Chapitre 1 Séries Numériques 1.1 1.1.1 Suites Numériques Définitions Une suite numérique est une application de N (ou d’une partie de N) à valeurs dans R ou dans C. On la note n → u(n), ou n → un , et on désigne la suite (c’est-à-dire l’application) par (un )n∈N . Suite convergente La suite numérique (un )n∈N est convergente s’il existe L, appartenant à R ou C tel que : ∀ǫ > 0, ∃N ∈ N / n > N =⇒ |un − L| < ǫ. Une suite non convergente est dite divergente. Dans le cas où (un )n∈N est une suite complexe, et L un nombre complexe, |un − L| désigne le module de un − L et non plus sa valeur absolue. On appelle L la limite de la suite et on note : lim un = L. n→+∞ Limites infinies (un )n∈N étant une suite réelle : lim un = +∞ ⇐⇒ ∀A > 0, ∃N ∈ N / n > N =⇒ un > A. n→+∞ La définition est analogue pour une limite égale à −∞. Remarque 1.1. Une suite qui tend vers l’infini est divergente. Convergent sousentend dans R ou dans C. Interprétation graphique : Dans le cas d’une suite réelle qui admet une limite finie, la condition signifie que pour tout réel ǫ strictement positif, l’intervalle ]L − ǫ, L + ǫ[ contient tous les termes de la suite, sauf (éventuellement) un nombre fini. 9 CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 10 Dans le cas d’une suite complexe, c’est le disque de centre L et de rayon ǫ qui contient tous les termes de la suite sauf un nombre fini. Dans le cas d’une suite réelle qui tend vers +∞, on remplace l’intervalle ]L − ǫ, L + ǫ[ par l’intervalle ]A, +∞[ et dans le cas d’une suite réelle de limite −∞ par l’intervalle ]−∞, A[ . Exemple 1.1. Une suite peut être définie explicitement, par exemple par : un = n−1 n+1 , pour tout n appartenant à N. Exemple 1.2. On peut aussi définir une suite par récurrence : On donne alors un ou plusieurs termes initiaux et une relation de récurrence définissant un à partir du ou des termes précédents. Par exemple : – u0 = 1 et pour tout n appartenant à N, un+1 = sin (un ) . Plus généralement, si f est une fonction de R dans R, on peut définir une suite par la donnée de u0 et de la relation de récurrence un+1 = f (un ) . Dans ce cas la valeur de un est donnée par le terme précédent uniquement, on dit qu’on a une récurrence d’ordre 1. – Autre exemple : u0 = 0, u1 = 1 et un = un−1 + un−2 , pour tout n supérieur ou égal à 2. De manière plus générale, si f est une fonction de R2 dans R, on peut définir une suite en donnant u0 , u1 et la relation de récurrence un+2 = f (un+1 , un ) , pour tout n appartenant à N. Dans l’exemple précédent la fonction f est linéaire de R2 dans R, on dira donc que la suite est définie par une relation de récurrence linéaire d’ordre 2. On peut aussi définir une suite par une relation de récurrence linéaire d’ordre p : α0 , α1 , . . . , αp−1 étant p réels fixés, la suite est définie par la donnée de p réels u0 , . . . , up−1 et la relation de récurrence : un+p = αp−1 un+p−1 + αp−2 un+p−2 + · · · + α0 un , pour tout n appartenant à N. Exemple 1.3. Une suite peut aussi être définie implicitement, par exemple : On définit la fonction fn , de R dans R, par : fn (x) = xn − nx + 1. Montrer que, pour tout entier naturel n supérieur ou égal à 3, l’équation fn (x) = 0 admet une unique solution xn dans l’intervalle ]0, 1[. On définit ainsi une suite (xn )n≥3 . On peut aussi rencontrer des suites définies de manière plus exotique, par exemple : un est l’exposant de 2 dans la décomposition de n en produit de facteurs premiers.... CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 1.1.2 Propriétés 1.1.2.1 Rappel des principales propriétés vues en Sup 11 On se contente de rappeler ici les principales propriétés des limites des suites numériques, sans démonstration, il s’agit simplement de vous inviter à relire votre cours de sup. – La limite d’une suite, si elle existe, est unique. – Toute suite convergente est bornée. – L’ensemble des suites numériques peut être muni d’une structure d’espace vectoriel et d’un produit interne. La somme ou le produit de deux suites convergentes est une suite convergente, qui a pour limite la somme, ou le produit, des limites. – Si une suite admet une limite finie non nulle, il existe un indice au-delà duquel elle n’est jamais nulle. On peut alors définir une suite inverse, qui est convergente et a pour limite l’inverse de la limite. On peut énoncer le même résultat pour un quotient de suites, et l’étendre dans certains cas aux limites nulles ou infinies, les cas dans lesquels on ne peut rien dire étant les célèbres formes indéterminées. – Toute suite de réels croissante et majorée (ou décroissante et minorée) est convergente. 1.1.2.2 Suites extraites Définition 1.1. Soit (un )n∈N une suite numérique et φ une application strictement croissante de N dans N. On appelle suite extraite de la suite (un )n∈N la suite uφ(n) n∈N . Remarques : Remarque 1.2. Dans une suite extraite il n’y a pas de répétition de termes, ainsi la suite u3 , u3 , u5 , u5 , u7 , u7 , . . . , u2n+1 , u2n+1 , . . . n’est pas une suite extraite de la suite (un )n∈N . Remarque 1.3. Dans une suite extraite, l’ordre des termes est respecté, ainsi la suite : u1 , u0 , u3 , u2 , . . . , u2n+1 , u2n , . . . n’est pas une suite extraite de la suite (un )n∈N . Exemple 1.4. (u2n )n∈N , (u2n+1 )n∈N , (un! )n∈N , (u2n )n∈N sont des suites extraites de la suite (un )n∈N . Proposition 1.1. Toute suite extraite d’une suite convergente est convergente, vers la même limite. Remarque 1.4. Ce résultat est souvent efficace pour montrer qu’une suite ne converge pas. Exemple 1.5. un = (−1)n . La suite extraite des termes de rang pair est constante égale à 1, donc converge vers 1, la suite extraite des termes de rang impair est CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 12 constante égale à -1, donc converge vers -1, donc la suite ne peut être convergente. Suites extraites complémentaires : Définition 1.2. p suites extraites uφ1 (n) n∈N , uφ2 (n) n∈N , . . . , uφp (n) n∈N de la suite (un )n∈N sont dites complémentaires si : {φ1 (n), n ∈ N} ∪ {φ2 (n), n ∈ N} ∪ · · · ∪ {φp (n), n ∈ N} = N. Théorème 1.1. Si p suites extraites complémentaires d’une suite (un )n∈N convergent vers la même limite L (réelle, complexe ou infinie), alors la suite (un )n∈N converge vers L. Démonstration. Nous allons la faire pour une limite finie, réelle ou complexe, le cas des limites infinies est laissé aux bons soins du lecteur. Soit ǫ un réel strictement positif, il existe des entiers N1 , . . . , Np tels que : n > Ni ⇒ uφi (n) − L < ǫ. On pose alors N = max (φ1 (N1 ) , φ2 (N2 ) , . . . , φp (Np )) . Soit n un entier supérieur à N. Les suites extraites étant complémentaires, il existe deux entiers i et n′ tels que n = φi (n′ ). φi (n′ ) = n > N > φi (N i ) , donc, φi étant strictement croissante, n′ > Ni , ce qui entraîne uφi (n′ ) − L < ǫ, donc n > N entraîne |un − L| < ǫ, ce qui donne la convergence de la suite (un )n∈N vers L. Exercice 1.1. Ecrire le théorème dans la cas particulier des suites extraites des termes de rang pair et de rang impair et faire la démonstration dans ce cas particulier. Théorème 1.2 (de Bolzano-Wierstrass). De toute suite bornée on peut extraire une suite convergente. Démonstration. Soit (xn )n∈N une suite bornée de réels. On pose An = {xk , k > n} . An est un sous-ensemble non vide et majoré de R, donc admet une borne supérieure. On pose an = sup An . Si n > p, An est contenu dans Ap , donc sup An 6 sup Ap , c’est-à-dire an 6 ap , la suite (an )n∈N est donc décroissante. Elle est d’autre part minorée (puisque la suite (xn )n∈N est bornée) donc elle est convergente, vers un réel L. On va construire une suite extraite de la suite (xn )n∈N , convergente vers L. On pose ǫ = 1. ∃N ∈ N tel que n > N ⇒ L 6 an 6 L + 1. On fixe une telle valeur de n. an étant la borne supérieure de An , il existe un élément xk de An tel que : an − 1 6 xk 6 an (on exprime que an est le plus petit des majorants). On en déduit : L − 1 6 xk 6 L + 1, donc |xk − L| 6 1. On désigne par n1 une telle valeur de k, xn1 sera le premier terme de la suite extraite. On recommence avec ǫ = 21 : ∃N ∈ N / n > N ⇒ L 6 an 6 L + 12 . CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 13 On choisit une telle valeur de n, en imposant en plus la contrainte n > n1 (ce qui est possible parce que la condition est vérifiée pour tout n > N ). an étant la borne supérieure de An , il existe xk appartenant à An tel que : an − 12 6 xk 6 an + 21 . On en déduit : L − 12 6 xk 6 L + 21 , ce qui est équivalent à : |xk − L| 6 21 . On pose n2 égal à l’un de ces entiers k, xn2 sera le deuxième terme de la suite extraite. On suppose construits les termes xn1 , xn2 , . . . , xnp tels que : xnp − L 6 1 . p 1 On pose alors ǫ = p+1 . 1 . On choisit une telle valeur de n, en ∃N ∈ N / n > N ⇒ L 6 an 6 L + p+1 imposant la contrainte supplémentaire n > np . Il existe un élément xk de An , 1 1 6 xk 6 an + p+1 , ce qui entraîne : (ce qui entraîne k > np ) tel que : an − p+1 1 1 1 L − p+1 6 xk 6 L + p+1 , qui est équivalent à : |xk − L| 6 p+1 . On pose np+1 égal à l’un des entiers k. On a ainsi montré par récurrence l’existence d’une suite extraite xnp p∈N telle que xnp − L 6 p1 . Dans ces conditions, la suite xnp p∈N converge vers L. On a donc prouvé l’existence d’une suite extraite convergente de la suite (xn )n∈N . EXERCICES Exercice 1.2. Déterminer, si elles existent, les limites des suites de termes généraux : √ n √ 1. 3 n 2 − 2 n 3 . 2. 3. 4. 5. 5n −2n 4n −3n . ein n . n P 1 p!. n! p=1 √ √ n + 1 − n. 3 Exercice 1.3. Etudier la suite définie √ par : u0 réel fixé supérieur ou égal à − 2 et la relation de récurrence : un+1 = 2un + 3. Exercice 1.4. Etudier la suite définie par : u0 réel strictement positif fixé et la relation de récurrence : un+1 = 1 + u1n . CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 14 Exercice 1.5. Démontrer que la suite définie à l’exemple 3 est convergente et déterminer sa limite. Exercice 1.6. La suite (un )n∈N est définie par : un est l’exposant de 2 dans la décomposition de n en produit de facteurs premiers. La suite est-elle convergente ? Déterminer l’ensemble des limites des suites extraites convergentes de la suite (un )n∈N . Exercice 1.7. Théorèmes de Césaro. (un )n∈N est une suite réelle, convergente de limite L. 1) Première forme 1 +···+un converge et a pour limite L. a) Montrer que la suite : u0 +un+1 b) Application : On considère la suite (un )n∈N définie par u0 ∈ 0, π2 et la relation de récurrence : un+1 = sin (un ) . i) Montrer que la suite (un )n∈N converge et déterminer sa limite. 1 1 ii) Déterminer α réel pour que la suite vn = (un+1 )α − (un )α converge vers une limite finie non nulle, et en déduire un équivalent de un quand n tend vers l’infini. 2) Deuxième forme : Soit (vn )n∈N une suite de réels positifs, telle que : ∞ P v0 est non nul et la série vn diverge. n=0 1 v1 +···+un vn converge vers L. a) Montrer que la suite wn = u0 v0v+u 0 +v1 +···+vn b) Quelles sont les relations entre les deux formes du théorème de Césaro ? 3) Théorème de Césaro-Toeplitz : Soit un tableau triangulaire de la forme : a00 a10 a11 a20 a21 a22 .................................. ..................................... ap0 ap1 ......................app ................................................ On suppose que P toutes les lignes sont de somme 1, c’est-à-dire que pour tout p entier naturel p, k=0 apk = 1 et que pour tout entier naturel k, apk tend vers 0 quand p tend vers l’infini. Pn a) Montrer que la suite (tn )n∈N définie par : tn = k=0 ank uk converge vers L . n k b) Cas particulier : ank = 2n . Vérifer que la suite satisfait aux hypothèses précédentes. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 15 4) Conséquences du théorème de Césaro : On suppose que la suite (un ) est à termes strictement positifs. √ a) Montrer que : lim n+1 u0 u1 . . . un = L. n→+∞ b) On désigne par(vn ) est une suite de nombres réels strictement positifs , telle = L. que : lim vn+1 n→+∞ vn √ Montrer que lim n vn = L. n→+∞ q n c) Calculer lim n nn! . n→+∞ 1.2 1.2.1 Séries Numériques Définitions : On désigne par K un ensemble égal à R ou C (ou à une partie de R ou C). Soit (an )n∈N une suite d’éléments de K. On appelle série de terme général an le couple de suites (an )n∈N , (sn )n∈N , n P ai . où sn = i=0 La suite (sn )n∈N est appelée la suite des sommes partielles de la série. Série convergente : On dit que la série converge si la suite (sn )n∈N converge, dans le cas contraire, on dit que la série diverge. Dans le cas de convergence, lim sn , qui est un élément de K est appelée la n→+∞ somme de la série, noté : +∞ P an . n=0 Remarque 1.5. On parle souvent de la série +∞ P ai , sans savoir si la série converge i=0 ou diverge. Cet abus de notation est très dangereux : si vous n’avez pas démontré que la +∞ P ai n’est pas, à priori, un nombre réel, donc écrire qu’il est série converge, i=0 égal, inférieur ou égal ou supérieur ou égal à un nombre réel aura des conséquences graves. Il est préférable, sauf quand on ne peut pas faire autrement, d’écrire des inégalités uniquement entre termes généraux de séries (en se restreignant aux séries réelles, les inégalités entre nombres complexes ayant aussi des conséquences fâcheuses). Exemple 1.6. an = n1 , n ∈ N∗ . On va montrer que la série est divergente, en montrant que la suite des sommes partielles tend vers +∞. Soit n un entier naturel non nul. La fonction x → x1 est décroissante sur R∗+ , donc pour tout x appartenant à l’intervalle [n, n + 1] , n1 > x1 . En intégrant cette inégalité sur [n, n + 1], on en déduit : CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 1 n > n+1 ´ n dx x 16 et en faisant la somme de ces inégalités pour n variant de 1 à N, on en déduit : ˆ N n+1 N X dx 1 X > n x n=1 n=1 n = N ˆ+1 dx (en appliquant la relation de Chasles) x 1 = ln(N + 1). Cette dernière inégalité entraîne que la suite des sommes partielles tend vers l’infini et la série est divergente. Exemple 1.7. an = (−1)n . s2n = 1, s2n+1 = 0. La suite des sommes partielles ne converge pas : il y a deux suites extraites convergentes vers des limites différentes, donc la série est divergente. Remarquer au passage que la suite des sommes partielles ne tend pas vers l’infini (elle est même bornée) bien que la série soit divergente. 1 Exemple 1.8. an = n² , n ∈ N∗ . Soit n un entier naturel strictement supérieur à 1. La fonction x → 1 est décroissante sur R∗+ , donc pour tout x appartenant à l’intervalle [n − 1, n], n12 6 x12 . En intégrant l’inégalité sur [n − 1, n] et en faisant la somme des inégalités obtenues pour n variant de 2 à N, on a : ˆ N N X 1 1 dx =1− 6 6 1. 2 n² x N 1 n=2 La série étant à termes positifs, la suite des sommes partielles est croissante, +∞ P 1 étant en plus majorée, elle est convergente, donc la série n² est convergente. n=1 1.2.2 Somme de deux séries, produit d’une série par un réel Définition 1.3. +∞ P n=0 an et +∞ P bn étant deux séries numériques, la somme de ces n=0 deux séries est par définition la série de terme général an + bn . +∞ P λ étant un nombre réel ou complexe, le produit de la série an par le réel λ est par définition la série de terme général λan . n=0 CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 17 Propriétés immédiates Il résulte directement de la définition que la suite des sommes partielles de la somme de deux séries est la somme des suites des sommes partielles de ces séries et que la suite des sommes partielles du produit d’une série par un nombre réel ou complexe λ est le produit par λ de la suite des sommes partielles de la série. On déduit alors des résultats sur les suites numériques, appliqués aux suites des sommes partielles, que la somme de deux séries convergentes est une série convergente (et a pour somme la somme des sommes) et que le produit d’une série convergente par un nombre réel ou complexe λ est convergente (et a pour somme le produit par λ de la somme de la série). L’ensemble des séries réelles, muni de cette somme interne et ce produit externe, est un espace vectoriel réel et le sous-ensemble des séries convergentes en est un sous-espace vectoriel. On a les mêmes résultats pour les séries complexes. 1.2.3 Conditions nécessaires de convergence : Comportement du terme général Théorème 1.3. Si une série est convergente, alors son terme général tend vers 0. Démonstration. La série est convergente, donc la suite (Sn )n∈N des sommes partielles de la série converge vers S, somme de la série. La suite (Sn−1 )n∈N∗ converge vers la même limite, donc la différence des deux suites, qui est égale au terme général de la série, tend vers 0. Remarque 1.6. La réciproque est fausse : n1 tend vers 0 quand n tend vers l’infini, alors que la série de terme général n1 est divergente. 