La Lettre du Pharmacologue - Volume 13 - n° 3 - mars 1999
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PHARMACOLOGIE
POPULATIONS PARTICULIÈRES
Chez l’insuffisant rénal sévère, mais pas chez l’insuffisant
rénal modéré, il apparaît une augmentation sensible des
concentrations plasmatiques du sildénafil et surtout de son
métabolite actif : la prudence est donc de mise. De la même
manière, le métabolisme du sildénafil est sérieusement com-
promis en cas d’insuffisance hépatique sévère, qui est donc
une contre-indication.
Du fait de l’augmentation des concentrations plasmatiques
de sildénafil et de son métabolite actif chez le sujet âgé sain
(65-81 ans), la plus faible dose (25 mg) est recommandée. Le
sildénafil n’est pas indiqué chez la femme (compte tenu de la
faible excrétion séminale, le problème de la résorption trans-
vaginale ne devrait pas se poser), ni chez l’enfant.
EFFICACITÉ
Quatre études principales à dose fixe ou variable contre pla-
cebo ont été réalisées, complétées par des études chez des
sujets ayant des atteintes médullaires et chez des diabétiques,
couvrant au total plus de 3 000 patients. Compte tenu de la
difficulté à maintenir ou obtenir l’insu, aucune comparaison
n’a été faite avec les traitements actuels de référence (injec-
tion intracaverneuse d’alphabloquants).
N’ont pas été inclus dans ces études les patients ayant eu une
irradiation ou une chirurgie pelvienne, une insuffisance réna-
le ou hépatique sévère, un accident vasculaire cérébral ou un
infarctus de moins de six mois, une insuffisance cardiaque, un
angor instable ou une arythmie sévère dans les six mois pré-
cédents, ainsi que les patients traités par trazodone, testosté-
rone ou un autre agent érectogène, ceux ayant une prolactiné-
mie élevée ou une testostéronémie basse, les patients ayant
une hypotension (< 90/50), une rétinite pigmentaire, une réti-
nopathie diabétique proliférative, un ulcère gastro-duodénal
en activité ou une autre maladie instable. Plus de 90 % des
sujets étaient caucasiens.
Ces études prenaient comme critère d’efficacité la qualité
(qualité de la pénétration et du maintien de l’érection après
pénétration pour un rapport satisfaisant) et la durée de l’érec-
tion, dans des conditions naturelles, sur une évaluation par
autoquestionnaire, sur des échelles à 5 ou 6 points. Pour une
réponse moyenne de l’ordre de 2,2/5 sous placebo, les scores
étaient de 3 avec 25 mg, entre 3 et 4 avec 50 mg et presque
4avec 100 mg, avec des réponses similaires à 3 et 6 mois (le
score était de 0 : pas d’essai de rapports ; 1 : jamais ou presque
jamais ; 2 : rarement ; 3 : parfois, à peu près la moitié du
temps ; 4 : souvent, plus de la moitié du temps et 5 : toujours
- presque toujours) Cette érection était obtenue régulièrement
chez 50 à 55 % des sujets, contre 6 à 9 % sous placebo. Sauf
chez le diabétique, 62 à 73 % des tentatives de rapports étaient
couronnées de succès sous sildénafil, contre 22-25 % sous
placebo. Les partenaires indiquaient des indices de satisfac-
tion similaires. Plus de 91 % des sujets dans les études
ouvertes voulaient continuer à utiliser le produit.
Parmi les facteurs influençant la réponse thérapeutique, on
note que la qualité de la réponse semble diminuer un peu avec
l’âge. Si la durée de la dysfonction ne semble pas influencer
le résultat, la sévérité de celle-ci semble un facteur de moins
bons résultats. La cause de la dysfonction ne semble pas jouer
de rôle majeur, si ce n’est de moins bons résultats chez les dia-
bétiques (restant cependant toujours supérieurs au placebo).
Globalement, le pourcentage de réponses positives en fonc-
tion de l’étiologie s’établit comme suit : dysfonction psycho-
gène 84 %, dysfonction mixte 77 %, dysfonction organique
68 %, sujets âgés 67 %, diabète 59 %, ischémie cardiaque
69 %, hypertension artérielle 68 %, résection prostatique
transurétrale 61 %, prostatectomie complète 41 %, lésion spi-
nale y compris transsection médullaire 83 %, dépression
75 %.
EFFETS INDÉSIRABLES AU COURS DES ESSAIS CLINIQUES
Quatre mille deux cent treize sujets ont participé aux essais
cliniques comparatifs en double insu, 3 003 sous sildénafil et
1832 sous placebo, dont 769 ont ultérieurement reçu du sil-
dénafil dans des études ouvertes. Mille six cent quatre-vingt-
deux ont commencé par une dose de 50 mg ou plus et 559 en
ont pris plus d’un an. La dose moyenne était de 8 à 9 doses
par mois pendant les premiers mois, et de 3 doses par mois à
partir du cinquième mois.
Décès et infarctus
Une première évaluation de l’ensemble des essais cliniques en
février 1997 faisait état de 13 décès sous sildénafil contre 2 sous
placebo (fréquences respectives 0,3 et 0,1 pour cent patients
traités, risque relatif 3,16 ; IC95 :0,71-14,4 [NS]). Si l’on tient
compte des durées d’exposition de 1 719,3 pour le sildénafil et
de 366,3 patients-années avec le placebo, les fréquences corres-
pondantes sont de 0,8 et 0,5 % patients-années, risque relatif :
1,38 ; IC95 :0,31 à 6,16. Pour ce qui concerne la survenue d’in-
farctus, les fréquences respectives sont de 1,33 et 1,36 %
patients-années (RR : 0,98 ; IC95 :0,37-2,59). Une réévaluation
un an plus tard, avec des durées de suivi plus longues
(4 900 patients-années sous sildénafil), trouve 22 morts, soit
une fréquence de 0,45 % patients-années (RR 0,74 ; IC95 :0,18-
3,37). La diminution du risque relatif est un bon exemple de
déplétion des susceptibles : les plus à risque mourant d’abord,
l’allongement de la durée de suivi chez les mêmes patients
entraîne une diminution du risque de mortalité…
Arrêts prématurés
La fréquence d’arrêts prématurés de traitement était plus éle-
vée avec le placebo (13,9 %) qu’avec le sildénafil (8,5 %),
liée surtout à un surcroît d’arrêts pour inefficacité (5,5 % ver-
sus 1,5 %). Le nombre d’arrêts pour effets indésirables était
similaire (2,3 % [placebo] versus 2,6 %).
Autres effets indésirables
Les effets indésirables les plus fréquemment rapportés avec le
sildénafil étaient des effets digestifs (19,3 % versus 7,3 %),
essentiellement dyspepsie, certains effets étant en rapport