Applications linéaires - Arthur Lannuzel

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le 18 Février 2010 UTBM MT12
Arthur LANNUZEL
http ://mathutbmal.free.fr
Applications linéaires
1
Exemples et définitions.
Soit E et F , 2 espaces vectoriels sur K = R ou C.
On s’intéresse aux applications qui conservent la structure d’espace vectoriel.
Définition 1.1 (Application linéaire)
i) f : E −→ F est dite application K-linéaire ou homomorphisme si :
- ∀(u, v) ∈ E 2 , f (u +E v) = f (u) +F f (v),
- ∀u ∈ E, ∀λ ∈ K, f (λ.E u) = λ.F f (u).
ii) L’ensemble des applications linéaires de E dans F est noté L(E, F ) ou HomK (E, F ).
iii) f : E −→ E linéaire est dite endomorphisme de E.
Exercice 1.2 L(E, F ) est un K-espace vectoriel.
Indication : montrer que L(E, F ) est un sous-espace vectoriel de F(E, F ).
Remarque 1.3 i) Pour montrer que f : E −→ F est linéaire, il suffit de montrer
∀λ ∈ K, ∀(u, v) ∈ E 2 , f (λ.u + v) = λ.f (u) + f (v).
ii) Si f est linéaire alors f (0E ) = 0F .
En effet, f (u) = f (u + 0E ) = f (u) + f (0E ), donc f (0E ) = 0F .
Exemples 1.4 i) a ∈ R alors
fa : R −→ R
x 7→ a.x
est linéaire.
Les fa sont les seules applications linéaires de R dans R (d’où le nom).
ii) Soit E = C ∞ (R, R) l’ensemble des application infiniement dérivables de R dans R. Alors
D : E −→
E
f 7→ D(f ) = f ′
est linéaire.
2
iii) Soit E l’espace vectoriel sur R des fonctions intégrables sur [a, b] ⊂ R et
I : E −→
R
∫b
f 7→
f (t)dt
a
est linéaire.
iv) L’application trace
Tr :
Mn (R)
−→
R
∑
A = (ai,j )1≤i,j≤n 7→ T r(A) = ni=1 ai,i
est linéaire
v) Soit E espace vectoriel. Soit u ∈ E, u ̸= 0E alors l’application translation de vecteur u
Tu : E −→
E
v 7→ v + u
n’est pas linéaire.
vi) Soit M ∈ Mn,p (R) alors
fM : Rp −→ Rn
V
7→ M.V
est linéaire.
C’est l’application linéaire associée à M .
Exercice 1.5 i) L’image réciproque d’un sous-espace vectoriel par une application linéaire est
un sous-espace vectoriel.
ii) L’image d’un sous-espace vectoriel par une application linéaire est un sous-espace vectoriel.
iii) Trouver des contres-exemples qui montrent que ce n’est pas vrai pour une application quelconque.
2
Noyau d’une application linéaire.
Soient E, F 2 espaces vectoriels sur K et f une application linéaire de E dans F .
L’ensemble N des vecteurs u ∈ E tels que f (u) = 0F (N := f −1 ({0F })) est un sous-esp. vect.
de E.
[En effet :
- f (0E ) = 0F donc N ̸= ∅,
- soient u, v ∈ N , λ, µ ∈ K alors f (λ.u + µ.v) = λ.f (u) + µ.f (v) = λ.0F + µ.0F = 0F , donc
λ.u + µ.v ∈ N .]
3
De plus,
f (u) = f (v) ⇐⇒ ∃k ∈ N/u + k = v.
[En effet :
Si f (u) = f (v) alors f (v) − f (u) = f (v − u) = 0, donc v − u ∈ N .]
Attention : ce qui précède est faux pour une application non-linéaire.
Définition 2.1 f : E −→ F application linéaire.
L’espace vectoriel {u ∈ E/f (u) = 0F } s’appelle le noyau de f et se note Ker(f ).
Ker(f ) := f −1 ({0F }).
Exemples 2.2 i) D : C ∞ (R, R) −→ C ∞ (R, R) .
f
7→
f′
Réponse :
KerD = {cste}.