1.2.4 Condition suffisante de convergence : Convergence absolue Définition 1.4. La série de terme général an est dite absolument convergente si la série de terme général |an | est convergente. On lit valeur absolue ou module selon que la série est à termes réels ou complexes. Théorème 1.4. Toute série absolument convergente est convergente. Démonstration. Cas d’une série réelle. +∞ P Soit an une série absolument convergente. n=0 + On désigne par (a+ n )n∈N la suite définie par an = an si an est positif ou nul, + an = 0 si an est négatif ou nul. − On désigne par (a− n )n∈N la suite définie par an = −an si an est négatif ou nul, − an = 0 si an est positif ou nul. − + − On a alors : an = a+ n − an , et |an | = an + an . + − La série de terme général an + an est convergente, et pour tout n entier naturel − |an | > a+ n et |an | > an . CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 18 Si on désigne par Sn , Sn+ et Sn− les suites des sommes partielles des séries de − + − termes généraux |an | , a+ n et an , on a : Sn > Sn et Sn > Sn . + − (|an |)n∈N , (an )n∈N et (an )n∈N étant des suites à termes positifs, les suites des sommes partielles (Sn )n∈N , (Sn+ )n∈N et (Sn− )n∈N sont croissantes, ce qui entraîne, en désignant par S la somme de la série de terme général |an | : S > Sn > Sn+ et S > Sn > Sn− . Les suites (Sn+ )n∈N et (Sn− )n∈N sont croissantes et majorées, donc elles sont convergentes. Il en est alors de même de leur différence, qui est la suite des sommes partielles − de la série de terme général an = a+ n − an , qui est donc convergente d’après le résultat sur les sommes et produits de séries. Remarque 1.7. La réciproque du théorème précédent est fausse. n converge, cela se justifie par le théorème La série de terme général un = (−1) n spécial des séries alternées que nous verrons plus tard. Nous allons faire ici une démonstration basée sur le même principe que celle du théorème : on démontre que les suites extraites de rang pair et de rang impair de la suite des sommes partielles sont adjacentes. 1 1 1 S2n+2 = S2n+1 + = S2n + − . 2n + 2 2n + 2 2n + 1 On en déduit que la suite (S2n )n∈N est décroissante, supérieure à la suite (S2n+1 )n∈N et que la différence des deux suites tend vers 0. On montre de même que la suite (S2n+1 )n∈N est croissante. Les deux suites sont adjacentes, donc elles convergent, et vers la même limite. La suite des sommes partielles de la série admet donc deux suites extraites complémentaires convergentes et vers la même limite, donc elle converge. 1.2.5 Reste d’une série convergente Définition 1.5. On appelle reste de la série convergente +∞ P an le nombre réel n=0 ou complexe Rn = +∞ P ak . k=n+1 Proposition 1.2. Le reste d’une série convergente tend vers 0. Démonstration. Soit +∞ P un une série convergente dont on désigne la somme par n=0 S. Par définition, le reste de la série est égal à S − Sn et la suite (Sn )n∈N est convergente de somme S, donc la différence Sn − S tend vers 0 quand n tend vers l’infini. Remarque 1.8. Le reste d’une série divergente n’existe pas. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 1.3 1.3.1 19 Etude des séries à termes positifs Techniques de comparaison de deux séries On désigne par (an )n∈N une suite de réels positifs. La propriété essentielle, qui permet une étude plus facile de la série de terme général an est : La suite des sommes partielles (sn )n∈N est une suite croissante. Théorème 1.5. Une série à termes positifs converge si et seulement si la suite (sn )n∈N de ses sommes partielles est bornée. Démonstration. Si la série est convergente, la suite des sommes partielles est convergente et toute suite convergente est bornée. Cette implication est donc vraie, même si la série n’est pas à termes positifs. La série étant à termes positifs la suite des sommes partielles est croissante, si elle est en plus bornée elle est convergente, c’est la définition de la convergence de la série. Remarque 1.9. On a déjà observé, avec l’exemple de la série de terme général (−1)n , que le résultat est faux pour les séries de signe quelconque : cette série diverge, alors que ses sommes partielles sont bornées. 1.3.1.1 Principe de comparaison des séries à termes positifs Proposition 1.3. Soient (an )n∈N et (bn )n∈N , deux suites de réels positifs, telles que, pour tout entier naturel n, an 6 bn . Alors : – Si la série de terme général an diverge, la série de terme général bn diverge. – Si la série de terme général bn converge, la série de terme général an converge. Le même résultat est vrai si l’inégalité n’est vraie qu’à partir d’un certain rang. Démonstration. C’est une simple application du théorème précédent et de l’inégalité évidente : S1 (n) 6 S2 (n), si S1 (n) et S2 (n) désignent les sommes partielles des séries de termes généraux an et bn . +∞ P Si la série an diverge, la suite (S1 (n))n∈N n’est pas bornée, donc la suite n=0 (S2 (n))n∈N n’est pas bornée non plus, et la série Si la série +∞ P n=0 +∞ P bn diverge. n=0 bn converge, la suite de ses sommes partielles (S2 (n))n∈N est bornée, donc la suite des sommes partielles (S1 (n))n∈N de la série également bornée, donc la série +∞ P n=0 an est convergente. +∞ P n=0 an est CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 20 Si l’inégalité n’est vraie qu’à partir du rang N, il suffit d’observer que les séries +∞ +∞ P P an sont de même nature : on ne change pas la nature d’une suite an et n=0 n=N (et donc d’une série) en modifiant un nombre fini de termes. Application : Démonstration de : convergence absolue entraîne convergence pour une série complexe. +∞ P Soit zn une série complexe absolument convergente. n=0 |zn | > |Re (zn )| , |zn | > |Im (zn )| , donc d’après le principe de comparaison les séries de termes généraux |Re (zn )| et |Im (zn )| , qui sont majorés par |zn | sont convergentes. En appliquant le résultat vu pour les séries réelles, on en déduit +∞ +∞ P P que les séries Re (zn ) et Im (zn ) sont convergentes, ce qui est équivalent n=0 à la convergence de la série n=0 +∞ P zn . n=0 1.3.1.2 Séries de termes généraux équivalents Définition 1.6. Soient (an )n∈N et (bn )n∈N deux suites à termes positifs. On dit que les suites sont équivalentes quand n tend vers +∞, s’il existe une suite réelle (ǫn )n∈N telle que : an = ǫn bn , et lim ǫn = 1. n→+∞ Si bn n’est jamais nul, au moins à partir d’un certain rang, la propriété est équivalente à : an = 1. lim n→+∞ bn Théorème 1.6. Si les suites de réels positifs (an )n∈N et (bn )n∈N sont équiva+∞ +∞ P P lentes, les séries an et bn sont de même nature. n=0 Démonstration. 1 2, n=0 lim ǫn = 1, donc il existe N ∈ N tel que n > N entraîne n→+∞ |ǫn − 1| < c’est-à-dire : 21 < ǫn < 32 . On en déduit (parce que les séries sont à termes positifs) que : 1 3 2 bn 6 an 6 2 bn , pour tout n > N. Il suffit alors d’appliquer le théorème précédent : +∞ +∞ +∞ P P P bn diverge donc an diverge. – bn diverge entraîne que 21 – n=0 +∞ P n=0 bn converge entraîne que n=0 +∞ P 3 2 n=0 n=0 +∞ P bn converge donc an converge. n=0 Remarque 1.10. Le fait que le terme général soit positif n’est pas important, ce qui compte, c’est qu’il soit de signe constant. On a donc des résultats identiques CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 21 pour des séries de termes généraux négatifs, il suffit pour les démontrer de considérer les séries de termes généraux opposés. Le résultat est faux pour des séries dont le terme général n’est pas de signe constant. (−1)n √ Exemple 1.9. un = e n − 1. Les termes de la série sont alternativement positifs ou négatifs, on ne peut donc pas appliquer le théorème précédent. n √ un est équivalent à (−1) , qui est le terme général d’une série convergente. On n le démontre facilement avec un théorème que nous verrons plus loin, on peut aussi le démontrer avec la technique que nous avons utilisée pour démontrer la +∞ P (−1)n convergence de n . n=1 Si on fait un développement limité un peu plus poussé de l’exponentielle, on obtient : 1 (−1)n (−1)n 1 + + un = √ +◦ . 3 3 n 2n 6n 2 n2 La première série converge, la deuxième diverge, il reste à voir que les deux dernières convergent, ce que nous ferons bientôt. La série est donc divergente, bien que son terme général soit équivalent à celui d’une série convergente. Remarque 1.11. Si les termes généraux de deux séries à termes positifs sont équivalents, les séries sont de même natures mais les sommes ne sont pas égales. +∞ +∞ P 1 P 1 1 Il suffit par exemple de considérer les deux séries n2 et n2 + n3 . Les n=1 n=1 termes généraux sont équivalents, mais la différence des sommes est est manifestement un nombre réel strictement positif... +∞ P n=1 1 n3 qui 1.3.1.3 Utilisation des ◦ et O +∞ +∞ P P Théorème 1.7. Soient un et vn deux séries à termes positifs. On suppose que la série O (un ) . Alors la série n=0 +∞ P n=0 +∞ P n=0 un est convergente, et que vn = ◦ (un ) ou vn = vn est convergente. n=0 Démonstration. vn = ◦ (un ) est équivalent à vn = ǫn un où (ǫn )n∈N est une suite qui tend vers 0 quand n tend vers l’infini. vn = O (un ) est équivalent à vn = ǫn un où (ǫn )n∈N est une suite bornée. Toute suite convergente étant bornée, il suffit de faire la démonstration avec vn = O (un ) . (ǫn )n∈N est bornée, donc il existe un réel M tel que : |ǫn | 6 M, ∀n ∈ N. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 22 On en déduit que : vn 6 M un , ∀n ∈ N. La série de terme général M un converge, donc, par majoration, la série de terme général vn converge. 1.3.2 Comparaison d’une série et d’une intégrale Définition 1.7. Soit f une fonction continue sur [a, +∞[, à valeurs dans R. +∞ ´ f (x)dx convergente si et seulement si la fonction x 7→ On dit que l’intégrale ´x a f (t)dt admet une limite quand x tend vers l’infini. Dans le cas contraire, on a dit que l’intégrale est divergente. Théorème 1.8. Soit f une fonction positive et décroissante sur [0, +∞[ . +∞ +∞ ´ P Alors f (x)dx et f (n) sont de même nature. n=0 0 Démonstration. Supposons que +∞ ´ f (x)dx soit convergente. 0 n+1 ´ f (n + 1) 6 f (x)dx 6 f (n). En faisant la somme de ces inégalités et en n appliquant la relation de Chasles aux intégrales, on obtient : f (0)+f (1)+· · ·+f (n) 6 f (0)+ ˆn f (x)dx 6 f (0)+ +∞ ˆ f (x)dx. f (x)dx 6 f (0)+ n+1 ˆ 0 0 0 Les sommes partielles de la série de terme général f (n) sont bornées, donc la série est convergente. ´x f (t)dt existe, ce qui revient à monRéciproquement, il faut montrer que lim x→+∞ 0 trer que x 7→ ´x +∞ ´ f (t)dt est bornée par un réel indépendant de x, puisque la fonction 0 f (t)dt est croissante (une fonction croissante et majorée admet une li- 0 mite). ´x f (t)dt 6 0 0 0 n=0 n Ń f (t)dt, pour tout N entier naturel tel que N > x, par exemple N = ⌊x⌋ + 1, ⌊x⌋ désignant la partie entière de x. Ń NP −1 n+1 N ´ P f (t)dt = f (t)dt 6 f (n) qui est majoré par la somme de la série, n=0 puisque celle-ci a été supposée convergente. Donc l’intégrale converge. Remarque 1.12. On peut utiliser la technique précédente pour obtenir une majo+∞ P an , la série étant supposée convergente ration du reste d’une série : RN = bien sûr. n=N +1 CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 23 an = f (n), f vérifiant les hypothèses du théorème. +∞ ´n ´ f (x)dx. an = f (n) 6 f (x)dx, d’où RN 6 n−1 N Application : Les séries de Riemann Une série de Riemann est une série réelle dont le terme général est de la forme : un = n1α . +∞ +∞ ´ dx P 1 nα est de même nature que xα . Supposons α différent de 1. n=1 1 y ´ dx 1 1 xα = 1−α y α−1 − 1 qui admet une limite finie quand y tend vers +∞ si et 1 seulement si α − 1 est strictement positif, c’est-à-dire α > 1. Pour α = 1, une primitive est ln x, donc l’intégrale est divergente, puisque ´x dt t = ln x, qui tend vers +∞ quand x tend vers +∞. 1 En conclusion, la série de Riemann de terme général un = si et seulement si α > 1. 1 nα est convergente Comparaison d’une série avec une série de Riemann : le critère nα un +∞ P Soit un une série à termes positifs. On suppose qu’il existe α tel que n=0 lim nα un = L, réel non nul. Si α est strictement supérieur à 1, la série n→+∞ converge, si α est inférieur ou égal à 1, la série diverge. Démonstration. à L nα , lim nα un = L avec L non nul entraîne que un est équivalent n→+∞ qui est de même nature que 1 nα , d’où le résultat. Remarque 1.13. En pratique, on ne trouve en général pas α tel que la limite soit finie non nulle, mais plutôt des valeurs de α pour lesquelles elle est soit nulle, soit infinie. Il est encore possible de conclure, au moins dans certains cas. Supposons que lim nα un = 0. Il existe N tel que pour n > N, nα un < 1, donc n→+∞ à partir du rang N, un est majorée par le terme général de la série de Riemann 1 nα . Si α est strictement supérieur à 1, la série est convergente, si α est inférieur ou égal à 1, on ne peut pas conclure, on change de valeur de α, ou de méthode. Supposons que lim nα un = +∞. Il existe N tel que pour n > N, nα un soit n→+∞ supérieur à 1, donc à partir du rang N, un est minorée par le terme général de la série de Riemann n1α . Si α est inférieur ou égal à 1, la série est divergente, si α est strictement supérieur à 1, on ne peut pas conclure, on change de valeur de α, ou de méthode. Exemples de séries à termes positifs : les séries de Bertrand de Bertrand est une série dont le terme général est de la forme : un = 1 nα β (ln n) , n > 2, (α, β) ∈ R2 . Une série CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 24 Supposons α < 0, le terme général tend vers l’infini (croissances comparées des logarithmes et des polynômes, dans le cas où β est positif), donc la série diverge. Supposons α > 1. On pose α = 1 + 2h, h étant un réel strictement positif. 1 . un = β 1+2h n (ln n) n1+h un = nh (ln1 n)β , donc tend vers 0 quand n tend vers l’infini, en utilisant à nouveau les croissances comparées dans le cas où β est négatif. Pour α > 1, la série est donc convergente, quel que soit β. Supposons α = 0. Si β 6 0, la divergence est immédiate. 1 1 2 Si β est positif, n 2 un = (lnnn) β , qui tend vers l’infini quand n tend vers l’infini, avec les inévitables croissances comparées. Il existe donc un entier N tel que : 1 n > N ⇒ n 2 un > 1, donc un > 11 à partir du rang N, ce qui entraîne la n2 divergence de la série. Supposons 0 < α < 1. α = 1 − 2h, avec h strictement positif. 1 n1−h un = n−h (ln qui tend vers l’infini quand n tend vers l’infini. n)β Il existe donc un entier N tel que n > N ⇒ n1−h un > 1, donc à partir du rang 1 , qui est le terme général d’une série divergente. N, on a : un > n1−h La série est donc divergente, quel que soit β. Supposons enfin que α = 1. un = n(ln1n)β . Considérons la fonction f : x 7→ x(ln1x)β . −β f ′ (x) = − (ln xx)2 1 + lnβx , qui est manifestement négatif, donc la fonction est décroissante, et à valeurs positives, puisqu’on se restreint à l’intervalle [2, +∞[ . +∞ ´ dx . Supposons d’abord β différent La série est donc de même nature que x(ln x)β de 1. ´y dx 2 x(ln x) 2 β = ´y 2 d(ln x) (ln x)β = 1 1−β 1−β (ln y) 1−β − (ln 2) qui admet une limite finie quand y tend vers l’infini si et seulement si β est supérieur à 1. 1 Dans le cas α = 1, une primitive de x ln x est ln (ln x) , et l’intégrale est à nouveau divergente. En résumé, si α = 1, la série de Bertrand converge si et seulement si β > 1. L’étude de ces séries se trouve dans un article intitulé “Règles sur la convergence des séries” publié par Joseph Bertrand, élève ingénieur des mines, dans le journal de mathématiques pures et appliquées en 1842. 1.3.3 Règle de D’Alembert 1.3.3.1 Série géométrique Définition 1.8. On désigne par r un nombre réel. On appelle série géométrique une série dont le terme général est une suite géométrique, c’est-à-dire de la forme un = u0 rn , le nombre réel r étant appelé la raison de la suite géométrique. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 25 +∞ P u0 rn converge si et seulement si |r| < Théorème 1.9. La série géométrique n=0 1 . 1 et dans ce cas sa somme est égale à u0 1−r Démonstration. La somme des N + 1 premiers termes de la suite géométrique N +1 (u0 rn )n∈N est égale à : u0 1−r 1−r , et c’est la somme partielle d’ordre N de la série. Si |r| < 1, rN +1 tend vers 0 quand N tend vers l’infini, donc dans ce cas la série 1 est convergente de somme u0 1−r . Si |r| > 1, le terme général de la série ne tend pas vers 0, donc la série est divergente. Remarque 1.14. On peut remarquer également que le reste d’ordre N de la série +∞ +∞ P n P r N +1 u0 rn qui est égal à u0 rN +1 r = u01−r géométrique est . n=0 n=N +1 1.3.3.2 Comparaison d’une série à termes positifs et d’une série géométrique Théorème 1.10. Soient (an )n∈N et (bn )n∈N deux suites de réels strictement positifs. On suppose que : aan+1 6 bn+1 bn , pour tout n dans N (ou à partir d’un n +∞ P certain rang) et que bn converge. n=0 Alors Si +∞ P n=0 +∞ P an converge. an diverge, alors n=0 +∞ P bn diverge. n=0 6 bn+1 Démonstration. aa10 6 bb01 , aa12 6 bb21 , . . . , aan+1 bn . n En faisant le produit de ces inégalités, on obtient : an+1 6 de comparaison permet de conclure immédiatement. a0 b0 bn+1 , et le principe Corollaire 1.1. Soit (an )n∈N une série à termes positifs et k un élément de [0, 1[ . On suppose que pour tout n ∈ N, aan+1 6 k. Alors la série de terme général an n est convergente. Démonstration. Il suffit d’appliquer le théorème précédent avec bn = k n , qui est une série géométrique de raison strictement inférieure à 1, donc convergente. 1.3.3.3 Règle de D’Alembert Théorème 1.11. Soit (un )n∈N une suite de nombres réels strictement positifs. On suppose que : lim uun+1 = L. n n→+∞ – Si L < 1, la série est convergente. – Si L > 1, la série est divergente. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES Démonstration. n > N entraîne lim n→+∞ un+1 un 26 = L, donc pour tout ǫ > 0, il existe N tel que : L−ǫ< un+1 < L + ǫ. un Si L est strictement inférieur à 1, on choisit ǫ tel que L + ǫ soit strictement inférieur à 1, et on conclue par comparaison avec la série géométrique de raison L + ǫ. Si L est supérieur à 1, on choisit ǫ tel que L − ǫ soit strictement supérieur à 1. La suite (un )n∈N est alors strictement croissante, donc elle ne peut pas tendre vers 0, et la série diverge. Application un = gente. 1 un+1 n! . un = 1 n+1 qui tend vers 0, donc la série est conver- Remarque 1.15. Le théorème ne parle pas du cas L = 1. C’est un cas douteux, c’est-à-dire qu’il n’y a pas de règle générale : considérons les séries de termes généraux n1 et n12 . La première est convergente et la deuxième divergente, alors n2 n que les quotients uun+1 et (n+1) , égaux à n+1 2 ont tous deux pour limite 1 quand n n tend vers l’infini. 1.4 Séries alternées Définition 1.9. On appelle série alternée une série réelle dont le terme général n an est de la forme (−1) αn , αn étant positif pour toute valeur de n. Théorème 1.12 (spécial des séries alternées). Soit (an )n∈N une suite réelle n telle que an = (−1) αn , αn étant positif pour tout n entier naturel. +∞ P Si la suite (αn )n∈N tend vers 0 en décroissant, la série an converge. n=0 De plus le reste Rn est du signe de son premier terme an+1 , et |Rn | 6 |an+1 | . Démonstration. On étudie les suites extraites de la suite des sommes partielles (S2n )n∈N et (S2n+1 )n∈N . S2n+2 = S2n − α2n+1 + α2n+2 , et l’hypothèse faite sur la décroissance de la suite (αn )n∈N entraîne S2n+2 6 S2n . La suite (S2n )n∈N est donc décroissante. De même, S2n+1 −S2n−1 = α2n −α2n+1 , donc la suite (S2n+1 )n∈N est croissante. Enfin S2n − S2n−1 = α2n , qui tend vers 0 quand n tend vers l’infini, et qui est positif, donc : S2n > S2n−1 . Les suites (S2n )n∈N et (S2n+1 )n∈N sont donc adjacentes, donc convergentes vers une limite commune S qui est la somme de la série. +∞ P R2p = ak = S − S2p qui est négatif, puisque la suite (S2n )n∈N est décroisk=2p+1 sante. R2p est donc du signe de a2p+1 , qui est bien le premier terme négligé en approchant S par S2p . |R2p | = |S − S2p | = S2p − S 6 S2p − S2p+1 = −a2p+1 = |a2p+1 | . La démonstration est la même pour R2p+1 . CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 27 Remarque 1.16. La majoration du reste n’est pas vraie pour toute série alternée, même convergente, mais pour les séries alternées qui vérifient les hypothèses du théorème spécial, qui est une condition suffisante mais non nécessaire de convergence. +∞ P (−1)n n est une série convergente d’après le théorème des sé +∞ P (−1)n 1 ries alternées. La majoration du reste donne : n 6 N. Exemples 1) n=1 n=N 2) Un exemple de série alternée convergente qui ne vérifie pas les hypothèses du théorème spécial : +∞ n X (−1) n n + (−1) n=2 Il est visible que la série est alternée, le dénominateur étant manifestement positif. 1 Par contre la suite n+(−1) n n’est pas décroissante, il faudrait pour cela que la n suite n + (−1) soit croissante, alors que pour n = 2p, on obtient 2p + 1 et pour n = 2p + 1 on obtient 2p. Pour voir que la série converge on peut ruser, en multipliant numérateur et n dénominateur par "l’expression conjuguée" du dénominateur, n − (−1) . (−1)n n n−(−1)n un = n2 −1 = n2 −1 − n21−1 , la première série est convergente par le théorème des séries alternées, il suffit de vérifier, en calculant la dérivée, que la fonction x 7→ f (x)) telle que f (x) = x2x−1 est décroissante, la deuxième converge par la règle de Riemann. Autre méthode : on fait un développement limité (on ne peut pas utiliser d’équivalent puisque la série n’est pas de signe constant). n 1 1 (−1) n n = n 1 + (−1) n + (−1) n n (−1) = n n = n+1 (−1) 1+ n n ǫn + n (−1) (−1) ǫn 1 , − 2− n n n2 et les trois séries sont convergentes. ! CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 1.5 28 Produit de deux séries numériques 1.5.1 Définition (an )n∈N et (bn )n∈N étant deux suites réelles ou complexes, on appelle produit de convolution de ces suites la suite (cn )n∈N , telle que : cn = n X ak bn−k . k=0 La série de terme général cn est appelée série produit des séries de termes généraux an et bn . 