Chapitre 8
Applications linéaires
Dans ce chapitre, on pose K=Rou Cainsi que Eet Fdeux Kespaces vectoriels.
IGénéralités
1Notion d’application linéaire
Définition :
Soit L:E!Fune application. On dit que Lest linéaire si les deux conditions suivantes
sont vérifiées :
i8x, y 2E, L(x+y)=L(x)+L(y)
ii 82K,8x2EL(x)=L(x)
On note L(E;F)l’ensemble de toutes les applications linéaires de Edans F.
Exemple :
Si E=Rn;F=Rm;A2M
m,n(K)et L1:E!F
X7! AX
alors Lest linéaire.
Application : L1:R2!R3
(x, y)!(2x, 3xy, y x)
est linéaire :
Proposition :
Si L:E!Fest une application linéaire, alors L(0E)=0
F
Démonstration :
L(0E)=L(0
|{z}
0E
|{z}
x
)=0L(0E)=0
F
Proposition (Caractérisation des applications linéaires :) :
Soient Eet Fdeux Kespaces vectoriels et L:E!Fune application. Lest linéaire si
et seulement si l’une des conditions suivantes est vérifiée :
i8,2K,x,y 2EL(x+y)=L(x)+L(y)
ii 82K,x,y 2EL(x+y)=L(x)+L(y)
Démonstration :
Si Lest linéaire,alors
i8,2K,x,y 2EL(x
|{z}
2E
+y
|{z}
2E
)=L(x)+L(y)=L(x)+L(y)
ii C’est iavec =1.
Si iou ii est vérifiée, montrons que Lest linéaire.
?Si iest vérifiée :
Soient x, y 2E.Onprend==1et on obtient le ide la définition. Soit 2Ket
x2E.Onprendy=0et on obtient le ii de la définition.
?Si ii est vérifiée :
Soient x, y 2E.Onprend=1et on obtient le ide la définition.
Pour le ii de la définition : Soit 2Ket x2E.Alors
L(x)=L(0E+x)=L(0E)
| {z }
0F
+L(x)=L(x)
Exemple :
L2:C1(R)!C
0(R)
f7! f+2f0
est linéaire :
Contre exemple :
L:RN!RN
(un)!(un+1) n’est pas une application linéaire.
Définition :
On se donne une application linéaire L:E!F.
Si L(E)E,onditqueLest un endomorphisme de E.OnnoteL(E)àlaplacede
L(E;E).
Si Lest bijective, on dit que Lest un isomorphisme.(Epeut être diérent de F!)
On dit que deux espaces vectoriels Eet Fsont isomorphes s’il existe un isomorphisme
':E!F.
Une application linéaire L:E!Eest appelée automorphisme si c’est un endomor-
phisme bijectif. On note Aut(E)ou GL(E)l’ensemble des automorphismes de E.
1
2Opérations sur les applications linéaires
Proposition (Combinaisons d’A.L.) :
Si Eet Fsont deux K-espaces vectoriels, l’ensemble L(E, F)est K-un espace vectoriel.
Traduction : Toute combinaison linéaire finie d’applications linéaires est une application li-
néaire.
Démonstration :
L(E;F)F(E;F),oùFest un espace vectoriel. Or, F(E;F)est un espace vectoriel,
il sut donc d’utiliser le théorème de caractérisaiton des sev.
L(E;F)est non vide, car l’application nulle, notée ici ¯
0,estlinéaire:
¯
0(x+y)=0
F
=0
F+0
F
=¯
0(x)+¯
0(y)
Loi interne et externe :
On pose f, g 2L(E;F)et 2K.Montronsquef+g2L(E;F):
Soient x, y 2Eet , µ 2K.Ona
(f+g)(x+y)=f(x+y)+g(x+y)
=(f(x)+f(y)) + (g(x)+g(y))
=(f(x)+g(x)) + µ(f(y)+g(y))
=(f+g)(x)+(f+g)(y)
D’où f+g2L(E,F)
Proposition (Composition d’A.L.) :
Soient E,F,G des K-espaces vectoriels, alors
f2L(E,F),g 2L(F, G)=)gf2L(E,G)
Démonstration :
Si f:E!Fet g:E!Fsont des applications linéaires, la fonction htelle que
h(x)=f(x)g(x)pour tout x2E, n’est pas (jamais) une application linéaire si elle est
non nulle.
Remarque :
Dans le cas des applications linéaires, on note la plupart du temps gf àlaplacedegf.
Attention, ce n’est pas la multiplication de deux fonctions, mais bien la composition.
Ainsi, dans le cas d’un endomorphisme f,onnoterafnau lieu de f...f
| {z }
nfois
.
(Ces notations sont dûes à la relation entre applications linaires et matrices.)
3Lien entre matrices et applications linéaires en dimension finie
3.a Matrice d’une application linéaire
Dans ce paragraphe, on suppose que Eet Fsont de dimension finie.
Définition :
Soient E,F deux espaces vectoriels de bases respectives BE={e1,...,e
n}et BF=
{f1,...,f
m}.Pouruneapplicationf2L(E, F),onappellematrice de fdans les bases
BE,BFla matrice donnant les coordonnées des f(ei)en fonction des fj.
M(f)BF,BE=
f1
.
.
.
fm
f(e1)... f(en)
0
B
@
...
.
.
..
.
.
...
1
C
A
Remarque :
Si E=Fet que BE=BF,onparlesimplementdela matrice de fdans la base B,où
B=BEet on note M(f)Bau lieu de M(f)B,B.
Proposition :
Soient E,F deux espaces vectoriels de bases respectives BEet BF. Soient f2L(E,F)et
X2E.Alors
f(X)BF=M(f)BF,BEXBE
Exemple :
Soit L:R2[X]!R3[X]
P7! ZX
0
P(t)dt
.
Matrice dans les bases canoniques :
La matrice de Ldans les bases (1,X,X2),(1,X,X2,X3)est
L(1) L(X)L(X2)
0
B
B
@
1
C
C
A
1
X
X2
X3
2 Applications linéaires
car L(1) =
L(X)=
L(X2)=
Image d’un vecteur :
L(1 + 2XX2)=
car
U=0
B
B
@
000
100
01
20
00 1
3
1
C
C
A0
@
1
2
1
1
A=0
B
B
@
1
C
C
A
Matrice de Ldans d’autres bases :
La matrice de Ldans les bases (1,X,X2),(1,X 1,X2X, X3)est
L(1) L(X)L(X2)
1
X1
X2X
X3
0
@1
A
car L(1) =
L(X)=
L(X2)=
Proposition :
Soient E,F,G des ev de dimension finie, BE,BF,BGdes bases respectives de E, F,G.
iSi f, g 2L(E, F),,2K.Alors
M(f+g)BF,BE=M(f)BF,BE+M(g)BF,BE
ii Si f2L(E,F)et g2L(F, G),alors
M(gf)BG,BE=M(g)BG,BFM(f)BF,BE
iii Soit f2L(E,F).Alorsfest inversible ssi M(f)BF,BEest inversible et dans ce
cas
M(f1)BE,BF=(M(f)BF,BE)1
Démonstration :
i) et ii) admis. iii) est conséquence de ii).
3.b Changement de base
Théorème de changement de base :
Soient Eun espace vectoriel de bases Bet B0et Fun espace vectoriel de bases respectives
G,G0. Soit f2L(E,F),alors
M(f)G0,B0=PG0!GM(f)G,BPB!B0
Exemple :
Reprenons l’exemple de L:R2[X]!R3[X]
P7! RX
0P(t)dt
.
Dans les bases B=(1,X,X2),G=(1,X,X2,X3)la matrice de Lest 0
B
B
@
000
100
01
20
00 1
3
1
C
C
A.
On pose G0=(1,X 1,X2X, X3).DoùPG!G0=0
B
B
@
1100
0110
00 10
00 01
1
C
C
A
Les opérations C2 C2+C1puis C3 C3+C2permettent de calculer
PG0!G=0
B
B
@
1110
0110
0010
0001
1
C
C
A
Alors,
M(L)G0,B=PG0!GM(L)G,B=0
B
B
@
1110
0110
0010
0001
1
C
C
A
0
B
B
@
000
100
01
20
00 1
3
1
C
C
A=0
B
B
@
11
20
11
20
01
20
00 1
3
1
C
C
A
Corollaire :
En particulier, pour le cas d’un endomorphisme f2L(E),siBet B0sont deux bases de
E,ona
M(f)B0=PB0!BM(f)BPB!B0
ou autrement dit,
M0=P1MP
Pest la matrice de changement de base PB!B0,M=M(f)Bet M0=M(f)B0.
Définition :
Soient Met M0deux matrices. S’il existe une matrice Pinversible telle que
M0=P1MP (ou M0=PMP1)
alors on dit que Met M0sont semblables.
3 Applications linéaires
II Image, noyau, injectivité, surjectivité
1Image et noyau
Proposition :
Soit f2L(E,F)
Si Hest un sous espace vectoriel de E,alorsf(H)est un sev de F.
Si Gest un sous espace vectoriel de F,alorsf1(G)est un sev de E.
Démonstration :
Supposons que Hest un sous espace vectoriel de E.Montronsquef(H)est un sev
de F:
-f(H)est non vide, car 0E2Het 0F=f(0E)2f(H).
-Soient, µ 2Ket x, y 2f(H).Montronsquex+µy 2f(H):
Il existe x0,y
02Htels que f(x0)=xet f(y0)=y. Ainsi,
x+µy =f(x0)+µf(y0)=f(x0+µy0
| {z }
2H
)2f(H)
Par caractérisation des sous-espaces vectoriels, f(H)est bien un espace vectoriel.
Supposons que Gest un sous espace vectoriel de F.Montronsquef1(G)est un sev
de E:
-f1(G)est non vide, car 0F2Get 0F=f(0E),donc0E2f1(G).
-Soient, µ 2Ket x, y 2f1(G).Montronsquex+µy 2f1(G),cest-à-dire
f(x+µy)2G:
f(x+µy)=f(x)
|{z}
2G
+µf(y)
|{z}
2G
2G
Par caractérisation des sous-espaces vectoriels, f1(G)est bien un espace vectoriel.
Définition :
Soit f2L(E,F).
On appelle noyau de fet on note ker fl’espace vectoriel f1(0F).
On appelle image de fet on note Imfl’espace vectoriel f(E).
Remarque :
Le noyau de fest l’ensemble des vecteurs d’image 0:
ker f={x2E|f(x)=0}
Proposition :
Soit f2L(E,F).0E2ker f.(i.e.f(0E)=0
F)
Démonstration :
Exemple :
On considère L:C1(R)!C
0(R)
f7! ff0
Alors ker L=
Remarque :
L’image de fest le sous-espace vectoriel de Fdes vecteurs de Fayant un antédent :
Im f={f(x)|x2E}
Propriété :
Si E=Vect (e1,...,e
n),alorsImf=Vect f(e1),...,f(en).
(la famille (e1,...,e
n)n’est pas forcément libre...)
Démonstration :
Supposons que E=Vect (e1,...,e
n).
?Montrons que Vect f(e1),...,f(en)Im f:
on a f(e1),...,f(en)2Im fet Im fest un espace vectoriel. Par définition du Vect, on
adoncbienVect
f(e1),...,f(en)Im f.
?Montrons que Im fVect f(e1),...,f(en):
Soit y2Im f. Alors, il existe x2Etel que f(x)=y.Or,commeE=Vect (e1,...,e
n),
il existe 1,...,
n2Ktels que
x=1e1+nen
d’où
y=f(x)=f(1e1+nen)=1f(e1)+nf(en)2Im f
?Conclusion : Par double inclusion, on a bien Im f=Vect f(e1),...,f(en).
4 Applications linéaires
Remarque :
Ce théorème dit en particulier que, même si l’espace Fn’est pas de dimension finie, il
sut que Esoit de dimension finie pour que Im fle soit.
Exemple : On considère L:R2[X]!R[X]
P7! ZX
0
P(t)dt
.
1. dim(R2[X]) = 3 <1;maisR[X]n’est pas de dimension finie.
2. Malgré tout, d’après la propriété,
dim Im f6dim(R2[X]) = 3.
Ce qui se vérifie car Im f=XR2[X].
2Injection, surjection
Théorème de caractérisation :
Soit f2L(E,F).
fest surjective si et seulement si F=Imf.
fest injective si et seulement si ker f={0E}.
Démonstration :
Montrons que fest surjective si et seulement si F=Imf:
Il est clair que, dans tous les cas, Im fF
On a F=Imf,tout élément de Fadmet un antécédent ,fest surjective.
Montrons que fest injective si et seulement si ker f={0E}:
Comme ker fest un sous-espace vectoriel de E,ona{0E}ker f.
Montrons que fest injective si et seulement si ker f{OE}:
Remarque :
Étant donné les inclusions Im fFet {0E}2ker ftriviales, en pratique, on utilisera
plutôt le théorème suivant :
Théorème de caractérisation no2:
Soit f2L(E,F).
fest surjective si et seulement si FImf.
fest injective si et seulement si ker f{0E}.
Exercice
Montrer que L:R[X]!R[X]
P7! ZX
0
P(t)dt
est injective (mais non bijective).
————– Solution
————–
Remarque :
Une application f2L(E;F)injective est un isomorphisme de Esur Im fF.
III Applications linéaires en dimension finie
Dans cette section, on se donne E, F deux espaces vectoriels, avec Ede dimension finie et
f2L(E,F).
1Rang
Définition :
Si Im fest un espace vectoriel de dimension finie, on appelle rang de fet on note rg fla
dimension de Im f.(i.e.rgf=dimIm f.)
Théorème :
Si Fest de dimension finie, alors, pour toutes bases Bde Eet B0de F,ona
rg f=rg (M(f)B0,B)
En particulier, on obtient que rg M(f)B0,Bne dépend pas des bases B0et B.
5 Applications linéaires
1 / 7 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !