revue
HHV8, maladie de Kaposi
et transplantation d’organe :
devrions-nous procéder à un dépistage ?
A.-G. Marcelin
Service de Virologie,
Université Pierre et Marie Curie EA 2387,
Hôpital Pitié-Salpêtrière,
83, boulevard de l’Hôpital,
75013 Paris
Résumé.L’incidence de la maladie de Kaposi (MK) associée à l’herpèsvirus
humain 8 ou virus associé à la maladie de Kaposi (HHV8/KSHV) à la suite d’une
transplantation d’organe est 500 à 1 000 fois plus élevée que dans la population
générale et son apparition est associée à la thérapie immunosuppressive. L’inci-
dence rapportée de MK post-transplantation va de 0,5 à 5 %, suivant le pays
d’origine du patient et le type d’organe qu’il a reçu, principalement à la suite
d’une transplantation rénale. La MK post-transplantation est causée par deux
mécanismes possibles : la réactivation de l’HHV8 chez les patients qui étaient
déjà infectés par le virus avant la greffe et la contamination du receveur par le
biais de la greffe des organes du donneur infecté par HHV8. La réactivation de
l’HHV8 semble être le mécanisme prédominant dans la survenue de MK
post-transplantation, plutôt que les infections via la greffe. Cependant, certaines
études, dont les résultats sont fondés non seulement sur des données sérologi-
ques, mais aussi sur le traçage moléculaire de l’infection virale, ont montré que
la transmission de l’HHV8 liée aux organes infectés pourrait être plus répandue
qu’on ne le pensait auparavant et être associée dans certains cas à une maladie
très sévère liée à l’HHV8. On ne dispose pas actuellement d’évaluations précises
de la séroprévalence de l’HHV8 dans la population des donneurs et des receveurs
d’organes dans différents pays. De nombreuses études ont suggéré l’intérêt
potentiel de procéder à une recherche des anticorps anti-HHV8 chez les don-
neurs et les receveurs d’organe. Cependant, à ce jour, si les résultats de ces études
plaident effectivement en faveur d’une recherche de l’HHV8, même dans les
pays de faible prévalence d’infection, ce n’est pas pour rejeter la greffe, mais
pour posséder une information sur le statut HHV8 afin de pouvoir surveiller,
cliniquement et biologiquement, les patients chez lesquels risquent de se déve-
lopper des maladies liées au virus. La recherche des anticorps anti-HHV8
pourrait ainsi être effectuée dans les jours qui suivent la transplantation et les
résultats transmis aux médecins rétrospectivement. En conclusion, la question
du dépistage de l’HHV8 chez les donneurs et les receveurs, même dans les pays
à faible prévalence d’infection à HHV8, se pose toujours et des études prospec-
tives s’imposent pour évaluer les bénéfices des stratégies pré et post-
transplantation.
Mots clés :HHV8, transplantation, dépistage, Kaposi, transmission
Abstract.The incidence of Kaposi’s sarcoma (KS) related to Kaposi’s sarcoma
associated herpesvirus (KSHV/HHV-8) after organ transplantation is 500-1 000
times greater than in the general population and its occurrence is associated with
immunosuppressive therapy. The reported incidence of post-transplant KS
ranges from 0.5 % to 5 %, depending on the patient’s country of origin and the
Tirés à part : A.-G. Marcelin
Virologie 2007, 11 (4) : 279-88
doi: 10.1684/vir.2007.0105
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type of organ received, mainly following renal transplantation. Post-transplant
KS is caused by two possible mechanisms : KSHV reactivation in patients who
were infected before the graft and KSHV contamination from infected organs
donor to the recipient. KSHV reactivation appears to play a greater role on the
risk of KS than incident infections. However, some studies, with findings based
not only on serological data but also on molecular tracing of the viral infection,
have shown that organ-related transmission of KSHV could be more common
than previously thought and associated in some cases with severe KSHV related
disease. Precise estimates of KSHV seroprevalence in the organ donor and
recipient populations in different countries are lacking. However, studies have
reported seroprevalences among donors and recipients that are similar to those
among the general population of the country considered. Many studies have
suggested the potential interest of screening of KSHV antibodies among organ
donors and recipients. However, to date the results of these studies have argued
in favor of KSHV screening, even in low KSHV infection prevalence countries,
not to exclude the graft but to have the KSHV status information in order to have
the opportunity to monitor, clinically and biologically, patients at risk to KSHV-
related disease development. The detection of KSHV antibodies could be done
the days after the transplantation and the results transmitted to the physicians
retrospectively. In conclusion, the question of screening donors and recipients
for KSHV, even in low KSHV infection prevalence countries, is still debated and
prospective studies are needed to evaluate the benefit of pre and post-
transplantation strategies.
