TRIGONOMÉTRIE
Voici un ouvrage instructif, parce qu’à chaque pas, le lecteur est invité à fouler les plates-bandes de la science
pure et à en extraire une masse de conséquences pratiques et variées, si tant est qu’il soit possible d’extraire une
conséquence d’une plate-bande... et moralisateur parce que les nombreux séjours de notre héros sur la paille
humide des geôles prouvent à l’évidence qu’il est sage d’avoir la plus grande déférence pour tous les règlements,
surtout s’ils sont contradictoires.
(CHRISTOPHE. L’idée fixe du savant Cosinus.)
La trigonométrie souffre d’une mauvaise image de marque : pénible aux élèves, elle est assez souvent
peu prisée des professeurs qui n’y voient que l’obligation de calculs stériles et peu gratifiants alors qu’elle
est fondamentale pour les calculs de la Physique et des Mathématiques appliquées. En outre c’est un
bon outil de formation : on y apprend à lier représentations graphiques et propriétés d’invariance, à
développer la mémoire des résultats exacts et les rudiments de l’art des formules. En préférant l’élégance
et la clarté à une technique excessive, les exercices de trigonométrie deviennent l’occasion de progrès
importants, indispensables pour la suite.
A propos des notations
Etant donnés deux nombres réels aet b, nous écrirons a=b[2π](respectivement a=b[π])
pour dire qu’il existe un nombre entier relatif ktel que b=a+ 2kπ (respectivement a=b+) où k
est un entier relatif quelconque. Ces formules se lisent ”aest égal à bmodulo 2π(etc). Les formules
a=bmod 2π. (resp. a=bmod π) ont le même sens.
Quantificateur ,– Soit P(t)un ”énoncé mathématique” mettant en jeu une variable t. On
peut se demander si cet énoncé est vrai lorsque tappartient à un certain ensemble X. Si quel que soit
tappartenant à Xl’énoncé P(t)est vrai, on écrira
tX, P (t)
On peut mettre en jeu deux variables ; le principe est le même ; par exemple
kZ,tR,cos (t+ 2kπ) = cos t
signifie que l’égalité cos (t+ 2kπ) = cos test vraie quel que soit l’entier ket quel que soit le réel t.
– Ecrire
tX, P (t)
signifie qu’il existe (au moins) un tappartenant à Xtel que l’énoncé P(t)soit vrai,
1 Fonctions trigonométriques
1.1 Définitions
Une définition entièrement rigoureuse des fonctions trigonométriques est impossible à ce stade; cela peut
paraître paradoxal vu l’emploi constant que l’on en fait, mais cela tient à la ”nature” non algébrique
de ces fonctions. On s’en tiendra donc à la ”définition” graphique du secondaire basée sur le cercle
trigonométrique.
1
Le plan cartésien étant orienté, et M(t)un point du cercle trigonométrique repéré par l’angle orien
t=
OI,
OMdéfini modulo 2π, cos test l’abscisse de M(t)et sin tson ordonnée.
NB. Nous supposons que le lecteur connait les formules élémentaires concernant le sinus et
le cosinus des angles d’un triangle rectangle.
Exercice 1 Le dessin précédent suppose l’angle tentre 0et
π
2
(modulo 2π). Situer cos tet sin tlorsque
test entre
π
2
et π(modulo 2π)etc.
1.2 Propriétés d’invariance fonctionnelle
Le lecteur vérifiera sur un DESSIN les propriétés suivantes.
Périodicité L’avantage de cette définition est qu’elle montre immédiatement que cos et sin,
définies sur R, sont des fonctions 2π-périodiques, c’est à dire que :
tR,cos(t+ 2π) = cos tet sin(t+ 2π) = sin t.
Elle donne également les premières propriétés fonctionnelles de ces fonctions, à savoir :
tR,cos(t+π) = cos tet sin(t+π) = sin t
Cela tient à ce que les points du cercle correspondant aux valeurs tet t+πsont symétriques par rapport
à l’origine. Plus généralement :
kZ,tR,cos (t+) = (1)
k
cos tet sin (t+kπ) = (1)
k
sin t(1)
Angles opposés et supplémentaires – En considérant deux points symétriques par rapport à
l’axe des abscisses, on voit que :
tR,cos(t) = cos tet sin(t) = sin t(2)
De même en considérant deux points symétriques par rapport à l’axe des ordonnées, on voit que
tR,cos (πt) = cos tet sin (πt) = sin t(3)
Angles complémentaires – En considérant deux points symétriques par rapport à la première
bissectrice, on obtient :
tR,cos π
2t= sin tet sin sin π
2t= cos t(4)
En utilisant la rotation de centre O et d’angle
π
2
, on prouve que
tR,cos π
2+t=sin tet sin π
2+t= cos t(5)
2
Enfin le théorème de Pythagore montre que (longueur de OM) :
tR,cos
2
t+ sin
2
t= 1 (6)
Cela prouve que cos et sin sont des fonctions bornées
1
.
