Bulletin d’information Département de pharmacie du CSSS de Laval Volume 12, no 3 Mars 2009 LA ZIPRASIDONE (ZELDOXMD) : UN NOUVEL ANTIPSYCHOTIQUE DE DEUXIÈME GÉNÉRATION Rédigé par : Josée Filiatrault, résidente en pharmacie Révisé par : Nathalie Gadbois B.pharm, M.Sc, BCPP PREMIÈRE OU DEUXIÈME GÉNÉRATION? Les antipsychotiques classiques ou de première génération (ex. : chlorpromazine, halopéridol) ont été les premiers médicaments utilisés, au cours des années 50 et 60, pour traiter la schizophrénie. Ceux-ci agissent principalement au niveau des récepteurs dopaminergiques de type 2 (D2) et sont efficaces pour atténuer les symptômes positifs de la maladie. Malheureusement, ces médicaments n’ont que peu d’impact sur les symptômes négatifs et présentent plusieurs effets indésirables importants tels les troubles extrapyramidaux (présents sous forme d’akathisie, de dystonie ou de dyskinésie) et l’hyperprolactinémie (caractérisée par des symptômes d’aménorrhée, de galactorrhée, de gynécomastie et d’impuissance).5,6,7 INTRODUCTION En février 2008, la ziprasidone (ZeldoxMD) a fait son apparition sur le marché canadien dans la catégorie des antipsychotiques.1 Cette molécule, qui a préalablement été approuvée aux États-Unis en 2001, s’est longtemps fait attendre au Canada. En effet, un si long délai entre les mises en marché américaine et canadienne s’explique par le fait que les canadiens désiraient davantage d’informations quant à l’innocuité de la ziprasidone par rapport à son impact sur l’allongement de l’intervalle QT. Ayant désormais des données rassurantes sur le sujet, les professionnels de la santé devront apprivoiser cette nouvelle molécule afin d’en optimiser son utilisation. QUELLE EST L’INDICATION? La ziprasidone est un antipsychotique de deuxième génération indiqué dans le traitement de la schizophrénie et des troubles psychotiques apparentés.2 Bien que non officiellement indiquée, elle est aussi intégrée dans les lignes directrices du Canadian Network for Mood and Anxiety Treatments (CANMAT) 2007 pour le traitement des troubles bipolaires dans les manies et les épisodes mixtes.3 Au cours des années 90, de nouveaux antipsychotiques se sont ajoutés à l’arsenal thérapeutique. Ainsi, la clozapine (ClozarilMD), la rispéridone (RisperdalMD), l’olanzapine (ZyprexaMD) et la quétiapine (SeroquelMD) sont venus former une nouvelle classe : les antipsychotiques atypiques ou de deuxième génération. Puisqu’ils agissent sur plusieurs récepteurs, ils ont un effet bénéfique à la fois sur les symptômes positifs et négatifs de la maladie et risquent moins d’entraîner les effets indésirables rencontrés avec les antipsychotiques de première génération.5,6 Après l’avènement de ces molécules, il aura fallu attendre presque dix ans avant de voir arriver de nouvelles options de traitement en schizophrénie. La palipéridone (InvegaMD) et la ziprasidone (ZeldoxMD), maintenant disponibles au Canada, sont alors venues s’ajouter à cette classe d’antipsychotiques. LA SCHIZOPHRÉNIE : RAPPELS SUR LA PATHOLOGIE La schizophrénie est un trouble psychotique chronique qui touche environ 1 % de la population. La cause de cette maladie n’est pas encore clairement établie, mais elle semble multifactorielle.4 Les principaux symptômes se divisent en trois groupes distincts : les symptômes positifs (ex. : hallucinations, délires, agressivité), les symptômes négatifs (ex. : diminution de l’expression des émotions, diminution de la spontanéité de la pensée, détérioration des habiletés sociales, perte d’énergie) puis les troubles cognitifs (ex. : troubles d’attention, de mémoire, de fonction d’exécution).4,5 COMMENT AGIT-ELLE? De façon générale, les effets pharmacologiques des antipsychotiques s’exercent principalement via les récepteurs sérotoninergiques (5-HT), dopaminergiques (D) et adrénergiques (α) du cerveau.5,7 Chaque antipsychotique -1- deuxième génération. La ziprasidone s’est alors révélée d’une efficacité sensiblement équivalente à celle de l’olanzapine, de la rispéridone et de la quétiapine dans le traitement de patients en phase aiguë de schizophrénie ainsi que dans le traitement d’entretien prolongé de la schizophrénie.15,16,17,18,19 présente des affinités différentes pour ces récepteurs, créant par le fait même des différences tant au niveau de l’efficacité que des effets indésirables. Le tableau I présente un résumé des affinités comparatives des antipsychotiques aux différents récepteurs ainsi que les effets pharmacologiques et indésirables étant associés à ces récepteurs. QU’EN EST-IL DES EFFETS INDÉSIRABLES? De façon générale, la ziprasidone est bien tolérée par les patients. Au cours des études cliniques à court terme, les effets indésirables les plus fréquemment rapportés ont été les suivants : somnolence (14 %), symptômes extrapyramidaux (14 %), nausées (10 %), constipation (9 %), étourdissement (8 %), dyspepsie (9 %), akathisie (8 %), infection des voies respiratoires (8 %), asthénie (5 %), diarrhée (5 %).2 De plus, dans les essais de précommercialisation, environ 5 % des sujets sous ziprasidone ont présenté un rash ou de l’urticaire, nécessitant alors l’arrêt du médicament. Pour la plupart des effets indésirables, la fréquence semble augmenter avec l’augmentation de la dose.2,20 En observant ce tableau, on constate que la ziprasidone présente une affinité pour les récepteurs sérotoninergiques supérieure aux autres antipsychotiques. Cette propriété procure à la ziprasidone des effets pharmacologiques diversifiés non négligeables. En effet, en plus d’avoir des effets antipsychotiques, la ziprasidone présente des effets antidépresseurs et anxiolytiques.5,8 En outre, on constate que la ziprasidone présente une plus faible affinité pour les récepteurs histaminiques, muscariniques et adrénergiques. Cette propriété permet d’expliquer le fait que la ziprasidone présente un profil d’effets indésirables très avantageux.5 QU’EN EST-IL DE LA PHARMACOCINÉTIQUE? Parmi les éléments les plus importants de la pharmacocinétique de la ziprasidone, on note le fait qu’en présence d’aliments, la biodisponibilité de la ziprasidone augmente de près du double, passant de 30 à 60 %. Il est donc recommandé de prendre le médicament avec de la nourriture. Par ailleurs, en considérant la faible demi-vie d’élimination, soit environ 7 heures, la ziprasidone doit être prise deux fois par jour. Pour ce qui est du métabolisme, on note que le deux tiers de celui-ci est effectué par l’enzyme aldéhyde oxydase alors que le tiers restant est effectué par le cytochrome P450 3A4. Enfin, concernant l’élimination, la monographie indique qu’il n’est pas nécessaire de faire des ajustements posologiques en fonction de l’âge, du sexe, de la race ou de la présence d’une atteinte rénale ou hépatique modérée. Toutefois, peu de données sont disponibles dans les cas d’atteinte rénale ou hépatique sévère.2,4,5 En outre, plusieurs effets indésirables sont associés à la classe des antipsychotiques de deuxième génération. Évidemment, la ziprasidone n’y échappe pas. Le tableau II présente les effets indésirables les plus fréquemment associés aux antipsychotiques de deuxième génération et permet de comparer les différentes molécules. Enfin, les antipsychotiques de deuxième génération sont souvent associés à des effets indésirables métaboliques très incommodants pour le patient. L’un des avantages majeurs de la ziprasidone par rapport aux autres molécules concerne justement ces effets indésirables. Effectivement, selon plusieurs études dont CATIE (n = 1493), il a été démontré que, contrairement à la majorité des autres agents, la ziprasidone entraînait une diminution du poids, de l’hémoglobine glyquée, du taux de cholestérol et de la concentration des triglycérides.15 Le tableau III démontre bien ces résultats et permet une comparaison précise des différents agents antipsychotiques. QUE DISENT LES ÉTUDES CLINIQUES À PROPOS DE L’EFFICACITÉ? Dans les principales études avec placebo, la ziprasidone s’est révélée supérieure pour améliorer la psychopathologie globale et atténuer les symptômes positifs et négatifs de schizophrénie, une semaine après le début du traitement. La ziprasidone s’est aussi révélée significativement supérieure tant sur le temps écoulé avant la rechute que sur le taux de rechute après un an.12,13,14 QUELLES SONT LES PRÉCAUTIONS À PRENDRE? Lors des études de commercialisation, il a été démontré que la ziprasidone était associée à des changements à l’électrocardiogramme et à un allongement de l’intervalle QT. Un tel allongement peut entraîner des arythmies mortelles telles les torsades de pointe. Celles-ci peuvent être asymptomatiques tout comme elles peuvent entraîner des étourdissements, des palpitations, des syncopes ou des convulsions. Des torsades de pointes soutenues peuvent évoluer vers la fibrillation ventriculaire pour aboutir à la mort subite par arrêt cardiaque.2 Différents essais cliniques ont aussi comparé l’efficacité de la ziprasidone à celle des autres antipsychotiques de -2- significatifs, il ne semble pas nécessaire d’effectuer un ECG avant de débuter la ziprasidone.23 Selon une étude, avec la ziprasidone à raison de 160 mg/jour, l’allongement moyen par rapport à la durée initiale corrigée a atteint 15,9 ms, soit environ 9 à 14 ms de plus qu’avec quatre des agents de comparaison (15 mg/jour d’halopéridol [7,1 ms], 750 mg/jour de quétiapine [5,7 ms], 16 mg/jour de rispéridone [3,6 ms] et 20 mg/jour d’olanzapine [1,7 ms]), mais environ 14 ms de moins qu’avec 300 mg/jour de thioridazine (30,1 ms) qui lui, a reçu un avis de Santé Canada.2,21 Par ailleurs, dans cette même étude, on a démontré que l’effet de la ziprasidone sur le QTc n’a pas augmenté en présence d’un inhibiteur enzymatique.2,21 Enfin, une autre étude a démontré que l’augmentation de la dose à 320 mg/jour (le double de la dose maximale recommandée) a entraîné un allongement de QTc de 22,5 ms, soit seulement 3 ms de plus qu’à la dose de 160 mg/jour, ce qui indiquerait l’existence d’un plateau.2,22 Ces données semblent très rassurantes puisque aucun sujet n’a présenté d’intervalle QTc ≥ 450 ms ni d’allongement ≥ 75 ms par rapport à la durée initiale.2 DOIT-ON SURVEILLER DES INTERACTIONS? Interactions pharmacodynamiques En raison de son effet sur l’intervalle QT (voir section sur les précautions), la ziprasidone ne devrait pas être associée à un autre médicament qui allonge le QT. De plus, comme la ziprasidone tend à provoquer de l’hypotension, il est possible que les effets des antihypertenseurs soient accentués. Par ailleurs, de par son mécanisme d’action, il est possible que la ziprasidone s’oppose aux effets de la lévodopa et des agonistes de la dopamine. Enfin, puisque la ziprasidone agit principalement sur le SNC, la prudence s’impose en cas d’association avec d’autres agents agissants sur le SNC (ex. : alcool).2,20 Interactions pharmacocinétiques Les deux tiers de la clairance métabolique de la ziprasidone sont assurés par l’enzyme aldéhyde oxydase. Celleci fonctionne indépendamment des cytochromes et n’a aucun inducteur ni inhibiteur.2 Cette propriété pharmacocinétique permet d’éviter plusieurs interactions. Malgré le fait que les données cliniques semblent très rassurantes par rapport au danger associé à l’intervalle QT, la prudence est de mise. D’ailleurs, par mesure de précaution, la compagnie a émis une contre-indication chez les patients ayant récemment eu un infarctus du myocarde, présentant une insuffisance cardiaque non compensée ou des antécédents d’allongement du QT. Une mise en garde a aussi été émise quant à l’administration concomitante de la ziprasidone avec des médicaments qui accroissent, eux aussi, l’intervalle QT (ex. : quinidine, sotalol, moxifloxacine, clarithromycine, venlafaxine, cocaïne, …).2,6,20 Par ailleurs, il est important de considérer le fait que certains facteurs peuvent faire augmenter le risque de torsades de pointe. Ceux-ci sont présentés au tableau IV. Le prescripteur devrait tenir compte de ces différents facteurs de risque et ajuster sa conduite en conséquence. Toutefois, le tiers de la clairance métabolique restante est assurée par le cytochrome P450 3A4. Ainsi, l’administration concomitante d’inhibiteurs puissants du CYP3A4 (ex. : kétoconazole) peut faire augmenter significativement la concentration sérique de la ziprasidone. D’autre part, l’administration concomitante d’inducteurs puissants du CYP3A4 (ex. : carbamazépine) peut faire diminuer significativement la concentration sérique de la ziprasidone. La portée clinique de ces deux types d’interactions n’a pas été clairement établie, ce qui justifie par le fait même un suivi médical plus étroit.2 Par ailleurs, n’étant métabolisée que partiellement par le CYP3A4, des études ont démontré que la ziprasidone n’influençait pas de façon significative le métabolisme des autres médicaments substrats du CYP3A4.2 En considérant le fait que l’intervalle QT varie continuellement chez un même individu selon une différence pouvant aller jusqu’à 75-95 ms, un suivi avec ECG effectués à intervalles réguliers ne constitue pas une procédure cliniquement efficace pour détecter un allongement du QT secondaire à la médication.7,8 Néanmoins, en présence de signes ou de symptômes de troubles cardiaques, tels que palpitations, vertige, syncope ou convulsions, on devrait procéder à une évaluation de la fonction cardiaque avec ECG. On conseille de cesser le traitement si le QTc > 420 ms chez un patient symptomatique ou si le QTc > 500 ms chez un patient asymptomatique.2 Enfin, en dehors des conditions cliniques présentant des facteurs de risque Enfin, la ziprasidone est un substrat mineur du CYP1A2. Toutefois, comme la contribution de cette voie métabolique est mineure, la cigarette (un inducteur du CYP1A2) ne semble pas influencer la pharmacocinétique de la ziprasidone.2,5,6 ET LES PERSONNES ÂGÉES? La grande majorité des études sur la ziprasidone exclut ce type de clientèle. Néanmoins, la monographie recommande de prescrire une dose initiale plus faible, d’ajuster la posologie plus lentement et de faire une surveillance plus étroite durant la période d’administration initiale puis- -3- POUR PASSER D’UN ANTIPSYCHOTIQUE À UN AUTRE Si l’on désire passer d’un antipsychotique de deuxième génération à un autre, aucune procédure spécifique n’est favorisée. Ainsi, il est possible de cesser brusquement le 1er médicament pour débuter immédiatement le 2e tout comme il est possible de cesser graduellement le 1er agent tout en débutant graduellement le 2e. Chacune de ces procédures comporte ses avantages et ses inconvénients. Quelques études ont comparé ces différentes procédures, mais aucune n’a démontré d’avantages sur l’autre.8,24 Le choix d’utiliser l’une ou l’autre dépendra donc des molécules en cause, de la tolérance du patient et de sa condition clinique.5 que les personnes âgées sont généralement plus sensibles aux effets indésirables. De plus, comme elles ont souvent une fonction cardiaque réduite, le prescripteur devrait toujours considérer les précautions à prendre en fonction du risque d’allongement du QT.2,5,20 En outre, la ziprasidone n’est pas indiquée chez les personnes âgées atteintes de démence. En fait, une métaanalyse de 13 essais comparatifs avec placebo chez une telle population a mis en évidence un taux de mortalité 1,6 fois plus élevé chez les patients traités avec la ziprasidone. Bien que les causes variaient, la plupart des décès étaient d’origine cardiovasculaire (ex. : insuffisance cardiaque ou mort subite) ou infectieuse (ex. : pneumonie).2 PRIX La ziprasidone est disponible sous forme de capsule de gélatine dure opaque contenant 20, 40, 60 ou 80 mg. Un traitement avec une dose moyenne de ziprasidone coûte environ 115 $ par mois.25 Pour comparer les prix associés aux autres molécules utilisées en schizophrénie, référezvous au tableau V. Enfin, notons que ziprasidone fait partie de la liste des médicaments assurés par le régime d’assurance médicament du Québec. POSOLOGIE La monographie recommande d’amorcer un traitement de ziprasidone à une dose de 40 mg bid en mangeant. Toutefois, une dose initiale de 20 mg bid pourrait être préférable chez certaines personnes ou certains contextes cliniques. La posologie quotidienne devra être ajustée par la suite jusqu’à 80 mg bid selon la réponse au traitement. D’ailleurs, seules les doses variant entre 120 et 160 mg/jour ont été démontrées supérieures au placebo lors des études cliniques.11 Les ajustements posologiques doivent être espacés d’au moins deux jours, puisqu’il faut de un à trois jours pour atteindre l’état d’équilibre. Toutefois, en pratique, les augmentations peuvent être espacées davantage ou ajustées selon la tolérance et la condition clinique du patient. Il est généralement déconseillé d’augmenter la dose au-delà de 160 mg/jour par manque d’études.2,5,20 AVANTAGES ET DÉSAVANTAGES APPLIQUÉS À UN CONTEXTE CLINIQUE Lorsqu’on compare la ziprasidone aux autres antipsychotiques de deuxième génération, plusieurs avantages apparaissent évidents. Le tout premier constitue indubitablement le profil d’effets indésirables métaboliques qu’on peut considérer comme étant avantageux. Ensuite, l’effet pharmacologique diversifié de la ziprasidone constitue un avantage considérable par rapport aux autres agents. Enfin, contrairement aux autres agents, elle présente peu d’interactions. Si l’arrêt de la ziprasidone est souhaité, il est important de procéder à un sevrage graduel, particulièrement si la médication a été administrée sur une longue période. Si un tel sevrage n’est pas effectué, le patient est à risque de subir les symptômes suivants : gastrite, nausée, vomissements, somnolence, tremblements, bouffées de chaleur, sudation, tachycardie, céphalée et insomnie. Ces symptômes apparaissent généralement 24 à 48 heures après l’arrêt subit ou après une diminution importante de la dose de ziprasidone et peuvent durer jusqu’à 14 jours.5 Toutefois, plusieurs inconvénients doivent être pris en considération. Le plus important est certainement la prise biquotidienne avec nourriture. Lorsqu’on considère le fait que la non-adhérence au traitement est fréquente en psychiatrie, ces éléments peuvent constituer un obstacle majeur. Par ailleurs, bien que la ziprasidone ait été démontrée équivalente à l’olanzapine, à la rispéridone et à la quétiapine en terme d’efficacité, aucune étude n’a été effectuée dans un contexte de schizophrénie réfractaire.8,26 Enfin, bien que les données cliniques semblent très rassurantes par rapport au danger associé au prolongement de l’intervalle QT, la prudence est de mise. PEUT-ON OUVRIR LA CAPSULE? Pfizer Canada recommande de ne pas ouvrir les capsules car aucun essai clinique n’a pu confirmer l’efficacité, l’innocuité et la stabilité du médicament dans un tel contexte. Toutefois, puisque ZeldoxMD n’est pas libéré selon une cinétique particulière, il est peu probable qu’une telle pratique cause problème. PLACE DANS LA THÉRAPIE Tous les antipsychotiques de deuxième génération, soit la rispéridone, l’olanzapine, la quétiapine et la ziprasidone, -4- 2. Pfizer Canada Inc. Zeldox. Monographie de produit. Août 2007. 3. Yatham LN, Kennedy SH, O'Donovan C, et al. « Canadian Network for Mood and Anxiety Treatments (CANMAT) » guidelines for the management of patients with bipolar disorder : update 2007. Bipolar Disord 2006;8(6):721-39. 4. Crismon ML, Buckley PF. « Schizophrenia. » Dans : DiPiro JT, Talbert RL, Yee GC, Matzke GR, Wells BG, Posey LM, rédacteurs. Pharmacotherapy : A Pathophysiologic Approach. 6e éd. New York : The McGraw-Hill Companies Inc; 2002. p. 1209-33. 5. Bezchlibnyk-Butler KZ, Jeffries JJ, Virani AS. « Clinical handbook of psychotropic drugs. » 17e rév. éd. Ashland, OH : Hogrefe & Huber Publishers; 2007. 6. Joncas M. « La ziprasidone (GeodonTM). » Québec Pharmacie 2001; 48(8) :624-29. De plus, en considérant le fait que chaque individu peut réagir différemment à un agent versus un autre et que la ziprasidone a un effet pharmacologique diversifié, celle-ci pourrait être essayée chez les patients ne répondant pas aux autres antipsychotiques de deuxième génération. La ziprasidone pourrait donc constituer une autre alternative avant le passage à la clozapine. Cependant, par manque d’information, il serait prématuré de suggérer la ziprasidone chez les patients stabilisés par la clozapine. Cette dernière demeure donc le traitement de référence dans les cas de schizophrénie réfractaire.8,26 7. Stahl SM. Psychopharmacology of antipsychotics. 1re éd. London : Martin Dunitz Ltd ; 1999. 8. Kutcher S, Brooks SJ, Gardner DM, et al. « Expert Canadian consensus suggestions on the rational, clinical use of ziprasidone in the treatment of schizophrenia and related psychotic disorders. » Neuropsychiatr Dis Treat 2005;1(2):89-108. 9. Schmidt AW, Lebel LA, Howard HR Jr, et al. Ziprasidone: a novel antipsychotic agent with a unique human receptor binding profile. Eur J Pharmacol 2001;425 :197-201. Conclusion Enfin, la ziprasidone offre aux patients une efficacité équivalente à celle des autres agents et un profil d’effets indésirables très avantageux lorsque comparé aux agents actuellement sur le marché. Ces caractéristiques font de la ziprasidone une molécule intéressante. Elle constitue d’ailleurs un ajout important à l’arsenal thérapeutique de la schizophrénie. Enfin, une formulation intramusculaire pour le traitement à court terme des épisodes d’agitation aiguë est actuellement disponible sur le marché américain. Il ne serait donc pas surprenant de voir arriver une telle formulation sur le marché canadien et ce, à court ou à moyen terme. 10. Stahl SM, Shayegan DK. « The psychopharmacology of ziprasidone: receptor-binding properties and real-world psychiatric practice. » J Clin Psychiatry 2003; 64 (suppl.19) : 6-12. ont démontré une efficacité sensiblement équivalente. Ainsi, les experts suggèrent de considérer la ziprasidone en première ligne de traitement au même titre que toutes les autres molécules de deuxième génération. Actuellement, dû au manque d’expérience avec la molécule, les médecins québécois tardent à insérer la ziprasidone dans leurs premiers choix de traitement. Néanmoins, plusieurs situations cliniques bénéficieraient avantageusement des propriétés de cette molécule. C’est le cas, par exemple, des patients avec trouble métabolique chez qui l’on voudrait débuter un traitement ou des patients présentant des effets indésirables métaboliques significatifs secondaires à la prise d’un antipsychotique. Comme ces effets indésirables peuvent miner considérablement l’adhérence au traitement et éventuellement mener à un échec thérapeutique, la ziprasidone constitue une bonne alternative, surtout si la prise biquotidienne avec nourriture ne constitue pas un obstacle pour le patient.8,26 11. Caley CF, Cooper CK. « Ziprasidone : The Fifth Atypical Antipsychotic. » Ann Pharmacother. 2002; 36(5):839-51. 12. Daniel DG, Zimbroff DL, Potkin SG, et al. « Ziprasidone 80 mg/day and 160 mg/day in the Acute Wxacerbation of Schizophrenia and Schizoaffective Disorder : A 6-week Placebo-Controlled Trial. Ziprasidone Study Group. » Neuropsychopharmacology 1999; 20 : 491-505. 13. Arato M, O'Connor R, Meltzer HY, et al. « A 1-Year, Double-Blind, Placebo-Controlled Trial of Ziprasidone 40, 80 and 160 mg/day in Chronic Schizophrenia : The Ziprasidone Extended Use in Schizophrenia (ZEUS) Study. » Int Clin Psychopharmacol 2002; 17 : 207-215. RÉFÉRENCES 1. Santé Canada. Avis de décision portant sur Zeldox. Internet Formats. [En ligne, fichier pdf]. Février 2008 [cité le 17 septembre 2008]. [2 p.] Disponible : http://www.hc-sc.gc. ca/dhp-mps/prodpharma/sbd-smd/phase1-decision/drugmed/nd_ad_2008_zeldox_078188-fra.php 14. Daniel DG, Zimbroff DL, Potkin SG, et al. « Ziprasidone 80 mg/day and 160 mg/day in the Acute Exacerbation of Schizophrenia and Schizoaffective Disorder : a 6-Week -5- Placebo-Controlled Trial. Ziprasidone Study Group. » Neuropsychopharmacology 1999 : 20(5) : 491-505. cians and Healthcare Professionals. 15e éd. Hudson, OH : Lexi-comp; 2007-2008. 15. Lieberman JA, Stroup TS, McEvoy JP, et al. « Effectiveness of Antipsychotic Drugs in Patients with Chronic Schizophrenia. » N Engl J Med 2005; 353 :1209-23. 21. Harrigan EP, Miceli JJ, Anziano R, et al. « A Randomized Evaluation of the Effets of Six Antipsychotic Agents on QTc, in the Absence and Presence of Metabolic Inhibition. » J Clin Psychopharmacol 2004; 24 : 62-69. 16. Addington DE, Pantelis C, Dineen M, et al. « Efficacy and Tolerability of Ziprasidone Versus Risperidone in Patients With Acute Exacerbation of Schizophrenia or Schizoaffective Disorder : An 8-Week, Double-Blind, Multicenter Trial. » J Clin Psychiatry 2004; 65 :1624-1633. 22. Miceli J, et al. « Effets of Oral Ziprasidone and Haloperidol on QTc at Clinical and High Doses. » Schizophr Res 2003; 60 (Suppl.1) : 314 [abstract]. 23. Greenberg WM, Citrome L. « Ziprasidone for Schizophrenia and Bipolar Disorder : A Review of the Clinical Trials. » CNS Drug Rev 2007; 13(2) :137-77. 17. Simpson GM, Glick ID, Weiden PJ, et al. « Randomized, Controlled, Double-Blind Multicenter Comparison of the Efficacy and Tolerability of Ziprasidone and Olanzapine in Acutely ill inPatients with Schizophrenia or Schizoaffective Disorder. » Am J Psychiatry 2004;161 :1837-1847. 24. Weiden PJ, Simpson GM, Potkin SG, et al. « Effectiveness of Switching to Ziprasidone for Stable But Symptomatic Outpatients With Schizophrenia. » J Clin Psychiatry 2003; 64 : 580-88. 18. Simpson GM, Weiden P, Pigott T, et al. « Six-Month, Blinded, Multicenter Continuation Study of Ziprasidone Versus Olanzapine in Schizophrenia. » Am J Psychiatry 2005; 162 :1535-1538. 25. Service des relations avec la clientèle. Liste de médicaments publiée par la Régie de l’assurance maladie du Québec. Bibliothèque et Archives nationales du Québec; 21 juin 2008. 19. Stroup TS, Lieberman JA, McEvoy JP, et al. « Effectiveness of Olanzapine, Quetiapine, Risperidone, and Ziprasidone in Patients With Chronic Schizophrenia Following Discontinuation of a Previous Atypical Antipsychotic. » Am J Psychiatry 2006;163 : 611–622. 26. Lalonde P. « La ziprasidone – Un nouvel antipsychotique n’entraînant pas de prise de poids. » Le médecin du Québec 2008; 43(4) :15-16. 