Les occlusions intestinales chez l`adulte. Intérêt de la

Médecine du Maghreb 2001 n°87
RESUME
Les occlusions intestinales sont fréquentes. Les tableaux
cliniques complets sont inconstants. Le scanner haute
résolution constitue actuellement l’examen de première
intention, il permet le diagnostic positif, topographique
et étiologique et évalue le degré de souff rance intesti-
nale.
SUMMARY
Adult intestinal occlusion. Interest of CT scan.
Intestinal occlusions are frequent. Complete cl i n i c a l
p i c t u r e is inconstant. CT scan high resolution is a
method of first intention. It allows to positive topogra-
phic and etiologic diagnosis. It also estimates the degree
of intestinal suffering.
GÉNÉRALITÉS
Les occlusions intestinales représentent 10 % des douleurs
abdominales de l’adulte, les occlusions grêles sont 3 à
4 fois plus fréquentes que les occlusions coliques.
L’ o c clusion mécanique peut être d’ori gine endoluminale,
pariétale ou exoluminale.
L’ o c clusion fonctionnelle re l è v e d’une altération de la
motricité intestinale d’origine locale ou générale (2, 3, 6).
CLINIQUE
Les tableaux cliniques complets de l’occlusion intestinale
sont inconstants, ils associent typiquement la triade fo n c -
tionnelle :
- Les douleurs abdominales localisées ou diffuses, sévè-
res, elles doivent faire évoquer une occlusion par stran-
gulation,
- Les vomissements sont d’autant plus fréquents et préco-
ces que l’obstacle est proximal,
- L’ a r t des mat i è r es et des gaz surtout net dans les
occlusions coliques (3, 6).
TOMODENSITOMETRIE (TDM)
Le succès rapidement croissant du scanner dans l’ex p l o -
ration des douleurs abdominales aiguës ch i ru rgicales, en
général et de l’occlusion en particulier, témoigne de la qua-
li de cette inve s t i gation lorsquelle est corre c t e m e n t
conduite.
Il présente des avantages majeurs :
- Il assure une ex p l o ration complète de la cavité ab d o -
mino-pelvienne en un temps re c o r d, permettant une
attitude thérapeutique rapide,
- Il fo u rnit des images parfaitement analy s a bles sans
c a ra c t è re orateur dépendant ou interp r é t ation subjec-
tive,
- Pa rt i c u l i è rement utile dans les tableaux cliniques at y -
piques.
LES OCCLUSIONS INTESTINALES CHEZ L’ADULTE
INTÉRET DE LA TOMODENSITOMÉTRIE
K. LEBBAR, D. BASSOU, M. DRISSI, T. AMIL, M. BENAMEUR
S e r vice de ra d i o l o gie (Pr M. BENAMEUR) - Hôpital Militaire
d’Instruction Mohammed V. Rabat.
INTRODUCTION
Urgence chirurgicale abdominale, I’occlusion intestinale se
d é finit comme un art complet et permanent du tra n s i t
dans un segment intestinal.
L’approche diagnostic de l’occlusion intestinale a été pro-
fondément modifiée par l’utilisation en urgence de l’ima-
gerie en coupe, en particulier du scanner haute résolution,
seule technique permettant de répondre en totalité aux
questions clés énoncées par M O N D O R (5) en 1943, à
savoir :
- Est-ce une occlusion ?
- Est-ce une occlusion mécanique ou fonctionnelle ?
- Quel est son siège, quelle est la nature des lésions cau-
sales ?
- Y-a-t-il strangulation ?
- Faut-il opérer ou un traitement médical est suffisant ?
La radiologie conventionnelle, limitée aux clichés d’abdo-
men urgents, complétée au besoin par les opacifi c at i o n s
digestives ne peut répondre aux questions posées.
Médecine du Maghreb 2001 n°87
K. LEBBAR, D. BASSOU, M. DRISSI, T. AMIL, M. BENAMEUR
22
TECHNIQUE
L’examen sera réalisé sur un patient hémodynamiquement
stable.
Le scanogramme en cubitus est le premier temps d’ex a -
men (Fig. 1), il remplace le cliché d’abdomen sans prépara-
tion (ASP) en décubitus. Si la clinique ou les examens préa-
l ables (ASP, éch o graphie) n’ont pas permis une ori e n t at i o n
précise, un premier débrouillage sera réalisé par des coupes
épaisses de 10 mm incrémentées (tous les 15 à 20 mm) du
d i ap h ragme à la symphyse pubienne pour rep é rer les zo n e s
suspectes. Toute opacifi c ation ou insuffl ation dige s t ive doit
être proscrite. Puis on réalise un deuxième passage en coupes
de 5 mm jointives sur le niveau lésionnel avec injection de
2 ml/kg de produit de contraste iodé en injection mono-
phasique à 2 à 3 ml/s ou mieux en injection biphasique de 50
ml à 5 ml/s puis 70 à 100 ml à un débit de 1 à 2 ml/s.
