Contexte d`un processus psychopathologique

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Contexte d'un processus
psychopathologique
Situation clinique
C1
Vous êtes infirmière aux urgences et vous prenez en charge Mademoiselle L., âgée de 18 ans, adressée par ses parents pour troubles du comportement.
C2
Sa mère vous explique que depuis 2 jours, sa fille a un comportement étrange :
– Elle refuse d'aller au lycée car elle pense que ses camarades lui en veulent.
C3
– Elle dit être en danger car elle craint que son entourage (amis, famille…) conspire à son insu.
– Elle mange et dort peu.
C4
– Elle se réfugie dans sa chambre car elle dit que c'est l'unique endroit où elle se sent en sécurité.
Mlle L. n'a aucun antécédent (médical ou chirurgical) connu jusqu'à ce jour.
Ses parents sont très angoissés car ils ne reconnaissent pas leur enfant. Ils ont réussi à la conduire
à l'hôpital en lui disant qu'ils s'y rendaient pour lui faire un certificat médical afin de justifier son
absentéisme scolaire.
C5
C6
À son arrivée :
– Elle est logorrhéique, agitée, en sueurs et dit ne pas se sentir à l'aise dans cet endroit qu'elle ne
connaît pas.
– Ses propos sont incohérents, elle fait des associations d'idées superficielles par assonance, jeux de
mots ou sans lien apparent (elle passe du coq à l'âne).
– Elle refuse tout examen clinique et souhaite juste obtenir un certificat afin de ne plus aller à l'école.
Face à ce refus de soins et à cette agitation, le médecin prescrit 50 mg de Loxapac® en IM car la
patiente refuse catégoriquement de prendre un traitement par voie orale.
Une fois le traitement administré, Mlle L. est plus calme et un examen somatique est possible :
– Examen clinique normal
– Bilan sanguin normal
– Absence de présence de toxique au niveau urinaire et sanguin
– Scanner cérébral normal
– Les paramètres hémodynamiques sont les suivants :
• PA : 120/52 mmHg
• Pouls : 82 bpm
• Saturation : 99 %
• Température : 36,4 °C
Suite à l'entretien initial et à la normalité des examens effectués, le médecin diagnostique une bouffée délirante aiguë qui nécessite une prise en charge en milieu spécialisé.
Intégration des savoirs et posture professionnelle infirmière
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UE 5.3 Communication et conduite de projet
Après discussion, Melle L. s'oppose fortement à une hospitalisation.
Le médecin envisage alors, en accord avec les parents de cette jeune fille, une hospitalisation en
psychiatrie à la demande d'un tiers.
Comprendre une situation
clinique : méthodologie de travail
Caractériser la situation
Au regard du sujet, réaliser une liste de mots-clés qui caractérisera la situation.
L'intérêt pour l'étudiant est de se construire une base de données personnelle.
Mots–clés : bouffée délirante aiguë, urgence psychiatrique, hospitalisation à la demande d'un tiers,
neuroleptique.
Définir la classe de situation
Une classe de situation est un ensemble homogène de situations qui présentent des caractéristiques communes, seules certains éléments vont varier. Ces éléments de variation dépendent des
facteurs suivants :
– la diversité des conditions de travail (par exemple, la prise en charge d'un patient en secteur hospitalier, au domicile, en centre de rééducation, etc.) ;
– la variabilité du travail au cours de la journée (exemple travail de jour ou de nuit, travail dans
l'urgence ou admission programmée, etc.) ;
– l'extensivité de la classe de situation : en quoi la classe de situation peut devenir plus complexe.
Ici la classe de situation est la suivante : Prise en charge d'une urgence psychiatrique – bouffée délirante aiguë.
Ceci peut paraître complexe et demande un entraînement, mais est très utile pour l'étudiant : il
peut ainsi opérer des généralisations (c'est-à-dire des regroupements de situations similaires ou
apparentées qui lui feront gagner du temps en terme de raisonnement) ou des discriminations,
c'est-à-dire qu'il distinguera ce qui diffère dans la situation pour la caractériser de façon claire et
pertinente.
Déterminer la situation clé
ou situation emblématique
La seconde étape consiste à identifier la situation clé ou emblématique et à dire en quoi cette
situation est emblématique.
Pour cela il faut répondre aux trois éléments suivants :
– la situation est fréquente et représentative ;
– la situation est suffisamment critique pour être pédagogiquement intéressante ;
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– la situation est suffisamment significative en termes d'activité (comporte des éléments relatifs
à l'expertise professionnelle).
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Ainsi, pour ce cas ciblé sur Mlle L, la classe de situation homogène est : Prise en charge d'une
urgence psychiatrique.
Elle répond effectivement aux trois critères demandés :
– fréquente : ce type de situation est représentatif des urgences psychiatriques ;
– critique : le patient est vulnérable et potentiellement dangereux pour lui et pour les autres ;
– significative : le rôle propre de l'infirmière y est important, la situation fait appel à des connaissances spécifiques en soins infirmiers, la dimension éducative du patient et de sa famille est
présente.
Enfin, la situation clé (emblématique) est : Prise en charge d'une bouffée délirante aiguë.
Quelques questions pour
délimiter les connaissances
Questionnement 1
À partir des éléments du texte et de vos connaissances, définir les problèmes réels et/ou
potentiels de Mlle L. à son arrivée aux urgences.
■ TROUBLES DU COMPORTEMENT EN RAPPORT
AVEC LA SYMPTOMATOLOGIE DÉLIRANTE
C'est ce qui fait toute la gravité de l'épisode. Il existe à ce stade, un risque de passage à l'acte important qui peut être auto ou hétéro-agressif et qui pourrait conduire à un raptus suicidaire.
Signes :
– Trouble paranoïaque : « Elle pense que ses camarades lui en veulent » ; « elle craint que son entourage conspire à son insu ». Ce premier trouble entraîne un sentiment d'angoisse et d'insécurité qui
provoque un isolement et un repli sur elle-même : « Elle refuse d'aller à l'école » ; « se réfugie dans
sa chambre car elle dit que c'est l'unique endroit où elle se sent en sécurité ».
– Agitation.
– Logorrhéique.
– Propos incohérents.
■ LE REFUS DE SOINS
Signes :
– La patiente n'a pas conscience de son état car elle ne critique pas son délire. Par conséquent,
elle ne peut pas comprendre l'intérêt d'une prise en charge médicale : « Elle refuse tout examen
clinique et souhaite juste obtenir un certificat pour ne plus aller à l'école ».
– De plus, son anxiété ne fait que majorer ce refus de soins : « Elle dit ne pas se sentir à l'aise dans
cet endroit qu'elle ne connaît pas ».
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■ LA DIFFICULTÉ À ÉTABLIR UN CONTACT AVEC LA PATIENTE.
TROUBLE DE LA PENSÉE ET DU LANGAGE
Signes :
– L'altération du rapport à la réalité et le vécu délirant de la patiente ne permettent pas d'établir
aisément une relation avec elle.
– Elle souffre également de troubles du langage (qui sont secondaires à une altération du cours de
la pensée) qui ne facilitent pas la communication : « Elle est logorrhéique » ; « Ses propos sont incohérents, elle fait des associations d'idées superficielles par assonance, jeux de mots ou sans lien
apparent (elle passe du coq à l'âne) ».
Questionnement 2
À partir des éléments du texte et de vos connaissances, définir des hypothèses de diagnostics infirmiers.
Hypothèses de diagnostics infirmiers sous forme de PES :
– Altération des opérations de la pensée liée à des difficultés à se situer dans la réalité se manifestant par : un délire de persécution, des propos incohérents, une agitation, une angoisse majeure
marquée par un repli sur soi, un isolement, des troubles du sommeil et de l'alimentation.
– Altération de la communication verbale et non verbale liée à une altération du cours de la
pensée et manifestée par des propos incohérents et une logorrhée.
– Stratégie d'adaptation familiale inefficace marquée par une incapacité à gérer une telle situation dans le cadre familial (qui est inapproprié dans ce cas) et par une angoisse des parents.
– Risque de violence envers soi ou envers les autres lié à son angoisse importante.
Questionnement 3
Déterminez les actions à mettre en œuvre (relatives à votre rôle propre) à l'arrivée de
Mlle L. aux urgences.
La patiente doit être prise en charge rapidement : c'est une urgence.