Key words:HHV8, transplantation, screening, Kaposi, transmission
Malgré les progrès réalisés dans la transplantation de cel-
lules souches et d’organes, les infections opportunistes
constituent une cause importante de morbidité et de morta-
lité chez les receveurs. Les herpèsvirus persistent sous
forme latente après la primo-infection et peuvent se réacti-
ver sous traitement immunosuppresseur, comme c’est le
cas après une transplantation, ce qui en fait des agents
pathogènes particulièrement préoccupants chez les rece-
veurs d’organes. C’est le cas notamment de l’herpèsvirus
humain 8 (HHV8) et du virus d’Epstein-Barr (EBV). Bien
que certains agents antiviraux aient montré une activité in
vitro sur la réplication virale de l’HHV8, aucun n’a réelle-
ment fait la preuve d’une efficacité in vivo, que ce soit sur le
HHV8 ou l’EBV. C’est pourquoi la restauration de la ré-
ponse immunitaire de l’hôte contre ces virus est essentielle
pour le contrôle des tumeurs viro-induites chez les rece-
veurs d’organes. Les cancers de la peau constituent les
tumeurs malignes les plus répandues chez les receveurs
d’organes [1]. En ce qui concerne l’HHV8 en particulier,
l’incidence de la maladie de Kaposi (MK) à la suite d’une
transplantation d’organe est 500 à 1 000 fois plus élevée
que dans la population générale [2, 3]. L’apparition de MK
chez les receveurs d’organes est associée au traitement
immunosuppresseur, comme le montre la rémission des
lésions du MK à la suite de la réduction ou de l’arrêt d’un tel
traitement [4]. L’incidence rapportée de MK post-
transplantation varie de 0,5 à 5 %, selon le pays d’origine
du patient et le type d’organe transplanté [5, 6] (tableau 1).
La MK post-transplantation se développe principalement
chez les receveurs d’organes solides et a été décrite surtout
après transplantation rénale. Elle est causée par deux méca-
nismes possibles : la réactivation de l’HHV8 chez les pa-
tients qui étaient déjà infectés avant la greffe et la contami-
nation par l’HHV8 par le biais des organes infectés du
donneur qui sont greffés au receveur. La proportion respec-
tive des cas causés par chacun de ces deux mécanismes
varie grandement selon la prévalence des anticorps anti-
HHV-8 dans les populations étudiées. Pour celles où la
prévalence de l’infection est élevée, comme l’Italie, la MK
post-transplantation est principalement causée par la réac-
tivation de l’HHV8 ; alors que dans les zones de faible
prévalence, comme la Suisse, il a été montré qu’elle pouvait
être est due à une primo-infection [7, 8]. Cependant, certai-
nes études, dont les résultats sont basés non seulement sur
des données sérologiques mais aussi sur le traçage molécu-
laire de l’infection virale, ont montré que la transmission de
l’HHV8 via les organes greffés pourrait être beaucoup plus
répandue qu’on ne l’avait pensé jusqu’ici. En outre,
d’autres voies de transmission, comme celle des produits
sanguins, n’ont pas pu être exclues formellement comme
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source possible de contamination, bien qu’elles semblent
exceptionnelles [9].
Mécanismes de développement
de MK post-transplantation
chez les receveurs d’organes solides
Incidence de MK post-transplantation
chez les receveurs d’organes solides
L’incidence de MK chez les receveurs d’organes dépend
principalement de l’épidémiologie de l’HHV8 dans la po-
pulation concernée et du type de transplantation effectuée.
Le risque de MK est de1à3%entransplantation rénale
(tableau 1), le délai moyen de diagnostic de MK se situant
entre 29 et 31 mois [10, 11]. En Arabie Saoudite, où l’inci-
dence de l’HHV8 est élevée, le risque de MK après trans-
plantation est plus important et se situe entre 3 et 5 % [6].
Ce risque peut également atteindre un chiffre élevé chez les
patients transplantés appartenant à d’autres groupes ethni-
ques chez lesquels l’incidence de l’infection à HHV8 est
élevée, comme par exemple les patients originaires de la
zone méditerranéenne ou du Moyen Orient.Ainsi, dans une
étude, l’incidence globale parmi les patients transplantés
s’élevait à 0,78 %, mais elle passait à 4 % chez les patients
d’origine juive ou méditerranéenne [2]. Le type de trans-
plantation constitue un autre facteur clé. L’incidence est de
MK est de 0,2 à 2,8 % chez les transplantés de foie [12, 13],
de 0,41 à 11 % chez les transplantés de cœur [14-18] ; elle
s’élevait à 2 % après une transplantation rein-pancréas
[19], et deux patients seulement ont été signalés chez les
transplantés de poumon [20, 21]. Dans une étude réalisée
en France sur 7 923 receveurs d’organes, la prévalence
globale de MK s’élevait à 0,52 % mais, par rapport à
d’autres études, les cas d’apparition de MK étaient plus
fréquents chez les transplantés de foie (1,24 %) que chez
les transplantés de rein (0,45 %) ou de cœur (0,41 %) [22].
Réactivation du HHV8 à la suite
de transplantations d’organes
Transplantation de rein
Dans ce contexte, la plupart des cas de MK post-
transplantation se développent à la suite d’une réactivation
virale, puisque plus de 80 % des receveurs d’organes souf-
frant de MK sont séropositifs pour l’HHV8 avant de subir
une transplantation [23] (tableau 2). Selon une étude ré-
trospective italienne, 10 receveurs d’organes sur 11 (91 %)
ayant développé une MK étaient séropositifs pour l’HHV8
avant leur transplantation [7]. Ces données sont confirmées
par celles d’une autre étude, qui a démontré qu’une MK
s’était développée chez trois receveurs sur 21 (14,3 %) qui
étaient séropositifs pour l’HHV8 avant leur transplantation
de rein [24]. Il a été montré que chez les patients qui étaient
séropositifs pour l’HHV8 avant de subir une transplanta-
tion de rein, le risque de MK post-transplantation était de 23
à 28 %, comparé à un risque de 0,7 % chez les patients
séronégatifs pour l’HHV8 avant transplantation [23, 25].
Une étude française rétrospective réalisée entre 1990
et 1996 a montré que 32 patients (8 %) possédaient des
anticorps anti-HHV8 au moment de la transplantation et
que parmi ces 32 patients, 3 ans après la transplantation, la
survie s’élevait à 72 % et la prévalence de MK était de 28 %
(incidence de MK : 8,2/100 receveurs HHV8+/an). Une
analyse multivariée a identifié une infection bactérienne
Tableau 1.Incidence de la maladie de Kaposi (MK) dans les séries de
transplantés de rein de différents pays
Origine géographique des séries Incidence de la MK (%)
Allemagne [78] 0,26
Espagne [32, 79] 0,2-0,5
États-Unis [80] 0,5
Canada [73] 0,6
Italie [57] 0,7-3,3
France [22, 81] 0,4-2,4
Israël [82] 2,4
Turquie [52] 3
Afrique du Sud [83] 4-5
Arabie Saoudite [55] 4-5,3
Tableau 2.Receveurs d’organes solides avec réactivation de l’herpèsvirus humain 8 (HHV8)
Etude Type de
transplantation
Pays Nombre de transplantés HHV8
positifs avant transplantation (%)
Nombre de patients avec maladie
de Kaposi (%)
Cattani et al. Rein Italie 26/175 (15) 6/26 (23)
Frances et al. Rein France 32/400 (8) 9/32 (30)
Andreoni et al. Rein et foie Italie 21/130 (16) 3/21 (14)
Marcelin et al. Foie France 3/122 (2,5) 0/3 (0)
Aseni et al. Foie Italie 4/459 (0,9) 4/4 (100)
Emond et al. Cœur France 4/150 (2,7) 1/4 (25)
Sachsenberg et al. Poumon Suisse 1 (NA) 1 (NA)
NA : non applicable.
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sévère et/ou à Pneumocystis carinii (odds ratio : 8,6 ;
p = 0,019) comme facteur associé à la MK. Cela suggère
que le niveau d’immunosuppression pourrait constituer un
facteur important dans le développement de MK post-
transplantation.
Autres types de transplantation d’organes
Des cas de MK ont été rapportés après transplantation
d’organes solides, principalement chez les receveurs de
greffes de rein, mais aussi de foie, de cœur, de poumon et
d’allogreffe de moelle osseuse.
En ce qui concerne la transplantation de foie, une étude
italienne sur 130 receveurs de rein et de foie fait état d’un
taux de prévalence de l’HHV8 de 16,1 % avant transplan-
tation [24]. Dans cette étude, aucun des receveurs de foie
n’a développé de MK après la transplantation. De même,
sur 122 receveurs de foie français, la présence d’anticorps
anti-HHV8 dans le sérum de 3 receveurs (2,4 %) a été
détectée avant la transplantation et aucun de ces 3 receveurs
n’a développé de MK pendant la période de suivi [26]. En
revanche, une autre étude italienne a rapporté le suivi de
5 patients adultes qui ont subi une transplantation de foie et
développé une MK (du 9
e
au 23
e
mois suivant la transplan-
tation) sur un total de 459 patients étudiés. Quatre de ces
5 patients sont décédés de MK, ayant survécu de0à6mois
après que la maladie a été diagnostiquée, ce qui suggère un
taux élevé de mortalité dans ce contexte de greffe hépatique
[27].
Plusieurs cas de MK ont été rapportés après des transplan-
tations cardiaques. Par exemple, un des cas observé décrit
un lymphome primitif des séreuses associé à une infection
à HHV8 chez un transplanté de cœur, qui était probable-
ment déjà infecté avant la greffe [28]. Par la suite, une étude
française a rapporté un faible taux de MK chez les trans-
plantés de cœur : 1 patient sur 150 (0,67 %) qui était séro-
positif pour HHV8 avant la transplantation a développé une
MK après la transplantation. Ce taux peu élevé pourrait
s’expliquer par le fait que l’HHV8 n’est pas endémique en
France dans la population générale (prévalence de 2 %)
[29].
On a décrit très peu de cas de patients ayant développé une
MK à la suite d’une transplantation de poumon. Un des cas
observé fait état d’une MK cutanée, mais aussi au niveau du
poumon greffé. Les analyses sérologiques ont montré que
le donneur était séronégatif pour l’HHV8 et que le receveur
était séropositif pour HHV8 avant la transplantation pulmo-
naire, ce qui suggère que ce dernier était déjà infecté avant
la greffe et que le traitement immunosuppresseur a eu pour
conséquence de favoriser le développement de la MK
[21, 30].
Ces données suggèrent que la MK se développe principa-
lement chez les receveurs d’allogreffes de rein, mais que les
receveurs d’autres types d’organes sont aussi exposés au
risque de maladies liées à HHV8, y compris ceux qui vivent
dans des zones où le virus n’est pas très prévalent.
Enfin, une morbidité et une mortalité substantielles sont
associées au diagnostic de MK chez les transplantés. Dans
un vaste registre de tumeurs des transplantés, 143 patients
sur 356 (40,2 %) souffrant de MK présentaient des compli-
cations intestinales et, pour 61 patients sur 356 (17,1 %), la
cause du décès indiquée était la MK [31]. Bien que la
réduction des doses ou l’arrêt du traitement immunosup-
presseur puisse conduire à une rémission complète de MK,
parmi les patients en rémission, 65 % ont souffert d’une
perte de la greffe ou de fonctions diminuées, par rapport à
21 % dans la population globale des transplantés.
Contamination par l’HHV8 après la transplantation
d’organe
Transplantation de rein
Le premier cas rapporté suggérant qu’une infection de novo
peut se développer après une transplantation concerne celui
d’un transplanté de rein qui était séronégatif pour l’HHV8
avant la transplantation et pour qui la séroconversion
HHV8 est survenue 13 mois après la greffe, avec la décla-
ration d’une maladie de Castleman [7]. D’autres sérocon-
versions à l’HHV8 suivant une transplantation de rein ont
été décrites en Suisse. Sur une cohorte de 220 transplantés,
une MK s’est déclarée dans un délai de 26 mois chez
2 patients sur 25 (8 %) qui avaient développé une primo-
infection à HHV8 à la suite de la transplantation [8]. Ces
études ont suggéré pour la première fois que la transmission
de l’HHV8 pouvait se produire par allogreffe d’organe
(tableau 3). Cela a été confirmé par d’autres études faisant
état de taux de séroconversion à HHV8 à la suite de trans-
plantations rénales compris entre 2 et 5 % en Espagne et en
France, respectivement [32, 33]. En outre, une primo-
infection à HHV8 a été décrite chez 2 patients ayant tous
deux subi une transplantation de rein provenant d’un même
donneur séropositif pour l’HHV8. L’un de ces patients a
développé une MK disséminée et l’autre un syndrome
infectieux aigu, caractérisé par de la fièvre avec une plas-
mocytose, suivi d’une aplasie médullaire, et qui a entraîné
le décès du patient par insuffisance rénale et cardiaque [34].
Dans une étude plus récente, des marqueurs génétiques
spécifiques du donneur ont été détectés dans des cellules
néoplasiques infectées par l’HHV8 dans des lésions de MK
prélevées chez des transplantés rénaux. Ces résultats sug-
gèrent que, non seulement les cellules progénitrices de
l’HHV8, mais aussi celles de MK peuvent se reproduire
après une transplantation d’organe solide, survivre chez les
receveurs d’organes et subir une transformation et une
progression néoplasiques [35].
Autres types de transplantation d’organes
De faibles taux similaires de séroconversion à HHV8 ont
été rapportés après des transplantations de cœur et de foie.
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Parmi un groupe de 150 patients transplantés cardiaque,
une seule séroconversion à HHV8 a été observée après la
transplantation, sans développement de MK [36]. S’agis-
sant de transplantation de foie, sur un total de 122 donneurs
de foie et de leurs receveurs respectifs, 4 primo-infections à
HHV8 ont été détectées parmi les receveurs séronégatifs
pour l’HHV8 avant greffe et ayant reçu le foie d’un donneur
séropositif pour HHV8. Sur ces 4 receveurs, 2 patients
recevant un traitement immunosuppresseur particulière-
ment important ont développé des maladies à HHV8 symp-
tomatiques et sont décédés quelques mois après la trans-
plantation, d’une MK disséminée associée à une
lymphoprolifération à HHV8. Chez ces 2 patients, des
séquences du génome HHV8 étaient détectables en très
forte quantité dans les cellules mononucléées sanguines
périphériques et dans d’autres tissus, avant et à l’apparition
des pathologies liées au HHV8 [26]. Cela suggère qu’un
test sérologique pour détecter les anticorps anti-HHV8 et
une PCR HHV8 quantitative sur les cellules mononucléées
du sang circulant devraient être réalisés et combinés pour la
surveillance des transplantés ayant reçu un organe prove-
nant d’un donneur positif pour l’HHV8 [37].
