL2 - EPO - IL2 - Prednisone 2 - Patients de moins de 65 ans avec un facteur de mauvais pronostic : E. En pratique Les propositions thérapeutiques reposent sur l'évaluation des différents facteurs pronostiques. Il est donc nécessaire de proposer un traitement adapté selon trois situations différentes (Tableau 15). 1 - Parmi les patients porteurs de facteurs de mauvais pronostic, le traitement repose sur trois possibilités : • L'abstention thérapeutique et la surveillance. Inclusion dans les : • Protocoles : - SCAPP III - CYSCCO • Association Interleukine - Interféron 3 - Patients symptomatiques : • Chirurgie palliative Le rein est responsable de 6% des métastases cutanées (pulpe du doigt, cuir chevelu) chez l'homme et de moins de 1% chez la femme (vulve, vagin) [96]. Ces lésions cutanées hypervascularisées ont l'aspect macroscopique du sarcome de Kaposi. Elles nécesitent une biopsie exérèse associée à une immunothérapie. • La chirurgie palliative en cas de symptômes. • L'inclusion dans des protocoles réalisés de façon ambulatoire et à faible dose (IL2 - EPO et IL 2 prednisone). 2 - Les patients de moins de 65 ans avec un facteur de mauvais pronostic : Ces patients doivent être inclus dans des protocoles prospectifs : Interleukine-Interféron ou protocoles SCAPP III ou CYSCCO. 3- Les patients symptomatiques, doivent être soulagés par une chirurgie palliative. L’essentiel 3. La chirurgie des récidives locales • DESGRANDCHAMPS F., CUSSENOT O., MARECHAL J.M., CORTESSE A., TEILLAC P., LE DUC A. Les traitements du cancer du rein métastasé. Données actuelles et perspectives. Prog. Urol., 1993, 3, 177-186. Les récidives locales sont de mauvais pronostic avec 14% de survie à 1 an et sont le fait d'une résection incomplète de la tumeur initiale ou de la persistance de ganglions régionaux envahis [14]. • FRANKLIN J.R., FIGLIN R., RAUCH J., GITLITZ B., BELLDEGRUN A. Cytoreductive surgery in the management of metastatic renal cell carcinoma: The UCLA experience, Sem. Urol. Oncol., 1996, 14, 230-236. La médiane de survenue est inférieure à 20 mois [108]. 60% des patients sont asymptomatiques, ce qui nécessite un suivi par imagerie chez les patients à haut risque. • NEGRIER S., ESCUDIER B., LASSET C et al. The FNCLCC Crecy trial : Interleukin 2 (IL2) + Interféron (IFN) is the optimal treatment to induce responses in metastatic renal cell carcinoma (MRCC). Asco Abstract, Philadelphia, 1996. L'atteinte des tissus mous de la fosse lombaire est de meilleur pronostic que l'atteinte de la surrénale homolatérale [97]. • ROSENBERG S. A. , LOTZE M.T., MUUL L. M., et al. Observations on the systemic administration of autologous lymphokine-actived killer cells and recombinant interleukin-2 to patients with metastatic cancer. N. Engl. J. Med., 1985, 313, 1485-1492. Une récidive locale doit être considérée biologiquement comme une métastase du fait du risque de progression locale et à distance. De ce fait, il est licite d'associer à la chirurgie une immunothérapie. Cette immunothérapie doit être néo-adjuvante avant la résection de la tumeur résiduelle [55]. • WIRTH M.P. Immunotherapy for metastatic renal cell carcinoma. Urol. Clin. of North Am., 1993, 20, 283-295. • YANG J.C., TOPALIAN S.L., PARKINSON D., et al. Randomized comparison of high-dose and low-dose intravenous interleukin2 for the therapy of metastatic renal cell carcinoma: an interim report. J. Clin. Oncol., 1994, 12, 1572-1576. Cette attitude agressive n'a pas la prétention d'être curative mais elle permet d'améliorer la qualité de la survie [29]. 891 REFERENCES 1. 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