Figure 1 : Scanogramme : iléus paralytique
au cours d’une pancréatite aiguë
L’acquisition hélicoïdale permet une exploration rapide de la
c avité pelvi-abdominale avec un rehaussement optimal des
structures vasculaires artérielles ce qui sensibilise la mise en
évidence d’une ischémie segmentaire éventuelle (5).
RESULTATS
L’interprétation du scanner devrait suivre le schéma suivant :
La première étape : le diagnostic positif
Le diagnostic positif d’une occlusion intestinale est posé
d evant la mise en évidence d’une distension localisée ou
plus diffuse d’un segment digestif, avec la présence d’anses
dilatées à plus de 25 mm de diamètre pour la grêle (Fig. 2),
et de 50 mm pour le côlon (Fig. 3), ceci est associé à des
anses digestives collabées ou d’apparence normale (3, 5).
Figure 2 : Anses grêliques dilatées,
associées à des anses collabées
Figure 3 : Occlusion colique ;
distension supérieure à 5 cm du côlon
La deuxième étape : le diagnostic topographique
Il repose sur l’analyse précise de l’état de distension des
s egments digestifs identifi ables, à titre dexemple : un
cæcum plat correspond à un obstacle sur le grêle, un côlon
gauche plat traduit un obstacle angulaire gauche ou plus en
amont, des anses grêles distales juxta-cæcales plates, il
s’agit d’une occlusion grêle haute.
A l’issue de cette pre m i è re ap p ro ch e, on saura alors s’il
s’agit d’un obstacle colique ou d’une occlusion du grêle.
Médecine du Maghreb 2001 n°87
LES OCCLUSIONS INTESTINALES… 23
La troisième étape : le diagnostic étiologique
Le scanner dev ra identifier avec précision la zone tra n s i -
tionnelle.
Dans le cadre du diagnostic étiologique, l’étude des orifices
herniaires (régions inguino-crurales et trous obturateurs) et
incisionnels (incision de mini-lap a ro t o m i e...) est systéma-
tique.
• Les occlusions du grêle
Les occlusions sur brides et adhérences péritonéales sont
les plus fréquentes. Le diagnostic est évoqué devant un
patient déjà laparotomisé et il se caractérise en TDM par un
aspect de transition brutale du calibre des anses sans obsta-
cle visible (Fig. 4).
Figure 4 : Occlusion du grêle, la zone de transition entre
anses dilatées en sus lésionnel et anses plates est nette,
occlusion sur bride. A noter le clip chirurgical
Les adhérences multiples sont évoquées devant des disten-
sions multiples de courts segments du grêle, des adhérences
des structures abdomino-mésentériques au plan profond de
la paroi abdominale donnant un aspect suspendu des anses
à la paroi (1, 3).
En TDM le diagnostic étiologique de certaines occlusions
du grêle est pathognomonique :
. L’iléus biliaire avec pneumobilie, le scanner permettant
de localiser avec précision le ou éventuellement les
calculs au niveau de l’intestin et d’optimiser la taille de
la lap a rotomie en la duisant au minimum nécessaire
pour extérioriser le calcul par entérotomie.
. La hernie ex t e rne au scanner se traduit par une anse
intestinale incarcérée dans un orifice herniaire (Fig. 5).
Figure 5 : Occlusion du grêle sur hernie ombilicale.
Noter le kyste rénal simple
- L’ i n vagi n a tion intestinale se traduit par une masse
tissulaire correspondant à l’anse invaginée accompagnée
d’une image en croissant excentrée de densité graisseuse
correspondant au mésentère. Le corps de l’invagination
se présente sous forme de multiples anneaux concentri-
ques hypo ou hy p e rdenses (Fi g. 6). Le scanner permet
p a r fois l’identifi c ation de la lésion causale comme la
densité graisseuse d’un lipome.
Figure 6 : Invagination intestinale,
boudin d’invagination
Médecine du Maghreb 2001 n°87
24 K. LEBBAR, D. BASSOU, M. DRISSI, T. AMIL, M. BENAMEUR
• Les occlusions coliques
Elles touchent le plus souvent des patients âgés de plus de
60 ans et le sigmoïde est le site le plus fréquent.
. 70 % sont dus aux cancers, au scanner, il est de la plus
haute importance d’étudier les angles coliques et le
sigmde en coupes de 5 mm. Le diagnostic est fait
d evant une sténose courte avec épaississement pariétal
t i s s u l a i re sans remaniement majeur de la graisse ri -
colique.
. Les occlusions sur sigmoïdite diverticulaire (Fig. 7), 7 %
des occlusions (3), au scanner le diagnostic est évoqué
devant une infiltration inflammatoire péricolique impor-
tante associée ou non à la présence de diverticules.
