L`alimentation comme traitement pour éviter le retard mental

NEUROPÉDIATRIE
BIC 105 septembre - octobre 2003 - 5
Maladies métaboliques
L’alimentation comme traitement pour
éviter le retard mental
Si les maladies du métabolisme brillent par leur diversité, elles sont
heureusement rares. Les traitements sont complexes, parfois
inexistants. L’alimentation joue néanmoins un rôle important pour
nombre d’entre elles.
Nous sommes ce que nous mangeons…
C’est d’autant plus vrai pour Thomas
qui ne mange jamais de viande, de
poisson, de laitage, de pâtisserie, de pain…
Lorsqu’il fait ses emplettes, le tour du rayon
alimentation est vite bouclé: des fruits,
quelques légumes et le tour est joué !
On l’aura compris, Thomas doit suivre
un régime alimentaire ultra strict et ce,
durant toute sa vie. Un régime qu’il suit
déjà depuis la maternité, depuis que les
analyses effectuées quelques jours après
sa naissance ont révélé une trop grande
concentration de phénylalanine dans son
organisme. L'accumulation de cet acide
aminé et de ses dérivés toxiques provoque
une dégradation progressive et irréversible
du cerveau qui entraîne à terme un retard
mental important, indique le Dr Marie-
Cécile Nassogne, neuropédiatre. Les enfants
atteints d’une phénylcétonurie classique
qui ne suivent aucun régime alimentaire
présentent des difficultés sévères de déve-
loppement avec un langage pauvre et des
troubles majeurs du comportement. Beau-
coup doivent être placés en institution
spécialisée dès les premières années de
vie. S’ils sont bien suivis par contre, les
enfants traités dès la naissance ne pré-
sentent aucun symptôme, rassure la neu-
ropédiatre.
Haro sur les protéines
Pour limiter l'apport en phénylalani-
ne, Thomas doit donc recourir à des produits
spéciaux distribués en pharmacie et
capables de couvrir ses besoins nutrition-
nels. Les difficultés sont nombreuses car
quasiment tous les aliments contiennent
des protéines et par conséquent de la phé-
nylalanine, explique, Martine Dassy, dié-
téticienne. Les parents d’enfants atteints
de cette maladie doivent être très vigi-
lants. Au début, ils ont du mal à accepter
la situation, mais avec le temps, tout rentre
dans l’ordre: la confiance s’ installe et les
bonnes habitudes se prennent au fur et à
mesure de la diversification alimentaire
du bébé.
L’objectif à ce stade: dédramatiser la
situation tout en faisant respecter les règles
d’hygiène alimentaire ! C’est important car
jusqu’à 7 ans environ le cerveau est en
plein développement!
Bilan pluridisciplinaire
La phénylcétonurie fait partie de la
grande famille des maladies du métabo-
lisme. Et si ces maladies sont effectivement
nombreuses, elles sont aussi pour la plupart
très rares (exemple: dix phénylcétonuriques
naissent chaque année en Belgique).
Afin d’aider les parents et les enfants
confrontés à ce type de pathologie, une
consultation pluridisciplinaire a été lancée
dans le Service de neuropédiatrie en jan-
vier dernier.
Instaurée dans le cadre d’une conven-
tion établie avec l’INAMI il y a quelques
années, cette consultation propose un bilan
médical, psychologique, diététique et social
complet en une après-midi. Une soixan-
taine de patients sous régime alimentai-
re particulier sont actuellement pris en
charge dans le cadre de cette convention,
indique le Dr Nassogne. Ils sont hospitali-
sés ou suivis en ambulatoire avec, si néces-
saire, une prise en charge dans un éta-
blissement scolaire spécialisé.
Si la phénylcétonurie est une maladie
métabolique relativement «facile» à contrô-
ler, ce n’est pas le cas pour quantité d’autres
maladies métaboliques pour lesquelles il
n’existe encore aucun traitement. Ces mala-
dies évoluent mal et plongent bien sou-
vent les familles dans le plus grand désar-
roi. En cause : la difficulté de vivre au
quotidien avec ces enfants qui souffrent
de nombreux handicaps et qui nécessitent
des soins adaptés. Encore faut-il trouver
un lieu de prise en charge adéquat…
XL
ÉCHOS DES SERVICES
UNE ÉQUIPE POUR CHAQUE PATIENT
La consultation pluridisciplinaire
des maladies métaboliques est assurée
par le Dr Marie-Cécile Nassogne, neu-
ropédiatre, Martine Dassy, diététicien-
ne, Alix de Bohan, assistante de pédo-
psychiatrie, et Astrid Perron, assistante
sociale. Cette équipe travaille en étroi-
te collaboration avec le laboratoire des
Maladies métaboliques dirigé par le Pr
M-F Vincent.
Rens.: Dr Marie-Cécile Nassogne,:
tél.: 02/764 52 72.
Des recettes à gogo
Les diététiciennes des sept centres
des maladies métaboliques belges se
sont réunies afin d’éditer un nouveau
livre de recettes à base de produits
hypoprotéinés. Un fascicule explicatif
sur la maladie et le régime alimentaire
est également en cours d’élaboration.
Rens.: Martine Dassy, martine.das-
[email protected], tél.: 02/764 75 09.
LES MALADIES MÉTABOLIQUES : UNE FAUS-
SE NOTE DANS LA PARTITION
Bien que le corps humain soit une
petite merveille des dérapages existent.
Un enzyme manque, un acide aminé fait
défaut et voilà que tout bascule. C’est
notamment le cas pour les maladies
métaboliques. Certaines réactions bio-
chimiques ne se déroulent pas comme
prévu: une accumulation de substances
toxiques apparaît et provoque de graves
conséquences pour le développement.
Dans la majorité des cas, l’origine
des maladies métaboliques est géné-
tique. Les traitements actuels sont basés
sur différents types de régime alimen-
taire, suppléments en vitamines et pri-
se de médicaments épurateurs.
Des recherches sont en cours,
d’autres modalités de traitement font
progessivement leur apparition: la trans-
plantation d’hépatocytes (lire BIC 100),
le génie génétique…
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