THERMODYNAMIQUE La distribution de Boltzmann Entropie d`un

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THERMODYNAMIQUE
La distribution de Boltzmann
Entropie d’un mélange, potentiel chimique
TRAN Minh Tâm
Table des matières
Introduction
16
Rappel de Mécanique statistique
17
Équilibre statistique . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 17
La loi de distribution de Boltzmann . . . . . . . . . . . 17
La pression d’un gaz, énergie cinétique d’un gaz parfait . 21
Evaluation de la constante β de la distribution de Boltzmann . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 21
Application : la sédimentation . . . . . . . . . . . . . . 24
'
Rappel de Thermodynamique
26
$
Entropie d’un mélange, potentiel chimique . . . . . . . . 26
Diffusion . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 27
Un peu au delà
électrophorèse
:
centrifugation
et
31
La centrifugation . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 31
L’électrophorèse . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 33
&
- 2-
%
'
Introduction
$
Ce cours à option fait suite au cours de Physique Générale ; les sujets qui seront
abordés complètent l’enseignement de première année et ont été choisis de manière
à être utiles à des étudiants en Biologie par les applications qu’ils permettent d’aborder.
Parmi les nombreux sujets possibles, j’ai fait le choix de sujets suivants, étant
conscient que ce choix est bien arbitraire :
1. La distribution de Boltzmann.
Application : la sédimentation, la centrifugation, l’électrophorèse.
2. La diffusion de la lumière.
Application : la diffusion de la lumière par de grosses molécules.
3. Le magnétisme atomique, puis nucléaire.
Application : la résonance magnétique nucléaire, l’imagerie par résonance
magnétique nucléaire et la spectroscopie RMN.
4. La mécanique quantique.
– Les débuts : le rayonnement du corps noir.
Application : les lasers, les pinces optiques.
– L’équation de Schrödinger ; sa résolution dans le cas à 1 dimension ; l’effet
tunnel.
Application : le microscope à balayage à effet tunnel (Scanning Tunnelling
Microscope) (T.P.) ; le microscope à force atomique (Atomic Force Microscope) (T.P.).
5. Quelques notions de Physique Nucléaire
Application : la tomographie par émission de positons.
Dans ce chapitre de “Thermodynamique”, nous allons établir la loi de distribution
Ei
de Boltzmann ni = N0 e− kT que vous connaissez tous. Le développement est un
peu mathématique. Une application immédiate de cette loi est la sédimentation.
Pour “pousser” un peu plus loin, j’ai pensé utile de traiter le sujet de la centrifugation, bien utile pour les Biologistes qui désirent déterminer la masse des macromolécules ; cependant, pour traiter de la centrifugation, nous devons également
traiter de la diffusion dont le coefficient intervient directement dans le résultat, d’où
une digression sur l’entropie d’un mélange et sur le potentiel chimique. Un court
paragraphe sur l’électrophorèse est présenté qui évoquera les difficultés de cette
technique.
&
-16-
%
Rappel de Mécanique statistique
'
$
La mécanique statistique est l’application des lois de la mécanique classique aux
systèmes constitués d’un grand nombre de particules, dans le but d’obtenir des
renseignements sur les propriétés macroscopiques de ces systèmes.
Équilibre statistique
Considérons un système constitué de N particules, réparties dans des états d’énergies
E1, E2, ... Ei , avec ni particules dans l’état d’énergie Ei en un instant donné.
•
E5
n5 = 1
n4 = 0
E4
E3
E2
•
•
E1
• • • •
•
•
•
n3 = 3
n2 = 2
N = Σ i ni
n1 = 4
U = Σ i ni E i
U est l’énergie totale (ou énergie interne) du système.
Pour un système isolé (ni échange de matière ni échange de travail ou d’énergie) :
N = constant, U = constante
Les ni peuvent varier avec le temps.
Pour chaque état macroscopique du système (les conditions extérieures sont donc
données) il existe une répartition n1 , n2 , ... ni plus probable que les autres. Quand
cette répartition est réalisée, on dit que le système est en équilibre statistique. Les ni
peuvent fluctuer autour de la valeur correspondant à l’équilibre sans conséquences
macroscopiques observables.
Le problème de la mécanique statistique est de trouver la répartition la plus probable
d’un système, puis d’en déduire les propriétés macroscopiques du système.
La loi de distribution de Boltzmann
Considérons N particules identiques et discernables.
Si tous les états ont la même probabilité a priori d’être occupés, la probabilité
d’une répartition donnée est proportionnelle au nombre de façons de distribuer les
particules pour réaliser cette répartition.
Nombre de façons différentes et discernables de placer n1 particules au niveau
d’énergie E1 : (c’est le nombre de combinaisons possibles de N particules n1 par
&
-17-
%
Rappel de Mécanique statistique
'
$
N!
n1! (N − n1)!
Pour le niveau E2 : (on a enlevé n1 particules des N de départ !)
n1 , l’ordre n’ayant pas d’importance)
(N − n1 )!
n2! (N − n1 − n2 )!
Finalement, le nombre de façons différentes et discernables de réaliser la répartition
donnée est le produit des façons de placer les ni sur les niveaux Ei :
Ω =
N!
n1! n2! ... ni!
[ Il se peut que l’on ait plus de 1 état pour un niveau dénergie Ei donné : dans ce
cas, dit que le niveau d’énergie est dégénéré et on attribue un poids statistique gi à
chaque état. Un exemple de cette dégénérescence est le niveau d’énergie (n, l, m) de
l’atome où l’on peut avoir 2 électrons dont les poids statistiques sont gi = 1/2. Le
nombre d’états microscopiques est alors donné par :
gini
N ! g1n1 g2n2 ...gini
= N ! Πi
Ω =
n1 ! n2!... ni!
ni !
]
Etat d’équilibre :
Considérons 6 particules identiques et une énergie totale (somme des énergies des
particules) de 10 E, où E est une unité d’énergie quelconque. La figure suivante donne
3 répartitions possibles de ces particules sur les niveaux d’énergie ; ces répartitions (il
y en a d’autres) réalisent bien les deux conditions N = cst. = 6, U = cst. = 10E.
Si une particule a la même probabilité de prendre un état d’énergie plutôt qu’un
autre, la répartition la plus probable sera celle qui correspond au plus grand nombre
de possibiltés de répartir les particules sur les niveaux :
N=6
6E
6E
5E
5E
4E
4E
3E
3E
2E
2E
1E
1E
6 permutations
&
U = 10 E
60 permutations
-18-
15 permutations
%
'
Rappel de Mécanique statistique
Intuitivement, nous savons que l’état d’équilibre correspond à la répartition la plus
probable des particules, c.à.d. à celle qui permet d’avoir un maximum de possibilités
d’arranger les particules sur les niveaux. Les contraintes sur U, N seules ne peuvent
pas nous permettre de distinguer l’état d’équilibre ; il nous faut introduire le principe d’extremum : l’état d’équilibre est la répartition n1, n2 , ... ni pour laquelle
Ω (ou S = k ln Ω) est maximum, moyennant les contraintes :
$
N = Σi ni = constant, U = Σi ni Ei = constante
Prenons le logarithme naturel de Ω
(le logarithme est une fonction monotone croissante) :
ln Ω = ln N ! − Σi ln ni!
La condition ln Ω maximum est que la variation de Ω et, par conséquent, celle de
ln Ω soit nulle. Comme ln N ! est constant,
δ ln Ω = 0 = Σi δ ln ni!
En utilisant la formule de Stirling pour l’estimation des factoriels des grands nombres
(cf. par exemple L. Lyons, All you wanted to know about MATHEMATICS but were
afraid to ask, Cambridge, Volume 1, page 287 et suivantes).
ln N ! ' N ln N − N
X
X
δ
ni ln ni − δ
ni = 0
donc :
i
i
X
ln ni δ ni = 0
i
avec les deux contraintes :
δ N = Σ i δ ni = 0
δ U = Σ i E i δ ni = 0
En multipliant les deux équations précédentes par deux constantes α et β et en les
additionnant à celle résultant du principe d’extremum :
Σ α δ ni + Σ β Ei δ ni + Σ ln ni δ ni = 0
Comme les variations δ ni peuvent être considérées comme arbitraires, on a
ln ni + α + β Ei = 0
ni = exp ( −α − β Ei )
&
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%
'
Rappel de Mécanique statistique
Dans le cas où on doit assigner au niveau Ei une probabilité d’occupation gi le
nombre ni de particules sur le niveau Ei est :
$
ni = gi exp ( −α − β Ei )
La constante α est obtenue par la condition N = Σi ni ;
e −α =
il vient donc :
ni =
N
Σi gi e−βEi
N
gi e−βEi
Z
avec :
Z = Σi gi e−βEi
C’est la distribution de Boltzmann.
Z est la fonction de partition.
Exemple :
Considérons deux niveaux dont les énergies sont E1 = −E, E2 = E, g1 = g2 =
Z=
U=
1
2
1 βE 1 −βE
e + e
= ch β E
2
2
N
eβ E
n1 =
2 ch β E
N
n2 =
e −β E
2 ch β E
N
(−Ee βE + Ee −βE ) = −N E th β E
2 ch β E
Résumé Nous recherchons l’état d’équilibre, c.à.d. l’état le plus probable quand
nous répartissons N particules sur des niveaux d’énergie avec les contraintes sur le
nombre total de particules et l’énergie totale des particules. Le principe d’extremum nous dit de rechercher le maximum de Ω ou de l’entropie S = k ln Ω. Nous
aboutissons à la distribution de Boltzmann.
&
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%
'
Rappel de Mécanique statistique
$
La pression d’un gaz, énergie cinétique d’un gaz parfait
Prenons un gaz parfait, c.à.d. un gaz dont nous pouvons négliger les volumes propres
et les interactions ; pour simplifier la démonstration, restreignons-nous à un gaz
parfait monoatomique. Enfermés dans une enceinte cubique de côté a, les atomes de
ce gaz ont des collisions élastiques avec les parois et rebondissent ; à chaque collision
sur une des parois perpendiculaires x, la vitesse de l’atome change de vx à − vx.
La variation de la quantité de mouvement selon x est ainsi de 2 m |vx|. Comme le
nombre de collisions par unité de temps sur les deux parois perpendiculaire à x est
de |vx|/a, le changement de quantité de mouvement selon x par unité de temps sera
de 2 m vx2 /a pour 1 atome. Pour N atomes, il sera de
< vx2 >
d px
= 2N m
= Fx
dt
a
En passant à la pression, nous avons (pour 2 faces !) :
< vx2 >
< vx2 >
=
N
m
a 2a2
V
Comme rien ne nous permet de distinguer entre les directions x, y et z, nous avons
P = 2N m
< vx2 > = < vy2 > = < vz2 > =
PV =
1
< v2 >
3
1
2
N m < v2 > =
< E cin >
3
3
1
puisque N m < v 2 > est l’énergie cinétique (de translation) de notre gaz parfait.
2
Pour retrouver l’équation des gaz parfaits,
3
kN T
2
Rappel : Nous retrouvons l’équipartition de l’énergie : notre gaz parfait est monoatomique, le nombre de degrés de liberté qu’il a est f = 3 et à chaque degré de
1
liberté, nous avons associé une énergie cinétique de k T .
2
< E cin > =
Evaluation de la constante β de la distribution de Boltzmann
Rappel : Comment calculer une moyenne
Soit f(x) la densité de probabilité d’une variable X. La probabilité pour que X
soit comprise entre x et (x + dx) est donnée par f (x).dx.
&
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%
Rappel de Mécanique statistique
'
La loi de probabilité est normée :
probabilité de réalisation de 1.
Z
$
+∞
f (x) dx = 1 Un événement a ainsi une
−∞
On définit la moyenne de x (ou espérance mathématique) par
Z +∞
x · f(x) dx
E(X) =
−∞
Quand la variable X ne peut prendre que des valeurs discrètes avec la probabilité
de réalisation p(xi), nous avons
X
X
p(xi ) = 1
et
E(X) =
xi p(xi)
i
i
Si nous avons maintenant un ensemble de particules possédant une densité de probabilité n(q) de réaliser un certain
Z paramètre q, comme la vitesse, l’énergie, etc... la
+∞
q · n(q) dq
moyenne de q sera : < q > =
−∞
On appelle aussi n(q) la loi de distribution du paramètre
Z + ∞ q.
On peut aussi calculer la moyenne de q2 : < q2 > =
q2 · n(q) dq
−∞
Dans le cas discret :
X
< q >=
qi · ni
< q2 > =
i
X
q2i · ni
avec
X
ni = 1
i
i
Retour au problème
< vx2 >
Nous pouvons réécrire l’équation P = N m
comme :
V
Z +∞ Z +∞ Z +∞
PV =
(N A) exp( − β E ) m ẋ2 dẋdẏdż
−∞
−∞
(1)
−∞
Dans cette expression, nous avons noté :
vx =
dx
= ẋ
dt
vy = ẏ
vz = ż
Nous avons généralisé au cas continu l’expression donnée deux pages avant et nous
avons supposé que nos particules ont, à l’équilibre, une loi de distribution des énergies
cinétiques qui est celle de la loi de Boltzmann : au lieu d’avoir des énergies discrètes,
&
-22-
%
Rappel de Mécanique statistique
'
nous avons considéré ici l’énergie cinétique (seule énergie d’un gaz parfait) et
intégré sur dẋdẏdż, une “cellule” de l’espace des vitesses. N est le nombre total de
particules et A la constante de normalisation.
$
En intégrant sur toutes les valeurs possibles des composantes des vitesses ẋ, ẏ, ż,
nous devons retrouver la valeur de N :
Z +∞ Z +∞ Z +∞
(N A) exp( − β E ) dẋdẏdż
N =
−∞
=
Z
−∞
−∞
+∞ Z +∞ Z +∞
−∞
−∞
(N A) exp
−∞
1
− β m ( ẋ2 + ẏ 2 + ż 2 )
2
dẋdẏdż
En intégrant par parties par rapport à ẋ
ẋ = +∞
Z +∞ Z +∞
1
(N A) exp − β m ( ẋ2 + ẏ 2 + ż 2 ) ẋ N =
dẏdż +
2
−∞
−∞
ẋ= −∞
Z +∞ Z +∞ Z +∞
1
(N A) exp − β m ( ẋ2 + ẏ 2 + ż 2 ) β m ẋ2 dẋdẏdż
+
2
−∞
−∞
−∞
Le terme entre les limites ẋ = ±∞ doit de toute manière s’annuler car la valeur de
β doit rester positif et fini et que ce terme est proportionnel à ẋ. Nous avons alors :
N = β
Z
+∞ Z +∞ Z +∞
−∞
−∞
(N A) exp ( − β E ) m ẋ2 dẋdẏdż
(2)
−∞
En comparant (2) avec l’expression de P V (1), nous obtenons P =
Pour retrouver l’équation d’état d’un
⇒ β =
gaz
parfait,
1
kT
P
N
βV
=
N kT
V
Distribution de Boltzmann
La distribution de Bolzmann est donc :
ni =
avec : Z = Σi gi e−Ei / kT
N
gi e−Ei / kT
Z
Résumé : Nous avons obtenu la distribution de Boltzmann en recherchant le maximum de l’entropie d’un système de particules dont l’énergie totale est constante.
&
-23-
%
'
Rappel de Mécanique statistique
Application : la sédimentation
$
Des grains de gomme (en anglais : gamboge) en suspension dans l’eau ne tombent
pas tous au fond du récipient, bien que la gomme soit plus dense que l’eau : sa
concentration suit une distribution selon la hauteur dans l’eau, avec davantage de
grains au fond qu’à la surface. Perrin a mesuré la distribution de ces grains avec la
hauteur.
Avant de dériver l’équation donnant la distribution, considérons d’abord une colonne
de gaz d’une section A à température constante. Soit une tranche dy de la colonne
à la hauteur y.
y=h
y + dy
y
F
dy
y=0
Surface a
Si F est le poids de la colonne de gaz au-dessus de la tranche, le poids de la colonne
sur la face d’en-dessous est de F + dF = F + m g n A dy , expression où :
m g est le poids d’une molécule du gaz,
n est le nombre moyen de molécules par unité de volume,
A dy est le volume de la tranche.
Comme les molécules dans la tranche ont un certain poids, le nombre de molécules à
faible altitude sera plus grand qu’à haute altitude à cause de l’attraction gravifique.
Cette différence de concentration entraı̂ne une différence du nombre de collisions par
unité de temps entre les deux surfaces séparées de dy et la colonne de gaz est en
équilibre dynamique : le poids des molécules de chaque couche est compensée par
la force nette verticale, dirigée vers le haut, causée par la différence du nombre de
collisions moléculaires.
Nous venons de voir au début de ce chapitre que la pression d’un gaz venait justement
des collisions des molécules sur une ”paroi”.
&
-24-
%
'
Rappel de Mécanique statistique
Pour une mole d’un gaz qui peut être considéré comme parfait, nous avons :
P V = NA k T = R T , NA étant le nombre d’Avogadro.
$
En divisant par V et en introduisant n = NA / V = nombre de molécules par unité
de volume, nous avons : P = n k T ⇒ dP = k T dn . La différence de poids
dF vue précédemment peut s’exprimer en fonction de la pression par : dF = A dP
avec dP = −m n g dy ; le signe − montre que la pression diminue quand on s’élève
en altitude. En égalisant les deux expressions de la différence de pression :
dn
mg
= −
dy
n
kT
La relation entre le nombre de molécules n0 à y = 0 et celui à une cote y, n, est
obtenu en intégrant :
Z y
Z n
mg
dn
=
dy
⇒
n = n0 e− m g y / k T
−
kT
0
n0 n
k T dn = −m g n dy
⇒
Comme la pression est directement proportionnelle au nombre de molécules,
l’équation précédente peut être réecrite pour la pression : c’est ce que l’on appelle
souvent la loi des atmosphères.
Pour les grains de gomme en suspension dans l’eau, l’expression précédente doı̂t
être légèrement modifiée pour tenir compte de la force d’Archimède. Si la masse
spécifique des grains de gomme est ρ 0 et celle de l’eau (ou du liquide) de ρ, la force
ρ
d’Archimède est de m g 0 et le poids effectif d’un grain est :
ρ
0
ρ
ρ −ρ
ρ
mg − mg 0 = mg
= mg 1 − 0 = mg (1 − ρv)
(∗)
ρ
ρ0
ρ
En réinsérant cette expression dans la distribution du nombre de molécules, nous
obtenons, avec k = R / NA :
NA m g (ρ 0 − ρ) y
n = n0 exp −
ρ0 R T
Cette expression donne la distribution du nombre de grains à l’équilibre de la
sédimentation et résulte de l’agitation thermique des molécules. Perrin a mesuré
cette distribution dans une suspension diluée de grains de gomme, confirmant
l’équation de la sédimentation et, conclusion importante, cette mesure lui a permis de déterminer le nombre d’Avogadro NA .
(*) v = 1 / ρ 0 est le volume spécifique partiel des grains, c.à.d. le volume qu’occupe
dans le liquide
une
masse unité d’une substance qui y est dissoute ou en suspension.
3
−1
.
[v] = L · M
&
-25-
%
Rappel de Thermodynamique
'
$
Entropie d’un mélange, potentiel chimique
Nous avons vu que l’entropie d’un mélange était composée de l’entropie des corps
purs et de l’entropie de mélange. Dans le cas d’un mélange de deux substances
(solvant et soluté) constitué respectivement de N1 et N2 molécules (avec N1 + N2 =
N0 ), cette entropie de mélange s’écrit :
"
#
X
SM = k [N0 ln N0 − N1 ln N1 − N2 ln N2] = k N0 ln N0 −
Ni ln Ni
i
SM = − k
"
X
Ni ln Ni − N0 ln N0
i
#
= −k
X
Ni ln
i
X
Ni
= −k
Ni ln xi
N0
i
Ni
est la fraction molaire des molécules de type i. En multipliant et divisant
N0
le membre de droite par le nombre d’Avogadro NA , nous avons :
X
SM = − R
ni ln xi
xi =
i
ni étant le nombre de moles de type i.
Au cours de Physique Générale I, nous avons vu que nous pouvons déduire le potentiel chimique de l’entropie par
∂S
µi
= −
j 6= i
T
∂Ni U,V,Nj
Nous avons obtenu le potentiel chimique de la substance i dans le mélange :
µi , mélange = k T ln xi
ou pour une mole : µi , mélange = R T ln xi . Si nous notons par µ0i le potentiel
chimique de la substance pure i, le potentiel chimique total de i est donc
µi = µ0i +
R
| T{zln x}i
pour une mole
terme de mélange
xi < 1
⇒
ln xi < 0
[On trouve aussi dans les livres l’expression précédente exprimée en terme de concentration Ci au lieu des fractions molaires xi. La concentration et la fraction molaire
étant proportionnelles, avec le logarithme nous aurons un facteur additif que nous
pouvons “absorber” dans une redéfinition du potentiel chimique µ0i ; d’où :
µi = µ0i + R T ln Ci
&
pour une mole]
-26-
%
'
Rappel de Thermodynamique
$
Diffusion
Dans les phénomènes de transport auxquels nous sommes confrontés en général
(comme la sédimentation, le transport à travers une membrane semi-perméable,
etc...), il existe un déséquilibre et le transport auquel nous assistons est un
phénomène irréversible : un système qui n’est pas à l’équilibre tend vers cet équilibre
caractérisé par le maximum de l’entropie et le minimum des autres potentiels thermodynamiques (cf. cours de Physique Générale I) compatible avec les contraintes
exercées sur le système et dans cette évolution vers l’équilibre, un transport de
matière (électrons, atomes, molécules, ions...) ou d’énergie (chaleur) se fait.
Nous allons nous restreindre au cas du transport de matière dans une solution
constituée d’un solvant 1 et d’un soluté 2 ; ce soluté peut aussi être une suspension dans le solvant. Nous pouvons définir un courant de la matière du type 2 (ions,
molécules, atomes de type 2) dans ce transport.
Α
∆x
x
Le nombre de particules de type 2, de vitesse v2, passant la surface A pendant ∆ t
est de ∆ N2 = C2 A ∆ x , C2 étant la concentration des particules de type 2 en x
et ∆x = v2 · ∆t. Le nombre de particules 2 passant la surface A par unité de temps
et de surface est donc : J2 = ∆ N2 / A∆t = C2 v2 .
Quelle est donc la force qui met en mouvement les particules ? En Physique Classique, nous savons qu’une force conservative dérive d’un potentiel, par exemple, la
force qui met en mouvement les charges est une force électrique qui dérive d’un
potentiel électrique.
Le phénomène de diffusion est irréversible et nous ne sommes pas intéressés à trouver
la force qui agit sur chaque particule individuellement, mais plutôt à décrire le
phénomène de manière globale. Nous relions donc la force globale qui agit dans
le processus (la diffusion, la conduction électrique, etc...) au gradient d’un certain
potentiel ; si ce gradient devient nul, le potentiel est uniforme et la force s’annule.
&
-27-
%
'
Rappel de Thermodynamique
Exemple : la force générant le courant électrique est la force électrostatique qui
dérive de l’énergie potentielle électrostatique. S’il existe une différence de potentiel
aux bornes d’un circuit, un courant électrique s’établit et ce dernier s’annule quand
la différence de potentiel est nulle.
$
Dans les processus irréversibles, nous écrivons que le courant en un point quelconque
à un instant donné est proportionnel au gradient d’un potentiel approprié au point
considéré et en cet instant. Pour un problème à 1 dimension nous pouvons écrire :
∂U
J2 = − L2
. C’est une sorte de loi d’Ohm appliqué au problème.
∂x
Quelques exemples :
Phénomène
Potentiel
Cond. électrique Pot. électrique
Diffusion
Potentiel chimique
Sédimentation
Potentiel gravifique
Ecoulement de
Equilibre
électrons
Pot. électrique uniforme
molécules
Uniformité de µ
molécules
Min. Energie potentielle
Dans le cas de la diffusion, c’est le gradient de la concentration qui va donner la
force qui mettra en mouvement les molécules : ces dernières diffusent en un courant
∂C2
(cf. cours 1ère année). Mais la concentraobéissant à la loi de Fick J2 = − D
∂x
tion C2 est liée au potentiel chimique par µi = µ0i + R T ln Ci !
Notre système évolue ainsi d’une situation où l’entropie est minimale et l’énergie de
Gibbs (enthalpie libre) G est maximale vers une situation où l’entropie est maximale
et l’énergie de Gibbs minimale.
En effet, l’énergie de Gibbs décroı̂t puisque
µi = µ0i + R T ln xi avec ln xi < 0 .
&
-28-
∆G =
P
i ni µi −
P
0
i ni µi
et que
%
Rappel de Thermodynamique
'
Si nous définissons la force s’exerçant sur une molécule ou sur la particule du type
1 ∂U
2 par F2 = −
, cette force est, dans un mouvement sans accélération, égale
NA ∂x
à la force de frottement s’exerçant sur la molécule (ou particule) :
$
Force sur
la particule
F
Force de frottement f . dx
dt
Faisons l’hypothèse que la force de frottement est proportionnelle à la vitesse de la
molécule/particule par rapport au solvant et que F2 = Ff rottement = f2 · v2 (f2 est
appelé coefficient de frottement de la particule). Nous avons donc :
J2 = C2·v2 = − L2
∂U
∂x
=
|{z}
N A L 2 F2 ⇒ v 2 =
C2
NA L 2
F2 |{z}
⇒ L2 =
C2
NA f2
F2 = f2 ·v2
∂U
A ∂x
F2 = − N1
Revenons à notre problème de diffusion due à une différence de concentration ; nous
avons vu qu’une variation de concentration entraı̂nait une variation du potentiel
chimique : le potentiel dont dérive la force sur les particules est donc le potentiel
chimique. En effet, l’équilibre du système est dicté par le fait que le potentiel chimique est le même partout ; une variation de ce potentiel en fonction de la distance
induit l’apparition d’une force mettant en mouvement les molécules/particules jusqu’à ce que l’équlibre soit atteint (le potentiel de Gibbs G sera alors minimum).
Mais
Comme
∂ µ2
J2 = −L2
∂x
∂ µ2
∂ µ2
∂ C2
=
·
.
∂x
∂C2 T,P ∂x
RT
∂
µ
2
µ2 = µ02 + RT ln C2 ,
=
.
∂C2 T,P
C2
⇒ J2 = −
D = L2 ·
&
RT
C2
L2 RT ∂ C2
·
C2
∂x
⇒
|{z}
=
|{z}
−D
Loi de F ick
D =
L2 = C2 / NA f2
-29-
RT
NA f2
∂ C2
∂x
(∗)
%
'
Rappel de Thermodynamique
Résumé
– Dans le problème de la diffusion due à une inhomogénéité de la concentration d’un
type de particules, le phénomène est irréversible et l’évolution se fait d’une situation de minimum d’entropie et de maximum d’énergie de Gibbs à une situation
de maximum d’entropie et de minimum de l’énergie de Gibbs.
– Sur les particules s’exercent une force qui dérive du potentiel chimique.
– La diffusion obéit à la loi de Fick vue en 1ère année.
– Si le mouvement des particules est sans accélération et si la concentration des
particules est faible, le coefficient de diffusion de la loi de Fick peut être relié au
coefficient de frottement f des particules.
$
(∗) Cette relation a été établie par A. Einstein en 1905
A. Einstein, Ann. Physik 17 (1905) 549 et Ann. Physik 19 (1906) 371
&
-30-
%
'
Un peu au delà : centrifugation et électrophorèse
La centrifugation
$
La méthode de sédimentation sous l’action du champ gravifique présente l’inconvénient d’être restreinte par la faible valeur de l’accélération g : on n’est sensible
qu’à des particules massives comme les grains de gomme.
En utilisant des centrifugeuses, on peut atteindre des accélérations centrifuges de
plus de 300’000 fois l’accélération gravifique (l’éprouvette constitue un référentiel
en rotation, donc non-inertiel !) : on peut ainsi déterminer la masse m des macromolécules.
dx
Si
est la vitesse de la particule, sur cette particule va s’exercer une force de
dt
frottement qui dépend linéairement de la vitesse. La particule, de masse m et localisée à une distance x de l’axe de rotation de la centrifugeuse tournant à la vitesse
angulaire ω, est soumise à la force centrifuge m ω 2 x . La particule est aussi soumise
à la poussée d’Archimède − ω 2 x m0 , m0 étant la masse de liquide déplacé. On peut
remplacer m0 par le produit de la masse de la particule par la masse spécifique de
la solution et par son volume spécifique partiel : m0 = m ρ v.
[Le volume spécifique partiel est le volume effectif par unité de masse de la substance
dans la solution, le volume ne demeurant pas constant dans la solution.]
A l’équilibre, la force de frottement est égale à la force d’entraı̂nement de la particule :
dx
= ( 1 − ρ v ) m ω2 x
f·
| {zdt}
f orce de f rottement
Le coefficient f est le coefficient de frottement.
F
Poussée
d'Archimède
Force de frottement f . dx
dt
x
On définit la constante de sédimentation par
&
Force
centrifuge
-31-
s =
1
ω2 x
·
dx
. C’est la vitesse
dt
%
'
Un peu au delà : centrifugation et électrophorèse
de sédimentation divisée par l’accélération ω 2 x . L’unité de s est la seconde. Pour
une molécule donnée dans un solvant donné, s est une constante caractéristique ; on
l’exprime souvent en unité de Svedberg qui est égale à 10 − 13 seconde.
$
Pour une particule sphérique de rayon r, Stokes donne l’expression du coefficient f :
f = 6πηr
η étant le coefficient de viscosité du liquide. Le cas de la particule sphérique est malheureusement un cas particulier ; en général, on n’arrive pas à avoir une expression
simple pour f , même si on connaı̂t la forme de la particule, ce que l’on ignore en
général !
Heureusement, nous pouvons déterminer le coefficient de frottement f dans une
expérience de diffusion des molécules en solution diluée (cf. paragraphe précédent).
En faisant l’hypothèse que le coefficient de frottement f obtenu dans les mesures de
diffusion est la même que celle à utiliser dans la centrifugation,
D =
RT
kT
=
NA f
f
⇒
m =
kT s
D (1 − ρv)
En multipliant par le nombre d’Avogadro les deux membres, nous obtenons :
M =
RT s
D (1 − ρv)
Cette équation, obtenue par Svedberg en 1929 déjà, permet de déterminer la masse
moléculaire M via la vitesse de sédimentation apparaissant dans s. En général, on
fait des mesures de s et de D à différentes concentrations et on extrapole vers une
dilution infinie.
Protéine
v
s
D
(cm3 g −1) 10 − 13 s (cm2 s−1 ) × 107
Hémoglobine (cheval)
0,749
4,41
6,3
Hémoglobine (homme)
0,749
4,48
6,9
Serum albumine (cheval)
0,748
4,46
6,1
Serum albumine (homme)
0,736
4,67
5,9
Lysozyme (jaune d’oeuf)
0,750
1,90
11,2
Insuline (boeuf)
0,749
3,58
7,53
M
68000
63000
70000
72000
16400
46000
[On vérifiera que la dimension de m ou de M est bien celle d’une masse]
&
-32-
%
'
Un peu au delà : centrifugation et électrophorèse
$
L’électrophorèse
L’électrophorèse est le transport des particules par un champ électrique. Formellement, le processus est très semblable à la centrifugation et, au lieu de l’information
sur la masse donnée par la centrifugation, l’électrophorèse donnera une information
sur la charge de la particule ou de la macro-molécule.
Il est cependant très difficile de donner une théorie exacte de l’électrophorèse, comme
nous avons dans la solution, en plus des particules ou macro-molécules étudiées,
d’autres charges en suspension : on ne peut pas étudier l’effet du champ électrique
appliqué seul sur la particule, mais l’action combinée du champ appliqué et de celui
des autres ions entourant la particule.
Examinons le cas parfaitement idéal d’une particule ou d’une macromolécule chargée
dans un milieu isolant (cas a) ci-dessous).
+
+
Ze E
+Ze
+
+
-
-
+
-
a)
-
b)
-
+Ze
-
-
+
+
+
La force électrostatique que subit la particule est donnée par la loi de Coulomb :
F = Ze E , Z étant la charge de la particule en unité de charge élémentaire e et E
la valeur du champ électrique [Volts/m]. Comme pour la centrifugation, à l’équilibre,
nous aurons l’égalité de la force de frottement et de la force électrostatique :
dx
f·
| {zdt}
= Ze E
f orce de f rottement
On définit la mobilité µ de la particule ou de la macro-molécule par .
µ =
&
Ze
1 dx
=
E dt
f
-33-
%
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Un peu au delà : centrifugation et électrophorèse
La mobilité est analogue à la constante de sédimentation, puisque c’est le rapport
de la vitesse au “champ”.
$
Dans le cas d’un particule sphérique de rayon r, nous pouvons utiliser la relation de
Stokes donnant le coefficient f et obtenons la mobilité :
µ =
Ze
6π η r
expression dans laquelle η est la viscosité du solvant.
Complications . L’équation précédente n’est cependant pas réaliste ; en effet, dans
le solvant existent des ions, ne seraient ce que les ions dissociés de la macro-molécule
et qui lui donnent sa charge Ze (cas b) de la figure précédente)
La macro-molécule est ainsi entourée d’un nuage d’ions dont la charge est en
moyenne opposée à la sienne. Lorsqu’on applique le champ électrique, ce nuage d’ions
devient asymétrique et produit à son tour un champ opposé au champ extérieur. On
peut, de manière empirique, essayer d’apporter des corrections à l’expression de la
mobilité, mais les résultats sont cependant approximatifs.
&
-34-
%
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