Figure 7 : Occlusion colique, secondaire à
une diverticulite sigmoïdienne
Il est parfois difficile de distinguer au scanner sténose
tumorale infectée et diverticulite pseudo-tumorale, celle-ci
sera évoquée devant une sténose étendue en longueur et des
remaniements péri-coliques importants, le contrôle fi b ro s -
copique à distance fera la différence.
Les volvulus touchent essentiellement le sigmoïde, l’ASP
p e rmet le diagnostic dans la majorité des cas. Le scanner
permet l’analyse de la vitalité du segment volvulé.
• Les occlusions fonctionnelles (Fig. 1)
Quand l’ASP est concordant avec le tableau cl i n i q u e , le
scanner est indiqué en cas de difficultés diagnostiques et
t h é rapeutiques que peut poser la lésion re s p o n s a ble de
l ’ o c clusion réfl exe (pancréatite aiguë, collection suppurée
péritonéale ou rétro-péritonéale ).
Quand l’ASP est discordant ne permettant pas d’éliminer
une occlusion orga n i q u e, le scanner est alors indiqué et
p e rm e t t ra de confi rmer une occlusion fonctionnelle part i -
culière :
La colectasie aiguë idiopathique ou syndrome d’Ogi l v i e,
c e rtains iléus fonctionnels avec dilat ation seg m e n t a i re des
anses grêles et du côlon, la distension ga s t rique aiguë
réflexe.
La quatrième étape : le diagnostic de gravité
La re ch e r che de signes de graviest essentielle pour la
prise en charge et le pronostic. Le scanner est le meilleur
examen pour prédire de la souffrance intestinale.
L’occlusion aiguë du grêle devient un diagnostic extrême-
ment urgent lorsqu’il existe une stra n g u l ation avec souf-
f rance ischémique de l’anse concern é e. Ceci se pro d u i t
lorsqu’il s’agit d’une hernie étranglée, d’un volvulus primi-
tif ou en amont d’une bride péritonéale, d’une anse incar-
cérée dans une bride ou d’une anse invaginée.
Au scanner, les signes de souff rance ischémique sont un
épaississement des parois des anses dilatées, un re h a u s s e -
ment en «cible» ou en «halo», une persistance du rehausse-
ment, un rehaussement retardé, une pneumatisation pariéta-
le, un mésentère présentant des densités mal limitées avec
des dilat ations veineuses, un épanchement intrap é ri t o n é a l
liquidien ou hémorragique. L’anse ischémique est pleine de
liquide alors que les anses d’amont sont distendues par
l’air.
Dans les occlusions mécaniques «vieillies», les signes d’is-
chémie intestino-mésentériques peuvent dominer le tableau :
outre le retard de rehaussement des parois intestinales amin-
cies des anses ischémiques, pneumatose intestinale, aéropor-
tie, perforation avec péritonite et pneumopéritoine.
CONCLUSION
Le scanner par sa supéri o rité aux techniques conve n t i o n -
nelles tant au niveau du diagnostique positif, topograp h i -
q u e, étiologique que dans l’éva l u a tion du degré de souf-
france intestinale devrait être l’examen de première inten-
tion à réaliser devant un tableau clinique d’occlusion intes-
tinale organique.
Médecine du Maghreb 2001 n°87
LES OCCLUSIONS INTESTINALES… 25
BIBLIOGRAPHIE
1 - BRUEL J.M., TAOUREL P., PRADEL J., ENGELHOM L.
Imagerie des occlusions intestinales.
Cours de perfectionnement post universitaire. Octobre 1994.
2 - CASA C., ARNAUD JP.
Occlusions intestinales du côlon.
La revue du praticien, Paris, 1994, 47.
3 - DENEUVILLE M., BEOST S., CHAPUIS F., BAZIN C.,
BOCCACANI H.
Imagerie des occlusions intestinales aiguës de l’adulte.
EMC, Appareil digestif, 33710A 1997, 26p.
4 - REGENT D., CHAPUIS F., SCHMUTZ G.R., BLUM A., BENKO A.
Imagerie de l’abdomen aigu.
Masson, Paris, 1996.
5 - REGNET D., SCHMUTZ G.R., CHAPUIS F., BENKO A.,
DENEUVILLE M., BEOST S.
O c c lusions intestinales. Quelle technique d’image rie choisir : ASP,
échographie, entérolyse ou tomodensitométrie.
Cours de perfectionnement post universitaire, Novembre 1996.
6 - SCHMUTZ G.R., REGENT D., FOURNIER L., PERON J.M.
Abdomen aigu : échographie ou TDM. Quelle technique choisir ?
Cours de perfectionnement post universitaire. Novembre 1997.
7 - SEULIN P., PEZET D.
Occlusions intestinales du grêle.
La revue du praticien, 1997, 47.
Odonto-Stomatologie Tropicale
Le Pharmacien
sont sur
www.santetropicale.com
Médecine du Maghreb
Médecine dAf r i q u e No i re
1 / 5 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !