Neurologies • Octobre 2011 • vol. 14 • numéro 141 431
RETOUR DE CONGRÈS…
PHALÉES
CHRONIQUES
FRACTAIRES :
STIMULONS LES
PATIENTS !
La migraine chronique aecte 3 %
de la population générale adulte.
La gestion thérapeutique de ces
patients n’est pas aisée (mau-
vaise tolérance et ecaci toute
relative des traitements médica-
menteux traditionnels). Lalgie
vasculaire de la face chronique
réfractaire, heureusement beau-
coup plus rare (1 % des AVF), en-
traîne un handicap énorme chez
les patients. C’est pourquoi les
techniques de neuromodulation
(terme générique qui désigne un
ensemble de techniques permet-
tant d’interférer avec l’activité du
système nerveux central ou ri-
phérique) sont en plein essor dans
ces indications.
* Service de Neurologie B, Hôpital Roger Salengro, CHRU de Lille
** Centre Urgences céphalées, Hôpital Lariboisière, Paris
*** Service Neurochirurgie, CHU Timone, Marseille
Jean Shoenen (Liège, Belgique)
(1) a fait, en plénière, un tour d’ho-
rizon des techniques utilisées avec
notamment et par ordre d’appari-
tion historique dans l’AVF chro-
nique réfractaire la stimulation
cérébrale profonde hypothala-
mique homolarale, en sachant
que cette technique à risque est
quasi abandonnée, avec actuel-
lement des travaux de recherche
prometteurs sur la stimulation
du nerf Grand Occipital et encore
plus récemment la stimulation du
ganglion sphéno-palatin (comme
traitement des crises d’AVF chez
les patients non répondeurs aux
traitements conventionnels) avec
présentation d’une étude euro-
péenne en cours avec inclusion de
12 patients (2).
Dautres techniques (stimulation
du nerf vague, stimulation double :
nerf Grand Occipital et nerf supra-
orbitaire) existent, mais avec un
niveau de développement clinique
moindre.
La démarche est similaire dans la
migraine chronique avec un essai
en cours sur la stimulation du nerf
Grand Occipital par le sysme Ge-
nesis de St Jude Médical (3).
A l’heure les nouveautés thé-
rapeutiques pharmacologiques
se font rares dans ces aec-
tions particulièrement invali-
dantes, des données factuelles
robustes dans ces diérentes
techniques de neuromodula-
tion sont désormais requises
SOMMEIL ET
PHALÉES :
DES RELATIONS
TUMULTUEUSES
L’IHC a consacré une de ces ses-
sions scientifiques aux liens entre
sommeil et céphalées.
• Une première partie, plus fonda-
mentale, était consacrée aux liens
physiopathologiques entre cépha-
lées et sommeil par P. Holand (4).
15e International Headache
Congress
Neuromodulation, sommeil, hypotension du LCR
n
Le 15e International Headache Congress, congrès dévolu aux céphalées qui a lieu tous les
2 ans, s’est tenu à Berlin du 23 au 26 juin, capitale européenne étonnamment calme et à la
circulation fluide par rapport aux capitales latines. Parmi les très nombreuses communications,
nous avons choisi de retenir la piste de la neuromodulation l’aide de devices variés) dans les
céphalées chroniques réfractaires, les interrelations sommeil et céphalées et, pour l’apport im-
médiat dans la pratique, la communication de Lariboisière sur les céphalées par hypotension
du LCR.
Christian Lucas*, Dominique Valade** et Anne Donnet***
RETOUR DE CONGRÈS…
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Lalgie vasculaire de la face et la
migraine peuvent être considées
comme des maladies chronobiolo-
giques pour lesquelles l’hypotha-
lamus et le tronc cérébral sont les
régions anatomiques qui jouent
un rôle fondamental. Le noyau
suprachiasmatique est plus par-
ticulièrement le chef d’orchestre
de nos rythmes biologiques. Lhy-
pothalamus, cette fois-ci dans sa
partie antérieure, joue également
un rôle clef, puisquune lésion de
cette gion peut entraîner une in-
somnie prolongée.
Trois substances ont une action
fondamentale : les orexines, la mé-
latonine et l’adénosine. Si les deux
premières ont déjà fait lobjet de
nombreuses publications, l’adé-
nosine semble avoir une action
sur le métabolisme énertique et
un lien avec le noyau ventral pré-
optique de l’hypothalamus.
Une mise au point de Dagny
Holle (5) a é faite sur la pha-
lée hypnique, comme mole des
relations particulières entre som-
meil etphalées.
On rappellera qu’il y a dans la lit-
térature 175 cas publiés, en parti-
culier à travers plusieurs grandes
séries allemandes, françaises
et taïwanaises. Si sa prévalence
réelle est toujours inconnue (vrai-
semblablement entre 0,07 à 0,1 %),
cette céphalée survient de ma-
nière exclusivement nocturne, et
est associée à un comportement
moteur particulier, obser de ma-
nière sysmatique, et diérent de
celui décrit au cours de la crise de
migraine ou d’algie vasculaire de la
face.
Les études polysomnographiques
ont bien démontré que la surve-
nue de la céphalée se faisait aussi
bien dans le sommeil REM, que
lors du sommeil non-REM. Des
apnées peuvent être mesurées,
mais sans corrélation temporelle
avec la céphalée ; elles sont proba-
blement en rapport avec lâge des
patients (classiquement supérieur
à 50 ans).
Enfin l’imagerie structurale ali-
sée chez 14 patients versus 14 té-
moins a montré une diminution
de la substance grise de l’hypotha-
lamus postérieur.
