changement d`antipsychotique lors de l`apparition d`effets

OCTOBRE 2011 VOL. 58 N° 6 QUÉBEC PHARMACIE 7
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Changement dantipsychotique
lors de lapparition deffets
secondaires métaboliques
A.M. est un homme de 37 ans, diagnostiqué schizophrène depuis plusieurs années. Depuis 2006, sa maladie est stabilisée avec de la
quétiapine 100 mg bid + 300 mg HS et de la trifluopérazine 10 mg tid. Lors de sa visite d’aujourd’hui à la pharmacie, il mentionne avoir
pris beaucoup de poids ces derniers mois. Il demande s’il est possible de l’aider, car cela l’incommode particulièrement.
Discussion
La prévalence de lobésité chez les personnes
atteintes de schizophrénie serait de 1,5 à 4 fois
supérieure à celle de la population en général1.
Pour le syndrome métabolique, elle serait deux
fois plus élevée par rapport à la population non
atteinte2. Il a été soulevé que certains mécanis-
mes physiopathologiques de cette maladie
pourraient contribuer à lapparition dun syn-
drome métabolique2,3. De plus, la génétique, un
régime alimentaire pauvre, un mode de vie
sédentaire, le tabac et la médication antipsycho-
tique sont dautres facteurs qui peuvent expli-
quer ces prévalences plus élevées dans la popu-
lation schizophrène1,2,4.
Le syndrome métabolique est caractéripar
une intorance au glucose, une dyslipidémie, de
lobésité et de lhypertension3,5. Les antipsychoti-
ques de deuxième génération sont assocs à une
prise de poids et à une perturbation du métabo-
lisme. Ils auraient notamment un eet dans la
région de lhypothalamus impliquée dans le
contrôle de l’ingestion de nourriture2. Le blocage
du récepteur de l’histamine 1 (H1) par certains
antipsychotiques serait un des mécanismes par-
ticulrement responsables de la prise de poids2,5.
Le blocage du récepteur rotoninergique 2C
(5-HT2C) et u n eet agoniste au niveau du récep-
teur 1A (5-HT1A) engendreraient le même
eet2,5. Le mécanisme par lequel cette classe de
médicaments entrnerait une résistance à lin-
suline reste toutefois à élucider5. Cependant, le
blocage du récepteur muscarinique 3 (M3) au
niveau des cellules bêta du pancréas serait impli-
q dans la diminution de la crétion d’insuline
par, notamment, lolanzapine et la clozapine2,5.
Ainsi, selon les propriétés de chaque antipsycho-
tique atypique, la clozapine et lolanzapine sont
associées à un risque élevé de gain de poids, la
qtiapine et la risridone, à un risque modéré,
alors que laripiprazole et la ziprasidone sont à
faible risque3,4,5. Seules la clozapine et l’olanza-
pine ont démontré qu’elles augmentaient le ris-
que de diate et causaient une modication du
bilan lipidique de façon concluante4,5. Cepen-
dant, la quétiapine a aussi été ciblée dans certai-
nes études comme étant un facteur entrnant
un haut risque de dyslipidémie3.
En raison des conséquences cardiovasculaires
que ces eets indésirables peuvent engendrer, le
suivi des paramètres métaboliques s’avère essen-
tiel chez tous les patients trais par un antipsy-
chotique atypique. Il est recommandé, avant de
commencer le traitement, de recueillir de lin-
formation sur l’histoire familiale et personnelle
du patient, son poids (IMC), son tour de taille,
sa pression artérielle, son taux de glucose à jeun
et son profil lipidique4. Le poids devra par la
suite être mesuré aux semaines 4, 8, et 12, puis
tous les trois mois durant la première année et
annuellement par la suite4. La pression artérielle
et le glucose à jeun doivent être mesurés à nou-
Texte rédigé par Isabelle Lévesque, étudiante en
4e année au Pharm. D., Pharmacie Antonio Boyard,
Frédéric Normand & Sylvain Gibeault.
Texte original soumis le 13 juin 2011.
Texte final remis le 29 juillet 2011.
Révision : Sophie Grondin, B. Pharm., M.Sc.
