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LE REFLUX GASTRO-ŒSOPHAGIEN (RGO) DE L’ADULTE
Louis Buscail, Jacques Frexinos, Gilles Fourtanier
1) Définition : On désigne sous le terme de RGO, le reflux permanent ou intermittent du
contenu gastrique vers l’oesophage à travers le hiatus oesophagien. Le reflux gastro-
œsophagien pathologique représente en France une des affections digestives les plus
fréquentes puisque 10% des adultes, au cours d'une enquête récente, ont déclaré avoir ressenti
au moins une fois dans l'année des symptômes évocateurs de RGO.
2) Physiopathologie, causes et conséquences du RGO :
2.1 Physiopathologie :
Les éléments les plus agressifs sont représentés par la concentration en ions H+ et
par la concentration en pepsine, l'effet néfaste dépendant non seulement de la concentration
mais aussi de la durée d'exposition de la muqueuse œsophagienne. Le reflux d'enzymes
pancréatiques n'a probablement qu'une importance relative sauf après gastrectomie totale ou
dans le cas d'une achlorhydrie. Le reflux alcalin et biliaire considéré sur le plan expérimental
comme très agressif est actuellement jugé comme peu fréquent.
2.1.1 faiblesse du sphincter œsophagien inférieur SOI (cf annexe1 en fin de
chapitre) Schématiquement, plusieurs mécanismes peuvent expliquer les épisodes de
RGO :
- un relâchement transitoire total du SOI lié ou non à une déglutition,
- une augmentation de la pression intra-abdominale dépassant la pression du SOI,
- un SOI hypotonique ou atonique en permanence permettant un reflux continu.
2.1.2 Altération de la clearance oesophagienne et du couple péristaltisme
oesophagien / salive. En effet, lorsque la barrière anti-reflux a cédé un deuxième élément de
défense intervient alors pour neutraliser aussi rapidement que possible les conséquences
éventuellement néfastes dues à la présence d'acide dans l'œsophage. Ce moyen fait intervenir
le couple “péristaltisme oesophagien / salive”. La clairance œsophagienne joue ici un rôle
majeur pour éliminer le liquide ou les aliments qui ont reflué dans l'œsophage. L'acidité du
liquide reflué est neutralisée par les bicarbonates de la salive dont le pH, aux environs de 6
ou 7, permet de faire remonter le pH œsophagien au-dessus de 5 par paliers successifs. Le
couple "péristaltisme oesophagien / salive" joue donc un rôle capital mais peut être altéré en
période nocturne ou chez les sujets âgés en raison de la diminution de la motricité
œsophagienne et de la sécrétion salivaire.
2.1.3 Etiologies non sphinctériennes:
- une malposition cardio-tubérositaire qui peut être considérée comme une ébauche de
hernie hiatale mais qui n'entraîne ici à travers le hiatus que l'œsophage intra-abdominal et le
cardia anatomique (ouverture de l’angle de Hiss).
- une gastrectomie polaire supérieure ou toute autre intervention chirurgicale pouvant
affaiblir ou supprimer la barrière anti-reflux (intervention de Heller par exemple),
- la présence prolongée d'une sonde gastrique,
- au cours de la grossesse, environ la moitié des femmes enceintes présentent un pyrosis ou
des régurgitations, souvent lors du dernier trimestre. Des facteurs mécaniques (hyperpression
intra-abdominale) ont pu être incriminés mais le rôle des hormones sexuelles féminines et en
particulier celui de la progestérone semble être de plus en plus prépondérant,
- l'atteinte œsophagienne avec pyrosis au cours de la sclérodermie est fréquente,
- le rôle de la hernie hiatale a été classiquement avancé et présenté comme facteur aggravant
mais ces deux anomalies paraissent devoir être dissociées en se basant sur le fait que de
nombreux porteurs de hernie hiatale n'ont aucun RGO alors que beaucoup de sujets souffrant
de RGO n'ont pas de hernie hiatale,