Les nouvelles tendances marketing/communication "Marketing U.S. contre Marketing Européen." Jean Pierre A. Spriet SOMMAIRE Vers un consommateur européen "critique" en opposition à la conception globalisante du marketing U.S.? • On constate en Europe: – Un besoin de ré-enracinement "nostalgique" – Une nouvelle recherche de "communauté" – Une volonté de se réapproprier le quotidien en s'opposant aux propositions "toutes faites" des entreprises et des marques • On remarque au contraire que le mythe du progrès technologique inéluctable assurant un vécu toujours plus riche, reste dominant aux USA. • Et que le credo marketing anglo-saxon garde toute sa confiance en la domination des marques à la conquête d'un consommateur unifié qui se différencie essentiellement par son pouvoir d'achat • À la différence grandissante de l' Europe ? " La flèche brisée du progrès " • Les individus en 90 ont en grande majorité conquis une liberté totale, avec l'élévation du niveau de vie et un écroulement des contraintes liées aux valeurs politiques, sociales, morales, religieuses. Plus rien n'est tabou à commencer par le divorce. • Cela se traduit par un individualisme forcené qui devient pesant et dont la technologie accentue le malaise. (La vie connectée ne traduit-elle pas - tout en la masquant- une vie disloquée?). • On se rend compte que la mobilité imposée par une aspiration au cursus professionnel optimal est aussi un déracinement. Un déstabilisation profonde. On ne peut plus établir des liens durables. • Les crises et récessions brutales sans être radicales peuvent toucher tout le monde dans son cursus. Le lien social, syndical est absent. Grâce au progrès, on est autonome et libre mais que faire de cette liberté dans l'isolement? Une liberté qui nous impose une recherche identitaire • Sans contrainte, l'individu est devenu vulnérable: il doit se construire par lui même. • Mais sans contrainte, il doit se construire des règles et se motiver alors qu'il a perdu "le sens de l'effort". • Il n'est plus capable de se construire parce qu'il ne sait plus se projeter. Il privilégie l'instant et prône" le culte - malgré lui (?) - du moment fort. On vit dans l'éphémère. • Il devient difficile pour le marketer de comprendre et prévoir un comportement individuel. Un cadre brusquement décide à 50 ans de créer son entreprise, une femme d'avoir un enfant à plus de 45 ans, un couple de vendre sa résidence principale pour profiter de ce capital… Le nouveau "sens" de la consommation • Une certaine vision de la consommation est morte: celle du " vivre pour consommer " parce que le consommateur découvre que le consommation en soi ne le construit pas . • Le " consommer pour vivre " procure du sens à la vie. "Je ne dois pas accepter le produit que dans la mesure où il me procure un supplément de vie "joyeuse". Je constate que le progrès ou le standing auquel mon niveau de vie me permet d' accéder et qui est fortement promotionné par les marques ne sont plus des assurances de mieux-vivre". • C'est en se penchant dans le suivi d'un vécu quotidien fait de moments forts ou pénibles, que l'on peut appréhender le consommateur et non plus par des enquêtes sur interviews. • Et comme le consommateur est à la recherche d'une qualité de vie que les objets du progrès ne peuvent plus lui procurer, il se tourne vers ce qui peut lui procurer un vécu fort, rassurant, équilibrant. Les nouvelles attentes du consommateur européen: le tribalisme • Contrairement aux USA, la recherche de l'individualisme, de la personnalisation, de la participation et de l'innovation est désormais seconde par rapport à une recherche de réenracinement. • 3 thèmes émergent donc: – Retour de la communauté – Culture de la nostalgie – Volonté de l'appropriation qui va plus loin que la simple participation Les nouvelles attentes du consommateur européen: la recherche de l'authentique et de l'appropriation libre – Retour de la communauté, Culture de la nostalgie, Volonté de l'appropriation qui va plus loin que la simple participation • 1. débouchant sur un marketing tribal qui ne cherchera non plus à faire du "one to one" mais développer la relation inter-consommateurs de la tribu. • 2. La culture de la nostalgie, née du désenchantement du progrès matériel envahissant de la technologie, pousse le consommateur à regarder derrière, vers ses racines et à consommer de l'authentique. Ceci est vrai pour les objets comme pour les services. Un nouveau marketing de l'authentique se développe qui doit dépasser les signes pour offrir du concret et du vécu. Les nouvelles attentes du consommateur européen: la recherche de l'authentique et de l'appropriation libre • 3. Le marketing anglo-saxon invite le client à participer à la proposition marchande de façon spectaculaire mais aussi de façon normée (Ikea), organisée, construite. • Le marketing européen et d'abord latin, constate que le consommateur préfère être maître du jeux et se construire en picorant et fouinant. Le marketing se fait plus discret et humble. C'est du marketing "modéré", du marketing de procuration et non de participation guidée, de l'appropriation libre et non de l'achat modélisé. La marque dominatrice en question • La marque phare, symbole, ne serait-elle pas perçue comme de plus en plus oppressante, totalitaire, orgueilleuse, manipulatrice…Le capital-marque, sa "valeur", c'est moi le client qui en décide en définitive. • Le discours publicitaire est perçu parfois comme ridicule dans son outrecuidance, quand il prétend que la consommation "change la vie, vraiment". • Le "one to one" ne prendrait-il pas le consommateur pour un imbécile quand il s'insinue dans mon intimité. Je veux rester maître dans mon appropriation du produit. Internet me permet de garder mes distances en dialoguant sur la marque entre autres, avec mon "clan" et non directement avec elle ? La marque dominatrice en question, par le consommateur européen? • La marque emblématique, hyper-marquetée et publicisée n'est elle pas de fait récupérée par ceux qui veulent paraître et faire ainsi partie d'un " classe sociale " dont ils sont exclus et à laquelle ils ne mériteraient pas d'accéder? • La marque toute puissante n'est-elle pas de plus en plus perçue comme la marque conventionnelle et banale que je consomme par convention ou automatisme? • La marque " clanique" est par essence confidentielle et connue de ses membres. C'est à ses membres de faire son bouche à oreille. • Et à l' Entreprise, une publicité ciblée et "soft". Le marketing "doux" n'est-il pas devenu une nécessité en fonction de l'évolution du consommateur européen à la différence de l'américain?