CHAPITRE 9
79
CHAPITRE 9 Polynômes
L’ensemble des polynômes à coefficients dans C en la variable x forme un anneau : ceci est vérifié
formellement dans l’appendice. Plus généralement, on peut prendre comme corps des coefficients
un corps commutatif K quelconque, au lieu de C. L’ensemble des polynômes en x sur K est noté
K[x]
.
Le degré du polynôme non nul
Pa0a1x anxn
est n, si
an0
. La notation est deg(P).
Le degré du polynôme nul est par convention . De même, on conviendra des règles suivantes :
 0, n, si nN{}
.
Prenons par exemple
KQ
. Alors les polynômes
P2x3x25x et Q1x3
sont tous deux
de degré 3. Le polynôme
P2Q
est de degré 2 et PQ est de degré 6.
On observera qu’un polynôme est de degré  ou 0 si et seulement s’il est constant, c’est-à-dire
ne dépend pas de x, ou de manière équivalente, est dans K. On dit aussi constante pour un tel
polynôme.
9.1 Théorème
Si
P, QK [x]
alors
.
Preuve
Si
P0
, on a
PQ0
par le th. 6.3 (i); alors
 deg(Q)
, ce qui démontre le théorème
dans ce cas. Si
Q0
, on raisonne de même.
Supposons maintenant que P, Q sont tous deux non nuls. On peut alors écrire
Pa0a1x 
anxn,Qb0b
1x bmxm
,
ai,bjK
,
an0,bm0
et
ndegP
 
,
mdegQ
 
. Alors
PQanbmxnmxnm1  x
, où désigne des coefficients dans K dont l’expression
exacte nous importe peu. L’important est que
anbm0
, car K est un corps (cf. ex. 6.3), donc PQ
est de degré
nm
. On a donc bien
degPQ
 degP
 degQ
 
. u
9.2 Corollaire
Les éléments inversibles de
K[x]
sont précisément les éléments non nuls (i.e. inversibles) de
K
.
Preuve. Faire l’exercice 1.
CHAPITRE 9
80
9.3 Corollaire
Si P, Q
Kx 
sont non nuls, alors leur produit est non nul.
Démonstration
Le th. 9.1 montre en effet que dans ce cas
deg PQ deg P deg Q 0
, donc
deg PQ 
et PQ 0. h
9.4 Théorème
Si
P,QK[x]
, alors
deg(PQ)max deg(P),deg(Q)
 
.
Démonstration
Si
P0
, il faut montrer
deg(Q)max ,deg(Q)
 
, ce qui est bien vrai. De même si
Q0
.
Supposons alors que
P,Q0
. Nous écrivons P et Q comme dans la preuve du th. 9.1.
Si
nm
, nous aurons
PQbmxmxm-1+ +x +
, et donc
deg(PQ)mmax(n,m)
max(n,m)
; si
nm
, nous aurons
PQanbm
 xmxm1 
, et donc
deg(PQ)mmax(n,m)
; si
nm
un raisonnement analogue au cas
nm
montre que
deg(PQ)max(n,m)
. Dans tous les cas, on a donc
deg(PQ)max deg(P),deg(Q)
 
. h
Notez que lorsque
deg(P)deg(Q)n
, alors
deg(PQ)
peut être , 0, 1, …, ou
nmax deg(P),deg(Q)
 
.
L’anneau des polynômes possède une division euclidienne, qui est très semblable à celle des entiers
naturels.
9.5 Théorème
Soient A, B des polynômes dans
K[x]
, avec B non nul. Il existe alors des polynômes Q,
R tels que
ABQR et deg(R)deg(B)
.
Démonstration
L’existence de Q et R se démontre par récurrence sur
deg(A)
, B étant fixé. Si
deg(A)deg(B)
,
nous prenons
Q0 et RA
: on a bien
ABQ R et deg(R)deg(B)
. Supposons
CHAPITRE 9
81
maintenant que
deg(A)deg(B)
. On peut alors écrire
Aanxnan1xn1,
Bbmxmbm1xm1,
avec
an,b
m0
. Alors
nm0
, car
deg(A)deg(B)0
. Comme K
est un corps, bm a un inverse; posons
A
1Aanbm
1xnmB
.
On a
Aanxnan1xn1
et
anbm
1xnmBanb
m
1xnmbmxmbm1xm1
 anxnanbm
1bm1xn1
Donc
A
1an1anbm
1bm1 xn1...
et
A
1
est un polynôme de degré
n1deg(A)1
. Par hypothèse de récurrence, il existe des
polynômes
Q
1et R
tels que
A
1BQ
1R,deg(R)deg(B)
. Comme
AA
1anbm
1xnmB
, nous
avons
ABQ1Ranbm
1xnmBB an
bm
1xnmQ
1RBQR
, on a posé
Qanbm
1xnmQ1
. Comme
deg(R)deg(B)
, ceci démontre le torème.
Démontrons maintenant l’unici de Q et R. Si l’on avait
ABQRBQ R
avec
deg(R)deg(B)
et
deg( R )deg(B)
, on en déduirait
B(QQ )R R
.
Le membre de droite est de degré
deg(B)
, par le th. 9.4. Le membre de gauche est, par le th.
9.1, de degré
deg(B)deg(QQ )
. La seule solution pour qu’on ait égalité est donc que
deg(QQ )
. D’où
QQ 0
, et par suite aussi
RR 0
, ce qu’on voulait montrer. h
9.6 Exemple
Prenons
KQ, Ax45x31
et
B2x2x
. Comme dans la preuve précédente, on pose
A
1A(1 2)x2B
, où le facteur
(1 2)x2
a été choisi de telle manière que la soustraction
précédente fera disparaître la plus haute puissance de x dans A, à savoir
x4
. On a
A
1x45x311
2x22x2x
 x45x31x41
2x311
2x31
.
On continue avec
A
1
, en posant
A2A
111
4xB
, ce qui donne
A211
2x3111
4x2x2x
 11
4x21
.
On continue avec
A2
, en posant
A3A211
8B
, d’où
CHAPITRE 9
82
A311
4x2111
82x2x
 11
8x1
.
Comme
deg(A3)deg(B)
, on arrête là. Pour trouver Q et R, on écrit
AA
11
2x2BA
211
4xB 1
2x2BA
311
8B11
4xB 1
2x2B
B11
811
4x1
2x2


 

A3
,
donc
Q11
811
4x1
2x2et RA311
8x1
.
On peut disposer la division comme pour les nombres entiers :
x45x31
x41
2x3
11
2x31
11
2x311
4x2
2x2x
1
2x211
4x11
8
11
4x21
11
4x211
8x
11
8x1
9.7 Définition
Soit
P(x)anxnan1xn1 a0K [x]
. Un élément de K est une racine de P si
P()annan1n1 a00
.
9.8 Exemples
Avec
KQ
, 1 est une racine de
x1
, de
x22x1et de x23x2
. Ce dernier polynôme
admet aussi 2 comme racine. Le polynôme
x5x4x3x2x1
admet
1
comme racine. Si
P0
est le polynôme nul, n’importe quel nombre dans Q est racine de P.
CHAPITRE 9
83
Comme le montre l’exemple, un polynôme peut avoir plusieurs racines. Mais l’énoncé suivant
montre qu’il n’en a pas plus que son degré.
9.9 Théorème
Soit
PK[x]
, un polynôme non nul, avec
P(x)anxnan1xn1 a0,an0
. Alors P
a au plus n racines distinctes. Si P a n racines distinctes
1, ,n
alors
Pan(x 1) (xn)
.
Démontrons d’abord le lemme suivant.
9.10 Lemme
Si un polynôme P a la racine
, alors
P(x )Q
, où Q est un polynôme.
Démonstration
Par division euclidienne de P par
x
, nous trouvons
P(x )QR
, où
deg(R)deg(x)
. Comme
deg(x )1
, R doit être dans K. Alors
0P()
(  )Q()R()
, donc
R()0
. Mais R est dans K, donc
RR()
et par suite
R0
. D’où
P(x )Q
. u
Démonstration du théorème 9.9
1. Nous montrons par récurrence sur k l’énoncé suivant : si P a les racines distinctes
1, ,k
, alors il existe un polynôme Q tel que
P(x 1) (x k)Q
. Si
k0
, il n’y a rien à
montrer. Supposons l’énoncé prouvé pour k, et prenons un polynôme P qui a les racines distinctes
1, ,k1
. D’après le lemme, on peut écrire
Px k1
P
, pour un certain polynôme
P
. Si
i1, , k
, on a
i k1
, et comme
0Pi
  i k1
P i
 
, on en déduit que
P i
 0
. Donc
P
admet les racines distinctes
1, ,k
. Par hypothèse de récurrence,
P x 1
x k
 Q
, d’où
Px 1
x k1
 Q
.
2. Si P a k racines distinctes
1, ,k
, on peut d’après 1. écrire
Px 1
x k
 Q
. Si
P est de degré
n0
, on aura d’après le th. 9.1,
ndeg x 1
 ...x k
 
 deg(Q)
, donc
nkdeg(Q)et kn
, puisque
deg(Q)0
(car Q n’est pas nul, sinon P le serait).
1 / 15 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !