C AR MI G N AC ' S N OTE 31.05.2016 L'ATTITUDE DU SNIPER Juin 2016 par Didier SAINT-GEORGES Managing Director et Membre du Comité d’Investissement 31.05.2016 Les changements de tendances passent en général par une période d'instabilité Depuis que leur confiance dans le soutien inconditionnel des banques centrales a commencé de s'émousser (voir notre Note de juillet 2015 "La grande transition a commencé"), les marchés naviguent à vue. Faute de visibilité, leur appétit pour le risque fluctue au gré des diverses données qui invalident souvent les précédentes, sur la croissance, l'inflation ou les tergiversations de la Fed. De fait, à travers cette instabilité, les indices actions S&P 500 et MSCI Monde finissent le mois de mai sur à peu près les mêmes niveaux qu'un mois plus tôt, l'Euro Stoxx 50 progresse un peu, tandis que l'indice chinois continue de céder du terrain. Quant aux taux d'intérêt à long terme, ils continuent de se détendre, aux États-Unis comme en Europe, en dépit des attentes de relèvement des taux par la Fed. Il serait présomptueux de prédire quand cette valse-hésitation prendra fin (voir notre Note d'avril dernier "Danse sur un volcan"). Mais en attendant que la musique cesse, il demeure essentiel de rester lucide sur le régime d'instabilité dans lequel les marchés sont rentrès, du fait de l'asymétrie des risques en présence. Aux États-Unis en particulier, les investisseurs devront tôt ou tard prendre acte de la baisse des marges, de la faiblesse de la productivité, et de l'augmentation du levier financier des entreprises. Avec une valorisation actuelle de 18 fois les résultats attendus cette année, le marché américain est fragile. En dépit des bons chiffres de mai, la tendance de la consommation ne progresse plus depuis un an, et risque de faiblir sous le poids de l'augmentation des prix de l'énergie et des loyers. En Chine, l'amélioration de la performance économique obtenue grâce au plan de relance annoncé au premier trimestre semble avoir rassuré les investisseurs globaux (pas toutefois les investisseurs chinois). Mais elle s'accompagne d'une forte augmentation du risque économique et financier à moyen terme. Le réveil des investisseurs pourrait survenir soit d'une rapide déception sur la soutenabilité du plan de soutien, soit de la prise de conscience de la fragilité que provoque l'envolée de l'endettement des entreprises. Quant à l'Union européenne, elle ajoute à ses incertitudes économiques plusieurs risques politiques et géopolitiques proprement existentiels, qu'il serait négligent d'ignorer. Dans ce contexte, il faut investir les yeux bien ouverts. La période de grande modération dont ont fait preuve les marchés de mi-2012 à mi-2015, grâce à la confiance placée sans réserve dans les banques centrales, a pris fin. Quant à l'espoir que des relances fiscales prennent le relai du soutien monétaire, il se heurte aux niveaux d'endettement souverains, qui empêchent toute marge de manoeuvre significative. Des constructions de portefeuilles "tous temps", c'est-à-dire peu vulnérables aux aléas économiques et politiques, sont désormais nécessaires, ainsi qu'une gestion très active de toutes les opportunités de marchés, à la manière d'un sniper. La consommation, dernier croissance américaine bastion de la En dépit d'une activité manufacturière déjà très affaiblie, les États-Unis présentent encore un profil de croissance relativement enviable, grâce à une consommation résiliente. A y regarder de plus près, on observe cependant que le rythme de celle-ci ne progresse plus depuis un an. Les mêmes causes produisant les mêmes effets, l'infléchissement de la tendance des marchés, financiers et immobiliers, a interrompu l'effet d'enrichissement des foyers américains, qui avait soutenu la consommation depuis 2010. Cette dynamique déjà affaiblie subit de surcroît maintenant la reprise des prix de l'énergie et des loyers, qui agit comme une taxe sur la consommation. Il est à cet égard éclairant de constater que, en dépit d'un des hivers les plus doux des cent dernières années, les distributeurs traditionnels (de Walmart à Macy's, en passant par Target et Nordstrom) ont affiché depuis le début de l'année leurs plus faibles résultats depuis la récession de 2009. Certes les résultats de l'E-commerce sont toujours en forte croissance. Mais ils ne peuvent masquer le signal que nous envoie la faiblesse des résultats affichés au premier trimestre par les grands magasins (-47,8%) et les hypermarchés (-14%). Un ralentissement de la consommation serait d'ailleurs doublement problématique car les distributeurs américains ne semblent pas s'y être préparés : le niveau de leur stocks atteint aujourd'hui près d'une année et demie de chiffre d'affaires, soit son plus haut niveau depuis 2009. Pavés supplémentaires dans le jardin de la croissance américaine : la Fed souhaite reprendre son cycle de resserrement monétaire dès que les marchés le permettront, la création d'emplois décélère, l'utilisation des capacités de production baisse depuis un an, le nombre des permis de construire chute depuis le début de l'année, et l'incertitude croissante Quant à l'issue des élections présidentielles risque de pénaliser l'investissement au second semestre. La confiance que les marchés conservent toujours dans la poursuite de la locomotive américaine nous semble complaisante. L'aléa chinois Le redressement de l'économie chinoise au premier trimestre est spectaculaire, mais ne doit pas faire illusion : en s'obstinant à maintenir coûte que coûte son rythme de croissance, la Chine ne ferait qu'aggraver son problème déjà aigu de surendettement. Sur la tendance actuelle, le taux d'endettement total de 240% aujourd'hui atteindrait un niveau critique de l'ordre de 320% dans cinq ans, et s'accompagnerait d'une forte détérioration du ratio de couverture des engagements bancaires par les dépôts. Le taux de défauts sur les prêts bancaires, déjà très sous- estimé selon nous aujourd'hui, accélérerait encore et ménerait très certainement à une grave crise de crédit. Par conséquent, soit les autorités prennent le risque d'amener l'économie chinoise vers ce précipice, soit, plus raisonnablement, elles finissent par accepter l'impact sur la croissance à court terme que requiert la poursuite nécessaire des réformes de fond, l'assainissement du secteur bancaire, et le rééquilibrage de l'activité économique. L'hypothèse la plus constructive est que la Chine, à tout le moins, concède à un infléchissement de son rythme de croissance dès le second semestre de cette année. Le risque politique Les marchés ont coutume d'ignorer le risque politique, qui a en effet généralement peu de prise sur l'économie réelle. Mais ils devraient peut-être s'en soucier cette fois-ci. Presqu'inconcevable il y a encore six mois, l'élection d'ici la fin de l'année d'un Président ouvertement protectionniste, et disposé à renégocier la dette fédérale est désormais plausible aux États-Unis. Quant à un vote favorable à la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne, qui se produirait pour des raisons principalement d'ordre politique, il constituerait Quant à lui a minima une menace sérieuse de perturbations pour le commerce intereuropéen et la croissance. Quantités d'estimations plus ou moins argumentées circulent, la plupart partisanes, sur les probabilités des événements en question, et leurs conséquences économiques. Mais quoiqu'il en soit, l'important est que le risque est ici asymétrique : au mieux, les différentes échéances électorales accoucheront d'un statu quo, alors qu'au pire elles pourraient déclencher une réaction en chaîne. Car tout vote de rupture constituerait un précédent majeur qui dynamiserait, voire légitimerait, d'autres votes anti-establishment, ou anti-européens. Les marchés s'orientent donc bien vers cette nouvelle tendance que nous décrivions en début d'année, moins soutenue par l'intervention croissante des banques centrales, et plus exposée aux aléas économiques et politiques. Les changements de tendances passent en général par une période d'instabilité, dans laquelle les marchés sont entrès de plain-pied. Ce contexte incite à demeurer en embuscade, prêt à exploiter le plus précisément possible les fenêtres de tirs, à partir d'un positionnement sûr. Stratégie d'investissement Les devises Le mouvement d'affaiblissement du dollar américain du début d'année a marqué une pause au cours du mois de mai avec un léger raffermissement du billet vert. En conséquence les pressions baissières sur les principales monnaies émergentes sont réapparues : on notera en particulier l'évolution de la devise chinoise qui flirte désormais avec son point bas de janvier dernier. Par ailleurs, la livre britannique qui avait beaucoup pâti des craintes d'un vote du Royaume-Uni pour sortir de l'Union Européenne, s'est reprise sur fond d'avancée dans les sondages des partisans du maintien dans l'UE. Notre stratégie de change équilibrée qui vise à éviter la plupart des devises émergentes ainsi que la livre sterling nous aura permis de traverser cette période sans trop de volatilité. Les taux Les différentes déclarations des membres de la Fed auront permis de préparer le marché à de futures hausses de taux aux États-Unis sans créer de stress significatif sur les marchés financiers. Les taux longs américains sont ainsi restés remarquablement stables au cours du mois de mai. En zone euro, les taux ont été globalement stables au cours des deux derniers mois, à l'exception des taux grecs qui se sont fortement détendus suite aux décisions actées avec les créanciers du pays ouvrant la voie au déblocage d'une nouvelle tranche d'aide. Notre petite position en emprunts grecs souverains en a particulièrement profité. En anticipation de la volatilité liée au référendum britannique sur le " Brexit ", nous avons quelque peu réduit nos positions sur le crédit et conservé une sensibilité modérée. Les actions Les marchés actions ont été globalement stables au mois de mai, mais avec des divergences entre des marchés émergents connaissant une phase de consolidation, et des marchés européens marquant un solide rebond. Notre volonté de conserver une allocation géographiquement diversifiée nous aura permis de traverser ces renversements de momentum dans de bonnes conditions. Notre allocation thématique aura connu peu de changements au cours de ces derniers mois en continuant de faire la part belle aux secteurs et sociétés capables de délivrer des progressions de résultats solides dans un environnement de croissance économique rare. Si nos taux d'exposition ont été ajustés tactiquement, notre principal moteur de performance actions reste la sélection de valeurs avec des choix sectoriels forts, de façon à pouvoir générer de la performance tout en anticipant les risques à venir. Les matières premières Carmignac Portfolio Commodities a largement surperformé son indice de référence au cours du mois de mai, notamment grâce à ses positions sur les valeurs énergétiques. Notre sélectivité aura porté ses fruits alors qu'une différentiation semble s'opérer au sein des matières premières entre le segment énergétique tiré par des fondamentaux en nette amélioration, et le segment minier où l'espoir porté par une reprise de la consommation chinoise de minerais semble s'estomper. Fonds de fonds Nos Fonds de fonds ont enregistré une performance stable au cours du mois de mai. Tant les niveaux d'exposition que les allocations restent équilibrés, de façon à pouvoir absorber la volatilité à venir sur les marchés. Informations légales Les informations présentées ci-dessus ne constituent ni une offre de souscription, ni un conseil en investissement. Ces informations peuvent être partielles et sont susceptibles d’être modifiées sans préavis. 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