−1 0
1
:  R3  −→
R3  avec M =  2 −2 0 .

x
x
3 −2 −1
 y  7→ M.  y 
z
z

ii) fM
Réponse :
KerfM


1
= vect({ 1 }).
1
Exercice 2.3 Soit E un K-espace vectoriel et F1 , F2 deux sous-espaces vectoriels supplémentaires
de E (i.e. E = F1 ⊕ F2 ).
Soit
pF1 : E −→ F1
x 7→ x1 tel que x = x1 + x2 avec xi ∈ Fi
la projection sur F1 suivant F2 .
Déterminer KerpF1 .
Théorème 2.4 Soit f : E −→ F linéaire alors
f injective ⇐⇒ ker(f ) = {0E }.
Rappel 2.5 f : A −→ B injective si
(f (x) = f (y)) ⇐⇒ x = y).
4
Preuve.
Preuve du théorème. Découle directement de l’introduction du paragraphe 2.
CQFD
3
Image d’une application linéaire.
f : E −→ F application linéaire, E, F K e. v.
Montrons que f (E) est un s.e.v. de F .
- On a vu 0F = f (0E ) donc 0F ∈ f (E).
- Si y = f (x) et y ′ = f (x′ ) alors y + y ′ = f (x) + f (x′ ) = f (x + x′ ). Donc
y, y ′ ∈ f (E) =⇒ y + y ′ ∈ f (E).
- Si y = f (x) et λ ∈ K alors λ.F y = λ.F f (x′ ) = f (λ.E x′ ).
Donc
y ′ ∈ f (E), λ ∈ K =⇒ λ.y ′ ∈ f (E).
On a donc la
Proposition-définition 3.1 L’ensemble des vecteurs de F qui sont image par l’appliation
linéaire f de vecteurs de E est un sous-esp. vect. de F . On l’appelle image de f et on le note :
Im(f ) := f (E) = {f (x), x ∈ E}.
Exemples 3.2 i) D : C([a, b], R) −→ C([a, b], R)
f
−→
f′
Réponse :
alors ImD = C([a, b], R).
ii)Soit
Réponse :


f :  R3  −→
R3 

1 0 1
a
a
 2 2 0 
 b  −→ M.  b  avec M =
3 2 1
c
c

  
0
1



alors Imf = vect({ 2 , 0 }).
2
1
5
iii) Soit
f:
R3
−→ 
R4
 
a + 2b
a

a + 2c
 b  −→ 
 2a + 2b + 2c
c
2b − 2c




Donner une base de Imf .
Remarque 3.3 f : E −→ F linéaire.
f surjective ⇐⇒ Im(f ) = F.
4
Isomorphisme.
Définition 4.1 Une application linéaire f de E dans F est appelée isomorphisme si elle est
bijective (i.e. injective et surjective).
Remarque 4.2 f : E −→ F application linéaire. Alors
f isomorphisme ⇐⇒ Ker(f ) = {0} et Im(f ) = F.


1 0 1
Exemples 4.3 1) ϕM : M3 (R) −→ M3 (R) avec M =  1 1 1  est un isomorphisme.
A
7→
M.A
1 1 0
2) D : R[X] −→ R[X] n’est pas un isomorphisme.
P (X) 7→ P ′ (X)
Exercice 4.4 (important)
Soit E un K-esp. vect. de dim. n.
Soit B = {b1 , b2 , ..., bn } une base de E.
Montrer que
coordB : E −→  Kn 
λ1
 λ2 
∑n
 tel que V =!
V 7→ 
i=1 λ1 .bi
 ... 
λn
est un isomorphisme.
6
5
Image d’une base par une application linéaire
Soient E un K-espace vectoriel de dim. finie n ∈ N et B = {b1 , b2 , ..., bn } une base de E.
Soit f : E −→ F une application linéaire.
Si x ∈ E, x s’écrit de façon unique
n
∑
!
x=
λi .bi ,
i=1
donc
n
n
∑
∑
f (x) = f (
λi .bi ) =
λi .f (bi ).
i=1
i=1
Conclusion : une application linéaire de E dans F est parfaitement déterminée par la donnée
des images d’une base B de E et Im(f ) = vect({f (b1 ), f (b2 ), ..., f (bn )}
Théorème 5.1 Soient E, F K-esp. vect. et B = {b1 , b2 , ..., bn } une base de E. Soit f : E −→ F
une application linéaire. Alors :
i) f injective ⇐⇒ {f (b1 ), f (b2 ), ..., f (bn )} libre,
ii) f surjective ⇐⇒ {f (b1 ), f (b2 ), ..., f (bn )} génératrice de F ,
iii) f bijective ⇐⇒ {f (b1 ), f (b2 ), ..., f (bn )} base de F ,
Preuve.
(Exo.) Voir TD
CQFD
6
6.1
Applications linéaires et dimension finie.
Isomorphismes.
Théorème 6.1 Soient E, F K-esp. vect. de dim. finie alors
E∼
= F ⇐⇒ dim E = dim F.
Preuve.
=⇒) Supposons f : E −→ F isomorphisme.
Soit {b1 , b2 , ..., bn } une base de E (de dim. n) alors, d’après le théorème 5.1, {f (b1 ), f (b2 ), ..., f (bn )}
est une base de F donc dim F = n.
⇐=) Supposons dim E = dim F = n.
Soient {b1 , b2 , ..., bn } une base de E et {b′1 , b′2 , ..., b′n } une base de F alors l’unique application
linéaire ϕ de E dans F vérifiant ϕ(bi ) = b′i est un isomorphisme.
CQFD
7
6.2
Formule du rang.
Définition 6.2 Soit E un K-espace vectoriel.
i) le rang d’une famille de vecteurs {a1 , a2 , ..., an } ⊂ E est la dimension de vect({a1 , a2 , ..., an }).
ii) Le rang d’une application linéaire f : E −→ F est la dimension de Im(f ) :
rang(f ) := dimK (f (E)).


1 1 0 −1
Exemples 6.3 Soit M =  2 1 1 0  et
3 1 2 1
R4

fM :
 −→
x1
 x2 

V =
 x3 
x4
Réponse :
alors

7→
R3
M.V


x 1 + x2 − x4

2.x1 + x2 + x3
=
3.x1 + x2 + 2.x3 + x4

 
 
 
1
0
0
0
 0 
 1 
 0 
 0 

 
 
 
Im(f ) = vect({f (
 0 ), f ( 0 ), f ( 1 ), f ( 0 )}
0   0   0 
1
 
1
1
0
−1
= vect({ 2  ,  1  ,  1  ,  0 }
1   

  2 
 3  1
 
0
1
0
−1
1
1











1 
1
0
1
1
2
−
et
=
=
+
Mais
1
2
1  2   1
3
1
1
donc Im(f ) = vect({ 2  ,  1 }. De plus, les deux vecteurs sont clairement indépendants
3
1
donc rang(f ) = 2.
8
Théorème 6.4 (théorème du rang)
Soient E, F K-esp. vect. de dim. finie.
Si f ∈ L(E, F ) alors
dim E = dim Ker(f ) + dim Im(f ).
Preuve.
Ker(f ) ⊂ E et, d’après le théorème de la base incomplète (en complétant une base de Ker(f ),
on peut trouver H ⊂ E supplémentaire de Ker(f ) (i.e. Ker(f ) ⊕ H = E).
Montrons que f/H : H −→ Im(f ) est un isomorphisme (donc les dimensions seront les mêmes) :
• Montrons d’abord que f/H est surjective :
Soit y ∈ Im(f ). Il existe x ∈ E tel que f (x) = y. Mais Ker(f ) ⊕ H = E donc il existe
k ∈ Ker(f ) et h ∈ H tels que x = k + h. D’où y = f (x) = f (k + h) = f (k) + f (h) = f (h).
On en déduit que f/H est surjective.
• Montrons ensuite que f/H est injective :
Soit h1 , h2 ∈ H tels que f (h1 ) = f (h2 ) alors f (h1 ) − f (h2 ) = f (h1 − h2 ) = 0, donc h1 − h2 ∈
Ker(k) ∩ H = {0}. D’où h1 = h2 .
On en déduit que f/H est injective.
CQFD
Exercice 6.5 Vérifier cette formule avec l’exemple précédent.
Corollaire 6.6 (important)
Soient E et F deux K-espaces vectoriels de dimensions finies et égales (ce qui est le cas pour
un endomorphisme de E).
Soit f : E −→ F linéaire alors les propositions suivantes sont équivalentes :
(i) f est bijective,
(ii) f est injective,
(iii) f est surjective.
Preuve.
(i)=⇒(ii)) évident.
(i)=⇒(iii)) évident.
((ii) et (iii))=⇒(i)) évident.
Il suffit donc de démontrer que (ii)⇐⇒(iii) :
Or f injective ⇐⇒ Ker(f ) = {0}
et Ker(f ) = {0} ⇐⇒ dim(E) = dim(Im(f )) (d′ après le théorème du rang).
Mais on a dim(E) = dim(F ), donc dim(F ) = dim(Im(f )) ⇐⇒ Im(f ) = F .
Or Im(f ) = F ⇐⇒ f surjective, d’où le résultat.
CQFD
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