MOSCOW MATHEMATICAL JOURNAL
Volume 9, Number 3, July–September 2009, Pages 562–568
SUR LA CLASSIFICATION DE QUELQUES
φ-MODULES SIMPLES
Appendice `a
On the structure of some moduli spaces of finite flat group schemes
par E. Hellmann
XAVIER CARUSO
2000 Math. Subj. Class. 13C05, 11S23.
Dans cet appendice, on d´etermine les φ-modules ´etales simples sur ¯
Fp((u)) dans
une situation l´eg`erement plus g´en´erale que celle ´etudi´ee dans l’article ([1]). On fixe
pun nombre premier et on pose k=¯
Fpet pour tout q, puissance de p, on d´efinit Fq
comme l’unique sous-corps de kde cardinal q. Soient σun automorphisme de ket
b > 1 un entier. On note le sous-corps de kfixe par σet, plus en´eralement, pour
tout entier d, on note dle sous-corps fixe par σd. On consid`ere le corps K=k((u))
que l’on munit de l’endomorphisme :
φ
X
n=−∞
anun!=
X
n=−∞
σ(an)ubn.
(Si b=pet σ= id, on retrouve donc la situation de loc. cit.)
On consid`ere la cat´egorie Modφ
/K dont les objets sur les K-espaces vectoriels
Dde dimension finie muni d’un endomorphisme φ-semi-lin´eaire φD:DDdont
l’image contient une base de D. Par la suite, lorsque cela ne prˆetera pas `a confusion,
nous noterons simplement φ`a la place de φD. Les morphismes de Modφ
/K sont bien
entendu les applications K-lin´eaires qui commutent `a φ. On erifie ais´ement que la
cat´egorie Modφ
/K est ab´elienne et que chaque objet est de longueur finie. Le but de
cette appendice est de d´eterminer les objets simples de Modφ
/K .
Avant de commencer, rappelons que lorsque b=pet σ= Frob, les objets de
Modφ
/K ont un lien tr`es ´etroit avec certaines repr´esentations galoisiennes. Exacte-
ment, une application du th´eor`eme de Hilbert 90 montre que les deux foncteurs
RepFp(Gal(k((u))sep/k((u)))
Modφ
/K ,
V7→ (VFpk((u))sep)Gal(k((u))sep /k((u)),
(Mk((u)) k((u))sep)φ=1
7→
M
Received October 1, 2008.
c
2009 Independent University of Moscow
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SUR LA CLASSIFICATION DE QUELQUES φ-MODULES SIMPLES 563
(avec les notations usuelles) sont des ´equivalences de cat´egories inverses l’une de
l’autre. Par la th´eorie du corps des normes de Fontaine et Wintenberger (voir [3]),
ce esultat admet un pendant pour les corps locaux d’in´egale caract´eristique. Pour
le d´ecrire, consid´erons Kun corps de caract´eristique nulle complet pour une valua-
tion discr`ete, dont le corps r´esiduel est suppos´e parfait de caract´eristique p. Soit
´egalement Kune extension infinie arithm´etiquement profinie (APF) de K(dans
le langage de loc. cit.) : par exemple Kpeut ˆetre la Zp-extension cyclotomique de
Kou encore on peut avoir K=K(πs, s >0) o`u (πs) est un syst`eme compatible
de racines ps-i`emes d’une uniformisante πfix´ee. Alors le groupe de Galois absolu de
Ks’identifie canoniquement `a celui de k((u)). Ceci permet d’´etendre l’´equivalence
de cat´egories pr´ec´edente `a cette nouvelle situation. Dans le cas des repr´esentations
provenant de sch´emas en groupes annul´es par p, la situation est encore meilleure car
Kisin a prouv´e r´ecemment que la connaissance de la repr´esentation de Gal( ¯
K/K)
est ´equivalente `a celle de sa restriction `a Gal(K/K) lorsque K=K(πs, s >0).
Les objets D(d, n, a) et D(r, a). Soient dun entier strictement positif, nun
entier naturel et aun ´el´ement non nul de k.`
A ces donn´ees, on associe un objet de
Modφ
/K not´e D(d, n, a) d´efini comme suit :
D(d, n) = Ke0Ke1 · · · Ked1;
φ(ei) = ei+1 pour i∈ {0, . . . , d 2}.