1.5.2 Séries à termes positifs Théorème 1.13. Si les suites (an )n∈N et (bn )n∈N sont réelles positives et les +∞ +∞ P P séries an et bn sont convergentes, la série produit est convergente et a n=0 n=0 pour somme le produit des sommes. Démonstration. Posons A = +∞ P an et B = n=0 AN = N P n=0 a n , BN = N P bn , pour tout N entier naturel, n=0 bn et cn = n=0 +∞ P n P ak bn−k . k=0 Montrons d’abord la convergence de la série de terme général cn . c0 + c1 + · · · +cN = (a0 b0 ) + (a0 b1 + a1 b0 ) + · · · + (a0 bN + a1 bN −1 + · · · + aN b0 ) = a0 (b0 + b1 + · · · + bN ) + a1 (b0 + b1 + · · · + bN −1 ) + · · · + aN b0 On va majorer chaque somme de bi par la somme de la série : c0 + c1 + · · · + cN 6a0 B + a1 B + . . . aN B = (a0 + a1 + · · · + aN ) B 6 AB. Les sommes partielles de la série de terme général cn (positif) sont majorées, donc la série est convergente. On pose à présent CN = c0 + c1 + · · · + cN . AN BN − CN = (a0 + a1 + · · · + aN ) (b0 + b1 + · · · + bN ) − (a0 b0 ) − (a0 b1 + a1 b0 ) − · · · − (a0 bN + a1 bN −1 + · · · + aN b0 ) =a1 bN + a2 (bN + bN −1 ) + · · · + aN (bN + bN −1 + · · · + b1 ) . Soit ǫ un réel strictement positif, il existe un réel strictement positif N0 tel que n supérieur à N0 entraîne : +∞ X n=N0 an < ǫ et +∞ X n=N0 bn < ǫ. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 29 Choisissons N supérieur ou égal à 2N0 + 1. 0 6 AN BN − CN 6 a1 ǫ + a2 ǫ + · · · + aN0 ǫ + B (aN0 +1 + · · · + aN ) 6 (A + B) ǫ. Donc AN BN − CN tend vers 0 quand N tend vers l’infini, ce qui montre le résultat cherché. 1.5.3 Séries de signe quelconque (et séries complexes) Théorème 1.14. Si +∞ P an et n=0 +∞ P bn sont deux séries absolument convergentes, n=0 la série de terme général cn , avec cn = n=0 n=0 Démonstration. |cn | 6 précédent, puisque ak bn−k est absolument convergente, k=0 et on a : +∞ +∞ +∞ P P P cn . bn = an n=0 n P +∞ P n=0 n P k=0 |ak | |bn−k | qui est convergente d’après le théorème |an | et +∞ P n=0 |bn | convergent. La convergence absolue entraîne la convergence, donc la série +∞ P cn converge. n=0 Il reste à montrer que le produit des sommes est égal à la somme de la série produit. On pose : N N N X X X AN = a p , BN = bp , CN = cp , p=0 p=0 |an | = αn , |bn | = βn , A′N = p=0 N X ′ αp , BN = p=0 N X βp . p=0 AN BN − CN = a1 bN + a2 (bN + bN −1 ) + · · · + aN (bN + · · · + b1 ) . Donc |AN BN − CN | 6 α1 βN + α2 (βN + βN −1 ) + · · · + αN (βN + · · · + β1 ) qui +∞ +∞ P P tend vers 0 quand n tend vers l’infini, puisque les séries αp et βp convergent, p=0 p=0 donc leur série produit converge vers le produit des sommes, toujours d’après le théorème précédent. Remarque 1.17. Le produit de deux séries de signes quelconques peut être divergent, bien que les deux séries soient convergentes. Exemple 1.10. un = (−1)n 1 (n+1) 4 est une série convergente d’après le théorème spécial des séries alternées ; on en fait le produit avec elle-même. CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 30 Le terme général de la série produit est cn = n k X (−1) n−k (−1) 1 1 (k + 1) 4 (n − k + 1) 4 n X 1 1 = (−1)n 1 1 . 4 4 k=0 (k + 1) (n − k + 1) k=0 Pour k variant de 0 à n, 1 1 (k+1) 4 et 1 1 (n−k+1) 4 sont supérieur ou égaux à On a donc une somme de n + 1 termes minorés par |cn | > n+1 1 (n+1) 2 1 1 (n+1) 2 1 1 (n+1) 4 . , donc : 1 2 = (n + 1) , qui ne tend pas vers 0 quand n tend vers l’infini, donc la série est divergente. Application : Exponentielle complexe Soit z un nombre complexe, on +∞ P zn pose ez = n! . La série est absolument convergente (par application de la n=0 règle de D’Alembert par exemple), donc convergente. +∞ +∞ P zn P ′ ez ez est le produit des sommes des séries n! et n=0 n=0 z ′n n! . ′ Toutes les séries sont absolument convergentes, donc ez ez est égal à la somme de la série produit, qui est donc : ′ +∞ X n +∞ n X X (z + z ′ ) z k z n−k = . k! (n − k)! n=0 n! n=0 k=0 On a démontré, pour la fonction exponentielle complexe, la formule : ′ ′ ez ez = ez+z . On peut définir cos x = Re eix , sin x = Im eix , de même que ch(z) = z −z . et sh(x) = e −e 2 EXERCICES Exercice 1.8. Nature des séries de termes généraux : 1. un = 3n +5 4n +n2 . 1 √ 2. un = α e n − 1 + n2 − 1 − n. 1 1 3. un = e 2n − e 2n+1 . 4. un = arcsin 4n2n 2 +1 . α 1 5. un = n sin n . 6. un = n2 e−n . ez +e−z 2 CHAPITRE 1. SÉRIES NUMÉRIQUES 31 7. un = a−n ln n, a étant un réel strictement positif. ln n n . 8. un = 1 − 3 2n 1 9. un = 1+ 1 . n 10. un = n 1 1 n(n+2) 2 . 11. un = 1 + n − 21 ln 1 − n1 . 2n n+1 12. un = n+2 − e−2 . √ √ 13. un = n+1− nα 14. un = ln cos 15. un = 16. un = 17. un = n−1 1 2n n+1 (n+1) n . . n−1 n −(n−1) nα nα , vn n sin n1 √ (−1)n n sin √1n n+(−1)n 18. un = ln n ln 1 + 19. un = 2cos nπ . n 3 +cos nπ 1 n . = n sin n1 . ln 1 + 1 n2 n2 1 − e− 6 . . 1 où vn est l’exposant de 2 dans la décomposition de n en 20. un = n(1+v n) produit de facteurs premiers. Exercice 1.9. (un )n∈N est une suite réelle et f une fonction de classe C 2 de R dans R, telle que f (0) = 0. On suppose que les séries de termes généraux un et (un )2 sont convergentes. Montrer que la série de terme général f (un ) est convergente . Exercice 1.10. On suppose que (un )n∈N est une suite réelle et (vn )n∈N une suite réelle jamais nulle. 2 sont convergentes. On suppose que les séries de termes généraux uvnn et uvnn un Montrer que la série de terme général un +vn est convergente. Exercice 1.11. (un )n∈N est une suite de réels strictement positifs telle qu’il existe une suite vn et un réel λ vérifiant : λ un+1 = 1 − + vn . ∀n ∈ N∗ , un n On suppose que la série de terme général vn est absolument convergente. Montrer que la suite un est équivalente à nAλ , A ∈ R+ . Exercice 1.12. La série de terme général positif un est convergente . 1 Montrer que la série de terme général (un )1− n est convergente .