En conclusion, même si les primo-infections à HHV8 à la
suite de transplantations d’organes semblent assez rares,
elles peuvent parfois aboutir à des issues fatales.
Sérologie HHV8 dans le contexte
d’une séroconversion
L’HHV8 n’est pas omniprésent dans la population géné-
rale, tout au moins aux Etats-Unis et en Europe du Nord, et
la sérologie peut donc s’avérer utile pour détecter les
primo-infections dans ces régions. Les tests sérologiques
actuels sont des tests d’immunofluorescence (IF) utilisant
des lignées de lymphocytes B infectés par l’HHV8 et des
tests immunoenzymatiques (Elisa) utilisant des protéines et
peptides HHV8 recombinants. Ces deux types de test per-
mettent de détecter les anticorps dirigés contre les protéines
virales exprimées durant un cycle lytique de réplication ou
en cours de latence. Les antigènes HHV8 ciblés par la
réponse sérologique sont donc de deux types : latents et
lytiques. Le principal antigène latent est l’antigène nu-
cléaire latent 1 (LNA1), qui est codé par l’ORF73. Les
principaux antigènes lytiques sont les produits des ORF65
(une protéine de capside) et K8.1 (une glycoprotéine asso-
ciée à la membrane). Bien qu’il y ait toujours débat sur le
meilleur test, il semblerait que le test IF utilisant des anti-
gènes du cycle lytique soit le plus sensible [38]. En effet, on
pourrait sous-estimer le taux de séroconversion en utilisant
uniquement les tests IF latents. Cela a été montré par une
étude dans laquelle aucune séroconversion n’avait été dé-
tectée avec les tests latents IF, y compris chez deux trans-
plantés hépatiques qui avaient développé une primo-
infection à HHV8 symptomatique documentée [26].
Cependant, avec le test IF lytique, il avait été détecté dans
cette étude une séroconversion HHV8 chez tous les patients
ayant reçu des organes provenant de donneurs infectés par
l’HHV8. Cela peut être lié au fait que les anticorps dirigés
contre les antigènes lytiques sont apparus avant les anti-
corps dirigés contre les antigènes latents, phénomène bien
connu pour l’EBV. Cependant, il a été montré également
que le test IF latent était le test le plus spécifique. Ainsi, en
combinant les tests lytiques et latents pour évaluer la séro-
positivité, on devrait éviter le risque d’avoir des résultats
faussement négatifs et obtenir une évaluation exacte du
taux de séroconversion après la transplantation.
Facteurs de risque associés
au développement de MK post-
transplantation chez les receveurs
d’organes solides
Il est apparu que pratiquement tous les patients receveurs
d’organes solides souffrant de MK étaient séropositifs pour
l’HHV8, à l’exception de quelques cas douteux [6, 8, 18,
39, 40]. Cependant, certains facteurs peuvent avoir une
influence sur le risque de développer la maladie pour les
patients infectés préalablement à la greffe, y compris l’ori-
gine ethnique, le taux de séroprévalence dans la zone géo-
graphique d’origine, le sexe, l’âge et le degré d’immuno-
suppression [31, 41-43]. L’incidence de MK post-
transplantation est plus élevée dans les pays ou les groupes
Tableau 3.Receveurs d’organes solides avec transmission de l’herpèsvirus humain 8 (HHV8) par le donneur
Etude Type de
transplantation
Pays Cas de transmission ou taux
de séroconversion (%)
Nombre de patients avec maladie de
Kaposi après séroconversion (%)
Luppi et al. Rein Italie 2 patients 2/2
Regamey et al. Rein Suisse 25/220 (17) 2/25 (8)
Milliancourt et al. Rein France 6/287 (2) 0/6 (0)
Munoz et al. Rein, foie et cœur Espagne 3/59 (5) 4/70 (5,7)
Emond et al. Cœur France 1/146 (0,7) 0/1 (0)
Marcelin et col. Foie France 4/122 (0,3) 2/4 (50)
MK : maladie de Kaposi.
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