φ(ed1) = aune0.
On d´efinit ´egalement D(d, n) = D(d, n, 1).
On commence par d´eterminer des familles d’isomorphismes entre les diff´erents
D(d, n, a).
Lemme 1. Si σn’est pas l’identit´e, alors D(d, n, a)est isomorphe `a D(d, n)pour
tous d,net acomme pr´ec´edemment.
emonstration. Consid´erons un ´el´ement λktel que a=σd(λ)
λ(l’existence r´esulte
d’un th´eor`eme classique de th´eorie de Galois). Si e0, . . . , ed1(resp. e
0, . . . , e
d1)
est la base de D(d, n, a) (resp. D(d, n)) fournie par la d´efinition, un isomorphisme
convenable est donn´e par ei7→ σi(λ)e
i.
Lemme 2. Soient (d, n, a)et (d, n, a)deux triplets comme pr´ec´edemment avec
le mˆeme d. On suppose qu’il existe un entier naturel stel que nbsn(mod bd1)
et a=σs(a). Alors D(d, n, a)D(d, n, a).
emonstration. Si m=nbsn
bd1Z, et si e0, . . . , ed1(resp. e
0, . . . , e
d1) est la
base de D(d, n, a) (resp. D(d, n, a)) fournie par la efinition, alors un isomor-
phisme est ei7→ ubime
i+so`u les e
jpour j>dsont d´efinis par la relation de
ecurrence e
j+1 =φ(e
j).
Proposition 3. Soient (d, n, a)un triplet comme pr´ec´edemment. On suppose qu’il
existe det ncomme pr´ec´edemment tels que t=d
dsoit un entier et que n
bd1=
n
bd1.
(i) Si σn’est pas l’identit´e, on a :
D(d, n, a)D(d, n)d
d.
564 X. CARUSO
(ii) Si σest l’identit´e et si test premier `a p, on a :
D(d, n, a)D(d, n, a
1)D(d, n, a
2) · · · D(d, n, a
t)
o`u les a
isont les racines t-i`emes de a.
(iii) Si σest l’identit´e, a= 1 et t=p, il existe une suite croissantes de sous-
modules de D(d, n)stables par φ
0 = D0D1D2 · · · Dp=D(d, n)
pour laquelle tous les quotients Dm/Dm1(1 6m6p)sont isomorphes `a
D(d, n).
emonstration. Pour toute la preuve, posons r=n
bd1=n
bd1.
On traite d’abord (i). D’apr`es le lemme 1, on peut supposer a= 1. ´
Etant donn´e
que le groupe de Galois absolu de Fpest un groupe procyclique sans torsion (il est
isomorphe `a ˆ
Z), dest une extension cyclique de dege tde d. On d´efinit pour
tout αdet tout i∈ {0, . . . , d1}, l’´el´ement suivant de D(d, n, a) :
fi(α) =
t1
X
s=0
σsd+i(α)urbi(bsd
1) esd+i.
(On remarquera que l’exposant qui apparaˆıt sur uest un entier ´etant donn´e que
r(bd1) = nen est un.) On erifie `a la main que φ(fi(α)) = fi+1(α) pour i
{0, . . . , d2}, et que φ(fd1(α)) = unf0(α) (la derni`ere ´egalit´e utilise σd(α) = α,
ce qui est vrai puisque αest pris dans d). Comme par ailleurs, il est clair qu’`a
αfix´e, la famille des fi(α) est libre, on en d´eduit que les sous-objets F(α) =
Kf0(α) · · · Kfd1(α) sont tous isomorphes `a D(d, n). Il suffit donc pour
conclure de montrer que td’entre eux sont en somme directe. Ceci nous am`ene `a
chercher des ´el´ements α1, . . . , αttels que chacune des matrices :
Mi=
σi(α1)σi(α2). . . σi(αt)
σd+i(α1)σd+i(α2). . . σd+i(αt)
σ2d+i(α1)σ2d+i(α2). . . σ2d+i(αt)
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
σ(t1)d+i(α1)σ(t1)d+i(α2). . . σ(t1)d+i(αt)
(pour ivariant entre 0 et d1) soit inversible. En ealit´e, il suffit pour cela de
choisir les αide fa¸con `a ce que (α1, . . . , αt) soit une base de dsur d. En effet, on
remarque d’abord que Mi=σi(M0) et donc qu’il suffit de d´emontrer l’inversibilit´e
de M0. On invoque alors le th´eor`eme d’Artin d’ind´ependance lin´eaire des caract`eres
qui montre que les vecteurs ligne forment une famille libre.