20. Lacy CF, Armstrong LL, Goldman MP, et al. Drug information handbook: A Comprehensive Resource for all Clini- -6- TABLEAU I : AFFINITÉS COMPARATIVES DES ANTIPSYCHOTIQUES AUX DIFFÉRENTS RÉCEPTEURS ET LES EFFETS Récepteur Clozapine Rispéridone Olanzapine Quétiapine Ziprasidone PHARMACOLOGIQUES ET INDÉSIRABLES Y ÉTANT ASSOCIÉS5,8,9,10,11 D2 ++ +++++ +++ ++ ++++ H1 ++++ +++ ++++ ++++ +++ M1 +++ +/- ++++ + + α1 +++ ++++ +++ ++++ +++ α2 +++ ++++ ++ +++ +/- Effets indésirables Effets pharmacologiques Effet antipsychotique (Sx positifs) Effets extrapyramidaux, hyperprolactinémie Sédation, gain de poids, hyperglycémie, dyslipidémie Bouche sèche, constipation, vision brouillée, rétention urinaire, somnolence, troubles cognitifs Hypotension orthostatique, étourdissements, tachycardie réflexe, somnolence, hypersalivation Dysfonction sexuelle Effet anxiolytique, antidépresseur Hypotension, somnolence, gain de poids et antipsychotique Effet antipsychotique 5-HT2 ++++ +++++ ++++ +++ +++++ (Sx négatifs) Légende : D2 = Récepteur dopaminergique de type 2, H1 = récepteur histaminique de type 1, M1 = récepteur muscarinique de type 1, α1 = récepteur alpha-adrénergique de type 1, α2 = récepteur alpha-adrénergique de type 2, 5-HT1A = récepteur sérotoninergique de type 1A, 5HT2 = récepteur sérotoninergique de type 2, Sx = symptômes. 5-HT1A ++ ++ + ++ ++++ TABLEAU II : COMPARAISON DES ANTIPSYCHOTIQUES DE DEUXIÈME GÉNÉRATION PAR RAPPORT AUX EFFETS INDÉSIRABLES ASSOCIÉS À LA CLASSE5 Effets indésirables Comparaison des molécules Effets extrapyramidaux Risp > Olan = Zip > Quét = Cloz Hyperprolactinémie Risp > Olan = Quét = Cloz = Zip Effets anticholinergiques Cloz > Olan > Quét > Risp = Zip Hypotension orthostatique Cloz > Risp = Quét > Olan = Zip Sédation Cloz > Olan = Quét > Risp = Zip Gain de poids Cloz = Olan > Quét = Risp > Zip Dyslipidémies Cloz = Olan > Quét > Risp > Zip Hyperglycémie Cloz = Olan > Quét = Risp > Zip Allongement du QT Zip > Quét = Risp = Olan -7- TABLEAU III : VARIATION MOYENNE DES PARAMÈTRES MÉTABOLIQUES RAPPORTÉE POUR CHAQUE ANTIPSYCHOTIQUE DE DEUXIÈME GÉNÉRATION SELON L’ÉTUDE CATIE15 Rispéridone Olanzapine Quétiapine Ziprasidone Variation moyenne du gain de poids (kg) 0,4 4,3 0,5 - 0,7 Variation moyenne de la glycémie (mmol/L) 0,4 0,8 0,4 0,1 Variation moyenne de Hba1c (%) 0,08 0,41 0,05 - 0,10 Variation moyenne du taux de cholestérol (mmol/L) - 0.05 0,25 0,14 - 0,24 Variation moyenne des triglycérides (mmol/L) - 0,03 0,48 0,22 - 0,20 Effets indésirables métaboliques TABLEAU IV : FACTEURS DE RISQUE DE TORSADE DE POINTE ET CONDUITE SUGGÉRÉE PAR RAPPORT À LA ZIPRASIDONE2,5,8,20 Facteurs de risque Conduite suggérée Présence d’un allongement congénital de l’intervalle QT Éviter la ziprasidone si QTc > 450 ms. Cesser si QTc > 420 ms chez un patient symptomatique ou si QTc > 500 ms chez patient asymptomatique Antécédents personnels de maladie ou d’arythmie cardiaques Éviter la ziprasidone Antécédents familiaux de mort subite avant l’âge de 50 ans Éviter la ziprasidone Bradycardie Éviter la ziprasidone Lésions du système nerveux central (ex. : AVC, infection, trauma, maladie de Parkinson) Usage concomitant d’autres médicaments qui allongent l’intervalle QT/QTc * Déséquilibre électrolytique (ex. : hypokaliémie, hypomagnésémie, hypocalcémie) Cesser l’usage de ces médicaments ou éviter la ziprasidone Utilisation de diurétiques ou présence de dysfonction rénale Effectuer un suivi régulier des électrolytes Éviter la ziprasidone Corriger avant d’introduire la ziprasidone Sexe féminin, âge > 65 ans, diabète, obésité, carence alimentaire, Aucune conduite particulière suggérée trouble thyroïdien * Une liste complète des médicaments pouvant prolonger l’intervalle QT est disponible via le site www.qtdrugs.org TABLEAU V : COMPARAISON DES PRIX MENSUELS ASSOCIÉS AUX DIFFÉRENTES OPTIONS DE TRAITEMENT25 Traitement* CSSSL RAMQ Clozapine 300 mg die 81,50 $ 238,00 $ Rispéridone 2 mg die 9,50 $ 28,80 $ Olanzapine 15 mg die 89,10 $ 164,10 $ Quétiapine 800 mg die 311,20 $ 311,20 $ Ziprasidone 40 mg bid 113,40 $ 113,40 $ *Les prix correspondent à la formulation générique, lorsque celle-ci est disponible. -8-