S A.M. se plaint d’une prise de poids importante (environ 18 kg) depuis quelques mois.
O Homme de 37 ans, fumeur, peu actif
Poids : 96 kg, IMC : 29
Médication actuelle : trifluopérazine 10 mg TID, quétiapine 100 mg bid + 300 mg HS,
citalopram 40 mg die, benztropine 2 mg tid, lorazépam 2 mg tid, trazodone 50 mg hs,
rosuvastatine 10 mg die, sildénafil 50 mg 1 co 1 h avant la relation, pantoprazole 40 mg
die et docusate de sodium 100 mg bid.
Autres antipsychotiques essayés par le pas: fluphénazine 50 mg IM q 3 semaines.
A Parmi lesdicaments du patient, la quétiapine est celui qui est le plus susceptible
d’entraîner un gain de poids marqué. La ziprasidone et l’aripiprazole ont démontré qu’ils
n’avaient que peu ou pas d’effet sur le poids. La ziprasidone doit se prendre deux fois par
jour avec des repas importants, alors que la prise uniquotidienne d’aripiprazole sans
égard au repas lui confère un certain avantage.
P Communiquer avec le psychiatre afin de proposer de changer la quétiapine
pour l’aripiprazole.
Établir la dose équivalente d’aripiprazole et un calendrier de substitution.
Rédiger l’opinion pharmaceutique.
Remettre les conseils sur l’aripiprazole.
Discuter avec le patient de l’importance d’une saine alimentation et de l’intégration
d’exercices légers dans sa routine quotidienne.
Suivi auprès du patient chaque semaine pendant la substitution d’antipsychotique
et un mois après l’atteinte de la dose cible d’aripiprazole pour les symptômes
de la schizophrénie.
Suivi du poids une fois à chacun des trois premiers mois et tous les trois mois par la suite.
Le bilan lipidique, la pression artérielle et le glucose à jeun devront être mesurés après
12 semaines de traitement. Par la suite, la pression artérielle et le glucose à jeun devront
être mesurés annuellement et un bilan lipidique sera effectué tous les 5 ans
minimalement.
À VOS SOINS
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veau à la semaine 12 puis chaque année par la
suite. Enn, le bilan lipidique doit être répété à
la semaine 12 puis tous les cinq ans4. Le phar-
macien communautaire peut prendre une part
active dans ce suivi, principalement en ce qui a
trait à la mesure du tour de taille et du poids, à la
prise de la pression artérielle et à la mesure du
glucose sanguin.
Le gain de poids incommode bien souvent les
patients. Un changement dantipsychotique
peut être envisagé lorsqu’un patient augmente
son poids initial de 5 % ou plus à tout moment
au cours du traitement4. Il faut cependant être
très prudent, car cette substitution peut le désta-
biliser. Lors dun changement, deux types de
phénomène rebond peuvent survenir. Le pre-
mier, à caractère pharmacodynamique, se pro-
duit lorsque les deux antipsychotiques dièrent
quant à leur affinité pour les récepteurs6. En
eet, des symptômes de sevrage peuvent surve-
nir selon le type de récepteur impliqué et la rapi-
dité du changement6. De plus, si le nouvel anti-
psychotique est à dose sous-thérapeutique, un
phénomène rebond de type pharmacocinétique
peut se produire6. Dans ce cas, le blocage des
récepteurs dopaminergiques 2 (D2) est moin-
dre par rapport à ce qu’il était avant le change-
ment6. Le patient peut donc se retrouver avec
une psychose, une manie, être agité ou manifes-
ter de lakathisie ou de la dyskinésie6.