Passons maintenant au (ii) : on suppose donc σ= id. On pose cette fois-ci :
fi(α) =
t1
X
s=0
αt1surbi(bsd
1) esd+i
pour tout i∈ {0, . . . , d1}et tout αk. On a encore φ(fi(α)) = fi+1(α) pour
i∈ {0, . . . , d2}, et si αest une racine t-i`eme de a, on erifie directement que
φ(fd1(α)) = αunf0(α). Ainsi, comme il est clair par ailleurs que la famille des
SUR LA CLASSIFICATION DE QUELQUES φ-MODULES SIMPLES 565
fi(α) (0 6i < d) est libre, on a Kf0(α) + ···+Kfd1(α)D(d, n, α) (toujours
sous l’hypoth`ese αt=a). Si maintenant test premier `a p,aadmet tracines t-i`emes
distinctes, et un calcul de d´eterminants de Vandermonde montre facilement que la
famille des (fi(α))06i<d, αt=aest une base de D(d, n, a). La conclusion s’ensuit.
Terminons finalement par la emonstration de l’assertion (iii). Pour tous entiers
i∈ {0, . . . , d1}et j∈ {0, . . . , p 1}, on pose :
fi,j =
p1
X
s=0
sjurbi(bsd
1) esd+i
et on d´efinit Dmcomme le sous-K-espace vectoriel de D(d, n) engendr´e par les
fi,j avec 0 6i < det 0 6j < m.`
A nouveau l’utilisation des d´eterminants de
Vandermonde assure la libert´e de la famille des fi,j , ce qui montre que la dimension
de Dmsur Kest md. Par ailleurs, on a les relations φ(fi,m) = fi+1,m pour i
{0, . . . , d2}et :
φ(fd1,m) = un
m
X
µ=0
(1)mµm
µf0unf0,m (mod Dm1).
Elles montrent `a la fois que Dmest stable par φpour tout met que les quotients
Dm/Dm1sont tous isomorphes `a D(d, n).
La proposition pr´ec´edente nous conduit `a consid´erer Rbl’ensemble quotient de
Z(b)(le localis´e de Zen la partie multiplicative des entiers premiers avec b) par la
relation d’´equivalence :
xy(sZ)xbsy(mod Z).
Via l’´ecriture en base b, les ´el´ements de Rbs’interpr`etent aussi comme l’ensemble
des suites eriodiques (depuis le ebut) d’´el´ements de {0,1, . . . , b 1}modulo
d´ecalage des indices, o`u l’on a en outre identifi´e les suites constantes ´egales respec-
tivement `a 0 et `a b1.
Soit r∈ Rb. Par efinition, il est repr´esent´e par une fraction (que l’on peut
supposer — et que l’on supposera par la suite — irr´eductible) s
to`u test un nombre
premier avec b. On v´erifie directement que l’ordre de bmodulo tne d´epend pas
du repr´esentant (irr´eductible) choisi : on l’appelle la longueur de ret on le note
(r). On pourra remarquer qu’`a travers le point de vue «suites eriodiques »,(r)
s’interpr`ete simplement comme la plus petite eriode.
Notons N(r) l’ensemble des entiers relatifs npour lesquels n
b(r)1est un re-
pr´esentant de r. La d´efinition de (r) implique imm´ediatement la non-vacuit´e de
N(r). Le lemme 2montre que les objets D((r), n) pour nvariant dans N(r) sont
isomorphes entre eux. Notons D(r) l’un de ces objets. Si en outre σ= id, le mˆeme
lemme 2permet de d´efinir D(r, a) pour tout akcomme l’un des φ-modules
D((r), n, a), n N (r).