Inversement, si aet bsont deux nombres réels tels que a
2
+b
2
= 1, les deux équations
cos t=aet sin t=b
définissent le nombre tmodulo 2π.
Angles opposés Angles supplémentaires
Angles complémentaires Angles différant de π/2
Remarque pratique – La périodicité des fonctions cos et sin permet de ramener la plupart des
démonstrations les concernant à l’intervalle ]π, π]; il est même souvent possible, vu les propriétés de
symétrie que l’on vient de rappeler de se ramener à l’intervalle [0, π], voire à l’intervalle 0,
π
2
.
1
Une fonction numérique (c’est à dire à valeurs réelles) fdéfinie sur Sy est bore s’il existe une constante Ktelle que
xS, |f(x)|K
3
1.3 Graphes
1.3.1 Tracé
Les considérations précédentes et l’observation du cercle trigonométrique permettent d’esquisser les
graphes de cos et de sin. Bien entendu un tracé précis suppose que l’on soit en mesure de calculer
effectivement le cosinus et le sinus d’un nombre, ce qui exige pour cela d’avoir avancé plus avant dans
la théorie; par exemple, on peut démontrer que si test positif
t1
6t
3
sin tt1
6t
3
+1
120t
5
résultat qui donne déjà d’assez bonnes approximations pour xappartenant à 0,
π
2
.(On renvoie pour
cela au chapitre sur les encadrements).
sinus et la droite d’équation y=x
cosinus
cos, sin et droite d’équation y=x
NB. Il faut savoir dessiner convenablement les graphes de cos et de sin.
4
1.3.2 Remarques géométriques
Le graphe de cos se construit en fait à partir de sa restriction à 0,
π
2
; en effet cos est paire; son
graphe est donc symétrique par rapport à l’axe des y; de plus la relation cos(πx) = cos xmontre
qu’il est également symétrique par rapport au point de coordonnées
π
2
; 0. La périodicité et quelques
considérations géométriques élémentaires montrent alors que le graphe de cos est symétrique par rapport
aux droites d’équation x=et par rapport aux points de coordonnées
π
2
+kπ, 0.
Le graphe de sin s’obtient de la même façon : en particulier sin est impaire; son graphe est donc
symétrique par rapport à l’origine; la relation sin(πx) = sin xmontre qu’il est également symétrique
par rapport à la droite d’équation x=
π
2
..
En fait il est inutile de reprendre les raisonnements faits à propos du cosinus si l’on remarque que les
graphes des deux fonctions sont isométriques : en effet la relation sin(x+
π
2
) = cos xmontre que l’on
passe du graphe de cos à celui de sin par la translation de vecteur
π
2
i.
On en déduit que le graphe de sin est également symétrique par rapport aux droites d’équation x=
π
2
+
et par rapport aux points de coordonnées (, 0) ..
On verra plus bas qu’il s’agit de fonctions dérivables; les graphes admettent donc des tangentes.
En particulier la tangente à l’origine au graphe de sin a pour équation y=x. Enfin sin est concave sur
[0, π], ce qui veut dire que sur cet intervalle son graphe est en dessous de ses tangentes et au dessus de
ses cordes, ce qui explique par exemple pourquoi l’on a :
t0,
π
2
,
2
π
tsin tt
Que le graphe de sin soit symétrique par rapport à l’origine montre également que sin est convexe
sur [-π,0]; en fait le graphe de sin présente à l’origine un point d’inflexion, autrement dit un point
où la concavité de la courbe s’inverse.
1.3.3 Valeurs particulières
Doivent être également connus les résultats du tableau suivant qu’un peu de géométrie élémentaire
permet de démontrer :
t0π/6π/4π/3π/2 2π/3 3π/4 5π/6π
cos t13/22/2 1/2 0 1/22/23/21
sin t0 1/22/2 1 3/22/2 1/2 0
N.B. On observera que les valeurs des sinus s’obtiennent en ”renversant” celles des sinus, ce qui n’est
guère étonnant puisque cos(
π
2
x) = sin x. Le passage aux angles supplémentaires permet par ailleurs
de calculer les cosinus et les sinus de 2π/3,3π/4,5π/6à partir des cosinus et des sinus de π/3, π/4, π/6.
1.3.4 À propos de quelques (in)égalités
Définition 1 Soit Sun sous-esemble de R. Une application f:SRest injective si, quels que soient
u, v appartenant à S, l’égalité f(u) = f(v)n’est possible que si u=v, ce qui revient encore à dire que
f(u)est différent de f(v)dès que uest différent de v.
La 2π-périodicité de cos et de sin montre donc que cos et sin ne sont pas des applications injectives.
On peut très bien avoir cos u= cos v(ou sin u= sin v) sans que usoit égal à v, par exemple avec u= 0
et v= 2π. En fait l’observation du cercle trigonométrique ou des graphes de cos et de sin (cf. les
remarques géométriques faites plus haut) montrent que :
sin u= sin vu=v[2π]ou u=πv[2π]
cos u= cos vu=v[2π]ou u=v[2π](7)
cos u= sin vu+v=
π
2
[2π]ou vu=
π
2
[2π]
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