
La grande politique est politique de volonté. Il s’agit de vouloir. La
grandeur comme mesure de la volonté de vouloir. La grande politique
veut sa volonté en voulant sa propre grandeur. Elle renonce à la volonté,
renoncement oriental en quelque sorte. Elle combat l’aversion, la
vengeance, le ressentiment. La politique de Nietzsche est une politique
de l’infini. Elle est politique de l’éternel, de ce qui se
passe
en deçà des
conditions historiques, sociopolitiques, culturelles.
La politique nietzschéenne considère l’inconsidérable, ouvre
l’impossible, provoque un événement dans le sens où Badiou l’entend
(c’est-à-dire que la positivité d’un événement interrompt l’ordre positif de
l’Être). Le sujet politique est sujet de cette folie, agent de quelque chose
qui le dépasse et, qui lui réclame de faire le presque impossible. Cela
agit, sans pouvoir assurer la raison et le
telos
de son action. Il risque
l’aveuglement essentiel et structurel, qui singularise tous ces
mouvements : “Car la singularité”, dit Badiou, “est véritablement
toujours là où se trouve l’endroit de la décision, et chaque décision est,
en dernière instance, en tant que décision vraie, une décision unique.
Précisément, il n’existe pas de décision générale et dans la mesure où,
ce qui introduit une vérité, ou ce qui engage à une vérité, ou ce qui est
soutenu par un point fixe appartient à l’ordre de la décision, il appartient
toujours aussi à l’ordre de la singularité.”1 Parler de sujet, que ce soit
pour déconstruire sa forme moderne avec ses attributs hérités
(conscience de soi, liberté, souveraineté, autonomie) au profit de sa folie
transcendantale, ou que ce soit pour le confronter à son devoir
irrécusable de jugement, de décision accompagnée de raisons
rationnelles, exige de penser le sujet comme endroit du conflit non