Il existe plusieurs méthodes pour passer dun
antipsychotique à un autre. La méthode la plus
abrupte, celle lantipsychotique à changer (X)
est cessé, puis remplacé par un nouvel antipsy-
chotique (Y) à pleine dose, est utilisée principa-
lement chez les patients hospitalisés7. Il y a ici
peu de risque dinteraction7. Cependant, le
patient aura possiblement des sympmes
rebonds7. Il est aussi possible de diminuer gra-
duellement la dose de X jusqu’à sa cessation et
dintroduire ensuite Y à faible dose, puis de
laugmenter graduellement7. Cette façon de pro-
céder minimise l’apparition de symptômes
rebonds et dinteractions7. Par contre, le patient
reçoit des doses sous-thérapeutiques pendant
une certaine période, ce qui peut favoriser une
exacerbation de la maladie7. De plus, il n’existe
pas de consensus sur la vitesse à laquelle la dose
des deux dicaments devrait être diminuée
ou augmentée. La méthode plus prudente, qui
minimise lapparition des sympmes rebonds
lorsque les deux antipsychotiques diffèrent
considérablement dun point de vue pharmaco-
dynamique ou pharmacocinétique, consiste à
faire un chevauchement6. Ainsi, Y est ajouté,
soit à pleine dose ou graduellement, et X est
maintenu à la dose habituelle. X n’est diminué
que lorsque 75 % à 100 % de la dose de Y a été
atteinte et maintenue pendant 4 à 5 demi-vies de
X. Ensuite, la dose de X peut être diminuée de
25 % à 50 % toutes les 4 à 5 demi-vies de X6. La
vitesse de changement de dose est une sugges-
tion et peut être adaptée selon la ponse du
patient.
Lutilisation de cette méthode diminue le ris-
que de rechute et est la plus sécuritaire7. Cepen-
dant, il peut y avoir addition deets secondai-
res et augmentation du risque dinteractions
médicamenteuses7. Elle serait à privilégier chez
les patients stables dont le changement de
médication est caupar un eet indésirable
ou chez les patients dont laponse au premier
traitement est incomplète7. Enn, le recours à
un anxiolytique/sédatif, antihistaminique,
anticholinergique, à de la gabapentine ou à de
la mirtazapine peut s’avérer nécessaire pour
limiter les symptômes rebonds lors du change-
ment de médication chez certains patients6.
Acte pharmaceutique facturable
Substituer en raison dun eet secondaire (DIN :
00999598)
Opinion pharmaceutique
Bonjour Docteur,
M. A.M se plaint davoir pris environ 18 kg
ces derniers mois. Il est fumeur et dit faire peu
dexercice. Il prend depuis récemment de la
rosuvastatine 10 mg pour un déséquilibre des
lipides sanguins. La quétiapine, utilisée pour le
traitement de sa schizophrénie, est susceptible
de causer un gain de poids et dentraîner une
perturbation du prol lipidique. Dans son cas,
laripiprazole pourrait être une bonne option
puisque ce dicament a très peu dimpact
sur le poids et sa prise est sans égard aux repas.
La dose daripiprazole équivalente à sa dose
actuelle de quétiapine est de 25 mg. Puisque le
patient est stabilidepuis longtemps avec de
la quétiapine, la méthode de substitution par
chevauchement serait appropriée pour assurer
la transition. Nhésitez pas à me joindre pour
de plus amples informations.
En toute collaboration,
La pharmacienne
Références
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psychotic switching for people with schizophrenia
who have neuroleptic-induced weight or metabolic
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diabetes. Diabetes Care 2004; 27: 596-601.
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6. Corell CU. From receptor pharmacology to improved
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7. Edlinger M, Baumgartner S, Eltanaihi-Furtmüller
N, et coll. Switching between second-generation
antipsychotics why and how ? CNS drugs 2005; 19 :
27-42.
QUESTION DE FORMATION CONTINUE
Répondez maintenant en ligne. Voir page 46.
1) Lequel des énoncés suivants est
faux ?
A. Le récepteur 5-HT2C est impliqué
dans le gain de poids lié aux
antipsychotiques atypiques.
B. L’olanzapine et la clozapine augmen-
tent le risque de gain de poids, de
diabète et de dyslipidémie.
C. Le bilan lipidique devrait être fait
annuellement lorsqu’un antipsychoti-
que atypique est débuté.
D. Des symptômes de sevrage peuvent
survenir lors d’un changement
d’antipsychotique, notamment
lorsque les deuxdicaments
diffèrent quant à leur affinité pour
les récepteurs.
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