Thèse de doctorat de Christophe Sempels - BSM

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Université catholique de Louvain
Facultés des sciences économiques, sociales et politiques
Institut d’Administration et de Gestion
L'intangibilité d'une offre globale de services : conceptualisation,
opérationalisation, variables d'influence et impact sur le niveau de risque
perçu
Christophe Sempels
Directeurs de thèse :
Professeur Frédéric Bielen
Professeur Robert Peeters
IESEG School of Management
IAG School of Management
Rapporteurs académiques :
Professeur Denis Lapert
Professeur Christopher Lovelock
Reims Management School
Yale School of Management
Lecteurs :
Professeur Jean-Jacques Lambin
Professeur Isabelle Schuiling
Università degli Studi di Milano
IAG School of Management
Président de la Commission Doctorale :
Professeur Per Agrell
IAG School of Management
REMERCIEMENTS
Cette recherche doctorale est le fruit d’un long et passionnant travail, qui a nécessité la
collaboration et le soutien d’un grand nombre de personnes, que je souhaite ici remercier.
Deux personnes ont été essentielles à mon parcours de doctorant. Je souhaite tout d’abord
remercier le Professeur Frédéric Bielen, co-directeur de cette thèse, pour la qualité de son
encadrement. Il m’a toujours soutenu et encouragé, dans un climat de confiance, et avec une
grande disponibilité. Frédéric m’a amené à me poser les bonnes questions, en stimulant ma
curiosité. Son esprit critique et ses capacités analytiques nous ont amenés à avoir des
discussions et des débats d’idées riches et constructifs. Je tiens également à le remercier pour
ses grandes qualités humaines. Cette thèse ne constitue que le point de départ d’une
collaboration que j’espère durable.
De manière peu conventionnelle à ce stade des remerciements, je tiens à exprimer toute ma
gratitude à mon épouse, Sylvie. Cette thèse est notre thèse, tant elle y a participé moralement.
Elle fut - et continue à être - un soutien sans faille. Elle révèle en moi ce qu’il y a de meilleur,
en toutes circonstances, et ce depuis plus de 11 ans.
Je tiens à remercier le Professeur Robert Peeters pour son implication et ses conseils éclairés
aux étapes clés de ce travail, et pour la confiance qu’il m’a accordée durant cette aventure.
Plus particulièrement, je tiens à lui exprimer ma gratitude pour la relecture finale de cette
thèse, dans des délais parfois courts.
Plusieurs personnes ont largement contribué au développement de ma passion pour le
marketing en général, et pour le marketing des services en particulier. Le Professeur JeanJacques Lambin a ainsi eu une influence déterminante sur le chemin que j’ai choisi, quand,
étant étudiant, j’ai appris le marketing dans ses ouvrages. Les Professeurs Christopher
Lovelock et Denis Lapert ont, quant à eux, contribué à faire de moi le passionné de marketing
des services que je suis. Je n’aurais jamais pu imaginer, il y a quelques années, qu’un jour, ces
trois Professeurs siégeraient dans mon comité d’encadrement de thèse. J’en suis fier, et
honoré. Je tiens à les remercier pour leur implication dans mon parcours doctoral, et pour le
temps qu’ils y ont consacré. Je tiens également à les remercier pour leurs remarques
constructives lors de la pré-défense.
J’ai eu la chance de fréquenter presque au quotidien la Professeur Isabelle Schuiling, membre
de l’Unité Marketing à l’IAG. Je tiens ici à la remercier pour la confiance qu’elle m’a toujours
accordée dans le cadre de mon travail, pour sa disponibilité, et pour son soutien, en toutes
circonstances. En tant que spécialiste de la marque, je suis heureux qu’elle ait accepté de faire
partie de mon Jury de thèse.
Ces remerciements sont bien longs, mais je ne peux oublier celles et ceux qui m’ont
également soutenu dans ce parcours : mon père, à qui je suis fier et heureux d’offrir cette
thèse; mes beaux-parents et mon beau-frère Benoît, pour la confiance qu’ils me témoignent,
pour leurs encouragements constants, et pour leur implication dans ce travail ; mes amis, avec
un clin d’œil particulier à Maxence, Douglas et Thierry ; Jean Tondeur, pour son influence
dans mes choix professionnels ; Norbert, pour la qualité et la rapidité de la relecture finale de
ce document ; toutes les personnes qui m’ont aidé à collecter mes données ; toutes les
personnes qui ont donné un peu de leur temps pour répondre à mon questionnaire ; les
étudiants de l’IAG et de l’IESEG, qui ont accepté de participer aux études exploratoires ; les
chercheurs et les professeurs qui ont répondu positivement à mes demandes d’envoi
d’articles ; mes collègues de l’Unité Marketing, ainsi que le personnel administratif de l’IAG.
Finalement, je veux exprimer ici tout mon amour à un petit bonhomme de presque 1 mètre,
Antoine, que j’aime passionnément, et qui est pour moi un moteur dans ce que j’entreprends.
Louvain-la-Neuve, le 15 avril 2005
TABLE DES MATIERES
INTRODUCTION
1
1. Problématique et objectifs de la recherche, et contributions attendues
3
1.1. Premier objectif : comprendre le concept d’intangibilité, et en proposer un outil de
mesure fiable et valide
1.2. Deuxième objectif : tester la relation entre l’intangibilité perçue et le risque perçu par
le client
4
1.3. Troisième objectif : identifier et tester les variables pouvant potentiellement
influencer le degré d’intangibilité perçue et sa relation avec le risque perçu
5
2. Plan de la thèse
7
PARTIE 1 : LE CADRE CONCEPTUEL
9
Introduction
9
Chapitre 1 : Comprendre le secteur des services
11
1. L’importance du secteur des services
11
1.1. La perception des services au 18ème siècle
1.2. La situation actuelle
11
12
2. La diversité du secteur des services
13
3. L’émergence du marketing des services
14
3.1. La naissance et la légitimation du paradigme des services (avant 1980)
3.2. Le décollage de la discipline (1980-1985)
3.3. L’explosion (1986-…)
3.4. L’avenir de la discipline en discussion (début du second millénaire)
3.4.1. Les principales caractéristiques des services par rapport aux produits
3.4.2. Le paradigme des services en crise ?
15
17
18
18
19
21
4. La définition du concept de service
25
Conclusion du chapitre 1
27
I
Chapitre 2 : Le concept d’intangibilité d’une offre globale de services
29
Introduction
29
1. Pourquoi s’intéresser au concept d’intangibilité ?
29
2. Définir le concept d’intangibilité
31
2.1. L’apparition du concept d’intangibilité dans un contexte marketing
2.2. La conceptualisation « physique » de l’intangibilité
2.3. La conceptualisation « physique » et « mentale » de l’intangibilité
31
32
36
3. L’intangibilité, un concept multidimensionnel ?
38
4. Opérationalisation du concept d’intangibilité
40
4.1. L’échelle de McDougall et Snetsinger (1990)
4.2. L’échelle de Laroche, Bergeron et Goutaland (2001)
5. Pourquoi faut-il tangibiliser les services ?
5.1. Principales conséquences de l’intangibilité pour le client
5.2. Principales conséquences de l’intangibilité pour le prestataire de service
5.3. Techniques de tangibilisation d’une offre de services
5.3.1.
5.3.2.
5.3.3.
5.3.4.
L’environnement physique et les indices périphériques tangibles
L’élément humain
La marque et l’image de marque
La communication
40
41
44
45
49
52
53
54
55
55
Conclusion du chapitre 2
58
Chapitre 3 : Le concept de risque perçu et son lien avec l’intangibilité
61
Introduction
61
1. Pourquoi s’intéresser au lien entre intangibilité et risque perçu ?
61
2. Le concept de risque perçu en marketing
64
2.1. Les deux composantes du risque perçu
2.1.1. La composante d’incertitude
2.1.2. La composante de conséquences (=composante de la perte)
2.2. Les six facettes du risque perçu
66
66
67
67
3. Opérationalisation du concept de risque perçu en marketing
II
70
3.1. Les mesures de faible niveau d’abstraction basées sur des méthodes déclaratives
directes
3.1.1. L’approche compositionnelle
3.1.2. L’approche globale
4.
72
73
79
Présentation des études existantes sur le lien entre l’intangibilité et le risque perçu
81
4.1. Les principales études empiriques portant sur le risque perçu dans l’univers des
services
4.2. L’étude de Laroche et al. (2003), étudiant le lien entre intangibilité et risque perçu
81
83
Conclusion du chapitre 3
86
Chapitre 4 : Les variables d’influence mobilisées dans cette recherche
87
Introduction
87
1. Les variables segmentation
88
1.1. Le degré de connaissance du service ou de la marque
1.2. L’expérience client : le degré d’utilisation du service ou de la marque
2. La marque de service : le service non marqué versus le service marqué
2.1. Qu’est-ce qu’une marque ?
2.2. La marque de service et son impact possible sur le processus de tangibilisation des
services
2.2.1. La force d’une marque dans une perspective de tangibilisation
2.3. Conclusion relative à la marque forte dans une perspective de tangibilisation
3. Les variables de classification
89
93
95
97
99
101
108
108
3.1. Comprendre la nature de l’acte de service
3.2. Niveau de contact et niveau d’équipement
3.3. Le mode de délivrance du service
Conclusion du chapitre 4
109
111
112
113
III
PARTIE 2 : PHASE EXPLORATOIRE ET MODELISATION
115
Chapitre 5 : Premières études exploratoires en vue de proposer une conceptualisation et
une opérationalisation du concept d’intangibilité
117
1. Evaluation des travaux existants relatifs à la mesure de l’intangibilité
117
2. Développement d’une échelle de mesure du degré d’intangibilité
121
2.1. La spécification du concept à opérationaliser
2.1.1.
2.1.2.
2.1.3.
2.1.4.
Intangibilité et intangible : spécificités linguistiques
Entretiens exploratoires auprès de managers d’activités de services
Entretiens exploratoires auprès de clients
Prise de position conceptuelle
2.2. La génération d’items en vue de la rédaction du questionnaire
2.3. Administration de l’échelle sous forme d’une première enquête
2.4. Purification de l’échelle sur la base des résultats obtenus
2.5. Administration de l’échelle purifiée lors d’une seconde enquête
2.6. L’analyse des résultats de l’échelle purifiée
2.7. Analyse factorielle confirmatoire à l’aide des méthodes d’équations structurelles
2.8. Mesure de fiabilité et de validité de l’échelle
2.9. La supériorité du modèle bidimensionnel
122
123
124
125
126
129
130
131
133
134
134
137
138
Conclusion du chapitre 5
139
Chapitre 6 : Nouvelle étude exploratoire en vue de prétester la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu global, de même que les variables de connaissance et
d’utilisation
141
1. Analyse critique de l’étude de Laroche et al. (2003)
141
2. Le design de l’étude exploratoire
142
2.1. Le choix des instruments de mesure
143
3. Présentation des résultats de l’étude exploratoire
3.1. Validation du modèle de mesure du degré d’intangibilité d’une offre de services
3.1.1. Les analyses factorielles exploratoires
3.1.2. L’analyse factorielle confirmatoire
3.1.3. Fiabilité et validité de l’instrument de mesure
3.2. Analyse de la relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
3.3. Analyse de la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu
global
IV
151
151
151
152
153
154
157
3.4. Impact de la connaissance sur la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité
et le risque perçu global
160
3.5. L’impact de l’utilisation sur la relation entre l’intangibilité (physique et mentale) et le
risque perçu global
162
3.6. Impact de la connaissance sur chaque concept considéré isolément (intangibilité
physique et mentale et risque perçu global)
163
3.7. Impact de l’utilisation sur chaque concept considéré isolément (intangibilité physique
et mentale et risque perçu global)
166
3.8. Impact de la marque sur le processus de tangibilisation physique et mentale
168
Conclusion du chapitre 6
169
PARTIE 3 : PHASE CONCLUSIVE
175
Chapitre 7 : Design de l’étude finale
177
1.
2.
3.
4.
5.
177
183
186
187
189
Choix des instruments de mesure pour le questionnaire final
Choix des services et des marques
La méthode d’échantillonnage
La collecte des données
L’organisation des retours, la procédure d’encodage et la validation des quotas
Conclusion du chapitre 7
191
Chapitre 8 : Test du modèle bidimensionnel de l’intangibilité
193
1.
2.
3.
4.
Analyse factorielle exploratoire sous SPSS
Analyse factorielle confirmatoire sous Lisrel
Nouvelles analyses factorielles exploratoires sous SPSS
Nouvelles analyses factorielles confirmatoires sous Lisrel
195
195
196
200
4.1. Le groupe « niveau d’éducation faible »
4.2. Le groupe « niveau d’éducation « moyen à élevé »
200
201
Conclusion du chapitre 8
203
Chapitre 9 : Résultats pour le groupe « niveau d’éducation faible »
205
1. Analyse de la relation entre l’intangibilité et le risque perçu
2. L’impact du degré de connaissance sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu
3. L’impact du degré d’utilisation sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu
206
209
211
Conclusion du chapitre 9
213
V
Chapitre 10 : Résultats pour le groupe « niveau d’éducation moyen à élevé »
215
1. Test du corps d’hypothèses principales de recherche
1.1. Nouvelle validation du modèle bidimensionnel de l’intangibilité
1.2. Analyse de la relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
1.3. Analyse de la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu
global
2. Test du premier corps d’hypothèses complémentaires : l’impact de la connaissance et de
l’utilisation sur la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu
218
218
220
223
225
2.1. Impact de la connaissance sur la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité
et le risque perçu global
225
2.2. Impact de l’utilisation sur la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le
risque perçu global
227
3. Test du deuxième corps d’hypothèses complémentaires : l’impact de la connaissance et de
l’utilisation sur les deux dimensions de l’intangibilité et sur le risque perçu considérés
isolément
229
3.1. Impact de la connaissance sur l’intangibilité physique et mentale
3.2. Impact de la connaissance sur le risque perçu
3.3. Impact de l’utilisation sur l’intangibilité physique et mentale
3.4. Impact de l’utilisation sur le risque perçu global
229
231
235
236
4. Test du troisième corps d’hypothèses complémentaires : l’impact de la marque de service
sur les deux dimensions de l’intangibilité et sur le risque perçu
237
Conclusion du chapitre 10
240
Chapitre 11 : Résultats complémentaires
243
1. Les continuums d’intangibilité
243
1.1.Le continuum d’intangibilité pour les personnes de faible niveau d’éducation
1.2.Les continuums d’intangibilité pour les personnes de niveau d’éducation moyen à
élevé
243
245
2. La nature du risque perçu à l’égard d’un service ou d’une marque
249
3. La marque de service et l’image de marque : résultats complémentaires
255
Conclusion du chapitre 11
258
VI
PARTIE IV : DISCUSSION, RECOMMANDATIONS, LIMITES, VOIES DE
RECHERCHE FUTURES ET CONCLUSION
259
Tableau synoptique des hypothèses de recherche
259
Chapitre 12 : Discussion des résultats et implications managériales de la recherche
261
1.
261
La perception d’intangibilité par les individus
1.1. Discussion des résultats relatifs aux personnes de faible niveau d’éducation
261
1.2. Discussion des résultats relatifs aux personnes de niveau d’éducation moyen à élevé 268
2 La mesure du risque perçu
3. La relation entre l’intangibilité et le risque perçu
4. Implications managériales de cette recherche
271
272
274
4.1. Segmentation et qualification des cibles marketing
4.2. Choix du positionnement marketing et du nom de marque, et impact sur la gestion de
la marque de service
4.3. Impact sur le marketing interne
4.4. Simplification des offres et des programmes marketing
4.5. Nouvelles pistes en matière de tangibilisation des services
274
275
278
279
281
4.5.1. Améliorer la connaissance et stimuler l’utilisation comme levier de
tangibilisation
4.5.2. Accroître la visibilité du service et de sa valeur ajoutée
4.5.3. Améliorer la compréhension du mécanisme de l’offre et de son processus
281
283
285
Conclusion du chapitre 12
286
Chapitre 13 : Limites et voies de recherches futures
289
1.
2.
3.
4.
289
293
294
294
Les personnes de faible niveau d’éducation
Apport limité pour la discussion sur le paradigme fondateur du marketing des services
Analyse complémentaire sur la marque et l’image de marque
Autres voies de recherches futures
Conclusion générale
297
Bibliographe
301
VII
Annexes
317
Annexe 1 : Logos de sociétés de services
318
Annexe 2 : Liste des 17 items générés
319
Annexe 3 : Questionnaire de la première étude exploratoire (version 1A)
321
Annexe 4 : Questionnaire de la seconde étude exploratoire (échelle purifiée)
326
Annexe 5 : Questionnaire de la troisième étude exploratoire visant à prétester la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu.
329
Annexe 6 : Questionnaire de l’étude finale (version 1A)
334
Annexe 7 : Séquence d’apparition des services et des marques dans les différentes versions de
questionnaires
342
VIII
INTRODUCTION
Avant la fin des années 70, les techniques de marketing étaient utilisées de manière
indifférenciée pour les services et pour les produits1, et avaient été largement développées
pour leur application aux produits. A cette époque, les managers actifs dans le secteur des
services faisaient d’ailleurs assez peu usage du marketing dans la gestion de leurs activités
(Shostack, 1977). La pensée communément admise par la communauté marketing d’alors
était que, si les managers d’activités de services utilisaient peu le marketing, c’est parce qu’ils
n’en percevaient pas une utilité directe.
Néanmoins, vers la fin des années 70 et le début des années 80, des voix s’élèvent pour
dénoncer l’inadéquation partielle des techniques et outils marketing aux spécificités des
services. Ces pionniers dans une discipline qui deviendra le marketing des services bousculent
les idées reçues : si les managers d’activités de services utilisent peu le marketing, ce n’est
pas par absence d’intérêt, mais plutôt parce que les outils marketing ne sont pas adaptés aux
spécificités des services, et, dès lors, ils manquent d’efficacité (Shostack, 1977). Ils plaident
donc en faveur d’outils et de techniques spécifiques, pour tenir compte des particularités des
services par rapport aux produits.
Parmi les caractéristiques qui distinguent les services des produits, l’intangibilité est
traditionnellement reconnue par un grand nombre d’auteurs comme étant la plus importante,
et la seule qui soit commune à tous les services, à des degrés divers. Certains vont même
jusqu’à suggérer que toutes les autres différences entre produits et services résultent de
l’intangibilité des services (Bateson, 1979 ; Zeithaml et al., 1985 ; Hoffman, 2000). Même si
cette affirmation est peut-être excessive, tant les managers d’activités de services que les
académiques actifs dans la discipline s’accordent à dire que l’intangibilité est un concept
central en marketing des services, et qu’il est un des éléments à la base de cette nécessité
d’adapter les techniques et les outils marketing pour une plus grande efficacité dans les
services.
1
Dans le cadre ce cette recherche, le vocable « produit » est utilisé dans le sens de « bien matériel » (good en
anglais), pour le contraster avec la notion de service. Nous sommes conscients que cette utilisation du mot
« produit » est réductrice, puisqu’au sens large, un produit est une entité à commercialiser, et englobe donc à la
fois la notion de bien matériel et celle de service. Toutefois, par souci de clarté et afin de ne pas alourdir
inutilement le texte, nous utiliserons donc le mot « produit » dans ce sens strict.
1
Au vu de cette place importante que l’intangibilité occupe dans le marketing des services,
nous nous attendons à une conceptualisation claire et communément admise de ce concept.
Certes, le concept a été largement étudié. Il a fait l’objet d’un nombre important de
publications. Ses conséquences pour les clients et pour les prestataires de services ont été
analysées. Le concept figure en général dans les premières pages des ouvrages traitant du
marketing des services. Il faut pourtant constater l’absence de consensus autour de
l’intangibilité. Concept apparemment simple, il s’avère complexe lorsqu’on l’analyse en
détail. Des divergences de vue fondamentales existent à son encontre, puisqu’elle portent sur
la nature même du concept, sur son contenu. En outre, en comparaison du volume de
publications abordant de près ou de loin le concept d’intangibilité, un nombre très faible de
travaux ont cherché à l’opérationaliser, à le mesurer de manière fiable et valide. Dès lors, les
propositions à l’égard de l’intangibilité et de ses conséquences possibles sur le comportement
du consommateur, par exemple, se limitent souvent à des énoncés théoriques. Nous pouvons
ainsi lire que l’intangibilité occasionne une plus grande difficulté pour les clients à évaluer le
service avant achat (p.ex. Berry, 1980 ; Zeithaml, 1981 ; Rushton et Carson, 1989), ou que
l’intangibilité est la cause première d’un risque perçu accru pour les services par rapport aux
produits (p.ex. Flipo, 1988 ; Murray et Schlacter, 1990). Mais ces propositions ont fait l’objet
de peu de validation empirique, et elles restent souvent des affirmations théoriques peu
précises et trop générales. Les possibilités de recherche autour de l’intangibilité sont donc
réelles et nombreuses, et ce concept représente le cœur de notre travail.
2
1. PROBLÉMATIQUE
ET OBJECTIFS DE LA RECHERCHE, ET CONTRIBUTIONS ATTENDUES
Cette recherche vise essentiellement à poursuivre trois grands objectifs, auxquels sont
associées des contributions attendues, tant théoriques que managériales.
1.1. Premier objectif : comprendre le concept d’intangibilité, et en proposer un outil de
mesure fiable et valide.
Comme nous le soulignions ci-avant, malgré le caractère central du concept d’intangibilité
perçue d’une offre de services en marketing des services, il n’y a à ce jour pas de consensus
sur le sens à lui donner. Un premier objectif de cette recherche vise donc à mieux
comprendre le concept d’intangibilité, en vue d’en proposer une définition robuste, qui
soit cohérente avec les propositions issues de la littérature, et qui soit jugée pertinente
par les praticiens actifs dans des activités de services.
Une fois le concept défini, nous allons nous efforcer de l’opérationaliser, en vue de pouvoir
mesurer, à l’aide d’un instrument de mesure fiable et valide, le degré d’intangibilité
perçue d’une offre globale de services. Un examen critique de la littérature existante nous
amène à conclure qu’il est nécessaire de développer une nouvelle échelle de mesure,
applicable tant au niveau des services que des marques de services. Une procédure de
construction d’échelle de mesure est donc mise en place. Outre la mesure du degré
d’intangibilité perçue à proprement parler, une discussion est menée sur la dimensionnalité du
concept, puisque selon les auteurs, l’intangibilité est un concept uni-dimensionnel, bidimensionnel ou tri-dimensionnel.
Les contributions de cette première phase de nos travaux sont multiples. Sur un plan
théorique, nous souhaitons accroître la compréhension du concept d’intangibilité dans le cadre
d’une recherche francophone. Le concept d’intangibilité a été majoritairement étudié à ce jour
dans un contexte anglophone. Or, comme nous allons le voir par la suite, la langue joue un
rôle important dans cette thématique. Cette recherche apporte aussi une proposition robuste au
niveau de la dimensionnalité du concept d’intangibilité. De plus, nous voulons enrichir la
littérature d’un instrument de mesure fiable et valide, ce qui n’est pas le cas actuellement. Les
deux instruments de mesure identifiés et disponibles actuellement sont en effet soit incomplet
3
pour le premier, soit souffrant d’un problème de validité de contenu et de validité convergente
pour le second. Si notre nouvel instrument de mesure est en soi une contribution théorique,
c’est surtout son utilisation qui va permettre de contribuer plus largement à une meilleure
connaissance, notamment, de l’impact de l’intangibilité sur d’autres variables du
comportement de consommation.
Sur un plan managérial, une meilleure compréhension du concept d’intangibilité est
susceptible d’aider les praticiens actifs dans les services à affiner leur stratégie marketing, en
vue d’une plus grande efficacité. En outre, la mesure du degré d’intangibilité perçue d’une
offre de services peut intéresser les managers de services, pour positionner leurs services et/ou
leurs marques tant par rapport à la catégorie de services que par rapport aux services et aux
marques concurrentes. En effet, même si, intuitivement, il est possible d’évaluer le niveau
d’intangibilité de son offre, il est néanmoins impossible, sans outil de mesure, de se comparer
à la catégorie ou aux concurrents. Or, comme nous allons en discuter dans ce document, la
tangibilisation de l’offre de services constitue un levier réel de compétitivité pour les
entreprises de services.
1.2. Deuxième objectif : tester la relation entre l’intangibilité perçue et le risque perçu
par le client
L’intangibilité des services occasionne des conséquences parfois dommageables pour les
clients ou les prospects. Parmi ces conséquences, le risque perçu accru va retenir plus
particulièrement notre attention, pour plusieurs raisons. Tout d’abord, le risque perçu est un
concept important en comportement du consommateur, car il est souvent présenté comme une
variable prédictive du comportement des clients, ceux-ci cherchant plus généralement à
minimiser le risque qu’à maximiser l’utilité liée à l’achat ou l’utilisation d’un service (citons
p.ex. Taylor, 1974 ; Mitchell, 1999). Parce que le risque perçu affecte le processus de décision
des clients, les entreprises se doivent de comprendre ce qui est susceptible de l’influencer,
pour le réduire au maximum dans la perception des clients et des prospects. Or, tous les
auteurs s’accordent à dire que les services sont perçus comme étant plus risqués que les
produits, la raison essentielle étant la relative intangibilité d’une offre de services. Mieux
comprendre le lien entre l’intangibilité et le risque perçu est donc intéressant, notamment pour
mettre en place des stratégies de tangibilisation efficaces, qui permettent par extension
d’influencer de façon opportune le niveau de risque perçu.
4
Ce lien entre l’intangibilité et le risque perçu a été peu étudié à ce jour, et constitue le plus
souvent un énoncé théorique souvent flou ou trop généraliste. Le second objectif principal
de cette recherche vise donc à analyser la relation pouvant exister entre l’intangibilité
perçue d’une offre de services, et le risque perçu lié à son achat et/ou son utilisation.
Les contributions théoriques liées à ce deuxième objectif visent dès lors à améliorer la
compréhension de la nature et de l’intensité de l’influence de l’intangibilité sur le risque
perçu. Au niveau managérial, cette recherche devrait aussi permettre de mieux comprendre
comment mettre en place des stratégies de tangibilisation et de réduction de risque efficaces,
et adaptées aux services ou aux marques que le manager doit gérer.
1.3. Troisième objectif : identifier et tester les variables pouvant potentiellement
influencer le degré d’intangibilité perçue et sa relation avec le risque perçu
La littérature sur le marketing des services, de même que la littérature sur le risque perçu,
suggèrent l’existence de variables pouvant influencer le degré d’intangibilité perçue et sa
relation avec le risque perçu. Le troisième objectif de cette recherche vise donc d’une part
à identifier les variables d’influence les plus importantes, et d’autre part à en tester
l’impact effectif.
Au terme d’une revue de la littérature, trois variables d’influence vont plus particulièrement
retenir notre attention : il s’agit du processus de marquage des services, du niveau de
connaissance et du niveau d’utilisation des services ou des marques.
La marque est largement présentée dans la littérature comme un levier possible de
tangibilisation des services. Nous n’avons toutefois pas identifié de travaux validant
empiriquement cette proposition. De même, l’affirmation selon laquelle la marque réduit le
risque perçu est présente dans de nombreux travaux. Dans le cadre de cette recherche, nous
allons tout d’abord nous interroger sur les caractéristiques qu’une marque devrait rencontrer
pour jouer ce rôle de tangibilisation ou de réducteur de risque perçu. Toutes les marques sontelles susceptibles d’exercer une telle influence, ou seulement certaines d’entre elles, qu’il faut
alors caractériser. De plus, nous allons formellement tester l’impact de la marque sur son
possible rôle de tangibilisation et de réducteur de risque.
5
Deux autres variables, distinctes mais liées entre elles, vont retenir notre attention : il s’agit du
niveau de connaissance à l’égard du service ou de la marque, et de son degré d’utilisation.
Nous allons empiriquement tester l’impact de ces deux variables sur l’intangibilité perçue, sur
le risque perçu et sur la relation entre ces concepts.
Les contributions relatives à ce troisième objectif sont nombreuses. De manière générale, il
s’agit de mieux comprendre comment l’intangibilité perçue et sa relation avec le risque sont
affectées par de possibles variables d’influence. Plus spécifiquement, il s’agit de valider si la
marque peut bel et bien constituer un levier de tangibilisation d’une offre de services. Le cas
échéant, quelles seraient les caractéristiques que cette marque devrait idéalement rencontrer
pour maximiser son effet « tangibilisateur ». Cette problématique de la marque comme levier
de tangibilisation est susceptible d’intéresser les managers d’activités de services, pour qui la
marque semble devenir un enjeu de plus en plus important. De plus, si la connaissance et
l’utilisation exercent un impact significatif sur nos variables d’intérêt, elles pourraient
constituer de nouvelles variables de segmentation, susceptibles d’affiner un peu plus encore la
compréhension des clients et de leur diversité, en vue de mieux répondre à leurs besoins et de
mieux adapter encore à ces spécificités le mix marketing et communicationnel, de même que
les stratégies commerciales.
6
2. PLAN DE LA THÈSE
Le plan de la thèse se compose, classiquement, de quatre parties complémentaires :
•
La première partie dresse le cadre conceptuel, et vise à présenter les concepts clés
mobilisés par cette recherche, ainsi que les relations possibles pouvant exister entre
eux. Elle se base sur une revue de la littérature.
•
Le deuxième partie de cette recherche est consacrée à la spécification du corps
d’hypothèses à tester. Une discussion critique de la littérature est ainsi menée. La
méthodologie suivie est décrite à travers plusieurs études exploratoires, qui sont mises
en place pour mieux appréhender certains concepts, pour développer une première
proposition d’échelle de mesure du degré d’intangibilité perçue d’une offre de
services, et pour prétester les relations possibles entre certains des concepts mobilisés
dans la recherche. Cette deuxième partie se conclut par la présentation du modèle de
recherche final à tester, et des hypothèses de recherche à tester.
•
La troisième partie consiste en la phase conclusive. Elle vise à mettre à l’épreuve le
modèle proposé en vue de tester les hypothèses de recherche posées. Cette partie
consiste essentiellement en la présentation de l’étude empirique finale et de sa
méthodologie, de même que des résultats de cette étude.
•
La quatrième et dernière partie est consacrée à la discussion des résultats, aux
implications et aux contributions de la recherche, de même qu’à ses limites et aux
voies de recherche futures. Elle se termine par la conclusion générale.
7
Schématiquement, la structure de notre thèse se présente donc comme suit :
PARTIE 1 : LE CADRE CONCEPTUEL
Chapitre 1 :
Comprendre le
secteur des services
Chapitre 2 :
Le concept
d’intangibilité d’une
offre globale de
services
Chapitre 3 :
Le concept de risque
perçu et son lien
avec l’intangibilité
Chapitre 4 :
Les variables
d’influence
mobilisées dans
cette recherche
PARTIE 2 : PHASE EXPLORATOIRE ET MODELISATION
Chapitre 5 :
Premières études exploratoires en vue de
proposer une conceptualisation et une
opérationalisation du concept d’intangibilité
Chapitre 6 :
Nouvelle étude exploratoire en vue de
prétester la relation entre l’intangibilité et le
risque perçu global, de même que les
variables de connaissance et d’utilisation
PARTIE 3 : PHASE CONCLUSIVE
Chapitre 7 :
Design de l’étude finale
Chapitre 9 :
Résultats pour le groupe
« niveau d’éducation faible »
Chapitre 8 :
Test du modèle bidimensionnel de
l’intangibilité
Chapitre 10 :
Résultats pour le groupe
« niveau d’éducation moyen
à élevé »
Chapitre 11 :
Résultats complémentaires
PARTIE 4 : CONCLUSIONS, RECOMMANDATIONS ET LIMITES
Chapitre 12 :
Discussion des résultats et implications
managériales de la recherche
Chapitre 13 :
Limites et voies de recherches futures
Conclusion générale
8
PARTIE 1 : LE CADRE CONCEPTUEL
INTRODUCTION
La première partie de cette thèse vise à présenter l’ensemble des concept mobilisés dans cette
recherche.
Le premier chapitre a pour objectif de mieux comprendre le vaste secteur des services, de
même que les principaux enjeux soulevés par la gestion marketing des services. L’évolution
du marketing des services est brièvement retracée, et le concept de service est présenté et
discuté.
Le deuxième chapitre vise à présenter le concept central de la thèse, à savoir l’intangibilité
perçue d’une offre globale de services. Une revue de la littérature permet d’appréhender et de
comprendre la teneur du débat autour du concept d’intangibilité, et d’en évaluer les points de
convergence et de divergence. Les travaux sur l’analyse de la dimensionnalité du concept
d’intangibilité et sur son opérationalisation sont ensuite présentés. Finalement, nous
expliquons pourquoi la pensée communément admise propose que les services doivent être
tangibilisés, en évaluant les conséquences de l’intangibilité, tant pour les clients que pour les
prestataires de services. En outre, nous détaillons les techniques de tangibilisation
actuellement proposées par la littérature.
Le troisième chapitre a pour objectif d’étudier le concept de risque perçu en marketing, et
son lien avec le concept d’intangibilité. De manière classique, le risque perçu est défini, et les
travaux relatifs à sa mesure sont exposés. Nous présentons ensuite les principales études
portant sur le risque perçu dans un contexte de services, et plus spécifiquement, nous
analysons en détail la seule étude empirique menée récemment, visant à évaluer l’impact de
l’intangibilité sur le risque perçu.
Finalement, le quatrième chapitre vise à présenter les variables d’influence susceptibles
d’affecter tant le degré d’intangibilité perçue que la relation entre intangibilité et risque perçu.
Nous distinguons les variables de fragmentation, propres à l’offre, et les variables de
9
segmentation, propres à la demande. Parmi les variables de fragmentation, nous discutons des
variables de classification des services, ainsi que de la marque comme levier possible de
tangibilisation des services. Au niveau des variables de segmentation, nous présentons les
variables de connaissance et d’utilisation du service ou de la marque.
10
CHAPITRE 1 : COMPRENDRE LE SECTEUR DES SERVICES
1. L’IMPORTANCE DU SECTEUR DES SERVICES
Chaque jour, nous entrons en contact avec le secteur des services : en allant à la banque, en
faisant des courses au supermarché, en prenant le bus, ou en nous rendant chez le coiffeur.
Les services sont partout, et sans cesse ils gagnent en importance. Si aujourd’hui cette
importance est largement reconnue tant par le monde politique qu’économique, il n’en a pas
toujours été ainsi.
1.1. La perception des services au 18ème siècle
Sans faire une analyse historique des activités de services, il est intéressant de noter qu’au
18ème siècle, les services étaient fort mal considérés. Ainsi, les physiocrates définissent vers
1750 la notion de service comme étant « toute activité autre que la production agricole » (voir
Walters et Bergiel, 1982). Ces penseurs du dix-huitième siècle, ralliés aux doctrines de
Quesnay, sont généralement considérés par les économistes comme les premiers à avoir
systématisé l’étude de l’économie. Dans leurs travaux, ils proposent que seule l’agriculture
constitue une activité productive, et que toute autre activité - donc les services au vu de leur
définition - est stérile. Adam Smith définit, peu de temps après, le service comme étant
« toute activité qui ne conduit pas à un produit tangible » (voir Walters et Bergiel, 1982). Pour
la première fois, le service est défini en s’appuyant sur la notion de tangibilité. Il fait en outre
une distinction très claire entre les activités productives, et les activités improductives. Pour
ce faire, il s’appuie sur le critère de tangibilité et de durabilité de ce qui est produit au terme
de l’activité. Il en conclut que les services sont des activités improductives, car conduisant à
un résultat intangible et éphémère, puisque existant uniquement au moment de la prestation
du service.
Il faut croire que les vieux préjugés ont la vie longue, car, en 1987, dans un ouvrage
désormais devenu célèbre en matière de marketing des services, Eiglier et Langeard tiennent
les propos suivants dans leur introduction : « … nous vivons encore sur une culture d’un
siècle et demi d’industrialisme triomphant, où la production de richesses ne peut être que le
fait de la production de biens matériels. Seule la production d’objets et de machines est
11
noble, et aux yeux de la société, les entreprises de services, publiques ou privées, sont
considérées comme improductives, parasites, à la limite du mal dont on sait qu’il est
nécessaire. Cette culture se traduit dans nos valeurs et notre système éducatif, qui donnent
toujours une primauté incontestée à l’ingénieur, celui qui maîtrise la production. Or il est en
train de se passer avec le secteur secondaire, c’est-à-dire avec l’industrie, ce que nous avons
vu avec l’agriculture dans les trente dernières années : une croissance ininterrompue de la
production, en valeur absolue, une croissance de la productivité, et un fort reflux de l’emploi.
Il va donc falloir s’habituer à considérer qu’une chaîne d’hôtels est aussi noble et productive
de richesses pour la société qu’une aciérie ou un constructeur automobile ». Il est donc
intéressant de se demander comment les mentalités ont évolué jusqu’à ce jour.
1.2. La situation actuelle
En Belgique, les services représentent aujourd’hui plus de 70% de l'
emploi et du Produit
National Brut. A Bruxelles, capitale de la Belgique et de l’Europe, 90% des acteurs
économiques sont actifs dans des activités de services, contre 72% pour la moyenne nationale
belge (Trends, 8 juillet 2004). Une enquête belge récente, commandée par un poids lourd du
secteur de l’intérim, conclut que les employeurs retrouvent confiance et se préparent à
recruter dans la quasi-totalité des secteurs. Mais les perspectives sont plus favorables dans les
services et les activités financières, ainsi que dans l'
Horeca pour raisons saisonnières, alors
que l'
industrie manufacturière et la construction restent relativement prudentes (Trends, 1
juillet 2004). En outre, en Belgique, la part des services dans la valeur ajoutée à prix courants
a progressé de plus de 10% en dix ans, arrivant à 73% en 2000, au détriment du poids relatif
de l’agriculture (-1,2%) et surtout de l’industrie (-7,5% dans l’industrie manufacturière, et –
2,5% dans la construction) (Rapport du Conseil Supérieur belge de l’emploi, 2000).
Sur un plan politique, il semble y avoir une prise de conscience de l’importance du secteur
des services dans sa capacité à créer de la valeur et de l’emploi. Ainsi, en 1999, les instances
européennes adressaient à la Belgique et à d’autres Etats membres de l’Union les
encouragements « à adopter et à mettre en œuvre des stratégies cohérentes, incluant des
mesures réglementaires, fiscales, et des mécanismes de promotion de l’emploi, permettant de
mieux exploiter le potentiel d’emploi dans le secteur tertiaire » (Rapport du Conseil Supérieur
belge de l’emploi, 2000).
12
Plus généralement, et selon les indicateurs utilisés (PNB, PIB, emploi, productivité, …), le
secteur des services compte pour 65 à 80% de l’économie des pays dits industrialisés
(Iacobucci, 1998). L’OCDE parle de tertiairisation de l’économie dans la plupart des pays
membres. Dans la majorité de ces pays, le développement de l’économie de services s’est
appuyé au cours des quinze dernières années sur l’accroissement de la part des services aux
producteurs, ainsi que sur celle des services sociaux et des services aux particuliers. Dans les
pays en développement, l'
importance du secteur des services s'
accroît également. C'
est ainsi,
par exemple, que l'
État indien de l'
Andhra Pradesh (Sud-est de l’Inde, Golfe du Bengale) est
devenu l'
un des centres mondiaux des services informatisés (La Libre Belgique, 24 février
2003).
Par ailleurs, à côté du développement du secteur des services proprement dits, on assiste à une
tertiairisation croissante des secteurs primaire (agriculture) et surtout secondaire (industries).
Certaines études ont ainsi conclu que les entreprises manufacturières génèrent jusqu’à 75% de
leur valeur ajoutée à travers leurs activités de services (Nollet et Farmer, 1992). Ainsi, bien
que la société d’ascenseurs Kone soit classifiée comme une entreprise manufacturière, plus de
la moitié de ses revenus et de ses profits proviennent de ses activités de réparation, de
maintenance et de modernisation des installations, c’est-à-dire de ses activités de services
(Grönroos, 2000). Les entreprises industrielles ont ainsi compris que les services constituent
pour elles un levier essentiel de compétitivité, et une source d’avantage concurrentiel et de
création de valeur importante. La saturation et les phénomènes de mondialisation d’un
nombre croissant de marchés réduisent en effet considérablement les différences entre
produits, la valeur ajoutée de l’offre résidant alors essentiellement dans les services offerts
autour du produit (Furrer, 1999). Au vu de ces tendances, certains vont jusqu’à parler de la
« servicisation » de l’industrie (Vandermerwe et Rada, 1988 ; Kostecki, 1994).
2. LA DIVERSITE DU SECTEUR DES SERVICES
Le secteur des services peut se caractériser par sa très grande diversité (Lovelock, Wirtz et
Lapert, 2004), et il regroupe des activités multiples et hétérogènes. Les entreprises de services
peuvent ainsi être de grosses sociétés internationales, dans des secteurs aussi variés que la
banque, l’assurance, le transport aérien, les télécommunications, etc. A l’inverse, un grand
nombre de services sont délivrés localement par de petites sociétés, des professions libérales
13
ou des indépendants. Nous pensons par exemple aux médecins, aux coiffeurs, aux taxis, aux
stations de radio locales, aux restaurants, aux garagistes, … Les services ne sont pas confinés
au seul secteur privé. Le secteur public ou semi-public, de même que le secteur nonmarchand, est en effet pourvoyeur d’un très grand nombre de services : l’administration au
sens large, les soins de santé, la culture (musée, théâtre, …), l’enseignement ou encore le
transport public, pour ne citer qu’eux. Les services peuvent s’adresser directement aux clients
finaux, mais aussi aux entreprises : les comptables, les juristes d’entreprise, les publicitaires,
les consultants, les sociétés de nettoyage de bureaux, ou les sociétés de gardiennage ne sont
que quelques exemples de prestataires de services dits business to business.
Nous le voyons, le secteur des services est très large, ce qui contribue à le rendre extrêmement
riche et passionnant comme terrain d’investigation, mais également terriblement complexe,
une difficulté essentielle résidant dans la possibilité de généralisation de recommandations ou
de résultats d’études.
3. L’EMERGENCE DU MARKETING DES SERVICES
L’émergence du marketing des services en tant que paradigme spécifique du marketing
débute véritablement dans les années septante (Lovelock et Lapert, 1999), après un débat sur
sa légitimité. Certes, comme présenté ci-après, il existe des travaux antérieurs à cette période parfois extrêmement visionnaires - portant sur des activités de services. Ces analyses
constituent très probablement une source d’inspiration importante pour la discipline naissante
du marketing des services, et elles aident au développement du paradigme.
D’après Brown, Fisk et Bitner (1994), l’évolution et la légitimation du marketing des services
en tant que discipline spécifique du marketing peut se caractériser par trois périodes clés : la
naissance et la légitimation du paradigme des services (avant 1980), le décollage de la
discipline (1980-1985), et l’explosion (1986-…). Le début du second millénaire semble
toutefois marquer un nouveau tournant dans la discipline, avec un questionnement sur les
fondements paradigmatiques du marketing des services (Lovelock et Gummesson, 2004 ;
Vargo et Lusch, 2004). Observons plus en détail chacune de ces périodes clés2.
2
La présentation des trois premières périodes s’appuie sur la revue de littérature menée par Brown, Fisk et
Bitner (1994).
14
3.1. La naissance et la légitimation du paradigme des services (avant 1980)
Cette période est celle des preneurs de risques, comme le disent Brown, Fisk et Bitner (1994).
John Bateson, Leonard Berry, Pierre Eiglier, William George, Christian Grönroos, Eric
Langeard, Christopher Lovelock, ou encore Lynn Shostack contribuent durant cette période à
donner au marketing des services ses lettres de noblesse, et à le faire reconnaître comme
discipline spécifique à part entière.
Avant la fin des années 70, les techniques marketing étaient largement dominées par une
logique « produit », et aucune distinction ne semblait être faite entre le marketing des produits
et celui des services (Rust, Zahorik et Keiningham, 1996). Pourtant, dès le milieu des années
cinquante, des doctorants et de jeunes professeurs s’intéressent plus spécifiquement aux
activités de services dans une perspective marketing, et plaident pour la mise en place de
démarches d’analyse et d’outils spécifiques. Cette période marque le commencement de
publications sur le marketing des services. Une des premières publications est la thèse de
doctorat de McDowell (1953), suivie par celle de Parker en 1958. Sans plaider en faveur d’un
paradigme spécifique pour le marketing des services, Lambin (1960) propose une réflexion
sur la nature et le rôle de la fonction commerciale dans une entreprise de services. Dans cet
article, il présente de manière assez visionnaire les enjeux et les spécificités des services par
rapport aux produits. En 1963, Regan publie dans Journal of Marketing un article où il décrit
ce qu’il nomme la révolution des services, qui marque selon lui une évolution majeure de
l’économie des Etats-Unis et du comportement des consommateurs. Toujours dans Journal of
Marketing, Judd (1964) discute de la définition d’un service, et Rathmell (1966) affirme que
les gens de marketing doivent absolument accorder une plus grande importance au secteur des
services. Même si ces articles sont descriptifs, ils marquent les esprits et constituent le point
de départ de beaucoup de recherches.
En 1969, Johnson soulève la question de la différence des services par rapport aux produits, et
lance ainsi le débat sur les spécificités des services. C’est véritablement dans les années 70
que la discipline prend son essor, à travers un nombre croissant de recherches doctorales et de
publications. Un premier ouvrage dédié au marketing des services est écrit par Rathmell en
1974. Ce dernier cherche à proposer une démarche marketing cohérente pour les activités de
services, en se focalisant sur quatre secteurs particuliers: les services sportifs, les soins de
santé, les services bancaires et les services professionnels. Les premiers séminaires sur les
15
services se tiennent en France en 1975, réunissant des chercheurs européens et américains.
Des projets de recherche naissent sous l’égide du Marketing Science Institute, réunissant les
français Eiglier et Langeard, et les britanniques Lovelock et Bateson. Ces projets conduisent à
la rédaction, en 1977, d’un recueil d’articles dédiés au marketing des services3, qui va
constituer une ressource essentielle pour les jeunes chercheurs dans la discipline naissante.
Vers la fin des années 70, alors que la littérature sur le marketing des services croît, la
question fondamentale de la légitimité du marketing des services en tant que discipline
spécifique du marketing est posée. Même si peu d’attaques sont publiées dans la littérature,
les chercheurs actifs dans le marketing des services se font fréquemment critiquer
verbalement, dans les conférences ou dans certains jurys de thèse par exemple (Brown, Fisk et
Bitner, 1994). La critique est toujours la même : le marketing des services ne serait qu’un cas
particulier du marketing, une application des principes de base du marketing parmi d’autres,
et il ne constituerait en aucun cas un paradigme spécifique. En 1977, Lynn Shostack, alors
Vice-Présidente de Citibank, publie dans Journal of Marketing un article souvent présenté
comme décisif (Flipo, 1988) et provocateur. Elle adresse une question fondamentale à la
communauté académique : le marketing deviendrait-il myope en échouant à développer un
paradigme pertinent pour les activités de services ? Son expérience managériale marque les
esprits lorsqu’elle affirme qu’une application pure et simple des règles de marketing des
produits de consommation au domaine des services conduit souvent à l’échec. Ses propos
agissent comme un catalyseur sur les chercheurs actifs dans le domaine des services, et les
années 1979 et 1980 marquent enfin la reconnaissance de la pertinence du marketing des
services comme champ de recherche et d’analyse spécifique, avec des porte-paroles comme
Thomas (1978), Bateson (1979), Lovelock (1979) ou encore Berry (1980). Ces auteurs font
admettre que les services diffèrent des produits sur plusieurs caractéristiques, ce qui rend
nécessaire la mise en place de nouveaux concepts, de stratégies et d’outils spécifiques. Le
paradigme du marketing des services est ainsi posé. Lovelock rappelle néanmoins en 1981
que l’intention n’est pas de faire croire que le marketing des services est unique et totalement
différent de celui des produits, ce qui soulèverait de sérieuses questions sur la cohérence du
3
Le recueil inclut les articles suivants : « Do we need services marketing ? » (Bateson) ; « A new approach to
service Marketing » (Eiglier et Langeard) ; « A note on the commonality of problems in service management : a
field study » (Eiglier) ; « Services as systems : marketing implications » (Eiglier et Langeard) ; « Marketing’s
potential for improving productivity in services industries » (Lovelock et Young).
16
marketing comme discipline du management, mais simplement que les services - de par leurs
spécificités - méritent une démarche et des outils spécifiques.
3.2. Le décollage de la discipline (1980-1985)
Durant cette période, la littérature sur le marketing des services se dégage du débat sur sa
légitimité, et s’enrichit considérablement, avec des articles aujourd’hui encore jugés comme
fondamentaux (citons entre autres Oliver, 1980 ; Levitt, 1981 ; Zeithaml, 1981 ; Booms et
Bitner, 1981 ; Lovelock, 1983 ; Parasuraman, Zeithaml et Berry, 1985 ; Solomon, Surprenant,
Czepiel et Gutman, 1985). Plusieurs ouvrages spécifiquement dédiés au marketing des
services apparaissent également. Ils vont constituer une grande contribution, tant pour la
recherche que pour l’enseignement (Lovelock, 1984 ; Grönroos et Gummesson, 1985,
Cowell, 1984).
Un nombre croissant de recherches se penchent sur des problématiques spécifiques au
marketing des services. Lovelock (1983) propose ainsi plusieurs méthodes de classification
des services selon qu’ils partagent des caractéristiques communes, en dépassant le cadre strict
des secteurs de services. Il spécifie en outre comment ces caractéristiques sont susceptibles
d’influencer la définition des stratégies marketing. Des études empiriques cherchent
également à mieux comprendre les problèmes marketing spécifiques auxquels sont confrontés
les managers d’activités de services. Durant cette période, des courants de recherche
aujourd’hui encore centraux sont initiés, avec notamment des premiers travaux sur la qualité
de service, sur la satisfaction des clients, ou sur la gestion de la rencontre entre le client et le
prestataire.
Deux développements importants permettent d’expliquer partiellement l’engouement pour la
discipline à cette période (Brown, Fisk et Bitner, 1994). D’une part, la dérégulation d’un
grand nombre de secteurs de services aux Etats-Unis, et plus tard en Europe, qui modifie le
climat concurrentiel au sein de ces secteurs : concurrence accrue, pression sur les prix,
augmentation des exigences des clients. A cela vient s’ajouter la création de nouvelles
activités de services. Ce changement de climat accroît l’importance du marketing dans les
entreprises de services. D’autre part, cette période coïncide avec l’apparition d’un nombre
croissant de conférences dédiées au marketing des services. Outre la conférence de La Londe
les Maures, qui existe en France depuis 1975, l’American Marketing Association sponsorise
17
la tenue d’événements et la prise d’initiatives autour des activités de services. Ces conférences
et autres événements ont pour conséquence de stimuler la recherche dans le domaine des
services. Finalement, en 1980 d’abord, et en 1985 ensuite, deux journaux spécifiquement
orientés vers les services voient le jour : le Services Industries Journal et le Journal of
Professional Services Marketing.
3.3. L’explosion (1986 – …)
La période allant de 1986 à nos jours se traduit véritablement par une explosion des
recherches en matière de services. Aux travaux théoriques viennent s’adjoindre un grand
nombre de recherches empiriques. Le nombre de manuels sur le marketing des services
décolle, et les pionniers comme Lovelock, Grönroos ou Bateson proposent des éditions mises
à jour de leur ouvrage. Cette période marque aussi l’ouverture de plusieurs grands centres de
recherche en matière de management de services, tant aux Etats-Unis qu’en Europe.
Si la période de décollage a permis de définir de grandes thématiques de recherche, cette
période se traduit par un approfondissement, tant théorique qu’empirique, de ces thématiques.
La gestion de qualité ou de la satisfaction, la gestion des processus de services, la
synchronisation de la demande et de l’offre de services, la gestion de la rencontre clientprestataire - souvent appelée le moment de vérité -, la problématique de la rétention de la
clientèle et les connexions avec le marketing relationnel, … sont autant de domaines
investigés plus en profondeur. La discipline tend à s’ouvrir à d’autres fonctions du
management, en particulier la gestion des opérations et les ressources humaines. En outre, les
problématiques s’internationalisent.
3.4. L’avenir de la discipline en discussion (début du second millénaire)
La discipline du marketing des services s’est construite autour du constat que les services
diffèrent des produits sur plusieurs caractéristiques, ce qui rend nécessaire la mise en place de
stratégies et d’outils marketing spécifiques. Parmi ces caractéristiques, l’intangibilité,
l’hétérogénéité, l’inséparabilité et la périssabilité ont largement été reconnues comme les
caractéristiques différenciatrices clés des services par rapport aux produits (Lovelock et
Gummesson, 2004). Ces concepts ont largement structuré la discipline, et sont présentés
brièvement ci-dessous.
18
3.4.1. Les principales caractéristiques des services par rapport aux produits
L’intangibilité
L’intangibilité est reconnue par un grand nombre d’auteurs comme étant la caractéristique
distinctive la plus importante des produits et des services (Zeithaml, Parasuraman et Berry,
1985 ; Flipo, 1988 ; Rushton et Carson, 1989 ; Rust, Zahorik et Keiningham, 1996 ; Zeithaml
et Bitner, 2000 ; Bebko, 2000), et la seule qui soit commune à tous les services, à des degrés
divers (Flipo, 1988, McDougall et Snetsinger, 1990). Cette caractéristique constitue le
concept central de cette recherche, et sera très largement décrite et expliquée dans le
deuxième chapitre du présent document.
L’hétérogénéité (ou la variabilité)
L’hétérogénéité fait référence à la difficulté de fournir un service dont le résultat est stable et
uniforme. Cette difficulté est accrue dans le cas des services à haute densité de main-d’œuvre.
Dans un grand nombre de cas en effet, la prestation du service repose sur des facteurs
humains : le serveur au restaurant, le guichetier à la banque ou à la poste, le coiffeur, le
psychothérapeute,… Ces personnes font partie intégrante du service, et ils affectent la
perception que les clients en ont. Or, les facteurs humains sont peu contrôlables, et
contrairement à une machine, leurs comportements et leurs attitudes sont bien plus variables
en terme de qualité. L’humeur d’un cuisinier ou son état de fatigue, par exemple, sont ainsi
susceptibles d’affecter la qualité de ses préparations.
L’hétérogénéité du service peut se faire ressentir à différents niveaux : une variabilité dans le
temps d’abord. Puisque le résultat d’un service est directement lié, dans bien des cas, aux
comportements humains du personnel ou des clients eux-mêmes, la qualité peut varier d’un
moment à l’autre. Un repas dans un restaurant perçu aujourd’hui comme étant de grande
qualité peut être jugé décevant deux semaines plus tard, simplement parce que le serveur est
moins bien disposé. L’hétérogénéité du service est ainsi également liée aux personnes qui
délivrent le service. Un employé de banque peut être très performant et agréable, alors que
son collègue au guichet voisin peut être moins compétent. L’expérience de service est donc
différente selon que nous interagissons avec le premier employé ou le second. Finalement, la
variabilité du service peut se faire ressentir selon le lieu. Le problème est particulièrement
19
criant pour les enseignes de services multi-sites. Un individu peut apprécier le niveau de
qualité du service offert à l’hôtel Campanile de Paris-Bastille, ce qui crée une attente de
qualité similaire pour l’ensemble de la chaîne d’hôtels Campanile. Par la suite, il peut vivre
une expérience peu plaisante dans un autre hôtel de la chaîne, parce que cet hôtel n’est pas
géré de façon similaire, ni par les mêmes personnes que celui qui a façonné ses attentes.
L’inséparabilité
Un produit est le plus souvent produit, puis stocké, distribué dans les différents lieux de vente,
et finalement acheté par les clients. Il y a une désynchronisation dans le temps et dans
l’espace entre la production, la vente et la consommation du produit. En matière de services,
le processus est différent. Les services sont le plus souvent créés et consommés en même
temps. Lorsque l’on prend l’avion par exemple, le service de transport et l’ensemble des
services annexes sont dispensés en même temps qu’ils sont vécus par le client. En outre, la
vente précède le plus souvent la production en matière de services. Lorsqu’un client achète un
produit, ce dernier préexiste généralement par rapport à la vente, et peut donc faire l’objet
d’un examen. Pour les services, la vente se fait habituellement avant la prestation, le client
achetant un droit, une promesse de satisfaction future. Cela rend le problème de l’intangibilité
des services particulièrement aigu, et c’est de nature à influencer le risque perçu, et donc le
besoin de réassurance des clients.
Cette simultanéité entre production et consommation du service implique que les clients
participent, le plus souvent activement, au processus de production d’un service. Dans un
salon de coiffure, chez un psychologue, dans un restaurant ou chez le médecin, il ne peut pas
y avoir de service sans la participation active du client. Ce caractère « interactif » et « en
temps réel » fait que l’on décrit souvent la rencontre entre le client et le prestataire comme
étant un moment de vérité. Si les journées, pour le personnel de contact, peuvent se
ressembler, chaque expérience de client est unique, et dès lors le personnel doit sans cesse
faire ses preuves, sans relâche.
Dans certains cas, le client peut même décider de s’occuper lui-même du service, en tout ou
en partie. La personne qui se rend dans une laverie automatique pour y laver son linge décide
de prendre intégralement en charge le service de nettoyage. Le client d’un restaurant rapide
20
s’occupe lui-même d’une partie du service : il se rend au lieu de prise de commande, il décide
lui-même de la place où il s’installe, et il débarrasse sa table au terme de son repas.
Il faut également noter que les clients interagissent les uns avec les autres, et les
comportements des uns peuvent affecter l’expérience vécue par les autres. Si dans l’avion,
une personne est assise à côté d’un jeune enfant en bas âge qui pleure ou qui crie, il est
probable que son expérience du service soit moins plaisante que s’il est assis à côté d’une
personne calme qui lit un magazine.
La périssabilité
Parce que le service est un acte, une prestation, une performance essentiellement intangible, il
ne peut pas être stocké comme peut l’être un produit tangible. Lorsqu’un avion décolle avec
des sièges inoccupés, la perte de revenu liée à ce mauvais taux de remplissage est définitive et
inéluctable. La synchronisation de l’offre et de la demande de service est donc primordiale, et
nécessite une gestion efficace de la capacité de production du service, de même que des
techniques de lissage de la demande, à l’aide notamment d’incitants. Ainsi, les cinémas
pratiquent généralement un tarif réduit le lundi, pour inciter les gens sensibles aux prix à
privilégier une soirée au cinéma le lundi, jour traditionnellement creux, plutôt que le weekend, jours généralement très chargés.
Cette caractéristique fait qu’il est notamment impossible de retourner un service s’il est peu
satisfaisant. Si un individu achète une télévision, et qu’elle ne fonctionne pas de façon
satisfaisante, il peut la ramener au magasin pour l’échanger. S’il sort de chez le coiffeur avec
une coupe de cheveux ratée, il est par contre condamné à attendre que ses cheveux repoussent
pour pouvoir se faire à nouveau couper les cheveux de manière plus satisfaisante.
3.4.2. Le paradigme des services en crise ?
Plusieurs chercheurs en marketing des services – dont certains en sont les pionniers –
commencent à faire part de leur préoccupation quant aux perspectives futures de la discipline.
Pour les uns, le marketing des services a besoin d’une nouvelle énergie et de nouvelles
directions, et doit prendre du recul par rapport à des thématiques d’études particulières
comme la qualité de service (Schneider, 2000 ; Berry, 2000a dans Lovelock et Gummesson,
21
2004). Pour d’autres, le marketing des services s’est trop focalisé sur les services à haute
densité de main-d’œuvre, tant et si bien que le cadre de connaissance qui en est issu est
ébranlé par l’émergence de nouveaux formats de services sans interaction humaine (tels que
les services délivrés à travers l’Internet par exemple – Brown (2000) ou Bowen (2000) dans
Lovelock et Gummesson, 2004). Plusieurs chercheurs questionnent également l’actuel
paradigme du marketing des services, fondé sur les quatre caractéristiques différenciatrices
des services par rapport aux produits (Lovelock et Gummesson, 2004 ; Vargo et Lusch,
2004).
Ces quatre caractéristiques sont très présentes dans la littérature sur les services, et constituent
un socle sur lequel la discipline s’est construite. Néanmoins, ces caractéristiques sont avant
tout conceptuelles, et elles n’ont pas ou peu fait l’objet de travaux empiriques. Lovelock et
Gummesson (2004) et Vargo et Lusch (2004) proposent une importante discussion sur le
manque de solidité de ce socle conceptuel, et sur le caractère réellement différent de ces
quatre propriétés des services par rapport aux produits.
Lovelock et Gummesson (2004) partent du constat que le secteur des services a subi de
profonds changements ces vingt dernières années, la diffusion des technologies de support ou
de l’Internet étant un de ces changements majeurs. Sur base de ces évolutions, ils mènent une
discussion enrichie de nombreux exemples sur la solidité de cette assise conceptuelle, et
concluent que ces caractéristiques sont certes applicables à certains types de services, mais
que de nombreux contre-exemples existent :
•
Le remplacement du facteur humain par la technologie, de même que la mise en œuvre de
procédures strictes de contrôle de la qualité des services dans de nombreux secteurs,
réduisent de manière importante la variabilité du résultat du service. Un distributeur de
billets de banque, par exemple, réduit la variabilité du service au strict minimum : soit
l’appareil fonctionne, et il délivre le service de distribution des billets de manière
homogène, soit il est hors service, et il est dès lors incapable de jouer son rôle.
•
Si certains services sont caractérisés par un haut degré d’intangibilité, d’autres produisent
des résultats très tangibles : lorsque nous allons chez le coiffeur, par exemple, nous
pouvons voir et toucher le résultat de la coupe de cheveux. Lorsque nous faisons tondre
notre pelouse, le résultat semble lui aussi très tangible.
22
•
Si la caractéristique d’inséparabilité est associée aux services, il faut constater qu’il existe
un grand nombre de services séparables, qui n’impliquent pas directement le client dans le
processus de production, et pour lesquels la production est désynchronisée de la
consommation. Lorsqu’un individu fait nettoyer sa maison par un technicien de surface
quand il est au bureau, il ne participe pas à la production du service, et il profite de ses
bénéfices quand il rentre chez lui le soir. La jouissance du résultat du service est donc
différée par rapport à sa production. Plus généralement, les services de nettoyage à sec, de
livraison de courrier, de transport de marchandises ou de réparation de la voiture ne sont
que quelques exemples de services produits généralement en l’absence du client.
Si ces quatre caractéristiques ne sont pas universellement applicables aux services, il faut
également constater que, dans certains cas, elles s’appliquent à certains types de produits.
L’intangibilité des services, par exemple, est d’après Laroche, Bergeron et Goutaland (2001)
un concept multidimensionnel, dont les différentes dimensions ne permettent pas toutes de
discriminer les services des produits4. En termes d’hétérogénéité de la qualité de la production
dans le temps, le secteur manufacturier semble être confronté à une réelle difficulté de
maintenir constants ses standards de qualité. Il suffit de constater le nombre de produits
alimentaires qui sont sortis des rayons des grands magasins et rappelés par les producteurs,
parce que des problèmes de qualité sont constatés. De même, certains produits sont par nature
variables dans le temps : le vin en est un exemple : pour un même « Château », il existe de
bonnes et de moins bonnes années. La stabilité du résultat de la production de vin n’est pas
constante dans le temps, même si le processus de vinification est identique d’année en année.
La variabilité du résultat d’un processus de production n’est donc pas propre aux services. Au
niveau de la périssabilité des services, c’est-à-dire de leur incapacité à être stockés, le
véritable problème est celui de la gestion des capacités de production du service. Ce problème
est tout aussi criant pour un grand nombre de producteurs manufacturiers, notamment dans le
cadre de denrées périssables ou de produits très saisonniers. Un producteur de foie gras, par
exemple, est confronté a de grandes difficultés de gestion de ses capacités de production,
puisqu’une part significative de sa demande est concentrée sur les périodes de fin d’années.
4
Les travaux de Laroche, Bergeron et Goutaland (2001) sont largement présentés et discutés dans la suite de ce
document.
23
Toutes ces considérations ébranlent le paradigme des services, et soulèvent une question
fondamentale : le marketing des services serait-il en crise ? Sa légitimité en tant que champ
d’étude spécifique doit-elle être revue ?
Sans vouloir être ici exhaustif, notons que plusieurs ténors de la discipline veulent ouvrir le
débat autour de ces questions. Lovelock et Gummesson (2004) résument les trois options
possibles :
•
La première option consisterait à ne plus considérer le marketing des services comme une
particularité du marketing, mais à réunifier les approches. C’est l’option défendue par
Vargo et Lusch (2004), qui proposent que la distinction entre les produits et les services
soit abandonnée, et que les approches marketing soient réunifiées sous la bannière des
services, puisque « le service est le dénominateur commun dans tout échange, et non une
forme spécifique d’échange ».
•
La seconde option consisterait à abandonner l’idée de vouloir traiter les services dans leur
ensemble, mais plutôt de travailler sur des familles de services qui partagent des
caractéristiques communes. Les travaux sur la classification des services constitueraient
alors le socle d’une telle option.
•
Finalement, une troisième option consisterait à proposer de nouvelles caractéristiques des
services par rapport aux produits, en vue de redéfinir le paradigme fondateur du marketing
des services de manière plus solide et plus satisfaisante. En vue d’alimenter ce débat,
Lovelock et Gummesson (2004) suggèrent une piste de réflexion pour construire un
nouveau paradigme, basé sur l’absence de transfert de propriété. Ils proposent d’admettre
que « les transactions marketing qui n’impliquent pas de transfert de propriété sont
différentes de celles qui impliquent ce transfert », et discutent plus en détail des
implications d’une telle proposition pour la discipline du marketing des services.
Ces discussions fondamentales en sont à leur prémisses, et, sans nul doute, elles feront couler
beaucoup d’encre. Comme le soulignent Vargo et Lusch (2004), elles n’affaiblissent
cependant pas la discipline du marketing des services. Au contraire, selon ces auteurs, « les
avancées obtenues dans le champ d’investigation des services ont eu un énorme impact, et
pourraient (devraient) même avoir un impact plus large sur le marketing en général, plutôt
que sur une de ses sous-disciplines ». Ces discussions témoignent en tout cas de l’évolution
24
rapide des marchés et des pratiques managériales, et du nécessaire devoir de remise en
question.
4. LA DEFINITION DU CONCEPT DE SERVICE
Après plus de 35 ans de recherches dédiées spécifiquement au secteur des services, les
spécialistes ne s’entendent toujours pas sur une définition unique et commune à donner à la
notion de service, même si la majorité des définitions reprennent des idées communes. Cela
peut partiellement s’expliquer par la grande diversité des activités de services, décrite
précédemment.
Pour rappel, les premières définitions de la notion de services datent du 18ème siècle, ou le
service est présenté comme « toute activité autre que la production agricole », ou encore
« toute activité qui ne conduit pas à un produit tangible ». La seconde définition, proposée
par Adam Smith, soulève un aspect fondamental et très souvent repris dans les définitions
ultérieures : les services produisent un résultat intangible, ils ne conduisent pas à la
production d’un élément ayant une existence physique.
Jusqu’en 1960, les services sont essentiellement définis – disons plutôt présentés – à travers
une liste d’exemples d’activités de services (Judd, 1964). Le plus souvent, ces définitions ne
proposent d’ailleurs qu’une liste limitée et incomplète d’exemples. En 1960, Lambin propose
une définition de la notion de service qui s’appuie sur la notion de besoin et d’utilité. Selon
lui, « la satisfaction des besoins humains n’exige pas toujours l’utilisation d’une chose
concrète. En effet, si un bien matériel lui-même n’est utile que par les services qu’il rend et
par les utilisations attendues de lui, très souvent, ces utilisations et ces services peuvent être
rendus par l’intermédiaire d’un agent humain aux spécificités particulières : un acte de
l’homme, un effort qu’il accomplit pour son compte ou pour le compte d’autrui peut donc
avoir cet effet d’« utilité ». Dans cette dernière perspective, on peut diviser l’ensemble de
l’activité économique en deux secteurs : d’une part, les travaux industriels qui ajoutent une
utilité à la matière ; et d’autre part, les services, qui, quoique générateurs d’utilités, ne
s’incorporent pas à la matière ». Il définit ainsi la notion de service comme « des prestations
génératrices d’utilités qui ne se matérialisent pas par la livraison à l’acheteur d’une
marchandise déterminée ».
25
En 1964, Judd sort également de la logique jusqu’alors dominante qui consiste à présenter la
notion de service à travers une liste d’exemples, pour proposer une définition stricte de la
notion de service : « un service consiste en une transaction de marché proposée par une
entreprise ou un entrepreneur, où l’objet de la transaction ne conduit pas à un transfert de
propriété d’un bien tangible ».
En 1980, Berry définit le service en le distinguant du produit : « un produit est un objet, un
procédé, une chose. Un service est un acte, une prestation, un effort ». Il ajoute que, quand un
produit est acheté, quelque chose de tangible est acquis, quelque chose qui peut être vu,
touché, voire même senti ou essayé. Mais, quand un service est acheté, il n’y a généralement
rien de tangible à montrer.
Grönroos (1990) définit le service comme « une activité ou une série d’activités de nature
plus ou moins intangible qui normalement, mais non nécessairement, implique une
interaction entre le client et le fournisseur de service, et/ou ses ressources physiques, ses
biens ou encore ses équipements, et qui constituent une solution aux problèmes des clients ».
Il contraste également les différences essentielles entre les produits et les services, telles que
reprises dans le tableau suivant, qui ont un impact sur la façon dont les services sont gérés.
Tableau 1.1 : Différence entre produits et services (Grönroos, 1990)
Produit
Service
Tangible
Homogène (identique entre eux)
Séparable (les phases de production, de
distribution et de consommation sont
séparables)
Consiste en un objet
La valeur essentielle est produite lors de sa
fabrication
Intangible
Hétérogène (jamais identiquement le même)
Inséparable (les phases de production, de
distribution et de consommation sont
inséparables)
Consiste en une activité, un processus
La valeur essentielle provient de l’interaction
entre le prestataire et le bénéficiaire du
service
Le client participe généralement au processus
de production
Non stockable
Pas de transfert de propriété
Le client ne participe normalement pas au
processus de production
Stockable
Transfert de propriété
Kotler (1991) propose qu’un service soit « tout acte ou prestation qu’une partie offre à une
autre partie, qui est essentiellement intangible, et qui ne résulte pas dans le transfert de
propriété d’une entité. Sa production peut être ou ne pas être liée à un produit physique ».
26
Zeithaml et Bitner (2000) sont beaucoup plus succinctes en définissant les services comme
« des actes, des processus et des prestations ».
Ces définitions font apparaître des éléments communs :
•
Un service est un acte, une prestation, qui est essentiellement intangible, et qui peut
être liée ou non à un produit.
•
Un service est générateur d’utilité pour son bénéficiaire. Il lui apporte une réponse à
un besoin.
•
Un service n’implique pas un transfert de propriété. Il s’agit d’une expérience vécue,
d’un processus d’interaction entre le client et le prestataire de services, et/ou ses
ressources physiques, ses biens ou ses équipements.
CONCLUSION DU CHAPITRE 1
Le secteur des services offre une très grande diversité, et les problématiques qui y sont
rencontrées sont nombreuses, complexes, et nécessitent le plus souvent une approche
multidisciplinaire.
S’ils n’ont pas toujours été bien considérés, nul ne conteste aujourd’hui l’importance
économique et compétitive des services, en tant que levier de génération de valeur et de
richesse, d’emplois et de source d’avantages concurrentiels. Les services sont partout, et
certains vont même jusqu’à parler d’une tertiairisation des secteurs primaires et secondaires,
et plus largement de l’économie.
Depuis la fin des années 70, la discipline du marketing des services s’est développée autour
d’un constat : les services diffèrent des produits par plusieurs caractéristiques, ce qui rend
nécessaire la mise en place de stratégies et d’outils marketing spécifiques. Ce constat a permis
l’émergence d’un grand nombre de courants de recherche, et force est de constater qu’à ce
jour, la discipline est riche d’une imposante littérature. Toutefois, des voix commencent à
s’élever pour proposer l’ouverture d’un débat sur les fondements mêmes du marketing des
services. Les caractéristiques si souvent présentées comme permettant de distinguer les
27
services des produits semblent aujourd’hui dépassées, ou en tout cas moins discriminantes
qu’il n’y paraissait, même si elles restent vérifiées pour un grand nombre de services.
Notre recherche vise précisément à étudier plus en profondeur une de ces caractéristiques
aujourd’hui mises en question. Ainsi, si les principales caractéristiques des services ont été
présentées, celle qui est considérée aujourd’hui encore comme la plus importante n’a pas
encore été décrite. Il s’agit de l’intangibilité des services. Concept a priori simple, mais
pourtant complexe, l’intangibilité génère un nombre important d’implications très concrètes
quant aux difficultés de gérer un service. Comprendre en profondeur le contenu et les
implications de ce concept est donc un enjeu d’importance tant pour les managers d’activités
de services que pour les chercheurs actifs dans la discipline. De même, nous espérons que
cette recherche pourra contribuer modestement à nourrir ce nouveau débat sur les fondements
même du marketing des services.
28
CHAPITRE 2 : LE CONCEPT D’INTANGIBILITE D’UNE OFFRE GLOBALE DE
SERVICES
INTRODUCTION
Le concept d’intangibilité figure généralement en première place sur la liste des
caractéristiques permettant de différencier les services des produits (Palmer, 1994 ; Rust, et
al., 1996 ; Zeithaml et Bitner, 2000). Etant très largement cité dans la littérature sur le
marketing des services, ce concept y est présenté de manière diverse et variée. Certains
auteurs proposent des discussions conceptuelles autour de l’intangibilité, et le définissent
explicitement (Shostack, 1977 ; Bateson, 1979 ; Berry, 1980 ; Flipo, 1988 ; Rushton et
Carson, 1989). D’autres l’utilisent de façon parfois centrale pour définir la notion même de
service (Cowell, 1984 ; Grönroos, 1990 ; Kotler, 1991, Kasper et al., 1999). Ce concept a
également été mis en regard avec ses conséquences sur les modes de gestion des services, ou
sur le comportement du consommateur (citons entre autre Berry, 1980 ; Rushton et Carson,
1989 ; Stafford, 1996 ; Bebko, 2000). L’intangibilité est aussi présentée comme une variable
de classification des services entre eux, permettant de réaliser des typologies de services
(Lovelock, 1983 ; Lovelock et Lapert, 1999).
Concept central en marketing des services, l’intangibilité ne fait cependant pas l’objet d’un
consensus quant à sa définition. Ce chapitre vise dès lors à présenter ce concept important de
la discipline, en commençant par une justification de son intérêt en tant qu’objet d’étude. Une
revue de la littérature va ensuite exposer les différentes conceptualisations de l’intangibilité,
de même que les enjeux que ce concept soulève.
1. POURQUOI S’INTÉRESSER AU CONCEPT D’INTANGIBILITÉ ?
L’intangibilité - à côté de l’hétérogénéité, l’inséparabilité et la périssabilité - est reconnue par
un grand nombre d’auteurs comme étant la caractéristique la plus importante pour distinguer
un service d’un produit (Zeithaml et al., 1985 ; Flipo, 1988 ; Rushton et Carson, 1989 ; Rust
et al., 1996 ; Zeithaml et Bitner, 2000 ; Bebko, 2000), et la seule qui soit commune à tous les
services, à des degrés divers (Klein et Levis, 1985 ; Flipo, 1988, McDougall et Snetsinger,
29
1990). Certains vont même jusqu’à considérer que les autres caractéristiques ne sont que des
conséquences de l’intangibilité (Bateson, 1979 ; Zeithaml et al., 1985 ; Hoffman, 2000).
Pour rappel, les chercheurs actifs dans le domaine des services ont dû, dans les années 70,
imposer leur discipline comme champ d’étude spécifique au sein du marketing. Leur constat
était simple : la démarche et les outils marketing développés dans un contexte de produits, et
utilisés sans adaptation dans un contexte de services, mènent souvent à l’échec. Or,
l’intangibilité des services semble expliquer en grande partie cette nécessaire adaptation.
Shostack écrit ainsi en 1977 qu’il est faux de croire qu’un service est comme un produit, mis à
part son intangibilité. Cela reviendrait à considérer qu’une orange est comme une pomme, mis
à part son caractère d’agrume. Elle affirme avec force que l’intangibilité n’est pas un
modifiant, mais bien un état. Et cet état a des implications profondes dans la façon dont les
services doivent être gérés, parce qu’il affecte profondément la nature même de ce qui est
vendu et de ce qui est acheté. Elle conclut par le fait qu’à la fin des années 70, le marketing
n’offre pas de moyens satisfaisants pour gérer les offres intangibles, ce qui peut expliquer, de
façon certes moins confortable pour les gens de marketing, que les responsables d’activités de
services d’alors s’intéressent assez peu au marketing, ou en font peu usage.
Le cœur du problème est ainsi posé. Si les services nécessitent une approche marketing
spécifique, ce serait en grande partie à cause de leur nature relativement intangible.
Comprendre exactement ce qu’est l’intangibilité, et les conséquences qu’elle induit, tant pour
le client que pour le prestataire de services, permettrait donc de mieux affiner les stratégies et
les outils marketing.
Certains diront que le concept d’intangibilité a été suffisamment étudié, et qu’en tout état de
cause, ses conséquences sont suffisamment claires et connues pour être gérées avec efficacité.
S’il est vrai que le sujet a été largement traité, nous ne pensons pas qu’il ait été épuisé. Il y a
d’abord dans la littérature une absence de consensus sur le sens à donner au concept. Or, selon
la position conceptuelle adoptée, les retombées sont différentes, ou à tout le moins, elles
pourraient être précisées, affinées, et développées davantage. En outre, le concept a fait l’objet
de peu de travaux empiriques, notamment sur sa mesure, ou sur son influence effective sur
d’autres concepts essentiels. Enfin, le concept d’intangibilité est aujourd’hui partiellement
remis en question comme base du paradigme des services. Toutes ces raisons nous amènent
donc à conclure à l’intérêt de mener un nouveau projet de recherche centré sur l’intangibilité.
30
2. DÉFINIR LE CONCEPT D’INTANGIBILITÉ
La littérature sur le marketing des services n’offre pas à ce jour de définition consensuelle du
concept d’intangibilité. Certains auteurs définissent l’intangibilité uniquement dans une
perspective « physique », à savoir un manque d’existence physique, un manque de matérialité,
une impalpabilité, ou plus largement, une inaccessibilité aux cinq sens (par exemple Shostack,
1977 ; Flipo, 1984 ; Cowell, 1984 ; Flipo, 1988 ; Kurtz et Clow, 1998 ; Kotler, 2000 ;
Zeithaml et Bitner, 2000). Ainsi, une pomme peut être vue, touchée, examinée, avant d’être
achetée. Une assurance-vie n’a pas d’existence matérielle en tant que telle, et elle ne peut
donc pas faire l’objet d’une expérience sensorielle directe.
D’autres auteurs définissent l’intangibilité dans une double perspective : la composante
physique, mais aussi une composante mentale, décrite généralement comme une difficulté
accrue pour un service à être défini, formulé et compris (Bateson, 1979 ; Berry, 1980 ;
Cowell, 1984 ; Rushton et Carson, 1989 ; Ennew, Watkins et Wright, 1997, Mittal, 1999).
Finalement, il faut également souligner qu’un grand nombre de travaux s’appuient sur le
concept d’intangibilité sans le définir formellement, comme si le sens à lui donner était
évident et allait de soi. Ainsi, beaucoup de recherches qui ont étudié les conséquences de
l’intangibilité pour les clients ou pour les prestataires de services, ou son impact sur les
stratégies marketing, communicationnelles et commerciales, ne proposent aucune définition
de l’intangibilité.
2.1. L’apparition du concept d’intangibilité dans un contexte marketing
Lambin (1960) est l’un des premiers auteurs identifiés à spécifiquement évoquer
l’intangibilité comme caractéristique spécifique des services dans une perspective marketing.
Sans définir explicitement le concept, il avance l’idée qu’un service est intangible, en ce sens
qu’il constitue une idée, une abstraction. Il ajoute que les entreprises de services ne peuvent
proposer à leurs clients que des éléments non mesurables, et impalpables (comme de la
compétence ou de l’expérience par exemple). Dès lors, le service ne peut bénéficier de
l’attrait ou de la séduction d’une ligne ou d’une forme bien conçue, ni tirer un avantage d’une
présentation habile et colorée qui excite le désir d’achat.
31
Rathmell (1966) évoque également le terme d’intangibilité, sans le définir explicitement.
D’après lui, les services se distinguent des produits en ce sens que l’objet de l’échange lors
d’une prestation de service est intangible, ce qui rend difficile à mettre en œuvre les concepts
économiques de l’offre et de la demande, ainsi que l’évaluation des coûts et la fixation des
prix.
2.2. La conceptualisation « physique » de l’intangibilité
Shostack (1977) est l’une des premières à définir formellement le concept d’intangibilité, en
l’opposant au terme de tangibilité. Ainsi, « tangible » signifie selon elle « palpable » et
« matériel ». « Intangible » est l’antonyme, et signifie donc « impalpable », « immatériel »,
« incorporel ». Elle ajoute que les éléments intangibles d’une offre sont dynamiques,
subjectifs et éphémères. Ils ne peuvent pas être touchés, ni essayés comme pourrait l’être un
vêtement. Ils ne peuvent pas être exposés sur un présentoir. Et ils sont très difficiles à
quantifier.
Shostack s’oppose résolument à une présentation dichotomique et discrète de l’intangibilité,
qui tendrait à proposer qu’un produit est tangible, alors qu’un service est intangible. Selon
elle, il existe peu de produits purs ou de services purs dans les marchés. Ainsi les entités à
commercialiser sont composées d’éléments discrets - soit matériels, soit immatériels - mais le
tout ne peut être décrit qu’en terme de dominance, et peut donc varier selon un degré
d’intangibilité.
Pour illustrer ses propos, elle propose d’examiner deux offres commerciales : une voiture et
un vol en avion de ligne. Ces offres de voyage aérien et d’automobile, bien qu’étant
officiellement classées, la première dans les services, la seconde dans les produits, comportent
des attributs tangibles et des attributs intangibles, comme l’indique le graphe ci-dessous.
32
Figure 2.1 : Représentation de deux offres commerciales (inspiré de Shostack, 1977)
Facilité de
paiement
Les options
L’automobile
Entretien et
réparation
Transport
Horaire
et
fréquence
Service avant
et
après vol
Avion
Transport
aérien
Paris - NY
Hôtesses et stewards
Service
en vol
Repas
Eléments intangibles
Eléments tangibles
Ce graphe mérite une plus grande explication. Il faut d’abord rappeler la conceptualisation du
produit5 proposée par Lambin (1999), basée notamment sur les travaux de Levitt (1980). Pour
lui, le produit constitue un ensemble de valeurs, appelé panier de services. L’acheteur d’un
produit bénéficie ainsi de la valeur fonctionnelle du produit, c’est-à-dire de son service de
base, mais également des services secondaires de nature variée, esthétique, sociale, culturelle,
qui améliorent ou complètent le service de base. Ces services secondaires sont le plus souvent
déterminants dans le choix d’un produit ou d’un service. Ainsi, le client d’une compagnie
aérienne ne va pas uniquement payer pour le service de base, qui consiste à le transporter par
exemple de Paris à New-York. Si seul le service de base comptait aux yeux du client, le prix
serait le seul facteur de choix. Il achète plutôt une expérience globale de transport, c’est-à-dire
une offre globale de services, où les services supplémentaires jouent un rôle fondamental,
ainsi que tous les éléments tangibles qui entourent le service de base. Et ces éléments
5
le produit étant ici entendu au sens large, englobant à la fois les biens et les services
33
périphériques au service de base constituent les leviers qui permettent aux compagnies et aux
clients de différencier les compagnies aériennes entre elles. Ainsi, toutes les compagnies
aériennes reliant Bruxelles à Rome offrent le même service de base, mais c’est la flexibilité
lors de la réservation et de l’enregistrement des bagages, la qualité du service à bord,
l’apparence physique de l’avion et de l’environnement physique général, la qualité du repas,
le confort des sièges, … qui vont conditionner la perception que le client a de son expérience
de service. Le client achète donc un mix d’éléments tangibles et intangibles, qui vont
constituer l’offre globale pour laquelle il est prêt à payer.
Il en va exactement de même pour un produit matériel, qui représente beaucoup plus qu’un
objet tangible. Du point de vue de l’acheteur, le produit constitue une promesse, un ensemble
de valeurs souhaitées parmi lesquelles les éléments intangibles sont aussi importants que les
éléments tangibles (Nollet et Haywood-Farmer, 1992). Acheter une voiture ne consiste pas
uniquement à acheter un châssis sur quatre roues. Avant tout, le client achète le service de
transport que le véhicule procure. En outre, l’expérience d’achat du client va être influencée
par des éléments périphériques parfois essentiels, comme les facilités de paiement, la garantie
offerte, des contrats d’assistance (réparation ou entretien gratuit pendant les 50.000 premiers
kilomètres p.ex.), … A nouveau donc, le client n’achète pas uniquement un objet, mais une
offre globale constituée d’éléments tangibles et intangibles.
Sur base de cette représentation de l’offre globale acquise par le client, Shostack (1977)
propose un parallèle avec la chimie, en considérant les entités à commercialiser comme des
molécules constituées d’un nombre variable d’atomes de nature différente. Certaines entités
sont composées en majeure partie d’éléments tangibles, alors que d’autres sont principalement
composées d’éléments intangibles. Dès lors, même si le noyau de l’entité peut être clairement
tangible ou intangible, le tout ne peut être décrit qu’en terme de dominance. Tout produit ou
service se positionne donc sur un continuum en fonction de la proportion d’éléments tangibles
et intangibles qui le constituent. Ainsi, l’intangibilité d’une entité à commercialiser sera
d’autant plus grande que la proportion d’éléments intangibles au sein de cette entité est
grande.
34
En guise d’exemple, Shostack propose le continuum suivant, où elle positionne intuitivement
onze entités à commercialiser.
Figure 2.2 : Continuum de Shostack (1977)
Sel
Soft
drinks
Détergents
Automobiles
Cosmétiques
Restauration
Dominante
tangible
rapide
Agence
de pub
Dominante
intangible
Cie
aérienne
Gestion
portefeuille
financier
Consultance
Enseignement
Partant de ce continuum, Shostack conclut que « plus le poids des éléments intangibles est
élevé dans l’offre commerciale, plus il y aura de divergences par rapport aux produits dans
l’approche et dans les priorités marketing ».
En 1981, Levitt reprend les idées de Shostack dans un article où il examine en quoi les
facteurs intangibles entrant dans la définition d’une offre commerciale affectent les stratégies
de vente des services et celles du suivi après-vente. Son article – initialement écrit et publié en
anglais dans Harvard Business Review – ne propose pas de définition formelle de
l’intangibilité. Il est par contre intéressant de noter que, dans une version française de son
article publiée dans Harvard l’Expansion (1981/1982), le terme « intangibility » est traduit par
le terme « immatérialité », le mot « intangibilité » n’apparaissant pas dans la version
française. Ceci nous permet donc de proposer que Levitt définit l’intangibilité comme un
synonyme de l’immatérialité.
Dans un article où elle étudie le processus d’évaluation relatif aux services, Zeithaml (1981)
propose une définition de l’intangibilité basée sur l’inaccessibilité aux cinq sens avant achat.
Pour elle, l’intangibilité fait référence à « l’incapacité pour un service a être vu, senti,
entendu, touché ou goûté avant d’être acheté ». Cette définition est largement reprise dans
des travaux ultérieurs (voir p.ex. Cowell, 1984 ; Zeithaml, Parasuraman et Berry, 1985 ; Kurtz
35
et Clow, 1998 ; Kotler, 2000 ; Zeithaml et Bitner, 2000). En 1984, Flipo étend cette définition
en affirmant que l’inaccessibilité sensorielle peut également être perçue pendant l’achat, voire
même après achat (par exemple, l'
entretien d'
une automobile ou une opération chirurgicale).
En 1988, Flipo réexamine le concept d’intangibilité, et en restreint l’inaccessibilité sensorielle
à la seule inaccessibilité au toucher, en le définissant comme étant synonyme de
l'
immatérialité. Il estime que l’immatérialité est la seule caractéristique véritablement
universelle face à la très grande diversité des services. Et il ajoute que ce qui est
universellement immatériel dans un service, c’est l’acte de service lui-même, et non la
personne qui preste le service, ou le support physique qui lui est associé. Dès lors, il affirme
qu’il est faux de considérer qu’un service est plus ou moins intangible, puisque si l’on
considère le service dans son sens strict, il est par nature même intangible. Il termine en
insistant sur l’importance de ne pas confondre immatérialité avec imperceptibilité - la
musique, par exemple, peut être perçue par le sens de l’ouïe sans pour autant être matérielle –,
et il conclut que les facteurs intangibles peuvent donc être perçus par les autres sens que le
toucher.
2.3. La conceptualisation « physique » et « mentale » de l’intangibilité
En 1979, Bateson propose que l’élément critique dans les services, c’est qu’ils sont
doublement intangibles. Il distingue ainsi l’intangibilité physique, faisant référence à
l’impalpabilité d’un service, et l’intangibilité mentale, faisant référence à la difficulté pour un
intangible à être compris, à être saisi mentalement. Berry, en 1980, donne également un
double sens au terme d’intangibilité : d’une part, l’impossibilité pour un intangible d’être
touché ; et d’autre part, la difficulté pour un intangible à être défini, formulé ou compris de
façon claire et précise. Ces deux auteurs distinguent donc très clairement la composante
physique de l’intangibilité et sa composante mentale.
En 1984, Cowell définit le concept d’intangibilité dans un premier temps exclusivement à
travers sa composante physique. Mais, dans la suite de l’ouvrage, il affirme que Bateson
(1979) a sensiblement amélioré la compréhension et la portée du concept, en lui adjoignant la
composante mentale. Il suggère ainsi la supériorité de cette conceptualisation de
l’intangibilité. Rushton et Carson (1989) sont également fidèles à la conceptualisation
physique et mentale de l’intangibilité, en distinguant ce qu'
ils nomment l'
intangibilité
36
physique d'
une part, et l'
intangibilité mentale d'
autre part. Ainsi, les services sont par nature
intangibles. Ils ne peuvent pas être touchés, goûtés, sentis ou vus. En outre, ils sont plus
difficiles à comprendre, à saisir mentalement. Edgett et Parkinson (1993) supportent la
définition proposée par Bateson en 1979. Nollet et Haywood-Farmer (1992) proposent qu’un
élément intangible ne puisse être ni touché, ni très bien compris, quoiqu’il puisse être perçu
par un autre sens ou grâce à des images mentales. Ward (1996) distingue également les
composantes physique et mentale de l’intangibilité, en proposant que la composante mentale
représente la facette cognitive du concept. Ennew, Watkins et Wright (1997) affirment quant à
eux que l’intangibilité a deux significations : d’une part, elle fait référence à l’impalpabilité
d’un service, puisque le service n’a généralement pas d’existence physique, et d’autre part, les
services sont intangibles dans le sens où ils sont difficiles à définir et à comprendre. Ces
auteurs soulignent qu’un grand nombre de services se caractérisent par un degré élevé
d’intangibilité sur ces deux composantes, en insistant plus particulièrement sur les services
dits professionnels (services comptables, services légaux, …) et les services financiers. Mittal
(1999) évoque pour sa part la composante mentale de l’intangibilité en la nommant
« impalpabilité mentale », pour faire référence à la difficulté accrue pour un service d’être
compris. Grove, Carslon et Dorsch (2002), dans un article sur la tangibilisation des services à
travers la communication, insistent tout particulièrement sur la nécessité d’aider le client à
mieux saisir mentalement le service et à en faciliter la compréhension. Ce faisant, ils
suggèrent la double composante de l’intangibilité, laissant même supposer que la composante
mentale constitue un plus grand défi en matière de communication. Finalement, dans leur
discussion sur les fondements du marketing des services, Lovelock et Gummesson (2004)
soutiennent cette conceptualisation, en ajoutant que le degré d’intangibilité mentale inhérent à
un service n’est pas nécessairement corrélé avec le degré d’intangibilité physique (p.27), et
que l’un ne peut pas être jugé comme étant la nécessaire conséquence de l’autre.
Sur un plan purement conceptuel, des divergences existent donc sur le sens à donner au
concept d’intangibilité. Observons à présent les travaux relatifs à l’analyse de la
dimensionnalité du concept et de son opérationalisation, pour compléter la présentation de
l’intangibilité.
37
3. L’INTANGIBILITE, UN CONCEPT MULTIDIMENSIONNEL ?
Les définitions de l’intangibilité faisant référence à une composante physique et une
composante mentale suggèrent que ce concept soit multidimensionnel. Trois recherches ont
été identifiées, portant sur l’analyse de la dimensionnalité du concept : celle de Dubè-Rioux,
Regan et Schmitt en 1990, celle de Breivik, Troye et Olsson en 1998, et celle de Laroche,
Bergeron et Goutaland (2001).
Dubè-Rioux, et al. (1990) sont les premiers auteurs identifiés à proposer deux dimensions de
l’intangibilité : 1) le caractère abstrait/concret, qui fait référence à l’(in)accessibilité par les
sens, et 2) le caractère spécifique/général, qui fait référence à la capacité d’un terme à
recouvrir un nombre plus ou moins grand de mots subalternes.
•
D’après ces auteurs, un produit/service est d’autant plus concret que ses caractéristiques
ou ses résultats peuvent être perçus sensoriellement. Ainsi, un service de nettoyage est un
service relativement concret : son résultat peut être vu (la maison est propre, ça se voit),
touché (passer le doigt sur un meuble et constater une absence de poussière) et senti (un
parfum agréable de produits d’entretien). Par contre, une assurance vie est donnée comme
exemple de service très abstrait. Ses caractéristiques et ses résultats sont difficilement
perceptibles sensoriellement.
•
Un service est perçu comme étant général s’il est décrit par un grand nombre de mots
subalternes non exclusivement liés au service en question, et qui font référence à des
aspects généraux du service, de ses caractéristiques ou de ses résultats. A l’opposé, plus
un service est spécifique, plus les mots pour le décrire sont limités et adaptés à ce seul
service, et plus ils décrivent précisément les caractéristiques et/ou les résultats du service.
Les attributs spécifiques sont généralement des caractéristiques précises d’une entité
(système de freinage ABS, système ESP de correction de trajectoire, …), alors que les
attributs généraux font habituellement référence aux résultats de ces caractéristiques (p.ex.
la sécurité de la voiture). Par rapport à la définition de l’intangibilité de Bateson (1979) et
Berry (1980), cette dimension souligne donc la difficulté accrue à définir et à expliquer un
service.
38
Sur base des travaux de Dubè-Rioux, et al., Breivik, et al. (1998) proposent à leur tour les
deux dimensions suivantes : 1) L’inaccessibilité par les sens (intangibilité physique) et 2) la
généralité, qui est identique à la deuxième dimension suggérée par Dubè-Rioux, et al. (1990).
•
L’inaccessibilité par les sens signifie que les attributs intangibles sont reliés au service
mentalement plutôt que physiquement, et est associée à la première dimension de DubéRioux et al. (1990). Les auteurs se fondent sur les travaux d’Hirschman (1980), qui
proposent que les attributs tangibles soient accessibles sensoriellement, alors que les
attributs intangibles n’existent qu’à travers une construction mentale, car ne pouvant pas
être appréhendés par les sens.
Sur la base d'
une critique formulée à l'
égard de la définition de l'
intangibilité de Berry (1980)
et de travaux antérieurs - dont ceux de McDougall et Snetsinger (1990), de Dubè-Rioux et al.
(1990) et de Breivik et al. (1998) -, Laroche et al. (2001) ont développé une échelle du degré
d'
intangibilité d'
une offre de services, qui propose trois dimensions au concept étudié :
•
La première dimension, l'
inaccessibilité aux sens, fait référence à la composante physique
de l'
intangibilité. Elle a été précédemment décrite par Breivik et al. (1998). Elle rappelle
l’une des définitions classiquement donnée de l’intangibilité, à savoir, qu’un service ne
peut pas être perçu par une expérience sensorielle directe telle que le toucher ou la vue.
•
La deuxième dimension, la généralité, déjà identifiée par Dubé-Rioux et al. (1990),
souligne que le consommateur peut percevoir un service de façon générale ou spécifique.
« Un service est perçu comme étant général si les consommateurs ne sont pas capables de
fournir une définition précise du service, de ses caractéristiques ou de ses résultats.
Inversement, un service est perçu comme étant spécifique s’il génère des définitions
précises et claires du service, de ses caractéristiques et de ses résultats » (Laroche et al.,
2001, p. 28).
•
Laroche, et al. (2001) proposent, par rapport aux travaux antérieurs, une troisième
dimension de l'
intangibilité, qu'
ils nomment « l'
intangibilité mentale ». Les auteurs
précédents (Dubé-Rioux et al., 1990 et Breivik et al., 1998) distinguaient en effet
39
seulement deux dimensions : le caractère abstrait ou concret (ou l'
inaccessibilité aux sens),
faisant référence à la composante physique de l'
intangibilité, et la généralité, couvrant la
composante mentale. Laroche et al. (2001) distinguent quant à eux, à côté de la généralité,
une autre dimension relative à la composante mentale. Ils sont partis du constat que "la
tangibilité physique ne garantit pas chez le consommateur une représentation mentale
claire et tangible de l’objet, surtout si l’évaluateur manque d’expérience à l’égard de cet
objet" (Finn, 1985 ; McDougall et Snetsinger, 1990). Cette conception est nouvelle par
rapport aux auteurs antérieurs, qui semblent reconnaître implicitement qu’un
produit/service – s’il est physiquement tangible – ne nécessite pas de construction mentale
pour l’appréhender, et dès lors que le problème de l’accessibilité mentale ne se pose pas.
4. OPERATIONALISATION DU CONCEPT D’INTANGIBILITE
Deux recherches séminales ont été identifiées, visant à développer un outil de mesure multiitems du degré d'
intangibilité d'
une offre de services : celle de McDougall et Snetsinger
(1990), et celle plus récente de Laroche, Bergeron et Goutaland (2001).
4.1. L’échelle de McDougall et Snetsinger (1990)
McDougall et Snetsinger (1990) ont été les premiers auteurs identifiés à développer un
instrument de mesure multi-items du degré d'
intangibilité d'
une offre de services, basé sur un
modèle unidimensionnel de l’intangibilité.
40
L’échelle proposée par ces auteurs est la suivante :
Tableau 2.1. Items de l’échelle de McDougall et Snetsinger (1990)
I have a very clear picture of this item
J’ai une image mentale très claire de cet item
Une image de cet item m’arrive en tête
The image comes to my mind right away
immédiatement
This is not the sort of item that is easy to
Ce n’est pas un item qui est facile à imaginer
picture
mentalement
This item is very tangible
Cet item est très tangible
This is a difficult item to think about
Il est assez difficile de penser à ce type d’item
(traduction libre en français)
Cette échelle est testée sur un échantillon de convenance de 122 répondants (dont les
caractéristiques ne sont pas précisées), qui évaluent deux produits (un matelas et une voiture
compacte) et deux services (un club de fitness et une croisière aux Caraïbes). L’Alpha de
Cronbach est supérieur à 0,71 pour les quatre entités analysées. Néanmoins, les scores
d’intangibilité obtenus pour ces quatre entités ne sont pas mentionnés dans l’article.
Si cette première recherche est intéressante dans son approche et dans son objectif, elle est
néanmoins partielle, car, de l'
aveu même des auteurs, elle se focalise volontairement sur la
composante mentale de l'
intangibilité. Dès lors, leur échelle de mesure ne permet
d'
appréhender que partiellement le concept d'
intangibilité, puisqu'
elle se fonde sur la seule
composante mentale, sans considérer la composante physique de l’intangibilité, pourtant
présente dans toutes les définitions de l’intangibilité.
4.2. L’échelle de Laroche, Bergeron et Goutaland (2001)
Dans le cadre de leur recherche, Laroche et al. (2001) proposent une échelle du degré
d'
intangibilité d'
une offre de services, reprenant les trois dimensions décrites précédemment.
41
Les items de l’échelle sont présentés dans le tableau ci-dessous :
Tableau 2.2 : Items de l’échelle de Laroche, Bergeron et Goutaland (2001)
Dimension "inaccessibilité aux sens"
P1 : This item is very easy to see and touch
P1 : Cet item est très facile à voir et à toucher
P2 : I can physically grasp this item
P2 : Je peux physiquement prendre cet item
P3 : This item is very tangible
P3 : Cet item est très tangible
Dimension "généralité"
G1 : I feel that this item is 1 = very abstract
to 9 = very concrete
G1 : Cet item est 1 = très abstrait à 9 = très
concret
G2 : I feel that this item is 1 = very general
to 9 = very specific
G2 : Cet item est 1 = très général à 9 = très
spécifique
Dimension "intangibilité mentale"
M1 : I need more information about this item
to make myself a clear idea of what it is
M1 : J’ai besoin de plus d’informations sur
cet item pour me faire une idée précise
de ce que c’est
M2 : I have a clear picture of this item
M2 : J’ai une image claire de cet item
M3 : The image of this item comes to my
M3 : Une image de cet item m’arrive en tête
mind right away
immédiatement
M4 : This is not the sort of item that is easy
M4 : Ce n’est pas le genre d’item qui est facile
to picture
à se représenter
M5 : Il est assez difficile de penser à ce type
M5 : This is a difficult item to think about
d’item
(Traduction libre en français )
L’échelle tridimensionnelle développée par Laroche et al. (2001) est testée sur un échantillon
de convenance de 472 étudiants, à l’aide de trois produits (jeans, compact disque et ordinateur
portable) et trois services (un dîner dans une pizzeria, une coupe de cheveux chez le coiffeur
et un compte chèque). Les résultats sont illustrés dans les trois graphes suivants, qui
présentent les continuums d’intangibilité sur les trois dimensions identifiées.
42
Figure 2.3. Les trois continuums d’intangibilité de Laroche et al. (2001)
Intangibilité physique
7
5,81
6
5
4,19
4
3
4,51
4,75
3,08
2,24
2
1
Jeans
Ordinateur
Dîner
pizzeria
CD
Coupe
cheveux
4,08
4,13
Compte
chèque
Dîner
pizzeria
Compte
chèque
Généralité
7
6
5
4
3,42
3,51
3,74
Jeans
Coupe
cheveux
Ordinateur
4,52
3
2
1
CD
Intangibilité mentale
7
6
4,93
5
4
3
3,2
3,62
4,00
4,13
Ordinateur
CD
2,58
2
1
Jeans
Coupe
cheveux
Dîner
pizzeria
Compte
chèque
Continuums basés sur les données disponibles dans l’article –
L’intangibilité physique et l’intangibilité mentale sont mesurées sur une
échelle bipolaire à neuf niveaux. La généralité est mesurée sur une
échelle sémantique différentielle.
43
L’examen de ces continuums permet plusieurs constats :
•
Aucun des trois continuums d’intangibilité ne permet de discriminer les produits des
services. Plus spécifiquement, le continuum d’intangibilité physique proposé par Shostack
ne semble pas être validé dans le cadre de cette étude, puisque le dîner dans une pizzeria
(classé dans les services) est perçu comme étant physiquement plus tangible que le
compact disque (classé dans les produits).
•
Certaines entités peuvent être évaluées comme étant relativement tangibles sur un plan
physique, mais plus intangibles sur la dimension généralité ou sur la dimension mentale.
C’est le cas par exemple de l’ordinateur portable.
•
A contrario, certains services peuvent être perçus comme physiquement plutôt intangibles,
mais comme relativement tangibles sur les deux dimensions mentales. C’est le cas de la
coupe de cheveux chez le coiffeur.
Ces résultats, de même qu’un examen critique de l’échelle, feront l’objet d’une discussion
approfondie dans la suite de ce document.
5. POURQUOI FAUT-IL TANGIBILISER LES SERVICES ?
La littérature sur le marketing des services semble unanime sur un point : les facteurs
intangibles doivent être tangibilisés (citons entre autre Shostack, 1977 ; Berry, 1980 ; Levitt,
1981 ; Berry et Clark, 1986 ; Flipo, 1988 ; Rushton et Carson, 1989, Reddy, Buskirk et
Kaicker, 1993 ; Catsaras, 1995 ; Stafford, 1996 ; Mittal, 2002 ; Laroche et al., 2001 ; Laroche
et al., 2003). Mais quelles en sont les raisons ?
L’intangibilité des services a des conséquences importantes à la fois pour les clients et pour
les prestataires de services (Rushton et Carson, 1989). Or, ces conséquences sont le plus
souvent préjudiciables pour ces deux agents économiques. Dès lors, tangibiliser une offre de
services – c’est-à-dire accroître dans la perception des clients la tangibilité de l’offre (sur le
plan physique et/ou sur le plan mental, selon la conceptualisation retenue) - permettrait de
réduire certaines de ces conséquences, que nous allons maintenant détailler. Il est toutefois
important de mentionner qu’à ce jour, une seule étude identifiée (Laroche, Bergeron et
44
Goutaland., 2003) distingue spécifiquement la composante physique de la composante
mentale de l’intangibilité dans ses conséquences tant pour le client que pour le prestataire.
5.1.Principales conséquences de l’intangibilité pour le client
La difficulté d’évaluation
Parce qu’ils sont caractérisés par un plus haut degré d’intangibilité, les services sont présentés
comme étant plus difficiles à évaluer par les clients de manière objective avant achat, et
parfois même pendant et après leur consommation (Bateson, 1979 ; Berry, 1980 ; Zeithaml,
1981 ; Rushton et Carson, 1989 ; McDougall et Snetsinger, 1990 ; Hartman et Lindgren,
1993 ; Breivik et al., 1998).
Dans une étude sur le processus d’évaluation des clients, Zeithaml (1981) propose trois types
d’attributs constitutifs d’une offre de produits ou de services : les attributs d’examen, les
attributs d’expérience et les attributs de crédibilité. Les attributs d’examen sont des attributs
qui sont accessibles aux clients avant achat, des attributs que le client peut déterminer et
évaluer avant achat. La couleur, le prix, le style, la forme, la dureté, … sont autant d’exemples
de tels attributs. Les attributs d’expérience sont ceux qui ne peuvent être évalués et
déterminés que pendant ou après l’achat et/ou la consommation de l’offre. Le goût, la facilité
de manipulation, la rapidité du service, … sont des attributs d’expérience. Finalement,
certaines caractéristiques d’une offre peuvent être impossibles à évaluer, même après achat
et/ou consommation de l’offre. La compétence d’un mécanicien est un exemple de
caractéristique de ce genre, qui fait que l’entretien de votre voiture est généralement difficile –
voire impossible – à évaluer. En effet, vous déposez le matin une voiture en bon état de
marche au garage, et vous la récupérez le soir, sans constater de changement apparent. Seule
la confiance en votre garagiste vous permet de penser que le service offert est de qualité (sauf
si vous tombez en panne en sortant du garage, ce qui est assez rare). La figure ci-dessous
présente un continuum d’évaluation selon que l’offre est principalement constituée d’attributs
d’examen, d’expérience ou de crédibilité.
45
Figure 2.4 : Continuum d’évaluation selon différents types d’attributs
Dominante
« produits »
Vêtement
Bijou
Meuble
Maison
Voiture
Repas au restaurant
Coiffeur
Vacances
Baby-sitting
Réparation TV
Services juridiques
Entretien voiture
Diagnostic médical
Facile à
évaluer
Dominante
« services »
Essentiellement
des attributs
d’examen
Essentiellement
des attributs
d’expérience
Essentiellement
des attributs de
crédibilité
Difficile à
évaluer
(source : Zeithaml, 1981)
D’après Zeithaml (1981), plus une offre commerciale comprend d’attributs d’examen, plus le
client pourra évaluer facilement l’offre avant achat. Par contre, plus l’offre comporte des
attributs d’expérience ou de crédibilité, plus l’évaluation est rendue complexe. Or, plus une
offre est intangible, moins elle possède d’attributs d’examen (puisque ces derniers sont
généralement accessibles par les sens), et plus elle possède des attributs d’expérience et de
crédibilité. Dès lors, la nature relativement plus intangible d’un service influence
négativement la capacité d’évaluation.
Dans la même logique, Ward (1996) ajoute que l’intangibilité influence la capacité
d’évaluation, en ce sens que la connaissance d’un produit et d’un service ne s’acquière pas de
la même façon. Ainsi, un produit à dominance tangible peut être décrit précisément, il peut
être examiné soigneusement par le client avant achat, et dès lors faire l’objet d’une expérience
directe. Par contre, vu la nature à dominance intangible d’un service, il est difficile, voire
impossible, de l’essayer, de le contrôler ou de le tester à l’avance (Levitt, 1981). Les clients
potentiels sont généralement obligés de dépendre de substituts pour évaluer ce qu’ils peuvent
obtenir (Berry, 1980 ; Levitt, 1981).
46
Difficulté à discriminer les offres concurrentes
Etant confronté à une plus grande difficulté à évaluer le service, le client a plus de difficultés
à discriminer et à choisir entre plusieurs alternatives (Breivik et al., 1998). En outre, il ne
perçoit pas toujours les différences entre les prestataires de services. Une étude menée dans le
domaine bancaire (Sempels et Zanin, 2004) a ainsi démontré que les clients des trois plus
grandes banques belges ne perçoivent pas de différences significatives entre ces institutions.
Ceci peut expliquer partiellement le fait que les clients changent difficilement d'
institutions
bancaires. En effet, selon Kuter (2002), il y a un décalage important entre l'
intention de
changer de prestataire bancaire et le changement effectif (33% des clients ont envie de
changer de banque, mais seulement 5 à 6% des comptes sont clos chaque année). La fidélité à
une enseigne bancaire pourrait donc résulter en partie de l'
absence de différence perçue avec
les enseignes bancaires concurrentes. Il s'
agirait dès lors davantage d'
un comportement
d'
inertie (tel que décrit entre autre par Bozzo, 1999) que d'
un comportement de fidélité, ou
même de rétention. On est dès lors en droit de se demander si cette absence de vraies
alternatives (en tout cas perçues comme vraiment différentes) ne constitue pas une source de
frustration pour le client, qui se sent quelque part prisonnier d’une entreprise dont il peut ne
pas être totalement satisfait, mais dont il a néanmoins besoin.
Risque perçu accru
L’intangibilité du service et la difficulté d’évaluation qui en découle engendrent une anxiété et
un risque perçu accru pour le client (Bateson, 1979 ; George et Berry, 1981 ; Zeithalm, 1981 ;
Levitt, 1981 ; Güseman, 1981 ; Flipo, 1984 ; Finn, 1985 ; Flipo, 1988 ; Rushton et Carson,
1989 ; McDougall et Snetsinger, 1990 ; Mitchell et Greatorex, 1993 ; Breivik, Troye et
Olsson, 1998 ; Kurtz et Clow, 1998). Ce supplément de risque perçu est principalement dû au
fait d’une incertitude plus grande dans l’achat d’un service que dans l’achat d’un produit
(Bateson, 1979 ; Mitchell et Greatorex, 1993). Ce supplément de risque perçu peut même
conduire à une attitude négative à l’égard du service (Rushton et Carson, 1989). Dans une
étude empirique avec une mesure du degré d’intangibilité d’une offre de service, Laroche et
al. (2003) étudient l’impact des trois dimensions proposées de l’intangibilité (intangibilité
physique, généralité et intangibilité mentale) sur le risque perçu. L’étude conclut à l’impact
significatif des trois dimensions de l’intangibilité sur le niveau de risque perçu par le client.
Toutefois, la dimension mentale de l’intangibilité semble exercer un impact significativement
47
plus important sur le risque perçu que les deux autres dimensions de l’intangibilité. Cette
étude fera l’objet d’un plus long développement dans la suite de ce document.
Il est en outre important de rappeler que le risque perçu a lui même des conséquences
importantes pour le comportement du consommateur au sens large. Ces conséquences seront
détaillées dans le chapitre dédié au risque perçu. Dès lors, l’intangibilité, située en amont du
risque perçu, peut agir comme un catalyseur sur les conséquences du risque perçu.
Impact sur la satisfaction
Levitt (1981) soulève un autre problème relatif à l’intangibilité dans le chef du client : « à
propos des offres intangibles, les clients ne savent en général pas ce qu’ils ont jusqu’au
moment où ils ne l’ont pas ». Plus précisément, le client d’un service semble être moins
conscient d’être bien servi que lors de la consommation ou l’utilisation d’un produit. Cela
signifie que, dans le cadre des services, « seule l’insatisfaction fait discuter les clients, mais la
satisfaction est muette » (Levitt, 1981). Dans la même idée, Gelb (1987) affirme que, parce
qu’ils sont intangibles, les services ne produisent pas de satisfaction intrinsèque. Ces propos
sont sans doute excessifs, ou à tout le moins non pertinents pour l’ensemble des services,
puisqu’il faut, par exemple, distinguer les services utilisés dans le cadre de la recherche d’un
plaisir, et ceux qui sont nécessaires, sans néanmoins constituer une source de plaisir. Ainsi, un
client est capable de reconnaître la valeur d’une soirée dans un restaurant, il peut profiter
pleinement de cette satisfaction intrinsèque à y passer un moment de détente, et même s’en
réjouir à l’avance. Il en va de même pour les vacances, le théâtre, le cinéma, etc., qui sont des
services que nous pourrions qualifier de « plaisir ». L’assurance, par contre, est un exemple de
service qui semble ne pas fournir un niveau élevé de satisfaction intrinsèque. Le plus souvent,
l’assurance se résume pour le client au paiement de primes annuelles ou trimestrielles. En
outre, il suffit de lire la presse pour prendre connaissance de nombreux sinistres qui ont été
mal couverts, ou indemnisés avec retard par les assureurs, nous laissant dès lors penser que le
client a plus souvent l’occasion de ressentir et d’exprimer de l’insatisfaction plutôt que de la
satisfaction à être assuré. Il y a donc un ensemble de services qui pourraient être caractérisés
par un niveau de satisfaction intrinsèque faible, que le client ne prendrait pas réellement
plaisir à acheter ou à utiliser, le service pouvant être vu comme un mal nécessaire plutôt que
comme une source de plaisir ou même de satisfaction. Nous pensons toutefois que cette
conséquence n’est pas propre à certains services, comme certains le laissent sous-entendre,
48
puisqu’il existe des produits banalisés ou dont l’achat est nécessaire, mais pas nécessairement
plaisant, qui peuvent être associés à des niveaux de satisfaction intrinsèque assez faibles
également.
Impact sur le processus de prise de décision
Ces principales conséquences ont tendance à complexifier le processus de prise de décision
du client, si celui-ci est rationnel et explicite. Comme le souligne Burton (1990), le client de
services éprouve généralement une plus grande difficulté à se construire un cadre clair pour
l’aider à prendre ses décisions d’achat. Ceci est dû entre autres au fait que le client de services
a plus de difficultés à déterminer et à évaluer les critères de décision (les attributs) sur
lesquels la décision se base. Ainsi, imaginez, par exemple, qu’étant nouvellement créateur
d’entreprise, vous devez choisir un comptable. Comment savoir à l’avance – face à une liste
de comptables – qui est bon et qui est mauvais ? Sur quoi baser votre décision de choix ?
Le client va ainsi devoir consacrer un effort de collecte et de traitement de l’information plus
important (Breivik et al., 1998). Et la nature même des informations collectées peut en être
modifiée, puisqu’il semblerait que le consommateur cherche davantage à s’appuyer sur des
sources d’information personnelles (Zeithaml, 1981). Ainsi, le bouche-à-oreille semble
notamment plus important dans la sélection d’un prestataire de service que dans le choix d’un
produit (George et Berry, 1981).
5.2. Principales conséquences de l’intangibilité pour le prestataire de service
Si nous adhérons à la position selon laquelle l’intangibilité est la seule caractéristique
commune à tous les services, et si nous acceptons l’idée que toutes les autres caractéristiques variabilité, hétérogénéité, périssabilité, absence de transfert de propriété, … - ne sont que des
conséquences de l’intangibilité (comme défendu entre autres par Bateson, 1979 ; Zeithaml et
al., 1985 ; Hoffman, 2000), la liste des conséquences de l’intangibilité pour le prestataire de
service serait longue. En fait, elle nécessiterait de lister l’ensemble des spécificités des
services dans leurs modes de gestion marketing, ce qui reviendrait à écrire un ouvrage
complet sur le marketing des services. Ce n’est évidemment pas l’objectif du présent
document. Nous souhaitons dès lors présenter ici quelques-uns des défis les plus importants
49
pour les prestataires de services, au vu du caractère plutôt intangible de leur offre
commerciale.
Définir une réalité consensuelle de l’offre commerciale
Tout comme pour les clients, les prestataires de services sont confrontés à une difficulté plus
grande de conceptualiser le service qu’ils doivent promouvoir, et de le décrire en termes de
panier d’attributs et d’avantages. En effet, si la réalité physique d’un produit est acquise, de
par son existence matérielle, la réalité associée au service est subjective, et peut varier
d’individu à individu, ou de segment à segment. Un prestataire de service présentant un haut
degré d’intangibilité (physique et/ou mentale) est donc en danger quand il croit qu’il
comprend son offre intangible, alors qu’en fait, il n’est capable que de projeter sa propre
vision subjective de la réalité du service (Shostack, 1977 ; Rushton et Carson, 1989).
Shostack (1977) donne ainsi l’exemple d’une institution bancaire de renom, qui comprenait
« la gestion des investissements » comme le travail combiné d’une large équipe d’analystes,
soutenue par des personnes ressources en IT. Lors de la restructuration du département
« Investissement » de la banque, et avec cette réalité en tête, les managers ont décidé que le
service serait plus efficacement représenté chez les clients par des commerciaux, alors que
l’interlocuteur traditionnel du client était jusque-là le gestionnaire de portefeuille. Des
commerciaux ont été engagés, formés, et envoyés en clientèle. L’échec fut total, et très vite, la
direction du Département comprit
que la « réalité » qu’elle se faisait du service offert
différait de la « réalité » vécue par les clients. Pour les clients, la « gestion des
investissements » voulait dire « le gestionnaire de portefeuille ». En remplaçant par des
commerciaux cet interlocuteur qui incarnait la réalité du service au yeux d’une majorité de
clients, la banque n’a pas pris conscience qu’elle modifiait ainsi la nature même du service tel
que vécu et compris par le client. Le nœud de ce problème de « connaissance de la réalité du
service » réside donc dans le fait de pouvoir fournir une « réalité consensuelle » du service.
Cela requiert des études de marché et des recherches préalables.
Impact sur la communication
Parce que le service est relativement immatériel et/ou plus difficile à comprendre, il est plus
difficile à présenter aux clients, ce qui complexifie les tâches de communication (p.ex.
50
Stafford, 1996 ; Mittal, 1999 ; Grove, Carlson et Dorsch, 2002). La communication doit en
effet tenter d’engendrer dans l’esprit des consommateurs une représentation mentale plus
claire et plus rapide du service ou de ses bénéfices (McDougall et Snetsinger, 1990), et donc
accroître la « réalité » du service, qui est acquise pour les produits tangibles.
Impact sur le processus de contrôle de qualité
Outre les difficultés liées à la communication, contrôler la qualité d’un service est plus
complexe que pour un produit (p.ex. Lovelock et Lapert, 1999). Dans le cadre d’un produit
tangible, il est possible de définir des normes de qualité objectives et quantifiables, qui sont
vérifiables sur une ligne de production. En matière de service, la définition de ces normes est
bien plus ardue, car les attributs intangibles sont par nature peu quantifiables et difficilement
vérifiables. Comment quantifier en effet des normes de qualité en matière d’accueil, de
sympathie ou d’empathie à l’égard du client ?
Impact sur la perception des prix
A cause notamment de leur intangibilité, l’évaluation du coût d’une « unité » de service est
une tâche généralement présentée comme plus ardue et plus délicate (Rushton et Carson,
1989). Cette proposition est néanmoins également vraie pour certains produits, et assez peu
convaincante pour beaucoup de services. Plus que l’évaluation du coût, la difficulté réside
probablement davantage dans la valeur perçue par les clients d’un élément intangible. Ainsi,
si le coût horaire d’un consultant peut être évalué par son employeur, il est plus difficile de
valoriser économiquement des éléments intangibles tels que son expertise ou sa connaissance.
Il peut dès lors être plus difficile de faire prendre conscience aux clients de la valeur du
service offert, traduite par un niveau de prix fixé. Notons que cet élément est également vrai
pour certains produits, comme des produits d’art par exemple. Mais la valeur n’est-elle pas
alors également reliée dans ce cas précis à des éléments intangibles de l’œuvre (notoriété de
l’artiste, caractère unique de l’objet, …) ?
Impact sur la protection juridique des offres commerciales
L’intangibilité des services empêche leur protection par brevet (Nollet et Haywood-Farmer,
1992). Certes, si le service est marqué, la marque peut être protégée par brevet, mais le
51
concept de service et les activités y afférentes ne peuvent être brevetés. Or, certains services
sont faciles à copier et à reproduire. Ceci nécessite donc de protéger son service par d’autres
moyens que la protection juridique. La marque de service a donc ici un rôle précis à jouer, et
fera l’objet d’une large section au chapitre 4.
Toutes ces conséquences rendent nécessaire la tangibilisation du service. Nous allons donc
maintenant décrire les principales techniques que propose la littérature pour tangibiliser le
service.
5.3. Techniques de tangibilisation d’une offre de services
Les chercheurs et les managers actifs dans le domaine des services semblent s’accorder à dire
que ceux-ci doivent être tangibilisés, pour pallier aux conséquences dommageables de
l’intangibilité. Berry (1980) propose ainsi qu’un prestataire de service peut bénéficier
d’avantages marketing s’il parvient à renforcer la « réalité » de son service et à le rendre plus
clair mentalement. Levitt (81/82) – dans un article intitulé « Pour vendre vos produits
intangibles, matérialisez-les ! » - affirme qu’il faut concrétiser les caractéristiques
immatérielles des services pour mieux vendre et fidéliser la clientèle. Reddy, Buskirk et
Kaicker (1993) affirment quant à eux que la tangibilisation des services est la clé du succès en
marketing des services.
L’objectif de la tangibilisation des services vise à réduire dans la perception des clients
l’intangibilité physique et/ou mentale du service. Il s’agit donc d’une part d’accroître la
matérialité du service dans la perception que l’on s’en fait, mais aussi de le rendre plus facile
à comprendre et à saisir mentalement.
La littérature propose plusieurs stratégies ou techniques de tangibilisation. Il est intéressant de
noter que certaines techniques de tangibilisation portent sur la matérialisation physique du
service, alors que d’autres vont davantage chercher à améliorer la compréhension du service
en tant que tel, ou de ses bénéfices. En ce sens, on peut penser que certaines techniques visent
la tangibilisation physique du service, alors que d’autres vont tenter de minimiser
l’intangibilité mentale.
52
5.3.1. L’environnement physique et les indices périphériques tangibles
L’environnement physique – appelé par Lovelock, Wirtz et Lapert (2004) le serviscène6 - est
« l’ensemble des éléments qui déterminent le style du cadre matériel de l’entreprise et créent
une atmosphère particulière pour le client » (Lovelock, Wirtz et Lapert, 2004). Il s’agit par
exemple du restaurant, du hall d’accueil d’une entreprise de service, d’un salon de coiffure, …
Les indices périphériques tangibles sont tous les éléments physiques qui entourent le service,
et qui influencent la perception que les clients en ont. Certains garagistes placent ainsi sur le
siège de votre voiture ou sur le tapis de sol une protection en papier buvard que vous
retrouvez généralement tachée lorsque vous récupérez votre voiture après une réparation.
Celle-ci montre que des mécaniciens ont bien travaillé sur votre véhicule. Le verre emballé
dans un cellophane à l’hôtel montre qu’il a bien été remplacé ou lavé. Ces indices peuvent
être nombreux et variés : les supports communicationnels, l’apparence physique du personnel
de contact, la qualité des documents écrits, l’ensemble du matériel d’opération, la camionnette
du technicien, les supports technologiques mis à la disposition du personnel, … sont autant
d’exemples de tels indices.
Soigner l’environnement physique et ses abords, et entourer l’offre de services d’indices
périphériques tangibles, constituent probablement la première et la plus importante source de
tangibilisation du service (p.ex. Shostack, 1977 ; Levitt, 1981 ; Flipo, 1988 ; Rushton et
Carson, 1989 ; McDougall et Snetsinger, 1990 ; Bebko, 2000 ; Lovelock, Wirtz et Lapert,
2004). Ces éléments peuvent être la cause première du succès, ou de l’échec le plus
dévastateur qui soit (Lovelock et Lapert, 1999). En effet, ils influencent directement la qualité
perçue du service par le client, ainsi que le processus d’évaluation (Zeithaml, 1981). De
même, ils jouent un rôle important dans le processus de prise de décision et de réduction de
l’incertitude (Levitt, 1981, Rushton et Carson, 1989). La raison est simple : parce que les
offres de services sont à dominante intangible, les clients recherchent avant achat des signaux
de qualité, et l’environnement physique constitue un signal essentiel. Les clients potentiels
vont en effet traduire la confiance qu’ils acquièrent à travers les indices tangibles en confiance
au niveau de la performance du service (Levitt, 1981). Si vous montez à bord d’un avion
flambant neuf, vous serez probablement plus rassuré sur le niveau de sécurité du vol que si
6
Le mot « servicsène » est un néologisme inventé par Christopher Lovelock et Denis Lapert pour traduire le plus
fidèlement possible le terme « Servicescape » proposé par Bitner (1992)
53
vous montez dans un avion sale et ancien. A perception de compétence égale, vous choisirez
probablement le consultant qui vous a présenté son offre de service avec un ordinateur dernier
cri et avec un projecteur miniature flambant neuf, par rapport à celui qui aura réalisé une
présentation moins soignée sans support, ou avec un support désuet. Les exemples de la sorte
sont innombrables.
Dans certains cas, l’environnement physique ne cherche pas uniquement à rassurer, mais il
fait partie intégrante du service lui-même, ou de son positionnement. Ainsi, les restaurants se
positionnent autant sur leur marché par leur décor et l’ambiance créée que par la qualité
intrinsèque des plats qui y sont servis.
Si les indices périphériques tangibles accroissent la matérialité du service dans la perception
des clients, ils peuvent également agir en faveur d’une amélioration de la compréhension du
service ou de ses bénéfices. Lorsqu’un assureur offre gratuitement, lors de la souscription
d’une assurance incendie, un détecteur de fumée à son client, il contribue à clarifier dans
l’esprit du client le rôle protecteur de l’assurance.
5.3.2. L’élément humain
Le deuxième levier de tangibilisation essentiel dans un très grand nombre d’activités de
services est le personnel de contact (p.ex. Berry, 1980 ; Flipo, 1984 et 1988 ; Lovelock et
Lapert, 1999). Dans certains cas, tout repose sur lui ou presque. Le plus souvent, il/elle est le
service ou la marque dans les yeux de ses clients. Ainsi, la Singapore Girl incarne le service
offert par la compagnie aérienne Singapore Airlines, à tel point qu’elle est devenue pour la
compagnie un véritable icône publicitaire. Elle permet de donner un visage humain à la
société, et elle symbolise le charme et la beauté asiatique, de même que le bon goût et
l’hospitalité. En ce sens, elle agit comme un véritable support à la prise de conscience et à la
compréhension de la supériorité du service offert par Singapore Airlines.
5.3.3. La marque et l’image de marque
Le développement et la gestion d’une marque est une stratégie qui permet de rendre un
service plus tangible (Berry et Parasuraman, 1991 ; De Chernatony et McDonald, 1998). Cette
proposition théorique est répandue dans la littérature, mais à notre connaissance, elle n’a pas
54
fait l’objet de tests empiriques. Ainsi, une marque de service forte permet aux clients de
mieux visualiser et comprendre les intangibles (Berry, 2000). Plus spécifiquement, dans une
perspective de tangibilisation, il importe de créer une image forte du prestataire de service
(Zeithaml et al., 1985 ; Flipo, 1988). De plus, il semble souhaitable de créer au sein de cette
image des associations à la marque qui tangibilisent la représentation mentale du service,
notamment via l’utilisation de métaphores ou de symboles (Berry, 1980 ; Levitt, 1981). Ainsi
par exemple, une assurance-vie peut vouloir vous placer sous un « écran de protection » ou
« entre de bonnes mains ». Keller (1998) ajoute également que les symboles associés à la
marque peuvent aider à rendre le service plus concret.
Une section entière du chapitre 4 est consacré à la marque et à son rôle possible sur le
processus de tangibilisation des services.
5.3.4. La communication
Le lien entre le développement et la gestion d’une marque et la communication est évident. La
communication constitue en effet un bras de levier essentiel dans la construction d’une
marque et de son image auprès du public.
Une communication efficace a le pouvoir de rendre plus tangible ce qui ne pourrait être qu’un
produit éphémère (Lovelock et Lapert, 1999). D’abord, il faut rappeler que la palette des
outils communicationnels est large : vente en face à face, service client, publicité, promotion
des ventes, relations publiques, documents de formation tels que brochures, cassettes vidéos,
logiciels, et les identités visuelles (Lovelock et Lapert, 1999).
Parmi ces outils, certains tangibilisent par leur nature même. Les brochures constituent des
indices périphériques tangibles, la vente en face à face personnalise le service et permet au
délégué commercial d’expliquer les avantages de son offre. Ce faisant, il accroît la
compréhensibilité de ce qui est proposé. Les identités visuelles sont par nature des éléments
physiques, qui jouent un rôle crucial dans la tangibilisation du service. Le papier à lettres, la
signalisation, les uniformes, les véhicules sont autant d’indices périphériques tangibles. En
outre, le logo peut clarifier un concept. Sans faire référence ici à l’univers des services, le
parapluie d’Uniroyal et son slogan « la marque au parapluie rouge » est d’une grande clarté. Il
permet d’accroître la compréhension du bénéfice principal de la marque Uniroyal, et
55
opérationalise à merveille son positionnement. Le logo de la chaîne de restaurant Exky (voir
annexe 1) traduit parfaitement le positionnement de restaurant moderne, sain et bio, et il
constitue un signal qui permet aux clients de mieux appréhender la valeur ajoutée de ce
restaurant. Le logo du TGV en France, quoi que moins visible, traduit la notion de rapidité et
de modernité, avec un formidable pied de nez graphique en utilisant l’image inversée de
l’escargot (voir annexe 1).
Parmi les outils de communication, la publicité représente généralement une part non
négligeable des budgets. La problématique de l’intangibilité dans la publicité sur les services
a fait l’objet d’un nombre important de recherches. Les questions posées sont généralement
les suivantes : comment communiquer autour d’une abstraction de manière efficace ?
Comment gérer le problème de l’intangibilité pour construire une campagne efficace ?
Comment contribuer à tangibiliser le service grâce à la publicité ?
Berry et Clark (1986) propose 4 types de techniques pour tangibiliser une offre de service en
publicité :
•
La visualisation, qui consiste en la création d’une expérience virtuelle de service pour
le client par la description, de manière vivante, d’une partie de l’expérience de
services, de ses résultats ou de ses bénéfices. L’idée est de permettre aux clients de
vivre l’expérience de service mentalement. Il s’agirait par exemple de promouvoir une
croisière en mer avec un film montrant les passagers à bord s’amusant dans différents
endroits clés du bateau. La personne qui voit ce film peut ainsi se projeter
mentalement dans l’univers de la croisière, et s’imaginer vivre l’expérience de service.
•
L’association, qui consiste à lier un objet, un lieu ou encore une personne au service,
en vue d’en accroître la compréhensibilité. La particularité de cette technique réside
dans le fait que l’élément associé ne fait pas partie du service en tant que tel, mais
qu’il consiste en un élément porteur de sens, qui peut transmettre sa signification au
service auquel il est relié. Il s’agirait par exemple pour un courtier d’assurance de
développer une publicité où il associe des phares de voiture aux services de conseil et
de courtage qu’il offre, en vue d’accentuer son rôle de conseiller en produit complexe
(les phares permettant de souligner l’éclairage qu’il peut apporter sur un univers
complexe, avec un slogan du genre « pour y voir plus clair en matière d’assurance »).
•
La représentation physique, qui, contrairement à l’association, associe au service des
éléments physiques faisant intégralement partie de l’offre de service. Il s’agit de
56
l’exemple déjà évoqué de la compagnie aérienne Singapore Airlines, qui utilise
comme icône publicitaire ses hôtesses de l’air, les Singapore Girls.
•
La documentation, qui consiste à faire usage de faits marquants, d’expériences vécues,
de chiffres ou de statistiques pour expliquer la valeur d’un service. Cette technique
cherche à apporter au client ou au prospect une information concrète, spécifique, pour
l’assister dans l’évaluation des bénéfices du service. Il s’agirait par exemple pour un
centre de dépistage du cancer du sein de faire usage de statistiques démontrant le lien
existant entre le dépistage précoce de la maladie et les chances de guérison.
Stafford (1996) a testé empiriquement deux des quatre recommandations de Berry et Clark :
la représentation physique et la documentation. Son étude conclut à une plus grande efficacité
de la stratégie de documentation par rapport à la stratégie de représentation physique, cette
dernière montrant moins d’impact sur les variables analysées (essentiellement des variables
d’attitudes).
Mittal (1999) présente également plusieurs pistes pour tangibiliser le service dans la
communication publicitaire. Sans les nommer nécessairement de la même manière, il propose
en fait presque identiquement les quatre techniques évoquées par Berry et Clark en 1986.
Ainsi, il plaide en faveur de la technique de la représentation physique, qui présente selon lui
trois avantages :
1) cela permet de créer une identité forte en montrant de façon uniforme des éléments
physiques du service ;
2) Cela donne un signal sur le niveau de qualité du service ;
3) Cela permet de créer des associations à la marque ou au service basées sur des
attributs spécifiques du service, plutôt que sur des impressions générales.
Pour être efficace, il ajoute que le choix des éléments tangibles présentés doit être rigoureux,
consistant dans le temps, et qu’ils doivent refléter un niveau de qualité sur des attributs jugés
importants par les segments visés. Mittal (1999) estime ensuite que le message doit être
spécifique, et s’appuyer sur des faits objectifs, tel que le taux de ponctualité d’une compagnie
aérienne. Il reprend ainsi les idées de la technique de documentation, en distinguant ce qu’il
nomme la documentation des systèmes – où les faits et les chiffres font référence au système
de « production » du service (le nombre d’avions en service chez DHL p.ex.) – et la
57
documentation de performance – où les faits et les chiffres portent sur la performance du
service (le pourcentage de colis livrés endéans les 24h par DHL). Mittal (1999) propose aussi
que la publicité s’appuie sur l’expérience de service des clients passés dans la communication,
soit via des procédés de témoignage, soit via la stimulation du bouche-à-oreille (sans
malheureusement en dire plus sur ces méthodes de stimulation). Il reprend également la
technique de visualisation de Berry et Clark (1986), qu’il nomme « épisode de la
consommation du service », lorsqu’il suggère qu’une option de communication intéressante
consiste à montrer des épisodes d’expérience de clients. Cela permet de communiquer des
idées abstraites, comme la joie ou le plaisir ressenti à consommer un service de loisir par
exemple. Finalement, il propose que l’impalpabilité mentale du service (faisant explicitement
référence à la composante mentale de l’intangibilité) puisse être réduite dans la publicité en
énumérant et en détaillant les étapes clés du processus de service. Il appelle cette technique
« l’épisode du processus de service ». Une mise en œuvre possible de cette technique consiste
à présenter l’histoire d’un client, en commençant par le problème du client, et en énumérant
ensuite ce que l’entreprise a fait pour finalement résoudre le problème.
CONCLUSION DU CHAPITRE 2
L’importance du concept d’intangibilité est largement reconnue, tant par le monde
académique que managérial. En effet, la nature relativement intangible d’une offre globale de
services semble affecter tout particulièrement les stratégies et les actions marketing à mettre
en œuvre pour supporter la commercialisation de l’offre de manière efficace.
Bien que central, ce concept ne fait pas à ce jour l’objet d’un consensus sur sa définition.
Aussi, ce chapitre a tenu à présenter les divergences existantes entre les différents auteurs. La
question fondamentale est de savoir si le concept d’intangibilité est purement « physique », ou
à la fois « physique » et « mental ». Ceci soulève également la question de la dimensionnalité
du concept d’intangibilité. S’agit-il d’un concept uni-, bi- ou tridimensionnel ? De plus,
l’intangibilité doit-elle être considérée comme un continuum ou comme un état discret ?
Afin d’affiner la compréhension du concept, ses conséquences tant sur le client que sur le
prestataire de service ont été présentées. La littérature sur le marketing des services s’appuie
généralement sur ces conséquences pour justifier le besoin de tangibiliser les offres de
services. Les principales techniques de tangibilisation ont alors été détaillées aux lecteurs. Il
58
est intéressant de noter à ce propos que les techniques de tangibilisation distinguent la
composante mentale de l’intangibilité, de sa composante physique, bien que les techniques de
tangibilisation physique soient largement dominantes dans la littérature.
59
60
CHAPITRE 3 : LE CONCEPT DE RISQUE PERÇU ET SON LIEN AVEC
L’INTANGIBILITE
INTRODUCTION
En 1984, Flipo synthétise la pensée largement admise que « le risque perçu par l'
acheteur de
services est plus élevé que lorsque cette même personne achète des produits ». Il ajoute
« qu’il est évident que la dominante intangible des services est la cause numéro un de cette
perception d'
un risque supérieur ».
Un grand nombre d’auteurs proposent effectivement que l’une des conséquences importantes
de l’intangibilité sur le comportement du consommateur consiste à accroître le degré de risque
perçu par le client ou le prospect (Bateson, 1979 ; George et Berry, 1981 ; Zeithalm, 1981 ;
Levitt, 1981 ; Güseman, 1981 ; Flipo, 1984 ; Finn, 1985 ; Flipo, 1988 ; Rushton et Carson,
1989 ; McDougall et Snetsinger, 1990 ; Mitchell et Greatorex, 1993 ; Breivik, Troye et
Olsson, 1998 ; Kurtz et Clow, 1998). Si certaines études ont porté sur la comparaison des
niveaux de risque associés aux services par rapport aux produits, très peu de travaux ont
spécifiquement cherché à évaluer l’impact de l’intangibilité sur le risque perçu.
Ce chapitre vise à présenter le concept de risque perçu dans une perspective marketing.
L’intérêt de l’approfondissement de l’étude de la relation entre l’intangibilité et le risque
perçu est d’abord justifié. S’ensuit une présentation du concept de risque perçu, ainsi que des
principaux travaux ayant cherché à opérationaliser le concept dans une application marketing.
Finalement, ce chapitre présente les travaux déjà réalisés sur le lien entre l’intangibilité d’une
offre de services et le risque perçu.
1. POURQUOI S'INTERESSER AU LIEN ENTRE INTANGIBILITE ET RISQUE PERÇU ?
La première raison pour laquelle nous souhaitons approfondir la relation entre l’intangibilité
et le risque perçu réside dans l’importance que le concept de risque perçu représente en
comportement du consommateur, importance accentuée par la place prépondérante que le
risque occupe aujourd’hui dans le débat public. L’actualité de ces dernières années,
61
notamment à travers les crises alimentaires répétées, a ainsi mis en évidence l’impact du
risque perçu sur le comportement du consommateur et sur la façon dont il peut affecter les
choix de consommation, et par là-même la rentabilité des entreprises. La crise de la dioxine a
par exemple fait chuter la vente de volaille et d’œufs, juste après que beaucoup de gens aient
provisoirement abandonné le bœuf suite à la crise de la vache folle. Une marque comme
Perrier n’a jamais totalement surmonté la crise du benzène qui l’a affectée en 1990. En juin
1999, l’affaire Coca-Cola éclate en Belgique. Les ventes chutent, au profit de Pepsi et surtout
de Virgin Cola. Les marchés boursiers sanctionnent le titre. Des millions de bouteilles sont
retirées du marché dans quatre pays européens. La marque d’Atlanta doit consentir
d’importants efforts financiers pour rendre confiance au public.
Toutes ces crises ont certes provoqué des réactions à l’égard de l’achat et de la consommation
de produits agro-alimentaires, mais ces réactions se sont propagées, de manière inattendue, à
l’ensemble des actes de consommation (Mallet, 2002). Filser (1998) avance ainsi l’idée que la
peur constitue l’une des forces qui modèlent le comportement du consommateur de nos jours.
Dans le même ordre d’idées, plusieurs auteurs estiment que le risque perçu semble constituer
un facteur explicatif important du comportement d'
achat, dans la mesure où le client
chercherait le plus souvent à minimiser le risque de commettre une erreur lors d'
un achat,
plutôt que de maximiser son utilité (Taylor, 1974 ; Mitchell, 1999). Nous pouvons faire ici un
parallèle avec l’étude de Burton (1990), qui suggère que le déplaisir lié à une perte est
supérieur au plaisir associé au gain. Il se base sur différentes expériences menées en
psychologie notamment. L’une d’elles consistait à présenter à des participants différents
scénarios autour d’une nouvelle maladie pouvant tuer jusqu’à 600 personnes. Un premier
groupe de sujets reçut deux scénarios possibles de traitement de la maladie. Le traitement A
permettait de sauver à coup sûr 200 personnes, alors que le traitement B présentait une
probabilité de 0.33 de sauver les 600 personnes, et une probabilité de 0.67 de ne sauver
personne. Un second groupe reçu deux scénarios identiques, mais présentés différemment. Le
traitement A était présenté comme causant la mort certaine de 400 personnes, alors que le
traitement B présentait une probabilité de 0.33 que personne ne meure, et une probabilité de
0.67 que tout le monde succombe à la maladie.
Le premier groupe choisit l’option A à concurrence de 72%. Par contre, seulement 22% des
participants du second groupe ont également choisi l’option A, pourtant identique dans ses
conséquences. Mais, dans son mode de présentation, l’option A du second groupe insiste sur
62
la « perte » d’une portion de la population malade, alors que l’option A du premier groupe
insiste sur le « gain » de vies, même si in fine, les deux options permettent de sauver le même
nombre de vies. Au terme de l’expérience, et après analyse, les chercheurs confirment que les
individus cherchent davantage à minimiser la perte perçue qu’à maximiser le gain perçu, le
niveau de déplaisir ressenti lors de la perte étant supérieur au niveau de plaisir ressenti lors du
gain.
Certes, cette expérience n’est pas réalisée dans un contexte de consommation, et la
transposition de ses résultats en matière de comportement de consommation ne peut pas être
directe. Néanmoins, elle appuie l’idée que le client cherche le plus souvent à minimiser le
risque qu’il perçoit à acheter un produit ou à utiliser un service, plutôt que de vouloir
maximiser son utilité. Bien sûr, il serait peu convaincant de vouloir généraliser ces propos à
l’ensemble des individus et à l’ensemble des produits et services. L’achat d’impulsion, par
exemple, s’inscrit probablement dans la recherche d’un plaisir immédiat, qui peut
éventuellement conduire à du regret, et donc à du déplaisir. De même, comme le propose
Kapferer (2003), certaines personnes peuvent activement chercher le risque, et l’utiliser
comme base de plaisir et d’excitation. Ils veulent de l’émotion, pas de la réassurance.
L’émergence et le succès des sports extrêmes en est une illustration. Toutefois, ces situations
extrêmes ne sont pas en tout état de cause représentatives d’une majorité de la population,
généralement plus prudente. Comme le dit Marouseau (2002, dans Mallet, 2002), « le
nouveau consommateur est probablement un mythe ; le consommateur peureux sûrement une
réalité ».
Parce qu’il affecte les modes de décision des clients en matière de consommation, le risque
perçu est directement ou indirectement à l’origine d’un nombre important de phénomènes
préjudiciables pour l’entreprise qui commercialise le produit ou le service concerné. Ces
conséquences peuvent aller du simple report de la décision d’achat ou d’utilisation du produit
ou du service, jusqu’à sa « mort » commerciale, tant son utilisation est synonyme d’un risque
que le client ne veut pas assumer (Mallet, 2002). Les entreprises se doivent donc de
comprendre ce qui est susceptible d’influencer le risque perçu à l’égard de leurs produits, de
leurs services ou de leurs marques, pour le réduire au maximum dans la perception des clients
et des prospects. Ceci nous amène à la seconde raison de l’intérêt d’étudier la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu. Tous les auteurs s’accordent à dire que les services sont
perçus comme étant plus risqués que les produits matériels, la raison essentielle étant la
63
relative intangibilité d’une offre de services. Mieux comprendre l’influence de l’intangibilité
sur le risque perçu est donc intéressant, notamment pour identifier ou affiner les stratégies
éventuelles de réduction de risque. Or, ce lien entre l’intangibilité et le risque perçu a été peu
étudié à ce jour (nous avons identifié une seule étude empirique récente sur le sujet – cf.
infra). Les études portant sur le risque perçu dans leur application au secteur des services ont
en effet essentiellement cherché jusqu’ici à comparer les niveaux de risque perçu pour les
services par rapport aux produits, sans étudier spécifiquement l’impact de l’intangibilité sur le
risque perçu. Ce lien est donc à ce jour essentiellement un énoncé théorique.
En outre, si la conceptualisation à deux composantes de l’intangibilité s’avère supérieure à la
conceptualisation purement physique, il serait intéressant de distinguer la composante mentale
de la composante physique de l'
intangibilité dans sa relation avec le risque perçu. Si
l'
intangibilité génère effectivement un supplément de risque dans la perception des clients,
est-ce imputable à la composante mentale de l'
intangibilité, à la composante physique ou aux
deux composantes, à des degrés divers ?
2. LE CONCEPT DE RISQUE PERÇU EN MARKETING
Le concept de risque perçu s’inscrit en marketing dans le cadre conceptuel général de la prise
de décision par lequel le client choisit le produit, le service, ou la marque qu’il va acheter
(Cunningham, 1967). Il fut introduit pour la première fois en marketing par Bauer, en 1960.
Ce dernier ne s'
attendait probablement pas à initier un vaste courant de recherche en
comportement du consommateur, lui qui espérait simplement « voir son concept survivre à
cette tentative d'
introduction ». Si l'
engouement a été si important, c'
est précisément parce que
les chercheurs ont vite compris que le risque perçu constituait un facteur explicatif important
du comportement d'
achat.
Bauer (1960, p.23) introduit le concept en stipulant que « le comportement du consommateur
implique un risque dans le sens où toute action du consommateur va engendrer des
conséquences qu'
il ne peut anticiper avec certitude, et dont au moins certaines seront
probablement négatives ». Le risque est donc associé à l’action du client. En outre, comme le
souligne Cunningham (1967), cette définition revêt un double aspect : d'
une part le niveau
d'
incertitude lié à l'
apparition d'
un événement (ou la probabilité d'
occurrence d'
un événement),
et d'
autre part les conséquences induites par l'
apparition de cet évènement. Kogan et Wallach
64
(1964) parlent quant à eux de deux facettes du risque perçu : l'
une liée à la « chance », où
l'
accent est mis sur la probabilité qu’un événement survienne, et l'
autre sur le danger, qui met
l'
accent sur la sévérité des conséquences négatives si elles devaient se produire. En outre,
comme le rappelle Ross (1975), Bauer (1960) décide de s'
intéresser uniquement au risque
subjectif (et donc perçu), et non au risque objectif. Nous adoptons cette même position dans le
cadre de cette recherche. En effet, en marketing, ce sont les perceptions bien plus que les
réalités objectives qui sont intéressantes à étudier. L’expérience de Burton (1990), décrite
précédemment, illustre bien l’importance de travailler au niveau des perceptions, puisque,
face à une situation objectivement identique dans ses conséquences (un même nombre de vies
sauvées), le mode de présentation des scénarios modifie la perception que les participants ont
de cette réalité, et les choix de traitements recommandés sont complètement affectés. En
outre, nous nous inscrivons résolument dans la théorie de la rationalité limitée des individus
(telle que décrite par Simon en 1959). En effet, il est inconcevable de penser qu’un individu
est capable d’appréhender l’ensemble des conséquences possibles de ses actions, de même
qu’il ne peut évaluer avec certitude les quelques conséquences qu’il est capable d’évaluer
(Bauer, 1960).
Il est également important de souligner ici que, dans des disciplines comme l’économie, la
psychologie, la théorie de la décision ou encore la théorie des jeux, le concept de risque est lié
à des situations de choix, pouvant impliquer à la fois des conséquences positives et négatives.
Il s’agit de la notion de gain et de perte d’une loterie par exemple. En marketing au contraire,
le concept de risque perçu se concentre uniquement sur les conséquences potentiellement
négatives d’un choix de consommation ou d’utilisation de service (Stone et Gronhaug, 1993).
Le cadre théorique autour du concept de risque perçu est donc plus limité en marketing que
dans d’autres disciplines.
La conceptualisation originelle proposée par Bauer a structuré le risque perçu tel qu'
il a été
majoritairement admis par la communauté scientifique (Mallet, 2002). Le risque perçu est
ainsi un construit à deux composantes (l'
incertitude, et les conséquences négatives, encore
appelées par certains auteurs perte ou importance de la perte) et multi-facettes (risque
physique, psychologique, social, financier, fonctionnel et temporel). Nous allons à présent
détailler ces deux composantes et ces six facettes du risque perçu.
65
2.1. Les deux composantes du risque perçu
Imaginez un individu ayant invité ses collègues de travail à dîner. Il est au supermarché pour
y acheter le vin qu’il va servir durant le repas. Sans être un fin connaisseur en matière de vin,
il peut éprouver une sorte de malaise, de crainte, à devoir choisir le vin, car, face à la diversité
de choix, il n’est pas certain que le vin qu’il va acheter est bon, ou qu’il se mariera bien avec
le repas. Et si le vin s’avérait être mauvais … Quelles en seraient les conséquences ? Que
penseraient ses collègues de lui ? Est-ce que cela gâcherait le repas ? Les gens seraient-ils
malades, ou auraient-ils mal à la tête le lendemain ?
Ce court exemple introduit bien les deux composantes du risque perçu. Tout achat implique
un certain niveau d’incertitude quant à de possibles conséquences en cas de mauvais choix.
2.1.1. La composante d’incertitude
La composante d'
incertitude a été peu remise en question dans la littérature. Elle caractérise le
fait que l'
individu ne peut estimer avec certitude l'
intégralité des conséquences d'
un choix
(Mallet, 2002). Le client ne peut dès lors qu'
estimer des probabilités d'
occurrence de ces
événements (Kogan et Wallach, 1964 ; Cunningham, 1967 ; Jacoby et Kaplan, 1972 ; Peter et
Tarpey, 1975 ; Taylor, 1974). A côté de cette source d’incertitude liée à la capacité limitée de
l’individu face à une situation de choix, nous pouvons également mentionner un niveau
d’incertitude que nous pourrions qualifier d’intrinsèque, et qui serait objectivement mesurable
(même si sa mesure peut être complexe). Il s’agirait par exemple de mesurer la probabilité de
gain et de perte au Lotto.
L’incertitude peut porter sur de nombreuses étapes du processus d’évaluation des
conséquences potentiellement négatives attachées aux alternatives de choix. Et le plus
souvent, l’ensemble des alternatives offertes au choix n’est pas connu avant une recherche
d’informations intensives, ni même après (Volle, 1995). Comme le souligne cet auteur,
l’estimation des attributs soulève en elle-même de nombreuses incertitudes : quels sont les
attributs les plus importants, comment les alternatives de choix se positionnent-elles sur
chacun de ces attributs, ai-je identifié l’ensemble des alternatives de choix possibles, quel est
le niveau minimum d’exigence sur chaque attribut, quel est le critère de comparabilité des
diverses alternatives, … ? Intuitivement, nous pouvons comprendre que les services soient
66
généralement caractérisés par une plus grande incertitude que les produits, essentiellement à
cause de leur nature à dominante intangible. En effet, au vu de cette nature et comme discuté
préalablement, la « réalité » même d’un service peut s’avérer peu claire pour le client ou le
prospect. Ceci rend la tâche d’identification des attributs encore plus complexe que pour les
produits, ce qui contribue à augmenter le niveau d’incertitude. En outre, le client ou le
prospect semble avoir plus de difficulté à discriminer des offres concurrentes (voir p.47),
rendant la comparaison plus complexe. Ceci contribue également à accroître le niveau
d’incertitude, car il est plus difficile de s’assurer de la supériorité de l’alternative retenue par
rapport à d’autres alternatives possibles.
2.1.2. La composante des conséquences (=composante de perte)
La seconde composante du risque perçu - les conséquences négatives, encore appelées pertes
ou importance de la perte - a fait l'
objet d'
un plus grand nombre d'
interprétations : la sévérité
des conséquences (Kogan et Wallach, 1964) ; la quantité (pas uniquement financière) qui sera
perdue si la conséquence négative se produit (Cox, 1967) ; la gravité de l'
erreur (Taylor,
1974) ; un résultat obtenu inférieur à un point de référence fixé par l'
individu (Yates et Stones,
1992). Néanmoins, la majorité des auteurs ont donné une définition opérationnelle assez
semblable de cette composante : l'
importance perçue par le consommateur d'
une conséquence
négative si elle survient (Cox, 1967 ; Cunningham, 1967 ; Perry et Hamm, 1969 ; Taylor,
1974 ; Peter et Tarpey, 1975 ; Evans, 1982 ; Laurent et Kapferer, 1986 ; Mitchell et
Greatorex, 1993 ; Ouzaka, 2001).
2.2. Les six facettes du risque perçu
Les conséquences de la perte formant une des deux composantes du risque perçu, les
chercheurs en comportement du consommateur ont très tôt tenté d’identifier les différents
types de conséquences possibles intervenant dans la perception de risque face à une situation
d’achat. Tantôt appelées dimensions du risque, tantôt appelées facettes, composantes ou types
de risque, elles recouvrent la même réalité. Nous utiliserons ici le vocable facette.
67
Roselius (1971) est un des premiers auteurs à formellement proposer différentes facettes de
risques possibles. Il en distingue quatre, qu’il explique comme suit :
•
La perte de temps : quand un produit tombe en panne, nous perdons du temps, puisque
nous devons consommer du temps pour le faire réparer ou le remplacer.
•
La perte physique : certains produits peuvent être dangereux pour notre santé ou notre
sécurité.
•
La perte d’ego : lorsque nous consommons un produit, nous pouvons parfois nous
sentir déçus vis-à-vis de nous-mêmes, ou embarrassés vis-à-vis de notre entourage.
•
La perte d’argent : quand un produit ne fonctionne pas comme il devrait, cela
occasionne une perte d’argent liée aux dépenses consenties pour le faire réparer ou le
remplacer.
En 1972, Jacoby et Kaplan proposent quant à eux cinq facettes du risque perçu pour
appréhender le risque perçu global : le risque financier (perte d’argent), le risque de
performance (le produit ne fonctionne pas comme il devrait), le risque physique (danger pour
la santé), le risque psychologique (déception de soi) et le risque social (ce que pensent les
gens de vous). En outre, une étude empirique portant sur douze produits leur permet de
conclure que ces cinq facettes expliquent environ 70% de la variance du risque perçu global
(mesuré de manière directe). Et il semblerait que le risque de performance tendrait à expliquer
plus de variance que les quatre autres facettes.
Taylor (1974) suggère seulement deux dimensions du risque perçu en examinant les types de
pertes engendrées par le processus de choix : la perte psychosociale, et la perte
fonctionnelle/économique. Kaplan, Jacoby et Szybillo (1974) insistent néanmoins pour
distinguer dans le risque psychosocial un risque social et un risque psychologique. Les
résultats de l’étude de Mitchell et Greatorex (1990), comparés à ceux de l’étude de Jacoby et
Kaplan (1972), tendent à confirmer l’intérêt de séparer ces deux facettes. Leur étude
distinguait seulement quatre facettes du risque perçu : le risque psychosocial, le risque
financier, temporel et physique. Avec ces quatre facettes, ils n’expliquent que 55% de la
variance du risque perçu global, ce qui est moins bon que l’étude de Jacoby et Kaplan (1972).
68
Si d’autres travaux portant sur l’identification des facettes du risque perçu ont suivi par la
suite, ils n’ont pas apporté de contributions véritablement nouvelles. En 1993, Stone et
Gronhaug ont proposé une synthèse des différentes facettes du risque perçu communément
admises dans la littérature ; elles sont au nombre de six :
Le risque financier est lié à la perte d'
argent en cas de conséquences négatives (mauvaise
dépense, perte d'
argent en cas de mauvais fonctionnement). Dans ce cas, le client se
demande s’il en a pour son argent ou s’il n’existe pas une alternative équivalente à prix
plus bas.
Le risque fonctionnel est lié aux aspects fonctionnels du produit ou du service, et se
rapporte au risque de défection, de mauvais fonctionnement ou de prestation
fonctionnellement inadaptée. Il s’agirait par exemple pour un client de douter des
méthodes pédagogiques proposées par une école de langue pour s’assurer que les progrès
engrangés soient significatifs.
Le risque physique représente l'
impact possible sur la santé de l'
utilisation ou du mauvais
fonctionnement du produit ou du service. Un client peut par exemple s’interroger sur le
risque d’intoxication alimentaire à aller manger dans ce restaurant à la devanture peu
attirante.
Le risque psychologique reflète une déception du client à l'
égard de lui-même en cas de
mauvais choix. Ce risque fait essentiellement référence à la peur de regretter son acte
d’achat, et éventuellement de s’en vouloir, par exemple, de s’être laissé piéger par un
commercial convaincant ou une publicité séduisante.
Le risque social reflète le fait que le client soit mal perçu par son environnement social en
cas de mauvais choix. Par exemple, que vont penser les gens de moi si j’achète cette revue
à scandale, ou si je me rends chez une astrologue ?
Le risque temporel est lié au temps passé à l'
achat du produit ou du service, à la défection
de ce dernier, ou à l’identification d’une offre alternative en cas de mauvais choix. Ainsi,
quel est le risque que le vol de mon avion soit en retard si je privilégie un vol charter à un
vol régulier ?
Stone et Gronhaug (1993) proposent en outre de mesurer un score global de risque perçu, et
un score propre à chaque facette du risque perçu, en vue d’évaluer la contribution de chacune
des facettes du risque à l’explication du risque perçu global. Leur étude a permis de conclure
que chaque facette contribue à l’explication du risque perçu global, avec au total 88% de
69
variance expliquée. En outre, il ressort de leur étude que le risque financier et le risque
psychologique représentent les deux facettes prédominantes, ce qui n’est pas en accord avec
l’étude de Jacoby et Kaplan (1972), qui concluait à une prédominance de la facette
fonctionnelle du risque. Finalement, ils ont démontré que les cinq facettes du risque
(financier, social, temporel, fonctionnel et physique) sont médiatisées par le risque
psychologique dans leur influence sur le risque perçu global.
Il faut toutefois nuancer ces conclusions par le fait que le risque perçu est largement influencé
par le type de produit ou de service acheté, de même que par le contexte et le canal d’achat
(Derbaix, 1983 ; Cases, 2001). Ainsi, Derbaix (1983) a souligné que les biens durables étaient
davantage concernés par le risque financier, les biens non durables liés à la santé par le risque
physique, et les vêtements, par le risque psychologique. Cases (2001) considère que le canal
d’achat joue un rôle important dans la perception de risque, et dans l’intensité des différentes
facettes du risque. Ainsi, l’achat d’un livre disponible en libraire ne génère pas de risque
temporel, puisque la disponibilité du livre est immédiate. Par contre, l’achat de ce même livre
via un site Internet est susceptible de générer un risque temporel élevé, traduisant le délai
d’attente possible pour obtenir l’ouvrage. Ceci peut donc expliquer partiellement pourquoi la
prédominance de l’une ou l’autre facette du risque diverge selon les différentes études.
3. OPERATIONALISATION DU CONCEPT DE RISQUE PERÇU EN MARKETING
Le concept de risque perçu a fait l’objet d’un grand nombre de travaux autour de sa mesure.
Beaucoup d’échelles de mesure ont ainsi été développées en un peu plus de quarante ans de
recherche dans le domaine. Toutefois, ces échelles ont souvent été construites dans des
contextes fort différents, avec des méthodologies spécifiques, qui rendent difficile la
comparaison entre les outils.
70
D’après Dowling (1986), le concept de risque perçu a été opérationalisé à plusieurs niveaux
d’abstraction7 :
•
Les mesures de niveau d’abstraction élevé : ces méthodes de mesure cherchent à
appréhender le trait de personnalité de l’individu à l’égard du risque, afin de décrire
son comportement en situation de choix risqué (Mallet, 2002). Il s’agit de déterminer
si l’individu est plutôt « risquophobe » ou plutôt « risquophile » en général, ou dans
un contexte d’achat particulier. L’objectif n’est donc pas de mesurer le risque perçu à
proprement parlé, mais plutôt de distinguer l’attitude intrinsèque ou spécifique des
clients ou des prospects à l’égard du risque. Des travaux comme ceux de Kogan et
Wallach (1964), Barach (1968), Woodside (1972) ou encore Raju (1980) poursuivent
cet objectif.
•
Les mesures de niveau d’abstraction moyen : l’objectif vise ici à appréhender le risque
perçu attaché à une ou différentes classes de produits ou de services. Il s’agit par
exemple de comparer des classes de produits entre elles pour les classer du plus risqué
au moins risqué. Lumpkin et Dunn (1990) proposent ainsi une échelle
unidimensionnelle qui consiste à demander à un individu d’indiquer le niveau de
risque global à l’égard d’une catégorie de produit sur une échelle sémantique
différentielle à cinq points.
•
Les mesures de niveau d’abstraction faible, pour lesquels le risque perçu est attaché à
un produit ou un service, à une marque ou à l’un de ses attributs.
Pour mesurer le risque perçu à ces différents niveaux d’abstraction, plusieurs méthodes ont
été développées, et synthétisées par Volle (1995) :
•
Les méthodes déclaratives directes : un premier ensemble de ces méthodes consiste à
estimer séparément les deux composantes du risque perçu (l’incertitude et
l’importance de la perte) par des questions directes, puis à les combiner pour obtenir
un score global de risque d’une manière multiplicative (p.ex. Cunningham, 1967), ou
parfois additive (p.ex. Bettman, 1973). Dans certains cas, ces composantes sont
maintenues distinctes (p.ex. Laurent et Kapferer, 1986). Un autre ensemble de ces
méthodes vise à obtenir une estimation directe du risque perçu global, sans
7
Le terme « abstraction » est utilisé par Dowling (1986), et repris dans la littérature sur le risque perçu. Aussi,
nous l’utilisons tel quel dans ce document. Il serait néanmoins plus judicieux de parler de différents niveaux de
généralité des différents outils de mesure, plutôt que de différents niveaux d’abstraction.
71
décomposition, à partir d’échelles ordinales ou cardinales (p.ex. Roselius, 1971 ;
Stone et Gronhaug, 1993).
•
Les méthodes indirectes : ces méthodes reposent sur la notion de variance
caractéristique des modèles multi-attributs (p.ex. Pras et Summers, 1978), ou sur une
forme d’analyse conjointe en comparant des niveaux relatifs de risque (p.ex. Havlena
et DeSarbo, 1991). Ces méthodes, lourdes et très complexes, ont été très peu utilisées
en marketing.
•
Les méthodes expérimentales, basées sur des procédures expérimentales de
manipulation. Il ne s’agit donc pas ici de mesurer le risque perçu, mais d’assigner les
individus à des groupes dont les niveaux de risque sont supposés différents, suite à une
manipulation expérimentale, et d’observer si les comportements sont différents selon
les groupes (p.ex. Dowling et Staelin, 1994).
L’objectif de notre travail consistant à appréhender le risque perçu au niveau de certains
services ou de certaines marques, nous allons nous concentrer essentiellement sur les mesures
de faible niveau d’abstraction. En outre, au vu de notre méthodologie (cf. infra), nous
travaillerons sur base des méthodes déclaratives directes, que nous allons à présent détailler
ci-après.
3.1. Les mesures de faible niveau d’abstraction basées sur des méthodes déclaratives
directes
Les échelles de mesure déclaratives de faible niveau d’abstraction ont pour objectif
d’appréhender le niveau de risque perçu associé à un produit ou un service, ou à une marque
particulière de ce produit ou de ce service. L’immense majorité des échelles développées et
utilisées en marketing se situent à ce niveau d’abstraction (Mallet, 2002). Il y a
essentiellement deux approches dans ces échelles de mesure : l’approche compositionnelle et
l’approche globale. L’approche compositionnelle consiste en l’évaluation séparée d’une seule
ou des deux composantes du risque perçu, puis en la recomposition de ces composantes en un
score global de risque. L’autre approche consiste à mesurer directement le niveau de risque
perçu global, sans passer par les composantes du risque. Les échelles les plus significatives
sont présentées plus en détail ci-après. Les plus pertinentes pour cette recherche feront l’objet
d’un examen critique dans la seconde partie du document, une fois que la méthodologie de
72
l’étude aura été précisée, et qu’il nous faudra choisir un instrument de mesure pour la présente
étude.
3.1.1. L’approche compositionnelle
Cunningham (1967)
Cunningham (1967) est l’un des premiers chercheurs à proposer une mesure à partir des deux
composantes du risque perçu, qui a servi de base méthodologique à un grand nombre de
travaux postérieurs. Il évalue séparément le degré d’incertitude et l’intensité du danger liés à
l’achat d’un produit, à l’aide de deux questions directes :
•
Diriez-vous que vous êtes absolument certain/certain/moyennement certain/pas du tout
certain qu’une marque de produit que vous n’avez jamais essayée sera aussi
satisfaisante que votre marque actuelle ?
•
Comparé avec d’autres types de produits, diriez-vous que l’utilisation de produit
présente beaucoup de danger / un certain danger / peu de danger / aucun danger) ?
Il s’efforce donc de mesurer essentiellement le risque fonctionnel. Cunningham (1967) obtient
ensuite un score global de risque perçu en combinant de manière multiplicative les deux
composantes :
Score global de risque perçu = Incertitude X conséquence
Cette recomposition permet d’obtenir un score global de risque perçu variant de 1 à 16
(chaque composante présentant 4 niveaux de réponses différents). Le problème d’une telle
échelle est qu’elle se base sur le produit de deux échelles ordinales.
Perry et Hamm (1969)
Perry et Hamm (1969) développent une échelle basée sur le principe de la somme de
l’importance de la perte. Ils se concentrent donc sur une seule des deux composantes du
risque perçu, et distinguent deux types de pertes : la perte sociale et la perte économique (=
73
perte financière). L’échelle à sept points compte deux items, un par perte. Le score global de
risque perçu est obtenu comme suit :
Score global de risque perçu =
(importance de la perte i)
i allant de 1 à 2 et distinguant le risque social et le risque financier
Cette échelle est peu satisfaisante, puisque incomplète. Elle néglige en effet la composante
d’incertitude de la perte, qui nous semble néanmoins cruciale pour appréhender le risque de
manière complète dans le cadre d’une approche de mesure compositionnelle.
Jacoby et Kaplan (1972)
En 1972, l’échelle de Jacoby et Kaplan mesure le risque perçu en considérant uniquement la
probabilité d’occurrence de différentes pertes. Leur modèle est à la fois plus limité et plus
complet que les modèles précédents. Plus limité parce que ne considérant que la probabilité
d’occurrence d’une perte (la composante incertitude donc), et plus complet, car il distingue
cinq facettes du risque perçu : les facettes financière, fonctionnelle, psychologique, sociale et
physique.
La recomposition est additive, et suit le modèle suivant :
Score global de risque perçu =
(probabilité d’occurrence de la perte i)
i allant de 1 à 5 et distinguant chaque facette du risque retenue
Pour la même raison que l’échelle de Perry et Hamm (1969), cette échelle est peu
satisfaisante, puisqu’elle se fonde sur une seule des deux composantes du risque perçu (la
composante d’incertitude).
Deering et Jacoby (1972)
Deering et Jacoby proposent en 1972 un modèle de mesure du risque perçu beaucoup plus
complexe, basé sur la construction de trois mesures composites mettant en relief des
dimensions différentes des composantes d’incertitude et de conséquences.
74
Ces trois mesures composites se calculent à partir de réponses données à dix questions :
1) A quel point êtes-vous sûr qu’une marque de ce produit que vous n’avez jamais essayée
auparavant est aussi efficace que celle que vous utilisez à présent ?
2) Il est généralement admis que certains produits ne sont pas aussi efficaces que d’autres. En
comparaison avec d’autres produits, quel degré de danger pensez-vous qu’il existe à essayer une
marque de ce produit que vous n’avez jamais utilisée auparavant ?
3) A quel point êtes-vous sûr de votre jugement sur la qualité de ce produit ?
4) Acheter un produit qui procure une satisfaction peut être plus important pour certains des produits
mentionnés. A quel point est-il important pour vous que ce produit vous procure une satisfaction ?
5) Lors de l’achat d’un produit, vous investissez du temps, de l’effort et de l’argent. En termes de
temps, d’argent et d’effort global nécessaires pour l’achat d’un produit, quel est le degré de votre
investissement ?
6) Est-ce que les consommateurs peuvent en général anticiper la fiabilité de ce produit s’il est utilisé
pendant une longue période ?
7) Avant d’acheter ce produit, est-ce que quelqu’un peut vous donner des assurances sur les matériels
utilisés pour sa production et sur la façon dont ils sont assemblés ?
8) Avant l’achat de ce produit, le consommateur peut-il prévoir les conséquences de sa défectuosité
éventuelle ?
9) En général, est-ce que ce produit satisfait vos attentes ?
10) Est-ce que les raisons pour lesquelles une personne telle que vous désire ce produit sont
évidentes ?
La première mesure – appelée CM-1 – retient les deux questions développées par
Cunningham (1967), qui évaluent l’incertitude et le danger. Elle se calcule comme suit :
CM-1 = (1 X 2)
càd la réponse donnée à la question 1 multipliée par la réponse donnée à la question 2
La deuxième mesure – CM-2 – concerne l’incertitude, et met en relief les différences de
capacité individuelle à prédire les attributs du produit. Elle combine les questions 3, 4 et 5 de
manière multiplicative :
CM-2 = {3 X [(4+5)/2]}
75
La troisième mesure – CM-3 – concerne les conséquences, et combine les questions 4, 5, 6, 7,
8, 9 et 10.
CM-3 = [(4+5)/2] X [(6+7+8+9+10)/5]
Finalement, le score global de risque perçu est recomposé en additionnant les trois mesures
CM-1, CM-2 et CM-3.
Cette mesure lourde et complexe nous semble suspecte à plusieurs égard. D’abord, plusieurs
des 10 questions s’éloignent parfois fortement de la notion de risque. De plus, une question
comme la numéro 7 porte sur des éléments de réassurance à l’égard du risque, c’est-à-dire une
stratégie de réduction de risque. Il s’agit donc d’une contamination de la mesure du risque
perçu (Cases, 2001). En outre, la construction des trois scores et la recomposition ne sont pas
justifiées. Les scores présupposent par exemple un poids identique entre les différents items
dans l’évaluation du risque. Pourquoi ? Certains items sont additionnés, alors que d’autres
sont multipliés. Pourquoi ? En outre, ce mode de recomposition empêche le calcul d’indices
de fiabilité et de validité.
Peter et Tarpey (1975)
L’échelle de Peter et Tarpey (1975) est la première à introduire simultanément l’évaluation du
degré d’incertitude et du degré d’importance de la perte pour les six facettes du risque. Elle a
ainsi constitué un tournant dans la mesure du risque perçu, et a été largement utilisée en
marketing.
Peter et Tarpey s'
appuient sur le modèle de risque suivant :
OPR =
Où
6
( PLij * ILij )
i =1
OPR = Score global de risque perçu
PLij = probabilité de la perte i lors de l'
achat du produit/de la marque j
ILij = importance de la perte i lors de l'
achat du produit/de la marque j
76
i représente les 6 facettes du risque (physique, financier, psychologique, social,
fonctionnel et temporel).
L'
échelle se présente comme suit :
Pour mesurer la probabilité d'
occurrence des conséquences négatives, les répondants sont
invités à répondre à la question « Selon vous, quelle est la probabilité pour que l'
achat de
… entraîne les conséquences suivantes ? » sur une échelle bipolaire à 5 points, allant de
« très peu probable » à « fortement probable ».
Pour mesurer l'
importance des conséquences négatives, la question « Indiquez maintenant
d'
une croix l'
importance que vous accorderiez à chacune de ces conséquences si elles se
produisaient » est proposée aux répondants sur une échelle bipolaire à 5 points, allant de
« Ce n'
est pas du tout important » à « C'
est extrêmement important ».
Chaque facette du risque (les conséquences) est opérationalisée par les items suivants :
Tableau 3.1. Items utilisés par l’échelle de Peter et Tarpey (1975)
Facettes du risque
Items
Physique
L'
utilisation (ou la consommation) de … peut être dangereuse pour la santé
Fonctionnel
La qualité de … peut se révéler non conforme à mes attentes
Financier
L'
achat d'
un … peut représenter une mauvaise dépense (=perte d'
argent en
cas de mauvais fonctionnement, dépense plus coûteuse que prévue,
existence d'
un modèle équivalent à prix plus bas)
Psychologique
L'
achat d'
un … peut entraîner une déception vis-à-vis de moi-même
(possibilité d'
être déçu de soi à cause d'
un mauvais choix)
Social
Le … que l'
on achète peut donner une mauvaise image de soi à son
entourage
Temporel
L'
achat et/ou l'
utilisation d'
un … peut me faire perdre du temps
Le score global de risque perçu peut donc varier de 6 (toutes les probabilités et toutes les
importances sont égales à 1) jusqu'
à 150 (toutes les probabilités et toutes les importances sont
égales à 5).
Cette échelle, considérée par beaucoup comme une des mesures les plus avancées du risque
perçu, fera l’objet d’une large discussion en partie 2 du présent document.
77
Laurent et Kapferer (1986)
L’échelle de mesure du risque perçu proposée par Laurent et Kapferer (1986) s’intègre en fait
dans le concept plus large d’implication (les deux composantes du risque perçu faisant partie
dans leur modèle des cinq facettes de l’implication).
Laurent et Kapferer (1986) mesurent séparément l’importance perçue des conséquences
négatives d’un mauvais achat (3 items) et la probabilité subjective de faire un mauvais achat
(2 items).
Le problème majeur de cette échelle réside dans le fait que les auteurs ne mentionnent pas la
méthode de recomposition des composantes en un score global. Ils conservent les deux
composantes distinctes avant de réaliser des analyses factorielles complémentaires. Par
contre, l’avantage de leur approche porte sur la possibilité – au vu de l’opérationalisation de
chaque composante – de calculer un score de fiabilité et de validité. Ceci était jusqu’ici
impossible, au vu des modèles compositionnels développés. Laurent et Kapferer ont calculé
pour chaque composante l’Alpha de Cronbach, qui s’élève à 0,72 pour l’importance de la
perte et à 0,54 pour la probabilité de faire un mauvais choix. Ces scores traduisent un niveau
de fiabilité assez moyen, voire mauvais sur la composante de probabilité.
Conclusion sur les échelles de mesure basées sur l’approche compositionnelle du risque
Parmi les échelles de mesure proposées dans le cadre de l’approche compositionnelle du
risque, l’échelle de Peter et Tarpey (1975) est la plus avancée (Mallet, 2002), et dès lors la
seule qui soit susceptible de retenir notre attention. Il s’agit en effet du seul instrument de
mesure qui incorpore à la fois les deux composantes du risque perçu (incertitude et
importance des conséquences négatives) et les six facettes du risque perçu. En outre,
contrairement à l’échelle de Laurent et Kapferer (1986), elle propose un modèle de mesure
qui permet de calculer un score global de risque perçu, ce qui est essentiel dans la recherche
qui nous occupe, comme nous l’expliquerons ci-après.
78
Nous discuterons donc plus en détail des avantages et des inconvénients de cet instrument de
mesure dans la partie méthodologique de la thèse, lorsqu’il nous faudra sélectionner une
échelle de mesure du risque perçu pour la présente recherche.
3.1.2. L’approche globale
Pour rappel, l’approche globale de mesure du risque perçu se caractérise par la volonté de
mesurer directement le niveau de risque perçu global, sans passer par les composantes et les
facettes du risque.
Comme le signale Volle (1995), la décomposition du risque perçu en deux composantes est
avant tout heuristique, et les questions de recherche essentielles se posent davantage au niveau
du risque global. Au terme d’une large étude sur le risque perçu, Mallet (2002) conclut que
« la prise en compte du risque perçu global a plus de sens quant à la compréhension du
comportement du consommateur, ce dernier réagissant en fonction d’un sentiment global
d’incertitude, et non uniquement en fonction d’une facette particulière. En outre, les résultats
de recherches qui ont tenté d’évaluer la préférence du consommateur à l’égard des méthodes
de réduction de risque (Roselius, 1971 ; Mitchell et Greatorex, 1989) convergent dans ce
sens. Il semblerait en effet que le consommateur choisisse davantage là où les méthodes de
réduction de risque en fonction du niveau global de risque qu’il perçoit, plutôt qu’en fonction
des facettes dominantes du risque ».
Dans cette logique, certains auteurs se sont interrogés sur la pertinence d’appréhender
directement le risque perçu global, sans passer par une décomposition en ses composantes et
ses facettes, puis une recomposition en un score global de risque. Pour eux, il n’y a pas
nécessairement équivalence entre le score global de risque perçu obtenu par recomposition, et
le risque perçu global, essentiellement à cause de problèmes d’ordre méthodologique.
L’approche de décomposition-recomposition soulève en effet de nombreuses questions,
essentiellement au niveau de la recomposition des facettes et des composantes du risque en un
score global. Certains ont défendu une approche de recomposition multiplicative du risque
perçu global (Cunningham, 1967 p.ex.), d’autres ont privilégié une approche exclusivement
additive (p.ex. Jacoby et Kaplan, 1972 ; Mitchell et Greatorex, 1990). De plus, la très grande
majorité des études donnent un poids équivalent à chaque facette. Et les méthodes de
recomposition soulèvent d’autres difficultés, comme l’impossibilité de calculer des scores de
79
fiabilité ou de validité. Toutes ces questions seront approfondies dans la suite de ce document,
lorsqu’il s’agira de choisir un instrument de mesure pour la présente étude.
La plupart des échelles développées pour appréhender le niveau de risque perçu global sont
unidimensionnelles. La plus utilisée est celle de Spence, Engel et Blackwell (1970). Elle
comporte un seul item visant à mesurer le risque perçu à l’égard de l’achat d’un produit dans
une situation spécifique sur une échelle sémantique différentielle à cinq points, allant de « très
peu risqué » à « extrêmement risqué ». En 1972, Jacoby et Kaplan – à côté de l’approche par
les cinq facettes de risque décrites ci-dessus – mesurent directement le risque perçu global à
l’aide de l’item suivant : « En gros, et en considérant tous les facteurs combinés, quel risque y
a-t-il à acheter une marque inconnue de produit ? » sur une échelle sémantique différentielle à
neuf points allant de « pas du tout risqué » à « extrêmement risqué ». Ayant mesuré à la fois
le risque perçu de manière globale et via cinq des six facettes du risque, ils trouvent que les
cinq facettes utilisées permettent d’expliquer environ 70% de la variance totale du risque
perçu global.
En 1993, Stone et Gronhaug proposent une mesure multi-items du risque perçu global. Ils
partent du constat que la recherche sur le risque perçu s’est beaucoup trop focalisée sur les
composantes et les facettes du risque perçu, en ignorant le plus souvent la mesure directe du
risque perçu global. En outre, ils critiquent largement les méthodes de recomposition d’un
score global de risque, qu’ils jugent fausses, car mal construites.
Les trois items développés par Stone et Gronhaug (1993) sont les suivants :
1) Globalement, l'
idée d'
acheter un ordinateur personnel dans les 12 prochains mois me
rend inquiet(e) à la pensée des pertes éventuelles qui résulteront de l'
achat.
2) Tout compte fait, je pense que je commettrais une erreur si j'
achetais un ordinateur
personnel pour m'
en servir à la maison, dans les 12 mois à venir.
3) En fin de compte, je pense vraiment que l'
achat d'
un ordinateur personnel dans les 12
prochains mois m'
apporte des tracas dont je pourrais bien me passer.
Ce mode de mesure permet à Stone et Gronhaug (1993) de calculer un Alpha de Cronbach,
qui s’élève à 0,686.
80
Outre la mesure du risque perçu global en 3 items, ils proposent également de mesurer les six
facettes du risque perçu identifiées dans la littérature, chacune par trois items. Ceci leur
permet d’utiliser les méthodes d’équations structurelles, leur évitant ainsi le problème de la
recomposition du risque perçu en un score global. Comme déjà discuté, leur étude conclut
que chaque facette contribue à l’explication du risque perçu global, avec 88% de variance
expliquée. Ceci est donc beaucoup plus satisfaisant que l’étude de Jacoby et Kaplan (1972).
L’échelle de mesure du risque perçu global de Stone et Gronhaug (1993) a été utilisée par
d’autres chercheurs (Stone et Masson, 1995 ; Dholakia, 1997 ; Laroche et al., 2003). L’étude
de Dholakia (1997) présente un Alpha de Cronbach de 0,8057 pour le risque perçu global, et
les six facettes expliquent cette fois 84,3% de la variance du risque perçu global. Laroche et
al. (2003) obtiennent quant à eux un Alpha de 0,86. En outre, ils testent avec succès la validité
convergente du modèle de mesure du risque perçu global.
Dans cette section, nous avons voulu présenter aux lecteurs les différentes échelles de mesure
les plus significatives développées pour appréhender le concept de risque perçu. Parmi toutes
les échelles présentées, deux ont plus largement été utilisées en marketing (Mallet, 2002) :
celle de Peter et Tarpey (1975) et celle de Stone et Gronhaug (1993). Ajoutons que l’échelle
de Stone et Gronhaug (1993) est la seule pour laquelle la fiabilité et la validité ont été
vérifiées et validées. Ces échelles reposent sur une logique très différente : la logique de la
décomposition-recomposition pour celle de Peter et Tarpey (1975), et la logique de la mesure
globale multi-items pour celle de Stone et Gronhaug (1993). Dans la partie relative au choix
des instruments de mesure dans cette étude, nous discuterons en profondeur des avantages et
des inconvénients de ces deux outils de mesure, pour déterminer le meilleur instrument à
utiliser dans cette recherche.
4. PRÉSENTATION
DES ÉTUDES EXISTANTES SUR LE LIEN ENTRE L’INTANGIBILITÉ ET LE
RISQUE PERÇU
4.1. Les principales études empiriques portant sur le risque perçu dans l’univers des
services
La majorité des études portant sur le risque perçu dans un contexte de services ont cherché à
évaluer le risque à l’égard des services, par rapport au risque à l’égard des produits.
81
En 1976, Lewis (dans Mitchell et Greatorex, 1993) propose d’étudier le risque perçu associé à
18 entités, 13 étant des services et 5 étant des produits. Dans chaque cas, l’étude conclut que
le risque associé aux services est supérieur au risque associé aux produits, excepté sur la
facette physique du risque, où il n’a pas identifié de différence significative.
L’étude de Guseman (1981) compare également le niveau de risque associé à 10 produits et à
10 services, en demandant aux répondants d’évaluer l’incertitude et le danger sur deux
échelles à quatre points. L’étude conclut que le risque perçu à l’égard des services est
systématiquement supérieur au risque perçu à l’égard des produits.
George, Weinberger et Kelly (1985, dans Murray et Schlacter, 1990) sont néanmoins d’avis
que cet énoncé généraliste pourrait être remis en question. L’étude de Guseman (1981) a en
effet porté sur des produits et des services variant fortement au niveau de leur prix, de la
familiarité et de l’implication associée. Ces auteurs suggèrent dès lors que le supplément de
risque identifié dans l’étude de Guseman (1981) pourrait ne pas être imputable à la nature
« service » de l’entité analysée, mais plutôt à d’autres facteurs d’influence (le prix étant un
facteur jugé important). Ces auteurs proposent dès lors de comparer quatre produits et quatre
services dits « miroirs » : des verres de lunettes et un examen de la vue ; une télévision
couleur et la réparation d’une télévision ; l’achat d’un tapis et le nettoyage d’un tapis ; et
finalement l’achat d’une montre et la réparation d’une montre. Leur conclusion suggère que
l’énoncé généraliste ne tient pas pour chaque paire analysée.
En 1990, Murray et Schlacter proposent une nouvelle étude basée sur une méthodologie
expérimentale. Ils partent des faiblesses des deux études précédentes. L’une d’elles consiste
en la validation de la perception par les participants de la différence entre le caractère
« service » et le caractère « produit » des entités analysées. Pour ce faire, ils demandent aux
participants d’évaluer chaque entité analysée sur une échelle sémantique différentielle à 7
points, allant de « 100% produit physique » à « 100% service ». Une autre précaution consiste
à contrôler un facteur d’influence jugé majeur : la perception de prix. Finalement, ils
contrôlent également le niveau de familiarité associé aux entités analysées. Au terme de cette
procédure, ils retiennent cinq entités à connotation « produit » forte, cinq entités à connotation
« service » forte, et cinq entités mixtes. Ces quinze entités varient toutes dans un même
intervalle de prix perçu, et de niveau de familiarité associé. Une procédure expérimentale
82
permet ensuite d’évaluer le niveau de risque global associé à ces quinze entités, et d’évaluer
chacune des six facettes du risque. L’étude conclut que le risque perçu global est fortement
corrélé avec la position de l’entité sur le continuum produit-service. Les entités « produits »
sont jugées moins risquées que les entités mixtes, elles-mêmes jugées moins risquées que les
entités « services ». Ce résultat est confirmé au niveau des facettes du risque perçu, sauf pour
le risque financier et le risque fonctionnel, dont l’intensité ne va pas croissant avec l’évolution
sur le continuum des entités « produits » vers les entités « services ».
L’étude de Murray et Schlacter (1990) est probablement l’une des études les plus élaborées
dans l’étude du risque perçu dans un contexte de services. Sans spécifiquement proposer une
classification des entités analysées sur un continuum d’intangibilité, elle les classe sur un
continuum produit-service. Ceci est particulièrement intéressant, mais ne permet toutefois pas
d’évaluer la contribution éventuelle de l’intangibilité au risque perçu, souvent présentée
comme expliquant pourquoi les services sont jugés comme plus risqués que les produits (p.ex.
Flipo, 1984).
Lorsque nous avons commencé cette recherche, nous n’avons identifié aucun travail visant à
explicitement étudier le lien entre l’intangibilité et le risque perçu. En 2003 toutefois, une
étude très intéressante est publiée, qui traite spécifiquement de cette question : l’étude de
Laroche, Bergeron et Goutaland (2003).
4.2. L’étude de Laroche et al. (2003), étudiant le lien entre intangibilité et risque perçu
Suite à leur travaux de 2001, Laroche et al. (2003) proposent de tester la relation entre les
trois dimensions identifiées de l’intangibilité et le risque perçu global. Ils utilisent pour ce
faire l’échelle tridimensionnelle de l’intangibilité qu’ils ont développée en 2001, ainsi que
l’échelle de Stone et Gronhaug (1993) pour mesurer le risque perçu global. De plus, ils
proposent d’étudier l’impact de la connaissance et de l’implication comme variables
modératrices possibles.
Pour rappel, leur conception tridimensionnelle de l’intangibilité propose la dimension
« intangibilité physique », la dimension « intangibilité mentale » et la dimension
« généralité » (cfr. p.39).
83
L’étude, conduite sur un échantillon de convenance de 472 étudiants, porte sur trois services
(coupe de cheveux chez le coiffeur, dîner dans une pizzeria et compte chèque) et trois
produits (jeans, compact disque et ordinateur). Ces entités sont celles qui avaient été utilisées
dans leur étude de 2001.
L’analyse de l’ensemble des résultats conclut à un impact significatif des trois dimensions de
l’intangibilité sur le risque perçu global, comme l’indique la figure ci-dessous.
Figure 3.1 : Liens entre les dimensions de l’intangibilité et le risque perçu
Intangibilité
physique
Généralité
Intangibilité
mentale
0,16 (2,15)
0,17 (2,26)
Risque perçu
0,48 (5,40)
En gras : le lien structurel
(Entre parenthèse : le T de Student)
Les trois dimensions de l’intangibilité expliquent 25% de la variance du risque perçu global.
Il est intéressant de noter que la dimension « intangibilité mentale » explique une plus grande
part de variance du risque perçu global que les deux autres dimensions.