Sur le plan thérapeutique, le
consensus se fait sur la caféine, à
la fois comme traitement de crise
et de fond. Lutilisation du lithium,
dont l’ecacité est certes démon-
trée, mais à l’origine de nombreux
eets secondaires, doit se faire
avec prudence.
Lisotto (6) qui, dans un poster,
faisait une synthèse des dié-
rentes options thérapeutiques
au cours des céphalées hypniques,
positionnait cependant en pre-
mière intention le lithium, en rai-
son de son niveau de preuve, et en
seconde intention l’indométacine,
puis la caine et la mélatonine.
Cette stratégie nest pas la même
que celle proposée en France,
l’oxétorone a une place de choix.
Malheureusement, cette molé-
cule étant purement française, il
est dicile de la mettre en exergue
dans des recommandations inter-
nationales.
Une troisième partie faite par S.
Evers (7) abordait les rapports au
sens large entre sommeil et cépha-
lées.
A des comorbidités classiques
entre migraine et apnées, et mi-
graine et jambes sans repos, on
notera la fquence des apnées du
sommeil au cours de l’algie vas-
culaire de la face. La nature de
ces apnées étant centrale, et non
pas obstructive, cela explique que
la CIPAP n’a que peu d’eet chez
ces patients.
• Enfin, la classification inter-
nationale des troubles du som-
meil fait état d’une céphalée qui
est inconnue de l’IHS.
Il s’agit de la céphalée en coup
de tonnerre nocturne, reconnue
comme une entité dont la particu-
larité est de survenir au moment
du réveil ou lors de la transition
d’un stade à l’autre de sommeil.
Ceci devrait éveiller la curiosité
des spécialistes de laphae…
HYPOTENSION
SPONTANÉE DU LCR
ET BLOOD PATCH :
L’EXPÉRIENCE DE
LARIBOISIÈRE
Le Centre Urgences et Cépha-
lées (CUC), par l’intermédiaire
de Caroline Roos (8), a rapporté
en plénière son expérience du
blood patch dans le traitement des
céphalées par hypotension spon-
tanées du LCR.
Ils ont inclus 80 patients (dont
55 femmes) ayant eu des cépha-
lées par hypotension du LCR sans
brèche dure-mérienne évidente,
entre 2004 et 2009. 75 de ces
80 patients avaient des céphalées
typiquement à l’orthostatisme
et 66 avaient les anomalies IRM
classiques (prise de contraste des
espaces méningés, ptose des élé-
ments du sysme nerveux cen-
tral…). Ces patients avaient é
diagnostiqs t, en général dans
le mois suivant le début des symp-
tômes.
15 de ces 80 patients ont été amé-
liorés par les traitements conven-
tionnels (repos, caféine). Un blood
patch a été réalisé chez 64 patients
(un patient l’a refusé) avec une
guérison chez 77 % de ceux-ci. Un
2eblood patch a été réalisé chez
14 % des patients et un 3e chez 2 %.
Un hématome sous-dural a été
nochez 19 patients avec une pré-
dominance masculine (44 vs 14 %)
15e INTERNATIONAL HEADACHE CONGRESS
Neurologies • Octobre 2011 • vol. 14 • numéro 141 433
résolutifs soit après traitement
conventionnel dans 0,5 % des cas,
soit après blood patch dans 58 %
des cas mais nécessitant un drai-
nage neurochirurgical dans 26 %
des cas.
Le blood patch entraînait de
meilleurs résultats chez les
femmes (68 vs 45 %), sans doute
du fait d’un diagnostic et d’une
prise en charge des phaes par
hypotension spontanée du LCR
plus précoce que chez les hommes
(24 j ± 27 vs 29 j ± 51).
On retiendra donc l’intérêt de
faire tôt le diagnostic et le trai-
tement de l’hypotension spon-
tanée du LCR, afin non seule-
ment de soulager le patient,
mais aussi d’éviter les com-
plications de type hématome
sous-dural, potentiellement
gravissime n
1. Shoenen J. Medical device treatments for headache. XVth International
Headache Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
2. Schoenen L, Jensen R, Lantéri-Minet M et al. Caparso pathway CH-1
study: sphenopalatine ganglion (SPG) stimulation for acute treatment of
chronic cluster headache (CCH). Initial results. XVth International Headache
Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
3. Silberstein S, Dodick D, Saper J et al. The safety and efficacy of occipital
nerve stimulation for the management of chronic migraine. XVth Interna-
tional Headache Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
4. Holand P. The pathophysiological link between sleep and headache.
XVth International Headache Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
5. Holle D. Hypnic headache. A model for sleep-related headache. XVth In-
ternational Headache Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
6. Lisotto C, Mainardi F, Maggioni F, Zanchi G. The treatment of
hypnic headache: review of the literature including a personal new
large case. XVth International Headache Congress. Berlin, 23-26 juin
2011.
7. Evers S. Sleep in headache disorders-headache in sleep disorders. XVth
International Headache Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
8. Roos C, Appa Plaza P, Rossignol M et al. Spontaneous intracranial hypo-
tension. A prospective series of 80 patients. XVth International Headache
Congress. Berlin, 23-26 juin 2011.
BiBliographie
Mots-clés : Céphalées, Céphalées
chroniques réfractaires, Migraine,
Algie vasculaire de la face,
Neuromodulation, Sommeil,
Hypothalamus, Orexines, Mélatonine,
Adénosine, Céphalée hypnique,
Apnées, Syndrome des jambes sans
repos, Céphalée en coup de tonnerre,
Caféine, Hypotension du LCR, Blood
patch, Hématome sous-dural
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