Points-
clés
Cr
Crise et urgence psychiatrique
La notion de crise d'après le psychiatre Nicolas
de Coulon sera considérée comme « un moment
de rupture dans l'équilibre intrapsychique ou
d
interpersonnel qui mène à une prise de contact
avec un professionnel de la santé mental ». La crise
s'exprime de manière intense et demande une
intervention immédiate.
Actions de soins à mettre en œuvre devant une bouffée délirante aiguë :
– Se présenter clairement dans sa fonction (infirmier des urgences) et se positionner en tant que
soignant. Ici nous devons réaliser un entretien auprès des parents qui vise :
• La recherche de l'information administrative (état civil).
• La recherche des antécédents médicaux et chirurgicaux.
• La présence d'allergie.
• Les traitements en cours.
• L'éventuelle prise de toxiques.
• Les habitudes de vie.
• Les symptômes présents : à la fois ceux exprimés par Mlle L. et ceux que l'on observe (les attitudes
et les mimiques sont ici très importantes à noter, tout comme le discours et le comportement).
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• L'histoire de la maladie : le mode d'apparition des symptômes, leur évolution.
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• Les thérapeutiques mises en œuvre éventuellement.
• Les éléments biographiques de Mlle L. : les perturbations de la petite enfance, de l'adolescence et
les événements potentiellement survenus dans la vie de Mlle L. (la recherche d'un traumatisme,
un deuil, une perturbation de la dynamique familiale).
Il convient de créer un espace thérapeutique entre le patient, l'entourage et l'équipe : l'association
de l'entourage est ici capitale (sauf en cas de refus de la patiente ou en cas d'interférence notable).
– Installer la patiente dans un box proche du poste de surveillance.
– Rester calme, ferme mais empathique, ne pas montrer sa peur, éviter le contact visuel, faire sortir
les proches.
– Signalement immédiat au médecin et à l'équipe en cas de crises : ne jamais rester seul et isolé face
à un patient agité.
– Éloigner l'entourage et isoler la patiente dans un endroit sécurisé et sécurisant tout en expliquant
à la patiente l'intérêt de la prise en charge.
– Évaluer rapidement le caractère de dangerosité de la situation qui repose sur :
• une opposition à toute relation de la part de la patiente ;
• un contact impossible à établir ;
• une impulsivité ou une absence de contrôle de la part du patient ;
• une majoration des troubles du fait de l'intervention du personnel paramédical ou médical ;
• un passage à l'acte (violence physique ou verbale, crise d'agitation extrême) ;
• l'existence d'une intoxication associée (alcool ou drogues) ou d'un délire avec ou sans
hallucinations.
– Éloigner de la patiente toute source d'objet dangereux.
– Ne pas rester seul avec la patiente et assurer un nombre suffisant d'aides afin d'éviter une
agression.
– Ne pas laisser la patiente seule afin de prévenir le risque de fugue ou de passage à l'acte.
– Appeler le médecin.
– Établir une relation sécurisante et dédramatisante tout au long de la prise en charge avec la
patiente mais aussi avec la famille qui l'accompagne.
– Assurer une écoute bienveillante mais non complice : le premier contact et le climat de confiance
mis en œuvre sont très importants. L'hospitalisation peut engendrer une perte de repères et
conduire à une réaction de violence importante.
– Favoriser l'expression des problèmes générant l'angoisse du patient : ici l'important est la démarche
empathique (la capacité de comprendre l'expérience de l'autre, ce qu'il vit tout en n'étant pas cet autre).
– Ne pas oublier la prise en charge somatique qui consiste à :
• Mesurer les paramètres hémodynamiques (pouls, pression artérielle, saturation, fréquence respiratoire et température).
• Effectuer une glycémie capillaire.
• Réaliser le bilan sanguin prescrit par le médecin.
Si la patiente refuse cette prise en charge (comme c'est le cas), on peut différer l'examen somatique.
Puis, mettre en œuvre les prescriptions médicales.
Il est également important de rassurer les parents de la patiente en leur expliquant la situation.
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Si l'agitation est contrôlable : proposer un traitement sédatif per os (avec le traitement injectable
en intramusculaire et la contention déjà prêts en cas de refus, pas de négociation une fois que la
décision est prise).
La contention sera possible en dernier recours sur prescription médicale.