Th´eor`eme 4. Les D(r) (resp. D(r, a)si σ= id) sont des objets simples de Modφ
/K .
De plus, ils sont deux `a deux non isomorphes.
emonstration. Pour simplifier la preuve, on suppose dans la suite a= 1, laissant
au lecteur l’exercice (facile) d’adapter les arguments au cas g´en´eral.
566 X. CARUSO
Notons =(r) et consid´erons ntel que n
b1repr´esente r. Soit Dun sous-objet
non nul de D(r), et soit x=λ1e1+···+λeun ´el´ement non nul de Dpour lequel
le nombre de λinon nuls est minimal. Quitte `a remplacer xpar φm(x) et pour un
certain entier m, on peut supposer λ16= 0. Quitte `a renormaliser x, on peut en
outre supposer λ1= 1. On a alors :
φ(x)unx=
X
i=2
(φ(λi)ubinλiun)eiD.
Supposons par l’absurde qu’il existe un indice i > 1 tel que λi6= 0. Montrons
dans un premier temps que φ(λi)ubin6=λiun. Encore par l’absurde : si ce n’´etait
pas le cas, on d´eduirait φ(λi)
λi=un(bi1) et puis v(b1) = n(bi1) o`u
vest la valuation u-adique de λi. Ainsi, on aurait r=v
bi1, et on obtiendrait
une contradiction avec la d´efinition de . Au final, φ(λi)ubin6=λiun, et l’´el´ement
φ(x)unxest un ´el´ement non nul de Dqui, sur la base des (ei), a strictement moins
de coefficients non nuls que n’en avait x. Ceci contredit la minimalit´e suppos´ee et
montre que x=e1. On en eduit que e1est ´el´ement de D. Puisque ce dernier
est par hypoth`ese stable par φ, il contient n´ecessairement tous les autres ei. En
conclusion, D=D(r) et la premi`ere assertion du th´eor`eme est d´emontr´ee.
Pour prouver que D(r) n’est pas isomorphe `a D(r), il suffit de remarquer que (r)
et N(r) se retrouvent tous deux `a partir de D(r) : le premier en est la dimension,
alors que le second est l’ensemble des entiers npour lesquels il existe un xD(r)
non nul erifiant φ(r)(x) = unx. Finalement, il est clair qu’`a partir de ces deux
donn´ees, rest enti`erement d´etermin´e dans le quotient Rb.
Classification des objets simples. Nous souhaitons d´esormais montrer la e-
ciproque du th´eor`eme 4, c’est-`a-dire que les objets simples de Modφ
/K sont tous
isomorphes `a un certain D(r) (ou D(r, a) si σ= id). Pour cela, nous consid´erons D
un objet simple de Modφ
/K , (e1, . . . , ed) une base de Det Gla matrice de φdans
cette base, i.e., l’unique matrice erifiant l’´egalit´e :
(φ(e1), . . . , φ(ed)) = (e1, . . . , ed)G.
On rappelle, `a ce propos, la formule de changement de base qui interviendra plu-
sieurs fois dans la suite : si B= (e
1, . . . , e
d) est une autre base de Det si Pest
la matrice de passage de (e1, . . . , ed) `a B, alors la matrice de φdans la base Best
donn´ee par la formule P1(P). Il r´esulte de cette formule que, quitte `a multiplier
les eipar une certaine puissance de u, on peut supposer que Gest `a coefficients dans
k[[u]]. En ealit´e on aura besoin d’un esultat un peu plus pr´ecis, cons´equence du
lemme suivant. Introduisons avant tout une notation : soit γla valuation u-adique
de det G.
Lemme 5. Soit Nun entier strictement sup´erieur `a
b1et Hune matrice `a
coefficients dans k[[u]] congrue `a Gmodulo uN. Alors, il existe une matrice P`a
coefficients dans k[[u]] et inversible dans cet anneau telle que P Gφ(P)1=H.
emonstration. On d´efinit une suite de matrices (Pi) (a priori `a coefficients dans
K) par P0=Iet la formule de ecurrence Pi+1 =Hφ(Pi)G1. On a directement
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