■ FOCUS SUR… LA CONTENTION
Le recours à la contention n'est souhaitable qu'en dernier lieu et en cas d'inefficacité des autres moyens
pour la sécurité du patient. Elle est possible devant l'imminence d'un risque pour le patient ou pour un tiers.
Elle est possible lorsque l'étiologie d'une agitation violente n'est pas connue et que l'on ne souhaite pas
administrer une thérapeutique dangereuse et potentiellement iatrogène.
Elle ne doit jamais être utilisée pour réduire les inquiétudes et les angoisses de l'équipe ou à titre de confort
ni pour pallier un manque de personnel.
La contention est également non recommandée en cas de pathologie somatique avec instabilité majeure.
La contention est une prescription médicale qui doit comporter l'identité du prescripteur, la date et l'heure
de début. Elle est initiée pour une durée maximale de 4 heures. Un relais médicamenteux doit être débuté
immédiatement.
La contention impose d'expliquer au patient les raisons, les buts et les modalités de cette prescription.
Le matériel doit être adapté. La procédure impose une coordination de l'équipe et nécessite d'être au minimum 5 personnes (un soignant pour la tête et un soignant pour chacun des membres) voire une 6e personne
pour réaliser l'injection. Un leader doit coordonner les actions de chacun des soignants. Les précautions à
prendre sont :
– Vérifier l'absence d'objet dangereux, faire de la place.
– Faire sortir la famille et les proches.
– Fermer la porte.
– Toujours assurer un contact verbal pendant la mise de la contention.
– Évaluer la patiente toutes les 4 heures.
– Assurer une surveillance infirmière toutes les 15 minutes par la mesure des paramètres hémodynamiques
et la surveillance de l'apparition d'œdème, de rougeur, de coloration des téguments, de chaleur et de
douleur localisée : alerter en cas d'anomalie.
– Assurer l'hygiène du patient et respecter l'intimité, le confort et la dignité.
– Assurer une traçabilité de la contention dans le dossier de soin.
Questionnement 4
Quels sont les éléments du texte en faveur d'une bouffée délirante aiguë ?
Les éléments du texte en faveur d'une bouffée délirante aiguë sont :
• Apparition d'un délire chez une jeune femme exempte de pathologie psychotique
• Activité délirante envahissante à laquelle est attachée une conviction totale
• Le thème du délire : persécution
• Troubles de l'humeur : angoisse, isolement, agitation
• Logorrhée
• Propos incohérents
• Association d'idées superficielles par assonance, jeux de mots ou sans lien apparent
• Trouble du sommeil
• Examen somatique, bilan biologique et scanner normaux
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Contexte d'un processus psychopathologique
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■ FOCUS SUR… LA BOUFFÉE DÉLIRANTE AIGUË
La perturbation du comportement moteur psychique et relationnel est un élément que l'on retrouve dans
cette situation.
Le risque majeur de cette prise en charge est de se faire piéger par l'évidence psychiatrique et de passer à
côté d'une étiologie somatique. Il faut retenir que dans 40 % des cas des états d'agitation, il existe un lien
avec une cause somatique.
Les causes à éliminer sont :
– neurologiques (notamment chez le sujet âgé) tels que l'accident vasculaire cérébral, les hémorragies
méningées, les tumeurs, l'hypertension intracrânienne, etc. ;
– la prise de toxique (alcool, cocaïne, amphétamines, LSD…) ;
– les effets secondaires de certaines thérapeutiques (psychotropes, benzodiazépines) ;
– la déshydratation (l'hyponatrémie) ;
– les infections ;
– les causes métaboliques et endocriniennes : hypoglycémie, acidocétose, déshydratation, hyperthyroïdie,
etc. ;
– les causes cardiovasculaires ;
– les états de chocs.
Les facteurs de gravité sont :
– un contact impossible à établir ;
– une violence incoercible ;
– l'usage de toxiques ;
– la présence d'éléments délirants ;
– la présence d'éléments confusionnels.
La bouffée délirante se traduit par un état psychopathologique caractérisé par l'apparition brutale d'un délire
typiquement riche et polymorphe. Elle associe une agitation psychomotrice mais aussi potentiellement une
sidération. Le caractère brutal est une des caractéristiques principales (on parle dans la littérature « d'un
coup de tonnerre dans un ciel serein »).
Cette pathologie touche le plus souvent les sujets jeunes. On retrouve souvent des facteurs favorisants tels
que des traumatismes affectifs comme un deuil ou un changement important dans la vie. La consommation
de toxiques (drogue ou alcool…) peut aussi favoriser l'apparition d'une bouffée délirante. Les patients présentent une fragilité comme une immaturité ou des troubles de la personnalité.
Le délire se caractérise par sa richesse. Les thèmes du délire tournent autour de délire de grandeur, de persécution, de possession, de transformation corporelle, par exemple.
Les mécanismes de ce délire peuvent être de type hallucinatoire, interprétatif, imaginatif, intuitif, onirique. Un
syndrome d'automatisme mental comme la perception de voix intérieures, de pensées imposées, accompagne souvent le délire et le patient a l'impression d'être téléguidé. Les variations de l'humeur accompagnent la bouffée délirante avec deux pôles allant de l'euphorie à la dépression. La conscience est aussi
potentiellement destructurée. On peut retrouver une perturbation du sommeil.
Questionnement 5
Comment mettez-vous en œuvre le traitement neuroleptique par voie IM et quelle en est la
surveillance à court terme ?
Un traitement neuroleptique à visée sédative peut être indiqué chez certains patients en phase de
délire aiguë. C'est le cas de cette patiente. L'objectif ici est de calmer l'état de crise par l'utilisation
de neuroleptiques et de soulager la patiente.
Cependant, l'administration d'un tel médicament, et notamment par voie injectable, peut être perçue comme une réelle agression par le patient.
Ainsi, avant d'avoir recours à ce procédé, il conviendra de s'assurer que la voie orale est impossible.
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UE 5.3 Communication et conduite de projet
Acte et surveillance
infirmiers
Conduite à tenir lors de l'injection
d'un traitement neuroleptique
La patiente doit être prise en charge
dans une salle calme et isolée.
Vérifier qu'il n'y a pas de contreindications à l'injection intramusculaire
(troubles de la coagulation, prise
d'anticoagulants et réactions
allergiques au produit utilisé).
S'assurer d'un nombre suffisant de
personnes afin de maintenir la
patiente dans le cas où elle serait
trop agitée (voir focus Contention).
Préparer le soin avant d'entrer dans
la salle afin de ne pas majorer
l'angoisse et l'état d'agitation.
Mesurer la pression artérielle (si
possible) avant l'injection car les
neuroleptiques peuvent entraîner des
hypotensions orthostatiques.
Prévenir la patiente du soin et lui
demander de se mettre de
préférence en position allongée (ce
qui permettra de minimiser les
risques d'agitation, de fugue
ou de chute).
L'injection se fait en intramusculaire
profonde après désinfection locale et
en respectant (au mieux) les règles
d'asepsie.
■
Après l'injection :
Il est préférable que la patiente reste
en position allongée afin d'éviter les
chutes secondaires à l'effet sédatif
et à l'hypotension orthostatique.
Vérifier l'efficacité du traitement
en évaluant la régression des
troubles.
Surveiller l'apparition d'effets
secondaires immédiats :
– la sédation : surveiller l'état
de conscience ;
– les dyskinésies précoces : surveiller
l'apparition d'un trismus ;
– le syndrome malin : surveillance de
la température, de la pression
artérielle, du pouls et de l'apparition
d'une rigidité musculaire ;
– l'hypotension orthostatique : elle
est évitée si l'on parvient à maintenir
la patiente allongée ;
– les réactions allergiques (comme
dans tout traitement) : surveiller
l'apparition de réactions allergiques
cutanées.
La patiente doit être surveillée
régulièrement.
■ FOCUS SUR… LES EFFETS SECONDAIRES DES NEUROLEPTIQUES
(Voir aussi le fascicule Pharmacologie dans cette collection)
Les neuroleptiques peuvent entraîner de nombreux effets indésirables :
Sur le système nerveux central :
– Sédation
– Dyskinésies précoces (torticolis spasmodique, crises oculogyres, trismus)
– Syndrome extrapyramidal cédant partiellement aux antiparkinsoniens anticholinergiques
– Dyskinésies tardives survenant lors de cures prolongées. Les antiparkinsoniens sont sans action ou peuvent
provoquer une aggravation
– Syndrome malin des neuroleptiques (SMN) : les signes cliniques du SMN sont l'hyperthermie, la rigidité
musculaire, l'altération des facultés mentales, et des signes d'instabilité neurovégétative – instabilité du
pouls et de la pression artérielle, tachycardie, hypersudation et troubles du rythme cardiaque –, auxquels
peuvent s'ajouter des signes tels qu'élévation des CPK, myoglobinurie – rhabdomyolyse – et insuffisance
rénale aiguë
– Convulsions
Troubles végétatifs :
– Hypotension orthostatique, rares cas de modification du rythme cardiaque
– Effets anticholinergiques à type de sécheresse de la bouche, constipation, troubles de l'accommodation,
risque de rétention urinaire
Troubles endocriniens et métaboliques :
– dysérection, frigidité
– Hyperprolactinémie : aménorrhée, galactorrhée, gynécomastie
– Prise de poids ou perte de poids
Autres troubles observés :
– Asthénie, réactions allergiques
– Dans les traitements prolongés, possibilité de rétinopathies pigmentaires et de pigmentation lenticulaire
– Exceptionnellement : agranulocytose, leucopénie, thrombopénie
– Anomalies du bilan hépatique
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Questionnement 6
Quel est l'objectif d'une hospitalisation à la demande d'un tiers ? Quelles sont les conditions
de mise en œuvre d'une telle mesure ?
Mlle L. refuse l'hospitalisation, néanmoins son état nécessite une prise en charge dans une unité
spécialisée. Dans ce cas, afin de traiter la patiente et en raison du danger qu'elle représente pour
elle-même et pour autrui et considérant que ses troubles rendent impossible son consentement
éclairé, une hospitalisation à la demande d'un tiers est effectuée.
L'objectif est d'apporter des soins à la patiente et de la protéger.
Une demande d'admission doit être faite par un tiers (un membre de la famille le plus souvent mais
ce n'est pas une obligation). Elle doit être manuscrite, sur papier libre et adressée au directeur de
l'établissement d'accueil.
Deux certificats médicaux sont joints à cette demande : le premier doit être fait par un médecin
extérieur à l'établissement d'accueil et le second confirme le premier (il peut être fait par un praticien de l'établissement d'accueil).
Le patient peut alors être admis dans l'établissement d'accueil.
Le contrôle des hospitalisations sous contrainte est strict tant d'un point de vue médical que juridique.
Questionnement 7
Indiquer le devenir de Mlle L. et les objectifs d'une éventuelle hospitalisation en psychiatrie.
L'orientation vers un service de psychiatrie est la solution la plus souhaitable dans la mesure où la
bouffée délirante de Mlle L. n'a pas de cause somatique.
30 % des bouffées délirantes évoluent vers la schizophrénie (qui traduit une chronicisation de la
pathologie).
L'hospitalisation permet :
– de lutter et contenir les troubles comportementaux et les accès de violence potentiels ;
– d'alimenter Mlle L. ;
– d'établir un diagnostic ;
– d'initier une chimiothérapie de fond pour prendre le relais des neuroleptiques ;
– d'assurer l'observance des thérapeutiques ;
– de dépister et d'assurer la prévention des effets indésirables du traitement ;
– de mettre en place des entretiens ;
– de mettre en place un projet thérapeutique en y incluant la famille de Mlle L. (la prise en compte
de l'entourage est ici fondamentale) ;
– d'expliquer le projet thérapeutique avec notamment :
• l'importance de la prise du traitement régulièrement,
• les modalités de prise du médicament (heures des prises, posologie),
• l'éducation de Mlle L. sur les effets secondaires des médicaments,
• expliquer l'incidence de la non observance du traitement,
• éduquer Mlle L. et/ou sa famille à repérer les symptômes d'aggravation,
• permettre une réinsertion dans la société et dans sa famille,
• faire prendre conscience à Mlle L. de sa propre image,
• informer la famille et de faire comprendre la pathologie de Mlle L.
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■ FOCUS SUR… LES SOINS PSYCHIATRIQUES À LA DEMANDE D’UN TIERS EN URGENCE
Les soins psychiatriques à la demande d'un tiers en urgence (anciennement HDT) s'appliquent à un patient
dont les troubles mentaux rendent impossible le consentement à des soins, pourtant nécessaires immédiatement, avec surveillance en milieu hospitalier.
L'hospitalisation sans consentement est régie par la loi n° 90-527 du 27 juin 1990 réformée par la loi n° 2011803 du 5 juillet 2011 qui modifie le dispositif de soins sous contraintes en prévoyant différentes modalités
comme l’intervention du juge des libertés et de la détention pour maintenir une personne, sans son consentement, en hospitalisation.
Un tiers peut signer la demande manuscrite d'admission : ce peut être un membre de la famille, un proche,
ou une personne agissant dans l'intérêt du patient. Les personnels soignants de l'établissement d'accueil,
ainsi que ses personnels administratifs ne peuvent être admis comme tiers. En revanche, l'assistante sociale
de cet établissement peut être acceptée dans ce rôle.
Dans le cas d'un mineur, la procédure n'a pas de support légal : il appartient à la personne qui a l'autorité
parentale de prendre la responsabilité de l'hospitalisation.
En pratique, la demande du tiers doit être entièrement manuscrite. Ce document doit comporter tous les
renseignements concernant les nom, prénoms, profession, âge et domicile de la personne à hospitaliser et
du demandeur ; doivent être précisés les liens de parenté s'il en existe ou la nature des relations.
Elle doit être accompagnée de deux certificats établis par des médecins inscrits au Conseil de l'Ordre, datant
de moins de quinze jours. Le premier doit être rédigé par un médecin n'exerçant pas dans l'établissement
hospitalier. Le second par un médecin qui peut exercer dans l'établissement.
Sont exclus du rôle de certificateur les médecins non thésés, ou non-inscrits au Conseil de l'Ordre, les médecins exerçant dans l'établissement d'accueil (pour le premier certificat), les médecins parents ou alliés au
quatrième degré du tiers demandeur, du malade, ou des directeurs de l'établissement.
Ces certificats nécessitent un bon examen du malade, ne doivent pas être rédigés sous la pression des
proches et engagent les responsabilités civile, pénale et disciplinaire de leurs auteurs.
Un certificat établi dans les 24 premières heures doit être réalisé par un psychiatre de l'établissement, ce
nouveau certificat confirmant ou infirmant les précédents.
Lorsque les pièces sont réunies, le directeur de l'établissement les adresse au Préfet et à la Commission
des hospitalisations psychiatriques. Dans les trois jours, le Préfet informe le Procureur de la République,
le Président du Tribunal de grande instance du lieu d'hospitalisation ainsi que celui du lieu de domicile du
patient.
À titre exceptionnel, en cas de « péril imminent pour la santé du malade », l'admission pourra être faite sur
présentation d'un seul certificat pouvant même être produit par un psychiatre de l'établissement.
La durée de validité de ces deux certificats est de 15 jours.
En cas de péril imminent (Art. L. 3212-3 du Code de la Santé publique), le directeur de l'établissement hospitalier peut prononcer l'admission d'un malade au vu d'un seul certificat auquel s'adjoint la demande d'un
tiers. Dans ce seul cas, le médecin certificateur peut exercer dans l'établissement d'accueil : le certificat doit
alors mentionner de façon explicite le péril imminent.
Un certificat « immédiat » est rédigé dans les 24 heures par un psychiatre de l'établissement. Les certificats
« de quinzaine » confirment la nécessité du maintien de l'hospitalisation.
La sortie du malade est prononcée par le médecin constatant que les conditions de l'hospitalisation à la
demande d'un tiers ne sont plus justifiées, ou en cas d'absence des certificats réglementaires.
Les sorties peuvent se faire :
– sur avis médical : le psychiatre, au vu de l'amélioration clinique, « certifie que les conditions de l'HDT ne
sont plus réunies » ;
– à la demande d'un tiers : conjoint, ascendants, descendants majeurs, curateur, tuteur, toute personne
autorisée par le Conseil de famille ;
– à la demande de la Commission des hospitalisations psychiatriques ;
– sur ordre du Préfet en cas d'absence des certificats prévus.
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0001627206.INDD 122
10/4/2012 12:33:31 PM
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