Les variables de connaissance et d’implication ont également été retenues comme variables
modératrices possibles. Le tableau ci-dessous présente la façon dont les résultats sont affectés
selon le niveau de connaissance, et le niveau d’implication.
84
Tableau 3.2 : Liens structurels par niveau de connaissance et d’implication
Connaissance faible
Connaissance élevée
Lien structurel
T de Student
Lien structurel
T de Student
PHYS
RISQUE
0,28
2,78
0,05 (n.s.)
0,40
MENT
RISQUE
0,52
4,10
0,50
3,25
0,32
0,28
0,01 (n.s.)
0,05
GENER
RISQUE
Implication faible
Implication forte
Lien structurel
T de Student
Lien structurel
T de Student
PHYS
RISQUE
0,02 (n.s.)
0,26
0,44
3,19
MENT
RISQUE
0,31
2,73
0,80
5,20
0,13 (n.s.)
1,24
0,25
1,81
GENER
RISQUE
Les variables « connaissance » et « implication » affectent profondément l’intensité de la
relation entre les trois dimensions de l’intangibilité et le risque perçu global.
En cas de connaissance faible, les trois dimensions de l’intangibilité affectent le risque perçu
global de façon significative, la dimension « intangibilité mentale » étant davantage reliée au
risque que les deux autres dimensions. Par contre, en cas de connaissance élevée, ces
conclusions sont profondément modifiées, puisque seule l’intangibilité mentale exerce un
impact significatif sur le risque perçu global.
L’implication modifie également l’intensité des relations : en cas d’implication faible, la seule
dimension de l’intangibilité exerçant un impact significatif sur le risque perçu est
l’intangibilité mentale. En cas d’implication, forte par contre, les trois dimensions de
l’intangibilité sont significatives dans leur relation avec le risque perçu global.
Ces résultats sont intéressants, dans la mesure où l’intangibilité est souvent considérée dans la
littérature dans sa perspective exclusivement physique. Lorsque la littérature affirme que la
nature à dominante intangible des services induit un supplément de risque par rapport aux
produits, elle sous-entend généralement que c’est le manque de matérialité du service qui est
la cause essentielle de ce supplément de risque. Les résultats de cette étude remettent donc en
question cet énoncé théorique largement répandu. En effet, en cas de connaissance élevée ou
85
d’implication faible à l’égard des produits ou des services, cette étude suggère que la
dimension physique de l’intangibilité et la généralité n’exercent plus d’impact significatif sur
le risque perçu.
Cette étude fera l’objet d’une analyse critique dans la seconde partie de cette thèse.
CONCLUSION DU CHAPITRE 3
Si l’intangibilité des services est un concept central en marketing des services, le risque perçu
est tout aussi important en comportement du consommateur, car il en constitue une variable
explicative importante. Comme nous l’avons détaillé, le risque perçu associé à une offre
commerciale peut être largement préjudiciable à l’entreprise qui commercialise cette offre, car
il affecte directement le processus de décision – et donc de choix – du client.
Le présent chapitre a présenté en détail le concept de risque perçu en marketing. La
composante d’incertitude et la composante de l’importance des conséquences négatives ont
été développées, de même que les différentes facettes du risque (financier, social,
psychologique, fonctionnel, physique et temporel). En outre, l’examen des instruments de
mesure du risque perçu en marketing a essentiellement mis en avant deux échelles devant
retenir notre attention : celle de Peter et Tarpey (1975) et celle de Stone et Gronhaug (1993).
Ces deux échelles sont difficilement comparables, car fondées sur des approches très
différentes : l’approche compositionnelle pour la première, l’approche globale pour la
seconde. Dans la section du document relative au choix des instruments de mesure, nous
discuterons plus en détail des avantages et des inconvénients de ces deux outils de mesure, en
vue de sélectionner l’échelle jugée la plus pertinente.
Finalement, une synthèse des travaux existant en matière de risque perçu dans un contexte de
services a été présentée. Il en ressort que les services semblent être perçus comme étant
significativement plus risqués que les produits matériels lorsque des contraintes de
comparabilité sont prises en considération (même ordre de prix, même niveau de familiarité),
mais que cette conclusion ne peut pas s’appliquer à toutes les facettes du risque. De plus, la
seule étude identifiée portant spécifiquement sur l’analyse du lien entre l’intangibilité et le
risque perçu a été présentée, et sera analysée plus en détail dans la partie 2 de ce document.
86
CHAPITRE
4:
VARIABLES
D’INFLUENCE
MOBILISEES
DANS
CETTE
RECHERCHE
INTRODUCTION
La littérature sur le marketing des services suggère l’existence de variables pouvant influencer
à la fois le degré d’intangibilité perçue d’une offre globale de services, et sa relation avec le
risque perçu. Ce chapitre vise à présenter certaines de ces variables susceptibles d’influencer
la relation entre l’intangibilité et le risque perçu, ainsi que chacun de ces concepts considéré
isolément.
Comprendre la nature de l’influence de ces variables est intéressant à plusieurs égards.
D’abord, ces variables permettraient d’affiner notre compréhension de la perception
d’intangibilité d’une offre de services. En outre, elles permettraient de mieux comprendre la
nature et l’intensité de la relation entre l’intangibilité et le risque perçu, ce qui permettrait de
discuter de la pertinence ou de l’efficacité des techniques de tangibilisation, notamment dans
une perspective de réduction de risque. Finalement, certaines de ces variables pourraient
constituer de nouveaux critères de segmentation si elles s’avèrent être discriminantes dans la
perception que les gens ont des services et/ou du risque qu’ils y associent.
Sur base de notre revue de la littérature, nous avons décidé d’étudier l’impact des variables
suivantes sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu, ou sur ces concepts considérés
isolément :
•
Le degré de connaissance de l’individu à l’égard du service ou de la marque ;
•
Le degré d’utilisation de l’individu à l’égard du service ou de la marque ;
•
La marque de service, quant à son influence possible sur le processus de
tangibilisation des services et de réduction du risque perçu ;
Nous allons maintenant présenter plus en détail chacune de ces variables, la raison de leur
prise en considération, ainsi que les travaux déjà réalisés à propos de leur influence possible
87
sur nos relations ou variables d’intérêt. Dans un souci de clarté, nous allons présenter les
variables retenues de manière séquentielle :
•
Nous présentons d’abord les variables de connaissance et d’utilisation, regroupées sous la
bannière des variables de segmentation.
•
Nous présentons ensuite le concept de marque de services, et son rôle possible sur le
processus de tangibilisation des services, de même que son rôle en tant que réducteur de
risque perçu.
•
Finalement, nous présentons des variables de classification des services. Ces variables ont
pour objectif de regrouper différents services entre eux, selon qu’ils partagent des
caractéristiques communes. Ces variables ne feront pas l’objet d’un test formel
d’influence sur nos variables et relations d’intérêt, mais elles seront utilisées dans le cadre
du design de l’étude finale.
1. LES VARIABLES DE SEGMENTATION
Une entreprise ne peut généralement pas s’adresser à l’ensemble des acheteurs potentiels
composant un marché. Ceux-ci sont trop nombreux, dispersés et hétérogènes dans leurs
besoins, leurs attentes et leurs modes d’achat (Kotler et Dubois, 2000). Nul ne contestera dès
lors l'
importance en marketing de la démarche de segmentation des marchés. Cette démarche
bien connue en marketing stratégique consiste en un découpage du marché en des sousensembles homogènes en termes de besoins, de comportements, de motivations d’achat, qui
sont susceptibles de constituer des marchés potentiels distincts (Lambin et Chumpitaz, 2001).
Les variables permettant ce découpage se regroupent en deux catégories selon qu’elles
décrivent des caractéristiques des consommateurs (socio-démographiques, géographiques ou
psychographiques), ou qu’elles expriment les réponses de ces derniers (avantages recherchés,
variables comportementales) (Kotler et Dubois, 2000 ; Lambin et Chumpitaz, 2001).
Dans le vaste univers des services, les facteurs pouvant influencer le niveau d'
intangibilité
perçue pourraient constituer des critères pertinents pour mieux comprendre les individus qui
composent les marchés. Ces variables pourraient donc constituer de nouvelles variables de
segmentation, ou à tout le moins, l’utilisation de ces variables dans la démarche de
88
segmentation pourrait apporter une information supplémentaire sur les spécificités des cibles
visées, et sur les actions à mettre en place pour prendre ces spécificités en considération.
Observons donc plus en détail certaines de ces variables, de nature à influencer le degré
d’intangibilité d’une offre de services, et à constituer des variables de segmentation.
1.1. Le degré de connaissance du service ou de la marque
Plusieurs auteurs suggèrent que le degré de connaissance d'
un service ou d’une marque est
susceptible d'
influencer tant le degré d'
intangibilité perçue que le niveau de risque associé à ce
service (McDougall et Snetsinger, 1990 ; Murray et Schlacter, 1990 ; Ward, 1996 ; Breivik, et
al., 1998 ; Laroche et al., 2001 ; Laroche et al., 2003).
La connaissance est un concept qui a été largement utilisé et étudié en comportement du
consommateur. Malgré cette utilisation importante du concept, on peut noter un certain
désaccord autour de sa définition, ainsi que de son opérationalisation (Aurier et Ngobo, 1999 ;
Feick, Park et Mothersbaugh, 1994, dans Korchia, 2004).
En 1995, Engel, Blackwell et Miniard proposent une définition simple du degré de
connaissance dans une perspective marketing : il s’agit de l’ensemble des informations
relatives aux marchés, et stockées en mémoire. Dans la même idée, Korchia (2004) propose
que la connaissance d’une catégorie de produits ou de services représente les informations
relatives à cette catégorie, et stockées dans la mémoire à long terme des individus. De manière
similaire, il propose que la connaissance à l’égard d’une marque représente les informations
relatives à cette marque, stockées dans la mémoire à long terme des individus.
Jusque dans les années 85, la connaissance a été majoritairement traitée dans la littérature
comme un concept unidimensionnel, le plus souvent en faisant référence à la familiarité ou à
la connaissance antérieure (Alba et Hutchinson, 1987). La connaissance était alors décrite
comme le fait que l’individu peut posséder un certain niveau d'
expérience ou d'
information à
propos du produit ou du service. Néanmoins, un grand nombre de recherches sur
l'
opérationalisation de ce concept a amené les chercheurs à envisager le degré de connaissance
comme étant multidimensionnel. Toutefois, le contenu et la dimensionnalité de la
connaissance varient grandement d'
auteur à auteur.
89
Ainsi, Alba et Hutchinson ont écrit en 1987 un des articles les plus cités sur l'
étude de la
connaissance d'
un produit ou d’un service. Ils considèrent que la connaissance possède deux
composantes : la familiarité d'
une part, et l'
expertise d'
autre part.
•
La familiarité est définie comme le nombre d'
expériences liées au produit ou au
service étudié, que le client a accumulées.
•
L'
expertise est définie quant à elle comme la capacité de l'
individu à réaliser avec
succès des tâches autour du produit ou service étudié.
Ces définitions n’étant pas totalement explicites, ces auteurs précisent davantage la nature de
ces concepts. Ainsi, l'
expérience est appréhendée au sens large. Elle inclut : l'
exposition
publicitaire, la recherche d'
informations, l'
interaction avec une force de vente, l'
achat et le
niveau d'
utilisation du produit ou du service. L'
expertise fait référence à la structure cognitive
des individus (p.ex. les croyances autour du produit, les perceptions des attributs d’un produit)
et aux processus cognitifs (p.ex. les règles de décision de l'
individu dans le choix d'
un produit)
nécessaires à la réalisation avec succès des tâches autour du produit.
Korchia (2004) juge néanmoins que, si la définition selon laquelle la connaissance est un
ensemble d’informations stockées en mémoire est retenue, la familiarité telle que définie par
Alba et Hutchinson (1987) est un antécédent de la connaissance, puisque c’est suite à ses
expériences que le client va être à même de collecter, puis de stocker les informations. Dans
la même idée, il propose que l’expertise telle que définie par ces auteurs soit vue comme une
conséquence de la connaissance, puisque c’est à partir des informations accumulées autour du
produit, du service ou de la marque que le client est capable d’accomplir des tâches liées au
produit.
Pourtant, cette confusion entre la connaissance elle-même et ses antécédents ou ses
conséquences est très présente dans la littérature. Ainsi, si Alba et Hutchinson (1987)
considèrent la familiarité comme un synonyme de l'
expérience au sens large, certains auteurs
utilisent ce terme comme étant synonyme de la connaissance (Johnson et Russo, 1984). Des
auteurs comme Gharbi (1998) estiment que la connaissance est constituée des deux
dimensions que sont l'
expérience et la familiarité. Nantel et Robillard (1990) ont identifié
deux pôles de recherche concernant la conceptualisation de la familiarité : le premier la
considère comme une fonction de l'
expérience, de l'
utilisation, de l'
expertise ou de la
connaissance, alors que le second le définit en termes de structure cognitive. Nous le voyons
90
donc, les divergences sont nombreuses autour de ce concept. Au niveau de
l'
opérationalisation, le débat semble aussi vif qu'
au niveau conceptuel. De nombreux auteurs
(p.ex. Zaichkowski, 1985 ; Alba et Hutchinson, 1987 ; Murray et Schlacter, 1990 ; Park,
Mothersbaugh et Feick, 1994) ont proposé des échelles de mesure de ce qu'
ils appellent
connaissance, familiarité, expérience ou encore expertise, avec des recouvrements importants
entre tous ces termes.
Dans le cadre de cette recherche, nous adoptons la conceptualisation de la connaissance
proposée par Korchia (2004), à savoir que la connaissance consiste en l’information acquise
et stockée en mémoire autour d’un produit, d’un service ou d’une marque. Les raisons sont les
suivantes. D’abord, cette conceptualisation de la connaissance a été retenue par des auteurs
précédents pour en évaluer l’impact sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu
(Laroche et al., 2003). Ensuite, elle évite d’inclure dans le concept de connaissance des
éléments pouvant constituer soit des antécédents de la connaissance, soit certaines de ses
conséquences.
Nous n’avons identifié aucune étude qui, à ce jour, ait formellement étudié l’impact du degré
de connaissance sur le degré d’intangibilité perçue d’une offre de services. Pour rappel,
l’étude de Laroche et al. (2003) a uniquement évalué l’influence de la variable de
connaissance sur la relation entre les trois dimensions de l’intangibilité et le risque perçu.
Plusieurs auteurs suggèrent néanmoins que le degré de connaissance puisse influencer la
perception d’intangibilité « physique » (McDougall et Snetsinger, 1990 ; Murray et Schlacter,
1990 ; Ward, 1996 ; Breivik, et al., 1998 ; Laroche et al., 2001). Intuitivement, nous pouvons
effectivement penser que le processus de développement des connaissances conduit l’individu
a être en contact – physiquement ou visuellement – avec des indices matériels du service, et
donc qu’il réduit son niveau d’intangibilité perçue. Nous avons vu que l’expérience au sens
large est un antécédent de la connaissance, qui permet à l’individu de collecter de
l’information sur le service ou sur la marque. L’expérience peut être soit un entretien avec un
vendeur (le personnel étant un levier de tangibilisation tant physique que mentale), soit une
utilisation du service (le client est alors susceptible d’interagir avec le personnel ou avec
l’environnement physique), soit encore l’exposition à une publicité (la publicité pouvant être
un levier de tangibilisation, comme discuté précédemment). En outre, si la conceptualisation à
deux composantes de l’intangibilité est retenue, le processus de développement des
91
connaissances à l’égard d’un service ou d’une marque pourrait constituer un moyen de réduire
le degré d’intangibilité mentale du service (qui, pour rappel, fait référence, pour les partisans
de cette conceptualisation, à la difficulté de comprendre le service, de le définir).
L’activité de recherche d’information est une stratégie très présente dans les études sur la
réduction du risque perçu (citons entre autre Cox, 1967 ; Roselius, 1971 ; Derbaix, 1983 ;
Mitchell et Greatorex, 1990 ; Dowling et Staelin, 1994). Or, le processus de recherche et
d’acquisition d’information a un impact direct sur le niveau de connaissance, puisque la
quantité d’information présente dans la mémoire de l’individu augmente. Dès lors, le degré de
connaissance est susceptible d’avoir un impact sur le risque perçu. Nous pouvons donc penser
que la relation entre l’intangibilité et le risque perçu sera affectée par le niveau de
connaissance des individus, comme cela est soutenu par l’étude de Laroche et al. (2003).
Le degré de connaissance d’un individu à l’égard d’un service ou d’une marque peut être
appréhendé de deux manières différentes : soit via la connaissance objective, soit via la
connaissance auto-évaluée (citons entre autre Aurier et Ngobo, 1999 ; Park et al., 1994 ;
Flynn et Goldsmith, 1999).
•
La connaissance objective vise à mesurer ce que l’individu sait vraiment d’un produit,
d’un service ou d’une marque. Il s’agit donc d’évaluer objectivement l’information
que le client a stockée en mémoire. Le plus souvent, la connaissance objective est
testée à partir de questionnaires parfois très fouillés, posant des questions de « culture
générale » sur le produit, le service, ou la marque, et dont les réponses sont
objectivement connues (voir p.ex. Aurier et Ngobo, 1999 ; Burns et al., 1996 ; Park et
al., 1994 ; Raju et al., 1995). Généralement, ces questionnaires prennent la forme de
questions à choix multiples (p.ex. le Chambolle-Musigny est un vin du bordelais :
vrai ou faux), de questions de terminologie (p.ex. pouvez-vous définir ce qu’est le
millésime d’un vin ?), ou de questions d’ordre général (quelle est la différence entre
un vin d'
Appellation d'
Origine Contrôlée et un vin Délimité de Qualité Supérieure ?).
En outre, des discussions avec des experts peuvent également être mises en place pour
évaluer le degré de connaissance objective de l’individu.
•
La connaissance auto-évaluée représente la perception qu’une personne a de ce qu’elle
sait. Il s’agit pour l’individu d’évaluer lui-même son degré de connaissance à l’égard
92
d’un produit, d’un service ou d’une marque (p.ex. Selnes et Gronhaug, 1986 ; Park et
al., 1994 ; Aurier et Ngobo, 1999).
Nous présenterons et motiverons dans la seconde partie de ce document le choix effectué dans
cette recherche pour mesurer le degré de connaissance de l’individu à l’égard d’un produit ou
d’une marque.
A côté de la connaissance, un autre concept lié au concept de connaissance semble
intéressant à prendre en considération dans la recherche qui nous occupe : il s’agit de
l’expérience que le client a du service ou de la marque. Nous allons à présent lui consacrer
une section spécifique.
1.2. L’expérience client : le degré d’utilisation du service ou de la marque
Comme discuté ci-dessus, dans la conceptualisation sur la connaissance, beaucoup d’auteurs
incluent l’expérience au sens large comme une dimension de la connaissance. Nous avons
néanmoins adopté la position de Korchia (2004), selon laquelle l’expérience est un antécédent
de la connaissance, davantage qu’une de ses dimensions. Dès lors, connaissance et expérience
doivent être fortement corrélées. Toutefois, l’expérience est, dans cette conceptualisation,
appréhendée dans son sens large, et peut consister en une expérience directe d’utilisation ou
d’achat, mais aussi une recherche d’informations, une exposition à une publicité, une
discussion avec un ami, …
Or, de nombreuses recherches ont montré que les expériences directes n’ont pas le même
impact sur les clients que les expériences indirectes (Heath, 1999 ; Mooy, Robben et Robben,
1998 ; Wright et Lynch, 1995, dans Korchia, 2004). Comme Korchia (2004) le souligne, les
informations seront encodées de manière plus active et créeront un enregistrement plus fort
dans la mémoire de l’individu lors de l’utilisation du service par l’individu plutôt que lors
d’une exposition à une publicité radio sur son lieu de travail. Ceci est appuyé par Berry
(2000), qui souligne que, dans un contexte de services, l’expérience directe constitue
l’élément clé qui va façonner la perception que les clients ont du service ou de la marque.
Il nous paraît donc important de distinguer, à côté de la connaissance du client, son degré
d’expérience directe du service ou de la marque, que nous allons appréhender à travers son
93
taux d’utilisation. Certes, connaissance et utilisation doivent être fortement corrélées, mais un
individu peut détenir un niveau de connaissance important d’une marque, sans en être
utilisateur ou client. Un passionné d’automobile, et de Porsche en particulier, peut très bien
connaître les voitures Porsche, à travers des lectures par exemple, sans pour autant en
posséder une, ni même être déjà monté à bord d’une telle voiture. De même, un individu peut
utiliser un service sans nécessairement bien en connaître les modalités. Un individu peut ainsi
souscrire une assurance chez Ethias par tradition familiale, sans réellement comparer les
offres concurrentes, et donc sans posséder beaucoup d’informations sur le monde de
l’assurance en général, ou sur Ethias en particulier.
Le niveau d’utilisation est intéressant à considérer pour plusieurs raisons. D’abord, le niveau
d’utilisation est reconnu comme une variable de segmentation comportementale. De plus, il
est susceptible d’influencer tant le degré d’intangibilité perçue que le risque perçu. En effet,
l’utilisateur d’un service ou d’une marque peut raccrocher plus facilement des éléments
périphériques tangibles à cette marque qu’un non-utilisateur. En ce sens, il est susceptible de
percevoir le service ou la marque comme moins intangible sur le plan physique. En outre,
comme nous allons le voir dans la suite de ce chapitre, la marque est susceptible d’influencer
l’intangibilité perçue. Or, comme le souligne Berry (2000), l’utilisation semble avoir un
impact sur l’image de la marque, et dès lors sur le nombre et la force d’ancrage des
associations à la marque dans la mémoire des individus. Camelis (2002) a ainsi démontré que
le réseau d’associations à la marque est plus dense et contient plus d’associations fortes chez
les gros utilisateurs de la marque que chez les faibles utilisateurs. Le raisonnement vaut tout
aussi bien pour le service. Dès lors, ce réseau d’associations enrichi est susceptible de créer
plus de sens pour le client, et donc d’influencer la composante mentale de l’intangibilité, si
celle-ci est retenue. Finalement, l’utilisation d’un service ou d’une marque réduit l’incertitude,
et donc elle est susceptible d’agir sur le risque perçu. Si un individu n’a jamais essayé un
restaurant, il ne peut pas l’évaluer avec le même degré de certitude que s’il en est un client
fidèle. Le taux d’utilisation est donc également susceptible d’affecter la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu.
94
2. LA MARQUE DE SERVICE :
LE SERVICE NON MARQUE VERSUS LE SERVICE MARQUE
Dans la section relative aux techniques de tangibilisation (voir chapitre 2, p.52), nous avons
mentionné le rôle possible de la marque et de l’image de marque sur le processus de
tangibilisation des services. Certains auteurs (Zeithaml et al., 1985 ; Flipo, 1988 ; Berry et
Parasuraman, 1991 ; De Chernatony et McDonald, 1998 ; Berry, 2000 ; de Chernatony et
Segal-Horn, 2001 ; McDonald, de Chernatony et Harris, 2001) suggèrent en effet que la
marque peut constituer un levier de tangibilisation de l’offre globale de services, sans pour
autant que nous ayons pu identifier de travaux validant empiriquement cette proposition.
L’étude menée par McDougall et Snetsinger en 1990 appuie cette proposition, sans la
démontrer formellement. Pour rappel, ces auteurs ont développé une échelle de mesure
partielle de l’intangibilité qui leur a permis de positionner des services sur un continuum,
selon leur degré d’intangibilité perçue. Dans une seconde étape, ils ont effectué le même
travail, mais au niveau des marques de ces services analysés. Des différences ont été mises à
jour entre certaines marques et les services qu’elles incarnent (voir figure 4.1 ci-après). Ainsi,
il semble que certaines marques soient perçues comme plus tangibles que les services qui y
sont associés (différence pour les services « compte d’épargne » et « emprunt de voiture »).
Par contre, pour le service « Hypothèque », aucune différence n’est relevée entre le score
d’intangibilité du service et des marques. L’étude suggère également qu’il peut exister des
différences entre différentes marques d’un même service, suggérant ainsi que le rôle
« tangibilisateur » de la marque est lié à certaines caractéristiques de la marque, qu’il faut
alors pouvoir déterminer.
95
Figure 4.1 : L’échelle d’intangibilité de McDougall et Snetsinger (1990)
NIVEAU D’ANALYSE
3,2 3,3
Catégorie de
services
Compte
épargne
2,3 2,5
Marque
Compte
épargne A
3,0
Emprunt
Voiture B
Emprunt
voiture
3,3
Emprunt
Voiture A
3,6
3,9
Hypothèque
3,6
(Assurance
vie)
A = Banque A
B = Banque B
Hypothèque A
Hypothèque B
Compte
épargne B
Score d’intangibilité
Fortement
intangible
Fortement
tangible
Source : McDougall et Snetsinger (1990), p. 34
Ces résultats sont toutefois insuffisants pour affirmer que la marque est bel et bien perçue
comme moins intangible que le service qu’elle incarne. En effet, l’étude de McDougall et
Snetsinger (1990) n’avait pas pour objet principal de tenter de tester cette hypothèse. Dès lors,
nous ne pouvons pas évaluer si les différences de scores d’intangibilité entre marque et
service sont significatives. En outre, l’échelle utilisée pour mesurer l’intangibilité est
incomplète (voir infra), car elle ne mesure que la seule composante mentale de l’intangibilité.
Finalement, nous ne savons rien des marques utilisées. Cette étude doit par contre être
considérée comme un signal intéressant sur le rôle possible de la marque comme levier de
tangibilisation d’une offre de services.
Dans cette section, nous allons approfondir le concept de marque en le définissant, puis en
présentant les propositions théoriques qui nous permettent de mieux appréhender le rôle de la
marque et de l’image de marque sur le processus de tangibilisation d’une offre de services.
96
2.1. Qu’est-ce qu’une marque ?
Quick, Visa, Virgin Express, Fortis, Club Méditerranée, Citibank, Ethias, … : voici quelques
exemples de ces nombreuses marques de services avec lesquelles nous sommes en contact,
parfois au quotidien. Mais qu’est-ce qu’une marque ?
Si l’on en revient aux origines, « brand » vient du norvégien ancien « brandr », qui signifie
« brûler », et qui fait référence à une marque apposée au fer rouge sur du bétail pour
l’identifier (Keller, 1998). En 2000 avant Jésus-Christ déjà, des scènes égyptiennes retrouvées
dans des tombeaux décrivaient ces séances de marquage du bétail. Aujourd’hui encore, cette
pratique a cours chez les éleveurs américains. L’objectif est de permettre d’identifier le bétail
et son propriétaire.
Dans la littérature marketing, nous retrouvons notamment ce sens originel. Ainsi, Aaker
propose en 1991 une des définitions les plus classiques de la marque, à savoir « un nom et/ou
un symbole (comme un logo, un trademark, ou le design d’un emballage) qui sert à identifier
les biens ou les services d’un vendeur ou d’un groupe de vendeurs, et à différencier ces biens
et services de ceux de la concurrence » (Aaker, 1991).
Cette définition met en avant deux notions importantes de la marque :
•
La marque permet à ses clients de connaître son origine, et donc elle engage et
responsabilise le producteur ou le prestataire de service ;
•
La marque permet au producteur ou au prestataire de différencier son offre de celle des
concurrents, ce qui constitue un enjeu fondamental dans nos économies à forte pression
concurrentielle.
Néanmoins, cette définition limite la marque à un nom ou un symbole, sans souligner la
valeur ajoutée qu’elle peut apporter au produit/service, et sans donner de place aux clients. Or,
dès 1979, Srinivasan démontre que la marque dispose d’une valeur propre, indépendante de
celle du produit ou du service. Pour Cobb-Walgren et al. (1995), la marque donne une valeur
supplémentaire à l’entité marquée. Ainsi, si certains fabricants ou prestataires considèrent
effectivement la marque simplement comme un nom apposé sur leur produit ou leur service,
d’autres au contraire vont chercher à apporter à travers la marque une valeur ajoutée pour le
client, en créant des associations à la marque, voire une réelle personnalité autour de leur
97
marque (voir entre autre McDonald, de Chernatony et Harris, 2001 ; Moorthi, 2002). La
terminologie anglaise est d’ailleurs explicite face à cette distinction : le premier cas de figure
fait référence au « naming » alors que le second fait référence au « branding ». Nous allons
nous focaliser sur ces marques qui vont au delà du nom ou du logo pour créer de la valeur
pour leurs clients. Dans cette optique, il nous semble dès lors nécessaire de développer
davantage la définition d’Aaker, pour comprendre pleinement ce que nous entendons par le
concept de marque.
De Chernatony et McDonald (1998) apportent cet éclairage supplémentaire à la
conceptualisation de la marque en la définissant comme « un produit, un service, une
personne ou un lieu identifiable, augmenté de telle manière que le client ou l’utilisateur
perçoive une valeur ajoutée unique et pertinente liée à cette marque, qui lui permet de
remplir plus adéquatement ses besoins. En outre, le succès de la marque réside dans sa
capacité à maintenir cette valeur ajoutée face à la concurrence ».
(De Chernatony et
McDonald, 1998, p.20).
Nous souhaitons apporter certains commentaires à cette définition. Tout d’abord, grâce à
l’adjectif « identifiable », nous retrouvons bien le rôle d’« identifiant » de la marque tel que
suggéré par Aaker (1991). Ensuite, la marque confère à son entité marquée une valeur ajoutée
qui renforce son adéquation aux besoins des clients. Parce que cette valeur ajoutée est propre
à la marque et est unique, elle permet notamment aux entités marquées de se différencier de la
concurrence. Et la capacité pour une marque d’être performante dans le temps est directement
liée à la capacité de maintenir ces valeurs uniques. D’autre part, la définition souligne que
cette valeur ajoutée est perçue, rappelant qu’in fine, c’est la perception par le client de la
marque et de sa valeur ajoutée qui est importante. Cette référence à la perception place donc
le client au cœur même du processus de marquage.
Néanmoins, une précision peut encore être apportée quant à la nature de cette valeur ajoutée.
Ainsi, Keller (1998) spécifie que cette valeur ajoutée apportée par la marque au produit ou au
service peut être rationnelle – c’est-à-dire liée à la performance de l’entité marquée – ou
symbolique, émotionnelle, c’est-à-dire davantage liée à ce que la marque représente pour son
utilisateur. Dans la même idée, Doyle (2001) considère que la valeur ajoutée peut être
fonctionnelle et/ou émotionnelle.
98
Dans le cadre de notre recherche, nous intégrons ces éléments à la définition de De
Chernatony et McDonald (1998), de sorte que la marque est définie comme : « un nom et/ou
un symbole (comme un logo, un trademark, ou le design d’un emballage) qui permet
d’identifier un produit, un service, une personne ou un endroit et qui permet de les
différencier de ceux de la concurrence. Selon son mode de gestion, la marque peut apporter
aux acheteurs ou aux utilisateurs une valeur ajoutée perçue fonctionnelle et/ou émotionnelle,
qui permet de rencontrer plus adéquatement leurs besoins. En outre, le succès d’une marque
dépend de sa capacité à offrir une valeur ajoutée qui lui est propre et qui perdure dans le
temps et face à la concurrence ».
2.2. La marque de service et son impact possible sur le processus de tangibilisation
des services
De nombreux auteurs (Karthik, 1999 ; Berry, 2000 ; de Chernatony et Segall-Horn, 2001 ;
McDonald, de Chernatony et Harris, 2001) suggèrent que la marque constitue un enjeu plus
critique encore pour les services que pour les produits, essentiellement à cause de la nature à
dominante intangible des services, et à cause de leur nature plus risquée.
Si le rôle de la marque prend toute son importance dans les services, c’est parce qu’elle est
généralement présentée comme un levier de tangibilisation des services, et un moyen de
rassurer le client, et de diminuer ainsi son risque perçu. Ainsi, Berry (2000) estime qu’une
marque de service forte constitue « un substitut quand la firme ne propose pas de produit à
toucher, de pantalon à essayer, de melons ou de pommes à examiner, ou d’automobile à
essayer ». Il ajoute qu’une marque de service forte augmente la confiance des clients dans
l’achat d’un « invisible », qu’elle permet aux clients de mieux visualiser et comprendre les
intangibles, et qu’elle réduit le risque perçu du client, et donc rassure. Ces propos méritent
quelques commentaires.
La marque permet de mieux visualiser et de mieux comprendre les intangibles
Comme le soulignent plusieurs auteurs, la marque est avant tout une mémoire, un ensemble
de perceptions (De Chernatony et McDonald, 1998 ; Kapferer, 2000). Elle est le point
d’ancrage de toutes les impressions, positives et négatives, formées par les acheteurs ou les
utilisateurs au fil du temps. Elle encapsule et structure les informations issues des expériences
99
directes ou indirectes des clients à l’égard des services. Ainsi, la multitude d’interactions
qu’une personne peut avoir avec une société de services, mais aussi une exposition à de la
publicité ou encore le bouche-à-oreille par exemple, sont de nature à créer des associations à
la marque, et d’en accroître ainsi la signification. La marque devient alors un concentré
d’informations potentiellement porteuses de signification quant aux bénéfices fonctionnels
et/ou émotionnels du service marqué.
Si la marque est potentiellement porteuse de sens pour le client, elle l’est tout autant pour le
personnel. Selon De Chernatony et Segall-Horn (2001), la gestion d’une marque de service
implique par rapport aux produits une plus grande communication et un plus grand effort
d’explication en interne. Plus particulièrement, les valeurs et la promesse de la marque
constituent pour le personnel des sociétés de services un support non négligeable pour les
guider dans les attitudes à adopter face aux clients, afin de véhiculer un message cohérent et
consistant de la marque auprès de ses cibles.
En général, le bénéfice principal de la marque est cristallisé par les firmes dans son
positionnement. Et dans un contexte de service, la stratégie de positionnement est plus
essentielle encore, car « à cause de la nature à dominante intangible et expérientielle de
nombreux services, elle permet notamment d’aider la clientèle potentielle à se faire une idée
d’un service qui autrement leur semblerait trop vague » (Lovelock et Lapert, 1999). Le
positionnement est en effet l’occasion de renforcer dans l’esprit des clients le bénéfice ou
l’attribut principal du service, sa raison d’être, sa spécificité face à la concurrence. Ceci prend
une dimension particulièrement importante lorsque nous savons que les services sont
généralement plus difficiles à discriminer et à différencier entre eux (comme expliqué au
chapitre 2, p. 47)
La marque rassure, et réduit le risque perçu
La marque est une mémoire, mais aussi une promesse. Une promesse de satisfaction, une
promesse de stabilité de ses bénéfices fonctionnels dans le temps et selon les lieux (De
Chernatony et McDonald, 1998 ; Berry, 2000). Voyagez avec Singapore Airlines, et vous
serez confiant dans le niveau de qualité du service à bord. Faites vos courses au Colruyt, et
vous penserez obtenir les meilleurs prix pour des marques identiques à celles commercialisées
par les chaînes de distribution concurrentes. Cette fonction de garantie est probablement la
100
plus importante de la marque, mais aussi la plus délicate pour les services, caractérisés par
une plus grande variabilité de la qualité dans le temps et selon les lieux (voir chapitre 1, p.19).
En outre, alors que la marque de produit porte essentiellement sur un résultat (l’output d’une
chaîne de production), la marque de service est vécue et jugée par les clients aussi bien au
niveau du résultat (ce que reçoit le client) qu’au niveau du processus (la façon dont il le
reçoit) (De Chernatony et Segall-Horn, 2000). Les points de contact avec la marque sont
multiples, et le risque de discordance dans le message de la marque est donc accru (De
Chernatony et McDonald, 1998). Dès lors que le service est marqué, tout doit être mis en
œuvre pour réduire la variabilité du service dans le temps ou selon les lieux, au risque d’avoir
une marque floue, dissonante, peu crédible, et dès lors peu convaincante.
Qui dit promesse de stabilité des bénéfices fonctionnels de la marque dans le temps dit
réduction de l’incertitude, et donc impact sur le risque perçu. La littérature marketing est
unanime sur ce point : une marque forte rassure, et réduit le risque perçu (p.ex. De
Chernatony et McDonald, 1998 ; Keller, 1998 ; Kapferer, 2000 ; Berry, 2000).
Ces quelques éléments lèvent un coin du voile sur le rôle possible de la marque dans le
processus de tangibilisation des services, et dans l’influence de la marque sur la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu. La marque est un concentré d’informations porteuses de sens.
Grâce notamment à son positionnement, qui se traduit dans la perception par les clients d’une
ou plusieurs associations à la marque, celle-ci permet de rendre plus concrète une offre vague.
La marque peut en outre influencer le risque perçu. Mais une condition semble nécessaire
pour atteindre ces objectifs. La marque doit être forte. Tâchons donc à présent de mieux
comprendre ce qui caractérise une marque forte.
2.2.1. La force d’une marque dans une perspective de tangibilisation des services
Nous nous intéressons ici à la problématique de la force d’une marque dans la perspective de
tangibilisation des services. Si l’affirmation selon laquelle la marque forte tangibilise l’offre
de services est répandue dans la littérature, il faut néanmoins constater qu’aucun auteur
identifié ne définit formellement ce qu’il entend par marque forte.
De Chernatony et McDonald (1998) estiment qu’une marque dotée de valeurs fortes, et
positivement perçue par ses clients, peut tangibiliser le service. Selon eux, la marque doit
101
tenter de créer un maximum d’associations basées sur des éléments périphériques tangibles,
ou sur l’environnement physique du service. Plus généralement, dans une perspective de
tangibilisation, il importe de créer une image forte du prestataire de service (Zeithaml et al.,
1985 ; Flipo, 1988). De plus, il semble souhaitable de créer au sein de cette image des
associations à la marque qui tangibilisent la représentation mentale du service, notamment via
l’utilisation de métaphores ou de symboles (Berry, 1980 ; Levitt, 1981). Keller (1998) ajoute
également que les symboles associés à la marque peuvent aider à rendre le service plus
concret. Finalement, comme signalé ci-dessus, Lovelock et Lapert (1999) suggèrent qu’une
marque disposant d’un positionnement fortement ancré dans l’esprit des clients puisse aider la
clientèle potentielle à se faire une idée d’un service qui autrement leur semblerait trop vague.
En reprenant ces idées, une marque forte dans une perceptive de tangibilisation serait donc
une marque dotée d’un positionnement et de valeurs forts, positivement perçue par les clients,
et qui bénéficierait d’un réseau d’associations à la marque fort et basé entre autres sur des
éléments physiques, de même que sur des métaphores ou des symboles. Cette description de
la marque forte est toutefois peu opérationnelle, et elle peut encore être affinée.
En 2000, Berry propose un modèle de marque de service susceptible de donner un éclairage
important à la discussion. Il introduit dans son modèle la notion de « capital client de la
marque », en proposant qu’une marque forte - c’est-à-dire selon lui une marque pouvant
tangibiliser le service - est une marque dotée d’un capital client de la marque positif. Evaluer
la force d’une marque dans une perspective de tangibilisation des services reviendrait donc,
selon Berry (2000) à évaluer le capital de la marque aux yeux des clients.
Berry (2000) se fonde sur la conceptualisation du capital client de la marque de Keller (1993
et 1998), que nous présentons ci-dessous.
Le capital client de la marque selon Keller (1993 et 1998)
Alors que certains auteurs (citons par exemple Srivastava et Schocker, 1991 ; Aaker, 1992)
incluent dans la conceptualisation du capital client de la marque des variables perceptuelles et
comportementales, Keller (1993 et 1998) propose une conceptualisation exclusivement
perceptuelle du capital marque. Il base son modèle sur deux dimensions du capital client de la
marque : la notoriété de la marque et l’image de marque (cfr figure 4.2).
102
Figure 4.2 : le modèle de capital client de la marque de Keller (1993 et 1998)
Notoriété de la marque
Capital client de
la marque
Types d’associations
Valence des associations
Image de la marque
Force des associations
Unicité des associations
Source : Keller, 1993 / 1998
Les travaux de Keller (1993 et 1998) se basent sur la théorie des réseaux sémantiques de la
mémoire à long terme, qui caractérise la mémoire comme un ensemble de nœuds et de liens.
De façon générale, toute information va se stocker en mémoire dans un nœud, qui est relié à
d’autres nœuds par des liens variant en terme de force. Le rappel d’une information met en
œuvre un processus d’activation du réseau de nœuds auquel cette information est reliée. Plus
le lien entre les nœuds d’information est fort et plus l’activation de l’un de ces nœuds va
activer les autres (Collin et Loftus, 1975 ; Bourne et al.., 1986 dans Changeur et Dano, 1996).
Fidèle à cette théorie de la mémoire, la marque peut être considérée comme un nœud auquel
sont reliés d’autres nœuds, qui sont les associations à la marque. Ce réseau de nœuds et de
liens constitue le capital client de la marque (Keller, 1993).
La notoriété de la marque – la première dimension du capital client de la marque identifiée
par Keller (1993) – fait référence à la force d’ancrage du nœud « marque » dans la mémoire
des individus, et donc à la capacité d’activer ce nœud. En particulier, la notoriété de la marque
souligne la probabilité que le nom de la marque vienne en tête des clients, et le degré de
facilité avec lequel ce nom vient en tête. Elle peut être mesurée, soit de manière spontanée,
soit de manière assistée.
103
L’image de marque est définie, quant à elle, comme « l’ensemble des perceptions à l’égard
d’une marque, reflétées par les associations présentes dans la mémoire des clients » (Keller,
1993, p.3). Les perceptions des consommateurs à l’égard de la marque se fondent donc sur le
réseau d’associations à la marque, qui donne véritablement le sens de la marque.
Finalement, Keller (1993) définit le capital client de la marque comme « l’impact différentiel
de la connaissance de la marque sur la réponse du client à la marque et à son programme
marketing ». Ainsi, une marque détient un capital client positif si le client réagit de façon plus
positive à la marque et à son programme marketing qu’il ne le ferait pour un produit ou un
service équivalent mais non marqué, ou marqué avec un nom fictif.
Le modèle de Keller (1993) suggère donc que, pour appréhender l’image d’une marque, il
faut identifier et analyser le réseau d’associations à cette marque. Afin de structurer cette
analyse, Keller distingue différents types d’associations, de même que trois propriétés des
associations à la marque (force, valence et unicité des associations) :
Keller (1993 et 1998) propose que les associations puissent se structurer en trois types :
les attributs, les avantages et les attitudes. Les attributs sont les caractéristiques
descriptives d’une marque (couleur associée, prix, …). Les avantages sont les valeurs
personnelles et le sens que les clients attachent aux attributs. Ils peuvent être fonctionnels,
symboliques ou expérientiels. Finalement, les attitudes constituent le type d’association le
plus abstrait. Elles sont définies comme l’évaluation globale de la marque par le client. Il
s’agit par exemple d’une association du type « McDonald = nourriture qui n’est pas
saine ».
La force d’une association fait référence à la force de la connexion entre l’association et le
nœud « marque » et influence directement la qualité de l’activation, et donc l’accessibilité
mentale de l’association en lien avec la marque. Plus une association est forte, plus elle
sera rappelée à la mémoire du consommateur, et dès lors plus elle sera exploitable lors du
processus de choix de la marque.
Le degré de favorabilité (ou la valence) d’une association fait référence à une évaluation
de l’association plutôt favorable ou plutôt défavorable dans l’esprit du client. Le succès
d’un programme marketing va en partie dépendre de la capacité à créer des associations
positives autour de la marque.
104
L’unicité d’une association fait référence au caractère partagé ou exclusif de l’association
avec les marques concurrentes. Des marques bénéficiant d’un positionnement fort et
différenciant sont davantage susceptibles de présenter une ou plusieurs associations
uniques.
Une étude empirique menée par Changeur et Dano (1998) dans la catégorie des produits de
lessive leur a permis de démontrer qu’une marque à capital élevé possède des associations
plus fortes, plus favorables et plus uniques qu’une marque à faible capital.
Pour rappel, partant des travaux de Keller (1993 et 1998), Berry (2000) suggère qu’une
marque forte – donc une marque pouvant tangibiliser le service – est une marque disposant
d’un capital client positif. Nous pouvons maintenant préciser que, selon Berry (2000), une
marque forte est une marque connue, et dotée d’un réseau d’associations fortes, uniques et
positives.
Cette prise de position de Berry (2000) peut paraître réductrice pour les experts de la marque.
En effet, il faut noter, dans la littérature sur la marque, une absence de consensus sur le sens à
donner à la force d’une marque, de même qu’au capital client de la marque.
•
Pour certains (p.ex. Park, 1992 ; Kamakura et Russel, 1993 dans Jourdan, 2002), la force
d’une marque est fortement corrélée avec la part de marché de la marque, et peut donc être
mesurée à l’aide de cet indicateur.
•
Pour d’autres (p.ex. Srivastava et Schocker, 1991 ; Aaker, 1992 ; Schuiling, 2002), la
force d’une marque est le capital client de la marque, et intègre des éléments perceptuels
de la marque (notoriété et image, p.ex.) et des éléments comportementaux (fidélité à la
marque, p.ex.). Aaker (1992) recense ainsi quatre critères qui déterminent la force d’une
marque : sa notoriété, les associations à la marque, sa qualité perçue et sa capacité à
fidéliser. Thomas (1993) adjoint lui aussi aux éléments perceptuels la variable de fidélité à
la marque, de même que la position concurrentielle de la marque.
•
Sans spécifiquement parler de force de marque, des auteurs comme Keller (1993), Martin
et Brown (1990) ou Lassar, Mittal et Sharma (1995) appréhendent le capital marque
uniquement à travers des variables perceptuelles (l’image de marque et la notoriété étant
les variables communes à tous les modèles).
105
Que penser dès lors de la position de Berry (2000), qui s’appuie sur la conceptualisation
uniquement perceptuelle du capital client de la marque pour évaluer la force d’une marque ?
•
Il faut d’abord rappeler le contexte de notre recherche. Nous cherchons à définir le
concept de marque forte dans une perspective de tangibilisation des services, et plus
spécifiquement dans une perspective perceptuelle de l’intangibilité. Seule la
perception d’intangibilité nous intéresse. Dès lors, il paraît raisonnable de penser que
des variables perceptuelles comme l’image et la notoriété de la marque vont être
davantage susceptibles d’influencer la perception d’intangibilité que des variables
comme la position concurrentielle ou la part de marché. Ceci est appuyé par la
littérature, puisqu’une des recommandations liées à la marque comme levier de
tangibilisation réside dans le développement d’une image forte du prestataire de
service, et basée sur des associations concrètes (Zeithaml, 1981 ; Flipo, 1988 ; De
Chernatony et McDonald, 1998).
•
De plus, plusieurs auteurs suggèrent que le niveau de vente, la part de marché ou
encore certaines variables comportementales (choix du produit marqué ou fidélité à la
marque p.ex.) vont être fortement liés à une forte notoriété de la marque et à une
image positive (p.ex. Keller, 1993 ; Krishnan, 1996 ; Changeur et Dano, 1998 ;
Camelis, 2002 ; Leiser, 2003). Pour Krishnan (1996), le niveau de ventes et les
associations à la marque sont fortement corrélés. Changeur et Dano (1998) valident
empiriquement le fait qu’il existe une relation significative entre les associations
valorisées par les clients et le choix du produit marqué. En outre, elles démontrent
que dans la catégorie de produits étudiée (produit de lessive), la force de l’image de
marque au sens défini par Keller (1993) est fortement corrélée avec la part de marché
de la marque. Camelis (2002) défend l’idée qu’un niveau de notoriété élevé, conjugué
à une forte image de marque, augmente la probabilité de choix de la marque,
engendre une plus grande fidélité du client et du distributeur, et diminue la
vulnérabilité de la marque face aux actions de la concurrence. Finalement, Keller
(1993) affirme que la productivité des dépenses marketing – et donc leur efficacité à
se transformer en chiffre d’affaires - est largement influencée par ces variables
perceptuelles. Ces arguments renforcent donc la pertinence de ne prendre en
considération que des variables perceptuelles. De plus, il est légitime de questionner
le sens de la causalité entre le caractère fort d’une marque et les variables
106
comportementales ou de position de marché. Ainsi, est-ce qu’une marque est forte
parce qu’elle est leader, et qu’elle dispose d’une clientèle largement fidèle, ou est-ce
que la marque est leader et que beaucoup y sont fidèles parce qu’elle est forte (c’està-dire connue et bénéficiant d’une image basée sur des associations fortes, positives et
uniques) ?
•
Finalement, les variables perceptuelles – et plus particulièrement l’image de marque
et la notoriété – sont très souvent considérées comme les antécédents principaux du
capital client de la marque. L’image de marque et la notoriété sont ainsi les deux
seules variables communes à une très grande majorité de modèles de capital client de
la marque. Selon l'
analyse de Jourdan (2002, p.436), l'
évaluation de l'
image de
marque est une des deux approches pour mesurer le capital marque. O'
Loughlin
(2001, p.3) ajoute qu’« il y a une relation positive forte entre (…) l'
image de
l'
entreprise et le capital client de la marque ». Biel (1993, p.70) affirme également
que « le capital de la marque réside dans son image ». Il en est de même pour
Grönroos (2000, p.287) qui va jusqu'
à considérer capital client de la marque et image
de marque comme des synonymes. De la même façon, selon Changeur et Dano (1998,
p.1), les associations valorisées par les consommateurs « forment la dimension
perceptuelle du capital marque qui est largement considérée comme le véritable
capital de la marque ». Ou encore, selon Changeur (2002, p.6), « il y a un consensus
à considérer les associations de la marque comme le principal antécédent du capital
marque ».
Sur base de ces considérations, nous estimons donc que la conceptualisation de la marque
forte selon Berry (2000) est adaptée au contexte de cette recherche.
107
2.3. Conclusion relative à la marque forte dans une perspective de tangibilisation
En guise de conclusion, nous pouvons dire qu’une marque forte est susceptible de tangibiliser
le service, de même qu’elle est susceptible de réduire le niveau de risque perçu. Par marque
forte, il faut comprendre une marque disposant d’un niveau de notoriété élevé, ainsi que d’un
réseau d’associations à la marque globalement fortes, favorables et uniques. Implicitement,
cette définition souligne également la qualité du positionnement d’une marque forte, qui se
traduit dans l’esprit du client par une ou plusieurs associations fortement ancrées.
3. LES VARIABLES DE CLASSIFICATION
Comme le suggèrent Lovelock, Wirtz et Lapert (2004), il ne serait pas pertinent de se livrer à
des généralisations excessives à propos des services, tant ils peuvent varier entre eux.
Comment en effet comparer sur tous les plans une coupe de cheveux chez le coiffeur avec
l’envoi d’un colis par transporteur express, ou la gestion de ses comptes bancaires par Internet
avec un séjour dans un hôtel de luxe ? Partant de ce constat, plusieurs auteurs se sont efforcés
de réaliser des typologies de services, en vue d’identifier des critères de classification
permettant de regrouper des services entre eux selon qu’ils partagent des caractéristiques
communes. Un des objectifs sous-jacents de ces typologies est d’accroître la possibilité de
généralisation de résultats de recherche à ces familles de services plutôt qu’aux services dans
leur ensemble.
Lovelock (1983) a proposé plusieurs variables de classification, largement reprises par la suite
par d’autres chercheurs, parmi lesquels la nature de l’acte de service, le taux d’équipement et
l’intensité du personnel de contact dans l’expérience client, et le mode de délivrance du
service. Selon Lovelock (1983), certains de ces critères pourraient avoir un impact non
négligeable sur le degré d'
intangibilité perçue par le client. Ainsi, intuitivement, nous pouvons
penser qu'
un service où les équipements font largement partie de l'
expérience client (par
exemple une compagnie aérienne) sera perçu comme étant plus tangible qu'
un service où les
équipements sont faibles (par exemple une assurance). Pour rappel en effet, l’environnement
physique et les indices périphériques tangibles constituent un levier de tangibilisation
important des offres de services. De même, les services où les personnes font largement partie
de l'
expérience ne seront probablement pas évalués au niveau de leur intangibilité comme des
services sans aucun contact interpersonnel, puisque la personne est alors susceptible
108
d’incarner, dans la perception du client, le service. Nous allons à présent décrire ces critères
de classification plus en détail.
3.1. Comprendre la nature de l'acte de service
Une première question fondamentale est la suivante : qui ou quel est le récepteur direct du
service (Lovelock, Wirtz et Lapert, 2004) ? En outre, ce service conduit-il à des actions
tangibles ou intangibles ? Un service peut ainsi porter sur des personnes (une consultation
chez le médecin) ou sur des biens (l’entretien de la voiture). De même, il peut consister en des
actions tangibles (p.ex. être physiquement transporté de Bruxelles à Londres par l'
Eurostar,
faire entretenir son jardin et voir le résultat) ou intangible (le service est alors en interaction
avec le mental des individus ou porte sur des actifs intangibles)
Le tableau ci-dessous croise chacun de ces deux critères de classification, et permet de
distinguer quatre situations possibles (décrites par Lovelock et Lapert, 1999).
Tableau 4.1 : Compréhension de la nature de l’acte de service
Quelle est la nature de l’acte
de service ?
Actions tangibles
Actions intangibles
Qui ou quel est le récepteur direct du service ?
Personnes
Service s’adressant au corps
des personnes
Transport de passagers
Soins et santé
Hébergement
Salon de beauté
Salles de gymnastique
Restaurants / bars
Coiffeurs
Services funéraires
…
Biens
Service s’adressant aux
possessions physiques
Transport de marchandises
Réparation et maintenance
Entreposage
Gardiennage
Distribution de détail
Ravitaillement/carburant
Création/entretien de jardin
Évacuation / assainissement
…
Service s’adressant au mental Service s’adressant à des
Publicité
actifs intangibles
Arts et spectacles
Radio / télédiffusion
Conseil en management
Formation
Concert
Psychothérapie
Religion
…
Lovelock, Wirtz et Lapert (2004), p.15
109
Comptabilité
Banque
Traitement de données
Transmission de données
Assurance
Services légaux
Recherche
…
•
Le service peut consister en une action tangible sur une personne humaine. Ces
services consistent à transporter, à nourrir, à loger, à soigner, ou encore à embellir une
personne. L’Eurostar va ainsi transporter physiquement les gens de Bruxelles à
Londres, le coiffeur va couper les cheveux de sa cliente, qui peut voir le résultat de la
coupe. Dans cette classe de service, les gens doivent être physiquement présents tout
au long de la prestation du service. Cela signifie que les clients sont soit en interaction
avec l’équipement du prestataire, soit avec son personnel, ce qui est susceptible
d’influencer leur perception d’intangibilité
•
Le service peut consister en une action tangible sur un objet . Il s’agit par exemple de
faire réparer sa tondeuse, ou de faire nettoyer sa maison. Dans cette classe de service,
le client ne doit pas nécessairement être physiquement présent sur le lieu de prestation
du service.
•
Le service peut consister en une action intangible sur une personne. La participation à
une conférence., l’enseignement, une émission de radio, … font partie de cette classe
de services, qui comprend plus généralement toutes les activités de services qui
touchent à l’esprit des bénéficiaires, et qui consistent en des processus de stimulation
mentale. Le client ne doit pas nécessairement être physiquement présent sur le lieu de
prestation du service, mais il doit être mentalement présent. Un auditeur de radio
écoute ainsi rarement l’émission depuis le studio d’enregistrement, mais plutôt dans sa
voiture ou à la maison.
•
Finalement, le service peut consister en une action intangible portant sur des actifs
intangibles. Ce sont par exemple des services de traitement de l’information. Comme
le disent Lovelock et Lapert (1999), « l’information est la forme la plus intangible de
service qui soit, mais elle peut être transformée pour avoir une forme plus matérielle
et durable, comme des notes, des rapports, des livres, des disquettes. Parmi ces
services très dépendants du rassemblement et du traitement de l’information, on
retrouve les services financiers, la comptabilité, le droit, la recherche marketing, ou le
conseil en management ».
Cette classification est intéressante dans la mesure où il est plus que probable qu'
un service
basé sur des actions intangibles soit perçu comme plus intangible physiquement et/ou
mentalement qu'
un service basé sur des actions tangibles. De même, le client est moins
110
impliqué physiquement avec des services portant sur un bien, car il n'
est alors pas nécessaire
qu'
il entre dans l'
unité de service. Son rôle se limite souvent dans ce cas à commander le
service, à expliquer le problème ou le bénéfice recherché, éventuellement à amener l’objet sur
le lieu de prestation, et à payer la facture. Dès lors, sa perception de l'
intangibilité du service
en serait probablement affectée.
3.2. Niveau de contact et niveau d'équipement
Afin de mieux appréhender la diversité des services, Lovelock, Wirtz et Lapert (2004)
proposent une autre méthode de classification susceptible d’iinfluencer le degré d'
intangibilité
d'
un service. Celle-ci croise le niveau d'
équipement qui fait partie de l'
expérience de service
avec le niveau de contact lors de l'
expérience de service.
Le graphe ci-dessous illustre cette classification :
Figure 4.1 : Niveau de contact du client avec l’entreprise de service
Aperçu de services où les personnes font partie de l'expérience
Coiffeur
Élevé
Cours
particulier
Transport
aérien
Aperçu de services
où les équipements font
partie de l'expérience
Conseil en
communication
Élevé
Bas
Assurance
Service
postal
Cinéma
Banque
électronique
Bas
Source : Lovelock, Wirtz et Lapert, 2004, p.35
111
Carte de
crédit
Les services à haut niveau de contact exigent des clients qu'
ils se déplacent en personne
jusqu'
aux infrastructures de l'
entreprise, et qu'
ils s'
impliquent activement avec l'
entreprise et
son personnel tout au long du processus. Lors d'
un niveau de contact moyen, le client peut se
déplacer à l'
unité de service, mais soit il n'
y reste pas pendant (tout) le processus, soit il n'
a
qu'
un contact limité avec le personnel. Un niveau de contact faible n'
implique pas ou peu de
contact physique entre le client et le prestataire. Si contact il y a, il est alors établi à distance,
notamment grâce aux moyens de télécommunication. De même, certains services peuvent
largement s'
appuyer sur un équipement physique lors de la prestation, alors que d'
autres
peuvent ne nécessiter que peu, voire pas, d'
équipement.
Ces deux variables sont susceptibles d’influencer l’intangibilité perçue, car elles constituent
en elles-mêmes des techniques de tangibilisation. En effet, comme déjà discuté,
l’environnement physique dans lequel le client bénéficie du service, de même que les indices
périphériques tangibles, permettent d’accroître la matérialité de l’offre de services dans la
perception des clients. En outre, le personnel de contact incarne souvent aux yeux des clients
le service, en le personnalisant. Il constitue par là même un levier de tangibilisation essentiel.
Dès lors, un service caractérisé par un haut niveau de contact et par un niveau d'
équipement
élevé pendant l'
expérience client est susceptible d'
être perçu comme plus tangible sur le plan
physique et/ou mental qu'
un service où contact et équipement seraient faibles, voire nuls.
3.3 Le mode de délivrance du service
Un dernier critère partiellement recouvert par les variables de classification présentées cidessus est le mode de délivrance du service. Lovelock (1983) distingue trois cas de figure
possibles : le client se rend à l'
unité de service ; l'
unité de service se rend chez le client (p.ex.
visite du médecin à domicile) ; ou le service est délivré via un support de télécommunication
(p.ex. service électronique délivré à travers Internet). Si les deux premiers modes de
prestation peuvent ne pas modifier de façon importante le niveau d'
intangibilité perçue, la
délivrance d'
un service par voie électronique par exemple est susceptible de « détangibiliser »
un peu plus encore le service (Laroche et al., 2001). Ainsi, n'
y aurait-il pas de différence entre
le degré d'
intangibilité perçue d'
une banque traditionnelle versus une banque exclusivement
électronique ? Entre l'
achat d'
un compact disque chez le disquaire ou le téléchargement de
musique via Internet ?
112
Il nous paraît important de prendre en considération ces caractéristiques, qui vont
potentiellement avoir un impact sur le niveau d'
intangibilité. Toutefois, nous ne pourrons pas
formellement tester l'
impact de ces variables de classification sur le degré d'
intangibilité, ce
qui constitue une limite de notre travail. Cela nécessiterait en effet une étude empirique
considérable, portant sur un très grand nombre de services différents, ou chaque niveau de ces
variables de classification est contrôlé. Par contre, nous veillerons, dans notre étude
empirique, à travailler sur des services qui varient selon ces caractéristiques. Ainsi, il serait
intéressant de considérer des services portant sur des personnes, et des services portant sur des
biens. Il faudrait également distinguer des services où l'
action est tangible de ceux où l'
action
est intangible. De même, nous devons rester vigilants quant au taux d'
équipement et au niveau
de contact qu'
implique le service dans le design de l'
étude empirique. Finalement, il pourrait
être intéressant d'
inclure dans l'
enquête un service délivré à travers Internet. Tous ces aspects
seront davantage développés dans la partie consacrée à la méthodologie de la recherche.
CONCLUSION DU CHAPITRE 4
L’objectif poursuivi dans le chapitre 4 a visé à présenter certaines variables pouvant
influencer le degré d’intangibilité perçue, le risque perçu ou encore la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu. Parmi ces variables, nous avons distingué les deux variables
de segmentation que sont la connaissance et l’utilisation, de même que la marque de service,
et certaines variables de classification.
Dans le cadre de cette recherche, nous testerons formellement l’impact des variables de
connaissance et d’utilisation sur nos variables et relations d’intérêt. La connaissance est ici
définie comme étant l’ensemble des informations relatives au service ou à la marque, et
stockées en mémoire à long terme des clients. L’utilisation fait quant à elle référence à
l’intensité des expériences directes avec les services ou les marques analysés.
Nous étudierons également l’impact possible de la marque forte sur le processus de
tangibilisation des services, et sur le processus de réduction du risque perçu. Dans le cadre de
cette recherche, la marque forte est définie comme étant une marque connue, et disposant
d’un réseau d’associations à la marque fortes, uniques et positives.
113
Finalement, nous avons présenté des variables de classification des services susceptibles de
jouer un rôle important dans la perception d’intangibilité, et dans son lien avec le risque
perçu. Ainsi, la nature de l’acte de service, le taux d’équipement ou l’intensité de la main
d’œuvre durant l’expérience de service, ainsi que le mode de délivrance du service, sont
susceptibles d’influencer tant la composante physique de l’intangibilité que sa possible
composante mentale. Notons que nous ne testerons pas formellement l’impact des variables
de classification. Celles-ci seront toutefois exploitées lors de la spécification du design de
l’étude finale.
114
PARTIE 2 : PHASE EXPLORATOIRE ET MODELISATION
Notre démarche méthodologique se fonde essentiellement sur deux phases successives et
complémentaires, présentées successivement dans les deuxième et troisième parties de cette
recherche :
•
Les études exploratoires, dont les objectifs sont multiples : porter un regard critique
sur les études existantes et présentées en première partie ; mieux appréhender le
concept d’intangibilité, en vue de prendre position par rapport au débat conceptuel ;
préparer le développement d’une échelle de mesure du degré d’intangibilité d’une
offre globale de services ; et finalement, prétester la relation entre l’intangibilité et le
risque perçu, ainsi que l’influence de la connaissance et de l’utilisation sur
l’intangibilité et sa relation avec le risque perçu. Cette phase est présentée dans la
deuxième partie de cette recherche, et vise à spécifier le modèle final et les hypothèses
à tester. La méthodologie mise en œuvre pour atteindre ces objectifs est présentée en
parallèle avec la présentation des études mises en place.
•
La phase conclusive, qui nous permet de confronter le modèle théorique aux données
empiriques collectées sur base d’un échantillon représentatif de clients, en vue de
tester l’ensemble des hypothèses définies préalablement. Cette phase est présentée
dans la troisième partie de ce document.
La structure de la seconde partie est fidèle à la progression chronologique de notre recherche.
Le chapitre 5 commence par l’analyse critique des travaux de Laroche et al. (2001) portant
sur la modélisation tridimensionnelle de l’intangibilité. Cette discussion nous amène à
recommander le développement d’un nouvel outil de mesure du degré d’intangibilité d’une
offre de services. Nous présentons alors les deux premières études exploratoires visant à
développer une échelle de mesure fiable et valide du degré d’intangibilité d’une offre globale
de services. La première étape de ce processus de construction de l’échelle vise à spécifier le
construit à opérationaliser, et nous permet dès lors de prendre position par rapport au débat
115
conceptuel autour de l’intangibilité. La méthodologie poursuivie est présentée, puis mise en
œuvre pour développer l’instrument de mesure. Le chapitre 6 présente les résultats d’une
troisième étude exploratoire qui vise à prétester l’impact de l’intangibilité sur le risque perçu
global, de même que l’influence de la connaissance et de l’utilisation sur nos variables
d’intérêt. Ce chapitre est l’occasion de porter un regard critique sur les travaux de Laroche et
al. (2003), et de détailler le design et la méthodologie mis en place pour mener ces analyses.
116
CHAPITRE 5 : PREMIERES ETUDES EXPLORATOIRES EN VUE DE PROPOSER
UNE CONCEPTUALISATION ET UNE OPERATIONALISATION DU CONCEPT
D’INTANGIBILITE
Le deuxième chapitre de ce document a été l’occasion de présenter les divergences en matière
de conceptualisation de l’intangibilité, de même que les travaux relatifs à la mesure du degré
d’intangibilité d’une offre globale de services. Ce chapitre va commencer par évaluer les
travaux existants portant sur l’opérationalisation de ce concept. Cette évaluation nous amène à
recommander le développement d’un nouvel outil de mesure. Une procédure complète de
construction d’une échelle de mesure est alors mise en place à travers plusieurs études
exploratoires. Elle commence par la spécification du concept d’intangibilité, qui est
l’occasion d’adopter une position face au débat conceptuel8.
1. EVALUATION DES TRAVAUX EXISTANTS RELATIFS A LA MESURE DE L’INTANGIBILITE
Pour rappel, deux recherches identifiées ont explicitement visé à développer un instrument de
mesure du degré d’intangibilité d’une offre globale de services : celle de McDougall et
Snetsinger (1990), et celle plus aboutie de Laroche et al. (2001).
L’échelle de mesure de McDougall et Snetsinger (1990) est, de l’aveu même des auteurs,
incomplète, puisqu’elle ne se focalise que sur la composante mentale de l’intangibilité.
Indépendamment de la conceptualisation finalement retenue, elle ne peut donc pas être jugée
satisfaisante pour la présente recherche, puisqu’elle ne permet pas d’appréhender la
composante physique du concept d’intangibilité, pourtant soulignée dans toutes les définitions
de l’intangibilité.
8
Ce processus de développement de l’échelle de mesure du degré d’intangibilité a fait l’objet d’une publication
dans la revue Recherche et Applications en Marketing (Bielen F. et Sempels C. (2004), Proposition d’une échelle
de mesure bidimensionnelle du concept d’intangibilité, Recherche et Applications en marketing, 19, 3).
117
Plus récemment, Laroche et al. (2001) ont proposé une échelle de mesure tridimensionnelle
de l’intangibilité. Pour rappel, les trois dimensions identifiées sont les suivantes :
•
La première dimension, l'inaccessibilité aux sens, fait référence au fait qu’un service –
ou plus spécifiquement les attributs intangibles - ne peuvent pas être perçus par une
expérience sensorielle directe, comme pourraient l’être les attributs tangibles.
•
La deuxième dimension, la généralité, souligne que le client peut percevoir un service de
façon générale ou spécifique. « Un service est perçu comme étant général si les
consommateurs ne sont pas capables de fournir une définition précise du service, de ses
caractéristiques ou de ses résultats. Inversement, un service est perçu comme étant
spécifique s’il génère des définitions précises et claires du service, de ses caractéristiques
et de ses résultats » (Laroche, Bergeron et Goutaland, 2001, p. 28).
•
La troisième dimension, l'intangibilité mentale, est proposée sur base du constat que la
tangibilité physique ne garantit pas chez l’individu une représentation mentale claire et
précise de l’objet. Cette troisième dimension n’est cependant pas clairement présentée.
Ainsi, sans définir explicitement ce qu’ils entendent par « intangibilité mentale », Laroche
et al. (2001) estiment que certains produits physiquement tangibles peuvent être
mentalement intangibles. Ils donnent les exemples d’un four à micro-ondes, d’une voiture
ou d’un caméscope, qui, bien que physiquement tangibles, pourraient être, d’après eux,
plus intangibles mentalement qu’un repas dans un restaurant, un voyage en transport
public ou un film au cinéma. Ces exemples sont assez surprenants, dans la mesure ou il
nous semble qu’il est relativement aisé d’avoir en tête une image claire et précise de ce
qu’est une voiture ou d’un four à micro-ondes. Ce qui est plus délicat par contre, ce serait
d’en comprendre le fonctionnement. Ainsi, si nous pensons à un microprocesseur
d’ordinateur, il peut être accessible aux sens, mais, pour bon nombre de personnes, il est
difficile de comprendre de manière claire et précise son contenu, son mécanisme ou son
fonctionnement. De même, une œuvre d’art est accessible aux sens (elle peut être vue ou
touchée), mais il peut être difficile de comprendre clairement et précisément sa
signification ou son symbolisme. Inversement, certains services physiquement plus
intangibles pourraient être faciles à saisir mentalement. L’exemple d’un voyage en
transport en commun nous paraît ainsi relativement aisé à comprendre, à saisir
mentalement.
118
La recherche de Laroche et al. (2001) est intéressante dans son approche et dans sa finalité, et
elle présente l’échelle la plus aboutie à l’heure actuelle. Néanmoins, l'
échelle développée par
ces auteurs soulève plusieurs questions et commentaires :
•
Premièrement, sur le plan conceptuel, les auteurs ne spécifient pas clairement la
définition de l’intangibilité qu’ils retiennent et qu’ils opérationalisent. Or, la
spécification du construit est la première étape du processus de développement d’une
échelle de mesure, et cette étape est fondamentale. Comment dès lors évaluer la
capacité de leur échelle à mesurer un concept qui n’est pas clairement spécifié ?
•
Ensuite, sur un plan conceptuel toujours, la dimension « intangibilité mentale » ne
nous paraît pas correctement spécifiée. En première lecture, nous pouvons penser que
l’intangibilité mentale fait référence à la capacité à se représenter mentalement le
service. Toutefois, les exemples suggèrent que l’intangibilité mentale fait davantage
référence à la difficulté à comprendre, à saisir mentalement ce qu’est le service ou
comment il fonctionne, ce qui est davantage en lien avec la définition de la
composante mentale de l’intangibilité de Bateson (1979) ou de Berry (1980). Il est en
effet facile d’avoir en tête une image mentale de ce qu’est une voiture (fermons les
yeux, et nous verrons une carrosserie, quatre roues, des portières, …). Ce qui est plus
délicat, c’est de comprendre comment une voiture fonctionne, ce qui fait que c’est une
bonne voiture ou non, … De plus, l’examen des items relatifs à cette dimension
montre que certains d’entre eux sont reliés à la capacité de comprendre, alors que
d’autres sont reliés à la capacité de se représenter mentalement, ce qui n’est clairement
pas la même chose. Il y a donc un vrai problème de validité de contenu par rapport à
cette dimension. Ceci soulève dès lors un autre problème : il faut en effet s’assurer que
les dimensions « Généralité » et « Intangibilité mentale » sont bien indépendantes
l’une de l’autre, ou en tout cas suffisamment pour assurer la condition de validité
discriminante. Or, ces deux dimensions pourraient être fortement corrélées. Ainsi,
comme mentionné ci-dessus, la définition de la composante mentale de l'
intangibilité
de Bateson (1979) ou de Berry (1980) fait référence à une difficulté accrue pour un
intangible à être défini, formulé ou compris de façon claire et précise. Or, la
dimension généralité de Laroche et al. (2001) souligne la difficulté à définir ou à
formuler. La dimension « intangibilité mentale » semble quant à elle faire en tout cas
119
partiellement référence à la difficulté à comprendre, à saisir mentalement ce qu’est le
service. Mais la capacité à définir ou à formuler n'
est-elle pas directement influencée
par le degré de compréhension du produit ou du service ?
•
Troisièmement, sur le plan de l'
opérationalisation, les items tels que formulés par
Laroche et al. (2001) ne paraissent pas tous être opportuns. Ainsi, les items utilisés
pour opérationaliser la dimension « généralité » ne semblent pas être en adéquation
avec la définition proposée par ces auteurs (pour rappel, les items sont présentés au
chapitre 2, à la p.42). Le caractère général ou spécifique d'
un service ne paraît en effet
pas être un indicateur de la capacité à définir un service, ses caractéristiques ou ses
résultats. Comme le soulignent Johnson et Fornell (1987), il s'
agirait plutôt d'
un
indicateur du niveau de détail où l'
on se place dans l'
offre. Ainsi, d'
après ces auteurs,
les attributs spécifiques seraient reliés aux marques, alors que les attributs généraux
seraient davantage liés à la catégorie de service. Concernant le caractère abstrait ou
concret d'
un service, la même remarque s’impose. En outre, la question de son
appartenance univoque à la composante mentale de l'
intangibilité se pose. Le caractère
concret d’un service ne pourrait-il pas également représenter la composante physique
de l'
intangibilité dans la perception des clients ? Finalement, certains items manquent
de précision. Ainsi, l’item « Ce produit/service est 1 = très général à 9 = très
spécifique » semble être sujet à des interprétations multiples.
•
Quatrièmement, certains résultats observés par Laroche et al. (2001) concernant la
fiabilité et la validité convergente propre à la dimension « généralité » sont
insatisfaisants. Ainsi, l'
Alpha de Cronbach de cette dimension présente une valeur de
0,61, valeur limite face aux recommandations usuelles en la matière (Nunally, 1978 ;
DeVellis, 1991). En outre, la validité convergente n’est pas établie, la variance
moyenne extraite de la dimension « généralité » étant égale à 0,47, ce qui est inférieur
au prescrit de Fornell et Larcker (1981).
•
Cinquièmement, l’échelle est testée uniquement sur un échantillon de convenance
d’étudiants universitaires. S’il s’agit certes d’une démarche courante, une échelle ne
peut être entièrement validée sur un tel échantillon de convenance aux caractéristiques
si particulières (moyenne d’âge : 24 ans, niveau d’éducation universitaire). Nous
120
sommes en droit de nous interroger sur la stabilité d’un tel modèle de mesure sur un
échantillon réellement représentatif de la population.
•
Finalement, les scores d’intangibilité observés sur la dimension physique nous posent
question. S’il est parfaitement intuitif que les deux dimensions relatives à la
composante mentale de l’intangibilité ne permettent pas de discriminer les produits
des services, cela est plus surprenant pour la dimension physique de l’intangibilité.
Cette question nous renvoie vers deux options possibles : soit la dimension physique
de l’intangibilité ne permet réellement pas de discriminer les produits des services (ce
qui remettrait en question un des fondements probablement le plus largement cité de la
discipline du marketing des services. En tout état de cause, la recherche de Laroche et
al. (2001) ne permet pas de valider de manière robuste cette option, ne fût-ce que pour
des questions de manque de représentativité de l’échantillon) ; soit cette observation
témoigne d’une faiblesse dans la mesure de leur dimension physique de l’intangibilité.
Au vu de ces remarques, et indépendamment de la prise de position conceptuelle, l’instrument
développé par Laroche et al. (2001) n’est pas jugé satisfaisant, et ne peut pas être utilisé en
l’état dans le cadre de cette recherche. Il est donc décidé de développer une nouvelle échelle
de mesure du degré d’intangibilité d’une offre de services pour les besoins de la présente
étude.
2. DEVELOPPEMENT D’UNE ECHELLE DE MESURE DU DEGRE D’INTANGIBILITE
La construction d'
une échelle de mesure sur base de la définition de construit a elle-même été
source de recherches et de publications démontrant la délicatesse de l'
exercice. En vue de
développer une échelle de mesure fiable et valide, nous avons suivi le cadre traditionnel
général proposé par Churchill (1979), tout en veillant à intégrer les remarques et
développements formulés à l'
égard de cette procédure, et à l'
adapter aux outils statistiques
d'
analyse actuels (Cohen et al., 1990 ; Bagozzi, 1994).
121
Les étapes méthodologiques suivantes ont été suivies lors de la construction de l’échelle de
mesure du degré d’intangibilité d’une offre globale de services :
•
la spécification du concept à opérationaliser ;
•
la génération d'
items en vue de la rédaction du questionnaire ;
•
l'
administration de l'
échelle sous forme d'
une première enquête ;
•
la purification de l'
échelle sur base des résultats obtenus ;
•
l'
administration de l'
échelle purifiée lors d'
une seconde enquête ;
•
l'
analyse des résultats de l'
échelle purifiée ;
•
l'
analyse factorielle confirmatoire à l'
aide des méthodes d'
équations structurelles;
•
les mesures de fiabilité et de validité de l'
échelle;
•
la supériorité du modèle bidimensionnel.
2.1.La spécification du concept à opérationaliser
Avant toute tentative d’opérationalisation d’un concept, il est capital de bien spécifier le
contenu même du concept, afin d’éviter de rencontrer des problèmes de validité de contenu
(Churchill, 1979 ; De Vellis, 1991). Nous souhaitons être d’autant plus précis dans cette étape
qu’une de nos critiques à l’égard de l’échelle de Laroche et al. (2001) porte précisément sur
un problème de spécification du concept qu’ils cherchent à mesurer.
Pour rappel, malgré le caractère central du concept d’intangibilité au sein de la discipline du
marketing des services, il n’y a pas, à l’heure actuelle, de consensus quant au sens à lui
donner. Concept tantôt présenté dans une perspective exclusivement « physique », tantôt
présenté dans une perspective « physique » et « mentale », il est nécessaire de prendre
position par rapport à ce débat conceptuel pour la présente recherche.
Afin de proposer une définition robuste du concept d’intangibilité, qui soit cohérente avec les
propositions issues de la littérature, et qui soit jugée pertinente par les praticiens actifs dans
des activités de services, nous avons poursuivi une triple démarche. Nous nous sommes tout
d’abord intéressé aux spécificités linguistiques qui entourent ce concept. Dans un second
temps, nous avons mené des entretiens exploratoires auprès de managers d’activités de
services, afin d’évaluer ce qu’ils entendent par le vocable « intangibilité » dans l’exercice de
122
leurs activités. Finalement, nous avons poursuivi ce même objectif en rencontrant des clients
consommateurs d’activités de services.
2.1.1
Intangibilité et intangible : spécificités linguistiques
Il est intéressant de constater que les ouvrages francophones présentant le concept
d’intangibilité font uniquement référence à la composante physique du concept (Flipo, 1984 ;
Bréchignac-Roubaud, 1998 ; Eiglier, 2004). Par contre, un grand nombre de chercheurs
anglophones distinguent, à côté de la composante physique de l’intangibilité, une composante
mentale. Un examen des spécificités linguistiques propres à ce concept d’intangibilité peut
donc apporter un éclairage intéressant dans la poursuite de notre objectif de prise de position
conceptuelle.
Définir le concept d'
intangibilité revient à définir le concept d'
intangible, puisque
l’intangibilité signifie le « caractère de ce qui est intangible » (Larousse, 2003).
Suite à une discussion avec un professeur de lettres francophone, « intangible » est l’un de ces
nombreux mots de la langue française dont l’usage commun a détourné le sens. Dans le
français originel et dans le langage courant, « intangible » est utilisé comme l’antonyme de
« tangible », et signifie impalpable, inaccessible au sens du toucher. Mais au XXème ,
« intangible » a pris le sens de « sacré, inviolable, qui doit rester intact » (Larousse, 2003 ;
Hachette, 1997). Un principe intangible est donc un principe qui ne peut pas être changé, qui
est immuable. Une connotation au sens du toucher subsiste, mais dans une perspective
symbolique : on ne peut pas toucher à un principe intangible, on ne peut chercher à le
modifier, car il est sacré, inviolable.
En anglais, intangible semble avoir partiellement gardé son sens originel, tout en étant élargi.
Ainsi, l’Oxford Advanced Learner’s Dictionary (2003) le définit comme suit : « qui existe,
mais qui est difficile à décrire, comprendre ou mesurer »9. Le MacMillan English Dictionary
(2002) le définit comme « l’impossibilité à être touché ou mesuré et la difficulté à décrire ou
expliquer »10. L’Harap’s Chambers Encyclopedic English Dictionary le définit comme 1)
9
“That exists but that is difficult to describe, understand or measure”
“Not able to be touched or measured and difficult to describe or explain”
10
123
l’incapacité à être perçu par le toucher, et 2) la difficulté à comprendre, à saisir
mentalement11.
Il faut reconnaître que la littérature sur le marketing des services est très majoritairement
anglophone. Or, dans la définition anglophone du dictionnaire, nous retrouvons la composante
physique et la composante mentale de l’intangibilité. Le sens donné à ce mot en langue
française est par contre différent selon sa définition stricte, ou plus limité selon son usage
commun. Ceci peut donc expliquer partiellement pourquoi les recherches francophones ne
mentionnent pas la composante mentale de l’intangibilité, parce que cette extension de
contenu du concept soulève pour les auteurs francophones un problème sémantique.
2.1.2. Entretiens exploratoires auprès de managers d’activités de services
La littérature et la linguistique ne nous permettent pas de prendre une position conceptuelle
éclairée. Afin de mieux comprendre toute la portée du concept d’intangibilité, nous avons
décidé de recourir à des entretiens exploratoires auprès de managers d’activités de services.
L’objectif général de ces entretiens a consisté à mieux comprendre comment les
professionnels d’activités de services conçoivent le concept d’intangibilité. Des entretiens
individuels semi-directifs ont été menés auprès de sept managers appartenant aux secteurs
suivants : banque, assurance, conseil en stratégie d'
entreprise, services informatiques, service
juridique et conseil en modélisation quantitative. Ces managers étaient soit directeur
marketing, soit directeur de la communication, soit directeur général. Ces secteurs ont été
retenus pour leur diversité d’une part, mais aussi pour l’importance que le concept
d’intangibilité représente dans l’exercice de la prestation de leurs activités.
L’analyse par résumé des données manifestes a permis de dégager de manière unanime le
caractère important de l’intangibilité dans les activités analysées, deux interviewés nuançant
leur propos par le fait que leurs offres de services contiennent également des éléments
tangibles. Tous font également spontanément référence à la double composante « physique »
et « mentale » de l'
intangibilité, à des degrés divers. La composante physique a ainsi été
largement décrite comme un manque de matérialité (« on vend du vent », « on vend de
l’immatériel », « c’est impalpable », … ). Sur le plan mental, trois managers interviewés ont
spontanément insisté sur le problème « du manque de compréhensibilité » de leur offre, de
11
“1) Not able to be felt or perceived by touch 2) Difficult to understand or for the mind to grasp”
124
« la difficulté pour le client à comprendre », et de « la difficulté (pour le prestataire) à pouvoir
expliquer ». Plus particulièrement, le manager actif en conseil d’entreprise a longuement
insisté sur la difficulté à faire comprendre où réside la valeur ajoutée de son offre de services,
et sur la difficulté à expliquer cette valeur ajoutée aux clients. Les quatre autres managers
interrogés ont davantage évoqué l’intangibilité mentale comme générant des conséquences
négatives pour le client ou le prestataire de service (l’intangibilité génère du stress pour le
futur client dans le sens où il est difficile de lui faire comprendre ce qu’il va obtenir).
2.1.3. Entretiens exploratoires auprès de clients
Nous avons également rencontré neuf personnes clientes de banques et de compagnies
d’assurance. Ces personnes comptaient cinq hommes et quatre femmes, âgés de 25 à 70 ans.
A l’aide d’entretiens individuels semi-dirigés, nous avons souhaité appréhender comment ils
perçoivent des offres de services dont le degré d’intangibilité attendu est élevé. Pour ce faire,
nous nous sommes essentiellement focalisé sur des offres de services bancaires, et sur des
offres de services d’assurances. Néanmoins, durant la discussion, d’autres services ont été
évoqués, et ont fait l’objet d’une discussion (offres touristiques, offres de restauration, et
service de comptabilité, puisque l’un des hommes interrogés est indépendant et recourt à ce
service). Nous avons, dans un premier temps, demandé à ces personnes de nous dire ce qui
différencie ces services de produits matériels, sans évoquer la notion d’intangibilité. La raison
essentielle vise à éviter le biais sémantique qui pourrait limiter le répondant au seul sens
commun du mot. Nous avons ensuite approfondi les éléments de discussion liés à
l’intangibilité des services.
De manière unanime, les personnes interrogées ont toutes fait référence à la composante
physique de l’intangibilité, en l’exprimant de manières diverses :
•
« on n’achète rien de concret » ;
•
« c’est immatériel »
•
« on ne rentre avec rien à la maison, si ce n’est un morceau de papier » ;
•
« on vit une expérience, et il ne nous reste qu’un souvenir ».
125
Six personnes ont également fait référence à la composante mentale de l’intangibilité, de
manière variée :
•
« je n’y comprends rien en produits bancaires »
•
« Les offres ne sont pas transparentes, on a l’impression d’être floué »
•
« Pour moi, une bonne banque, c’est une banque où le personnel sait expliquer
clairement les choses ». La personne exprime ensuite que le personnel des grandes
banques en Belgique (Fortis, Dexia et ING) n’explique pas toujours clairement les
choses.
•
« J’aime bien Ethias, car leur offre est compréhensible, et les employés expliquent
clairement les choses. Ce n’est pas le cas pour toutes les compagnies d’assurance »12.
•
« Moi je n’y connais rien en comptabilité, donc je dois faire confiance à mon
comptable. Mais je ne suis pas toujours certain qu’il agit dans mes meilleurs intérêts,
car ses explications ne sont pas toujours très claires ».
2.1.4. Prise de position conceptuelle
Les entretiens exploratoires menés tant auprès de managers que de clients d’activités de
services suggèrent que la conception à la fois « physique » et « mentale » de l’intangibilité est
la plus appropriée pour représenter le concept d’intangibilité. Ceci est appuyé par un large pan
de la littérature. Ainsi, comme déjà discuté, de nombreux auteurs sont fidèles à cette
conceptualisation de l’intangibilité (citons Bateson, 1979 ; Berry, 1980 ; Hirschman, 1980 ;
Cowen, 1984 ; Rushton et Carson, 1989 ; Edgett et Parkinson, 1993 ; Ward, 1996 ; Watkins et
Wright, 1997, Mittal, 1999 ; Lovelock et Gummesson, 2004). En outre, de façon intéressante,
il faut constater que les quelques recherches ayant porté sur l’analyse de la dimensionnalité du
concept d’intangibilité, et sur son opérationalisation, s’inscrivent toutes dans la
conceptualisation physique et mentale. L’étude de McDougall et Snetsinger (1990) va même
jusqu’à opérationaliser le concept d’intangibilité dans sa seule composante mentale, suggérant
implicitement que cette composante puisse être plus importante que la composante physique.
12
Notons que cette affirmation appuie le rôle potentiel de la marque forte sur le processus de tangibilisation du
service.
126
Au terme des entretiens exploratoires et de la revue de littérature, la définition suivante du
vocable "intangible" ou "intangibilité" au sens marketing, fidèle à celle de Bateson (1979) et
Berry (1980) est dès lors proposée :
1. Un manque de matérialité (se rapportant à la composante physique du
construit) ;
2. Une difficulté accrue à être défini, formulé ou compris de façon claire et
précise (se rapportant à la composante mentale du construit).
Cette définition suggère que le concept d’intangibilité est multidimensionnel. Plus
précisément, contrairement à la conception tri-dimensionnelle de l’intangibilité proposée par
Laroche et al. (2001), et sur base des critiques que nous avons formulées à l’égard de cette
modélisation, nous posons l’hypothèse que le concept d’intangibilité est un concept
bidimensionnel, caractérisé par une dimension physique et par une dimension mentale unique.
Nous pensons que la capacité d’un individu à définir ou à formuler est largement influencée
par sa capacité à comprendre, et que dès lors ces trois phénomènes sont susceptibles d’être
capturés dans une seule et même dimension.
H1 :
Le concept d’intangibilité est un concept bidimensionnel, constitué d’une dimension
physique faisant référence au manque de matérialité du service, et d’une dimension
mentale faisant référence à la difficulté accrue pour un intangible à être défini, formulé
ou compris de façon claire et précise.
Dans son sens strict, immatériel signifie : « qui n’est pas constitué de matière » (Le Petit
Robert, 2004). La question est dès lors de savoir quels sont, parmi les cinq sens, ceux qui sont
impliqués dans la perception du degré d’immatérialité d’une offre de services.
Cette discussion pourrait être un débat philosophique : une odeur est-elle plutôt matérielle
(elle se sent) ou plutôt immatérielle (on ne peut pas la toucher) ? Pour un chimiste, une odeur
est constituée de particules, et, dès lors, elle pourrait être perçue comme étant matérielle,
puisque constituée de matière. Pour le commun des mortels, une odeur ferait probablement
127
davantage référence à quelque chose d’immatériel. Ainsi, ayant demandé à dix personnes si
une odeur est plutôt matérielle ou plutôt immatérielle, tous ont affirmé qu’il s’agissait de
quelques chose d’immatériel. Il en va de même pour la musique. Même si elle s’entend, les
personnes interrogées estiment qu’on ne voit pas, qu’on ne touche pas la musique, et que dès
lors elle est immatérielle. On ne peut voir ou toucher que la partition, qui n’est qu’un support
à la musique, mais pas la musique elle-même.
Lors des entretiens exploratoires avec les clients d’activités de services, les seuls sens de la
vue et du toucher ont été évoqués pour distinguer ce qui est matériel de ce qui ne l’est pas.
Les trois autres sens (ouïe, odorat et goût) n’ont pas été mentionnés. Toutes les personnes
rencontrées ont estimé que quelque chose de totalement immatériel ne peut pas être touché ni
vu.
Dans le cadre de cette recherche, nous considérons que les deux sens les plus importants pour
la perception du degré de matérialité d’une offre commerciale sont le toucher et la vue. Nous
pensons en effet que les trois autres sens (ouïe, odorat et goût) sont moins pertinents dans un
contexte de perception d’intangibilité physique lors de l’utilisation ou de la consommation
d’une offre commerciale (même si nous ne nions pas leur importance. Il peuvent d’ailleurs
constituer des éléments importants du marketing mix. Une odeur par exemple peut induire
une émotion particulière chez un client, et agir ainsi sur l’ambiance du lieu de vente ou de
prestation, et sur l’expérience du client).
Un autre élément de débat porte sur le caractère discret ou continu de l’intangibilité. Dans la
logique de la définition proposée, le caractère continu de l’intangibilité est retenu. Au même
titre que Shostack (1977) propose un continuum relatif à la seule composante physique de
l’intangibilité, la composante mentale du construit suggère la pertinence d’un second
continuum. Reprenant l’analogie de la molécule de Shostack (1977), une offre globale de
services ou de produits est composée d’éléments discrets, soit matériels, soit immatériels, et
facilement ou difficilement compréhensibles. Toutefois, l’offre prise dans sa globalité ne peut
être décrite qu’en termes de dominance. En effet, un des défis du responsable marketing
consiste à mettre à jour ce qui est perçu par le client, quelle est l’image qu’il se fait d’une
offre fonctionnellement complexe. Or, le processus de perception du client est réductionniste
et simplificateur (Flipo, 1984). Le client ne peut donc appréhender l’offre globale que comme
étant plus ou moins matérielle ou plus ou moins immatérielle. Il est incapable de quantifier
128
précisément la part matérielle et la part immatérielle de l’offre. De même, l’offre sera perçue
comme plus ou moins tangible sur le plan mental, soit plus ou moins simple ou plus ou moins
difficile à comprendre, à expliquer ou à définir. Il est intéressant de noter que le continuum
mental de l’intangibilité, à tout le moins, ne va pas nécessairement discriminer les produits
des services. Le concept d’intangibilité dans son ensemble ne peut donc pas être considéré
comme propre aux services, puisqu’un bien fortement matériel pourrait être perçu comme
mentalement plus intangible qu’un service aisé à comprendre, à définir et à formuler. Ce point
précis fera l’objet d’une discussion approfondie dans la suite du document.
2.2. La génération d'items en vue de la rédaction du questionnaire
Sur base de notre spécification du concept d’intangibilité, une première liste d'
items a été
considérée sur base des travaux antérieurs de McDougall et Snetsinger (1990) et de Laroche
et al. (2001). Ainsi, sur la base de l’analyse des items utilisés dans les études précédentes certains opérationalisant correctement le construit d’intangibilité tel que spécifié ci-dessus une première liste de huit items a été générée (M4, P5, M9, M10, P11, M15, M16, P17 – voir
annexe 2 pour la liste des items générés). Lors de cette phase toutefois, aucun item des études
précédentes n’a été identiquement repris, ne fût-ce que pour des raisons de traduction.
Parallèlement, nous avons conduit plusieurs entretiens individuels semi-dirigés auprès de cinq
managers d'
entreprises appartenant à des secteurs variés (informatique, tourisme, banque,
assurance, génie civil), et de trois groupes de discussion et d’entretiens individuels réunissant
un total de seize clients âgés de 22 à 65 ans. L’objectif de ces entretiens a été de générer des
items, en partant des définitions de l’intangibilité physique et mentale, sans limitation du
nombre d’items développés. Cette phase a permis de dégager 9 items supplémentaires.
Il en est ressorti une liste de 17 items, 5 items étant supposés mesurer la composante physique
de l'
intangibilité, 12 items la composante mentale. Cette liste, présentée en annexe 2, a été
prétestée auprès de clients, ainsi qu'
auprès d'
experts académiques et professionnels en France
et en Belgique. Chaque expert a ainsi eu à se prononcer sur le caractère compréhensible et non
équivoque de l’item, de même que sur sa capacité à opérationaliser correctement le construit
tel qu’il a été spécifié. Cette étape a permis de reformuler plus précisément deux items.
129
Au terme de cette phase, il est apparu qu’un certain nombre d’items étaient redondants. Mais
nous les avons volontairement conservés, afin de pouvoir identifier les items jugés les plus
pertinents lors de la phase de purification.
2.3. Administration de l'échelle sous forme d'une première enquête
Cette première enquête porte tant sur des produits que sur des services auxquels est
traditionnellement associée l'
intangibilité. Deux produits et quatre services ont été choisis.
Ces produits et services, appartenant à l’univers de consommation de l’échantillon interrogé,
sont : le jeans, l'
ordinateur portable, le compte d'
épargne, le vol Rome-Londres, la
consultation chez le médecin et l'
assurance "annulation voyage". Le choix de ces produits et
services repose sur l’attente d’obtention de degrés d’intangibilité physique et mentale variés :
intangibilité physique et intangibilité mentale attendues faibles pour le jeans, intangibilité
physique faible et intangibilité mentale forte pour l’ordinateur portable, intangibilité physique
et intangibilité mentale fortes pour le compte d’épargne et l’assurance, intangibilité physique
et intangibilité mentale moyennes pour le vol et intangibilité physique moyenne et
intangibilité mentale forte pour la consultation chez le médecin.
Un questionnaire reprenant la liste des 17 items générés a été administré à 692 personnes (le
questionnaire est présenté en annexe 3). Cet échantillon de convenance est composé
d'
étudiantes et étudiants français et belges, issus de différentes facultés (droit, sciences
économiques, sciences sociales, sciences politiques, écoles de commerce et d'
ingénieurs), de
niveaux d'
éducation (Bachelor et MSc) et d'
âges différents. A ce stade, le choix de cet
échantillon constitue une limite importante, dont nous sommes conscients. Dès lors, les
résultats issus de cette phase exploratoire devront être validés lors de la phase conclusive.
Les questionnaires auto-administrés comprenaient chacun un produit et deux services. Chaque
item a été mesuré sur une échelle de type différentiel sémantique en sept points, en variant
selon l'
item l'
ordre du niveau d'
intangibilité maximum. Quatre versions différentes de ce
questionnaire ont été distribuées, changeant l'
ordre d'
apparition des produits et des services.
Ce mode d’administration induit toutefois un biais possible d’étalonnage des deuxième et
troisième entités analysées par rapport à la première, risque normalement réduit par la
variation d’ordre d’apparition des services. En effet, en créant quatre versions différentes du
questionnaire, chaque service a pu apparaître comme première entité à évaluer, de sorte
130
qu’elle le soit indépendamment des autres entités. Sur les 692 questionnaires distribués, 643
ont été récoltés. Seize questionnaires ont encore dû être rejetés, car indûment complétés, soit
un total de 627 questionnaires encodés et 1881 applications de l'
échelle de mesure
d'
intangibilité.
2.4. Purification de l'échelle sur la base des résultats obtenus
De manière classique, nous avons mené une analyse factorielle des données collectées sur
l'
ensemble des produits et services, de même que sur chacun d'
entre eux étudié séparément.
Les résultats de l'
analyse factorielle (tableau 5.1) avec rotation varimax sur l'
ensemble des
données confirment l'
existence de deux facteurs (valeurs propres initiales supérieures à 1). Le
premier facteur relatif à la dimension mentale contribue à raison de 37,0% de la variance
expliquée, le second facteur relatif à la dimension physique contribue pour 27,1%, soit un
total de 64,1% de la variance totale pour les deux facteurs.
Tableau 5.1 : Résultats de l'
analyse factorielle
FACTEUR
1
M2
,810
M3
,738
M4
,683
M6
,825
M8
,588
M9
,692
M10
,613
M12
,831
M13
,716
M14
,763
M15
,498
M16
,724
2
P1
,731
P5
,877
P7
,898
131
P11
,790
P17
,759
Valeur propre
6,29
4,61
Variance expliquée
37,0%
27,1%
Alpha de Cronbach
0,93
0,89
La réduction des variables de l'
échelle d'
intangibilité a été réalisée sur la base des corrélations
de structure, ou charges factorielles, et sur l'
interprétation des variables. Les items dont les
corrélations de structure, comparées aux autres items, étaient les plus faibles sur le facteur
étudié (charge inférieure à 0,70) ou insuffisamment faibles sur l'
autre facteur (charge
supérieure à 0,30 – ces deux seuils ont été retenus en fonction des prescrits de Hair, et al.,
199813) ont été rejetés. Cette règle a conduit au rejet de M3, M4, M8, M9, M10, P11, M15 et
M16. Outre ces items éliminés pour leur qualité psychométrique peu satisfaisante, les items
M12 et P17 ont été supprimés, car jugés redondants. M12 reprenant le phrasé de M2 avec les
bornes de M14, il a été décidé d’éliminer cet indicateur dont la charge factorielle sur la
dimension physique était supérieure à celle des deux indicateurs susmentionnés. P17 étant,
quant à lui, très semblable à P7 dans sa signification, ce dernier a été privilégié pour ses
qualités psychométriques. Par ailleurs, il a été volontairement décidé de conserver P5, qui
associe dans un seul item le sens de la vue et du toucher. Même si cela peut paraître ambigu à
première lecture, l’objectif consiste à aider le répondant à appréhender le degré de matérialité
d’une entité non seulement à travers le sens du toucher, mais aussi le sens de la vue. Comme
déjà discuté, ce dernier peut en effet aider dans la perception de matérialité d’une entité non
nécessairement palpable immédiatement (par exemple, un avion posé sur une piste d’aéroport
n’est pas palpable depuis l’aérogare, mais sa matérialité est assurée par la vue). De plus, pour
rappel, la vue a souvent été mentionnée dans la phase exploratoire comme étant un des sens
essentiels, à côté du toucher, pour distinguer ce qui est matériel de ce qui ne l’est pas.
13
Ces auteurs suggèrent de manière empirique qu’une charge factorielle pour un item inférieure à 0,30 n’atteint
pas le niveau minimal permettant d’interpréter l’item par rapport au facteur. De même, ils estiment qu’une
charge excédant le seuil de 0,70 dans un facteur fait qu’il représente au moins 50% de la variance (Hair et al.,
1998, p.111).
132
A la suite de cette réduction, sept items ont donc été conservés (tableau 5.2) : quatre items
relatifs à la dimension mentale et trois items relatifs à la dimension physique de l'
intangibilité.
Tableau 5.2 : Purification de l'
échelle
Dimension
Mentale
Physique
Items
M2, M3, M4, M6,
Alpha de
Items
Nouvel
Variance
Cronbach
enlevés
Alpha ( )
expliquée
0,83
48,4%
0,86
24,0%
0,93
M3, M4,
M8, M9, M10, M12,
M8, M9,
M13, M14, M15,
M10, M12
M16
M15, M16
P1, P5, P7, P11, P17
0,89
P11, P17
L'
analyse factorielle avec rotation varimax sur les 7 items retenus, appliquée aux deux
produits et quatre services considérés séparément, confirme la structure bidimensionnelle
proposée.
2.5. Administration de l’échelle purifiée lors d’une seconde enquête
Sur la base de ces premiers résultats, nous avons mené une seconde enquête auprès de 269
(autres) étudiants, aux caractéristiques relativement similaires à la première enquête. Un
questionnaire14 reprenant les sept items retenus leur a été soumis, avec un produit et deux
services par enquête. Deux versions du questionnaire ont été administrées (variation de
l’ordre d’apparition des entités), et 256 questionnaires ont pu être encodés et traités.
Concernant les produits et services choisis, un produit et un service identiques à la première
enquête ont été conservés : le jeans et le compte d'
épargne. Le dîner dans une pizzeria a été
introduit comme nouveau service dans l'
étude, à titre de validation externe partielle. Le choix
de ce service s'
est fait sur la base du continuum unidimensionnel de Shostack (1977) qui situe
ce type de service à mi-chemin sur cette échelle. Par conséquent, la seconde enquête s'
appuie
sur un produit supposé à forte dominante tangible sur la composante physique et la
composante mentale (le jeans), un service supposé moyennement tangible sur la composante
physique et la composante mentale (le dîner dans une pizzeria) et un service avec un degré
d'
intangibilité attendu plus élevé sur ces deux composantes (le compte d'
épargne).
14
Le questionnaire est disponible en annexe 4.
133
2.6. L'analyse des résultats de l’échelle purifiée
Avant de procéder à une analyse à l’aide de la méthode des équations structurelles, nous
avons soumis les données collectées à une nouvelle analyse factorielle exploratoire avec
rotation varimax. Les résultats observés sur la base de cette seconde enquête sont présentés
dans le tableau suivant. Deux facteurs sont à nouveau retenus (valeurs propres initiales
supérieures à 1) expliquant 75% de la variance totale. Les variances expliquées sont
respectivement de 52% pour le facteur 1 relatif à la dimension mentale, et de 23% pour le
facteur 2 relatif à la dimension physique. L'
analyse de fiabilité (Alpha de Cronbach) a donné
des coefficients très acceptables de 0,83 et 0,90 respectivement pour les deux facteurs
(Nunally, 1978 ; De Vellis, 1991).
Tableau 5.3 : Analyse factorielle - Echelle purifiée
Facteur
Mentale
M2
,860
M6
,806
M13
,771
M14
,812
Physique
P1
,871
P5
,894
P7
,911
Valeur propre
3,64
1,61
Variance expliquée
52,0%
23,0%
Alpha de Cronbach
0,83
0,90
0,90
0,93
de Jöreskog
2.7. Analyse factorielle confirmatoire à l’aide des méthodes d’équations structurelles
Afin de vérifier la validité de la structure factorielle, une analyse factorielle confirmatoire a
été conduite à l’aide du logiciel Lisrel 8.50, sur la base du modèle hypothétique découlant de
l'
échelle réduite, représenté dans la figure suivante. La matrice de covariance des indicateurs a
134
été utilisée comme base de données d'
entrée et la procédure d'
estimation est celle du
maximum de vraisemblance. La taille de l'
échantillon final de la seconde enquête est de 256
répondants ayant répondu aux 3 applications de l'
échelle, soit 768 observations dont 704 ont
été complétées entièrement. L’absence de non-normalité des données a été testée sur la base
d'
une analyse conforme des valeurs Skewness et Kurtosis (Kline, 1998). En outre, l’hypothèse
de multinormalité des données n’a pas été rejetée. Ce test a été réalisé à l’aide du logiciel
Lisrel 8.50 (Jöreskog et Sörbom, 1996).
Figure 5.1 : Modèle hypothétique
M2
M6
MENTALE
M13
M14
PHYSIQUE
P1
P5
P7
Les contributions factorielles des indicateurs - spécifiées dans le tableau 5.4 ci-après - sont
comprises entre 0,78 et 0,95, à un niveau de signification inférieur à 0,05 pour l'
ensemble des
indicateurs. Cette vérification de l'
absence de résultats aberrants ou de paramètres non
significatifs est une première étape dans l'
évaluation de la qualité du modèle (Bagozzi et Yi,
1988). L'
analyse des R² permet d'
évaluer le pourcentage de variance expliquée pour chaque
indicateur, variant de 0,61 à 0,90 selon l’indicateur considéré.
135
Tableau 5.4 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
Indicateurs
latentes
Contributions
Niveau de
factorielles
signification du
R²
t de Student
Dimension
M2
0,78
0,036
0,61
Mentale
M6
0,81
0,035
0,65
M13
0,89
0,035
0,80
M14
0,86
0,037
0,74
Dimension
P1
0,83
0,031
0,68
physique
P5
0,93
0,029
0,87
P7
0,95
0,029
0,90
Les indices d’évaluation de la qualité d’ajustement du modèle sont subdivisés en trois
catégories : les indices de mesure absolus, les indices de mesure incrémentaux et les indices
de mesure de parcimonie15. Le choix des indices présentés dans le tableau 5.5, basé sur les
recommandations de Roussel et al. (2002), témoigne d’une qualité d'
ajustement tout à fait
acceptable, même si la question des valeurs clés des indices doit être considérée de manière
relative plutôt qu'
absolue.
15
Les définitions de ces indices d'
ajustement sont les suivantes :
- "Un indice d'
ajustement absolu permet d'
évaluer dans quelle mesure le modèle théorique posé a priori
reproduit correctement les données collectées" (Roussel et al., 2002, p62).
- "Un indice "incrémental" mesure l'
amélioration de l'
ajustement en comparant le modèle testé à un modèle
plus restrictif, dit modèle de base" (Roussel et al., 2002, p 65).
- "Le recours aux indices de parcimonie se justifie pour trois raisons (Roussel et al., 2002, p68) :
- Eviter de "surestimer" un modèle donné (améliorer artificiellement le degré d'
ajustement du modèle
grâce à l'
ajout exagéré de paramètres à estimer).
- Détecter si le mauvais degré d'
ajustement d'
un modèle ne provient pas, à l'
opposé, d'
une "sousestimation" du modèle testé (absence manifeste de paramètres à estimer, car trop de paramètres ont été
fixés).
- Permettre de déterminer, parmi plusieurs modèles plausibles équivalents, celui qui présente la
meilleure parcimonie et qui devrait, par conséquent, être préféré aux autres".
136
Tableau 5.5 : Indices d'
ajustement du modèle - 7 indicateurs
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
3,18
AGFI
0,96 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,096
Critical N
524,47 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,47
RMR
0,020
PGFI
0,35
RMSEA
0,056 < 0,08
2.8. Mesures de fiabilité et de validité de l’échelle
En plus d’une analyse satisfaisante de la fiabilité à l’aide des Alpha de Cronbach propres à
chaque facteur (0,83 et 0,90), les
de Jöreskog (Joreskog, 1971) - dont la sensibilité est moins
grande au nombre d'
items retenus (Roussel et al., 2002) – présentent des valeurs de 0,90 pour
la dimension mentale et de 0,93 pour la dimension physique, valeurs supérieures aux seuils de
0,7 à 0,8 communément admis (Fornell et Larcker, 1981).
La validité convergente est vérifiée par les conditions suivantes (Roussel et al., 2002 ; p. 56) :
1) Le test t associé à chacune des contributions factorielles est significatif, c'
est-à-dire
supérieur à 1,96 ; ceci est vérifié pour les 7 indicateurs (cf. Tableau 4 avec le niveau de
signification du t de Student < 0,05).
2) Chaque indicateur partage plus de variance avec son construit qu'
avec l'
erreur de mesure
qui lui est associée (cf. Tableau 4 : le carré de la contribution factorielle de tous les
indicateurs > 0,5).
3) A cela est associé le critère de la variance moyenne extraite ou du rhô ( ) de validité
convergente de Fornell et Larcker (1981). La valeur de la variance moyenne extraite pour
chaque facteur compte au moins pour 0,50 de la variance totale. La validité convergente
est donc établie, comme indiqué dans le tableau suivant qui résume les trois conditions de
validité convergente.
137
Tableau 5.6 : Evaluation de la validité convergente
Dimension
Nbre de non
Nbre de R² associé
(vc)
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
Mentale
0
0
0,700
Physique
0
0
0,818
La comparaison de la variance moyenne extraite de chaque variable latente avec le carré de la
corrélation qu'
il partage avec les autres variables latentes (Fornell et Larcker, 1981) permet
d’établir la condition de validité discriminante. Ainsi, le carré de la corrélation entre les deux
variables latentes étant de 0,26, cette valeur est bien inférieure aux deux variances moyennes
extraites correspondantes figurant dans le tableau ci-dessus ( (vc)).
2.9. La supériorité du modèle bidimensionnel
Notre remise en question du modèle tridimensionnel de Laroche et al. (2001) se fondait
essentiellement sur un problème de validité de contenu, accompagné d’un problème de
fiabilité et de validité convergente (cfr. infra). Cette remise en cause de l'
existence d'
un
troisième facteur a été confirmée lors de l’analyse factorielle exploratoire. Il reste alors à
tester la supériorité du modèle bidimensionnel de l'
intangibilité sur un éventuel modèle à une
dimension. Les résultats sont présentés dans le tableau suivant :
Tableau 5.7 : Comparaison des indices d’ajustement des modèles unidimensionnel et
bidimensionnel
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrément.
1 fact. 2 fact.
Indices de
Valeurs
parcimonie
1
2
1 fact.
2 fact.
GFI
0,80
0,99
NFI
fact.
fact.
² normé
54,97
3,18
AGFI
0,50
0,96
IFI
0,80
0,99
ECVI
0,91
0,096
Critical N
23,88
524,4
CFI
0,81
0,99
PNFI
0,42
0,47
RMR
0,19
7
0,81
0,99
PGFI
0,32
0,35
RMSEA
0,28
0,020
0,056
138
Les résultats de l'
analyse factorielle confirmatoire pour une structure à un seul facteur
conduisent à rejeter la structure unidimensionnelle testée. En effet, toutes les conditions de
validité convergente ne sont plus respectées, à savoir de faibles contributions factorielles sur
les indicateurs liés à la dimension physique (<0,5 avec R²<0,35). En outre, la comparaison
(Han, Kim et Srivastava, 1998) entre indices d'
ajustement liés aux résultats des analyses
factorielles confirmatoires pour une structure éventuelle à un seul facteur (l'
intangibilité)
versus une structure à deux facteurs (la dimension mentale et la dimension physique) est en
tout point favorable au modèle bidimensionnel (cf. tableau ci-dessus).
Par ailleurs, la structure bidimensionnelle est testée individuellement sur chaque produit et
service analysé. Les résultats de l'
analyse factorielle confirment à chaque fois cette
bidimensionnalité du concept étudié. Tout ceci suggère bien que le modèle bidimensionnel est
le plus approprié pour représenter le concept d'
intangibilité.
CONCLUSION DU CHAPITRE 5
Après une importante revue de la littérature, et au terme d’entretiens individuels avec des
managers d’activités de services et avec des clients consommateurs d’activités de services,
nous avons retenu la conceptualisation physique et mentale de l’intangibilité. Nous avons en
outre posé l’hypothèse selon laquelle le concept d’intangibilité est un concept bidimensionnel,
constitué d’une dimension physique faisant référence au manque de matérialité du service, et
d’une dimension mentale faisant référence à la difficulté (accrue pour un intangible) à être
défini, formulé ou compris de façon claire et précise.
Nous avons ensuite suivi le cadre général proposé par Churchill (1979), complété par les
remarques et développements formulés à l'
égard de cette procédure, et par les outils
statistiques d'
analyse actuels (Cohen et al., 1990 ; Bagozzi, 1994), pour construire une échelle
de mesure fiable et valide du degré d’intangibilité d’une offre globale de services. Au terme
de deux études exploratoires, il ressort que le modèle bidimensionnel de l’intangibilité semble
être le plus adapté pour représenter ce concept. Ceci appuie donc la première hypothèse que
nous avons formulée, sans pour autant la valider, au vu des limites inhérentes à une démarche
exploratoire (utilisation d’un échantillon de convenance). En outre, la procédure a permis de
développer une échelle de mesure de l’intangibilité à sept items, quatre étant censés mesurer
la dimension mentale de l’intangibilité, et trois sa dimension physique.
139
140
CHAPITRE 6 : NOUVELLE ETUDE EXPLORATOIRE EN VUE DE PRETESTER
LA RELATION ENTRE L’INTANGIBILITE ET LE RISQUE PERÇU GLOBAL, DE
MEME
QUE
LES VARIABLES
D’INFLUENCE
DE
CONNAISSANCE
ET
D’UTILISATION
Ce sixième chapitre vise à présenter une troisième étude exploratoire menée pour prétester la
relation possible entre les deux dimensions identifiées de l’intangibilité et le risque perçu
global. L’objectif général de cette nouvelle étude est de préciser davantage les hypothèses de
recherche qui seront testées lors de la phase conclusive. De même, nous souhaitons prétester
l’impact de deux variables d’influence présentées dans le cadre conceptuel, à savoir le degré
de connaissance et le degré d’utilisation.
Une première section est consacrée à une analyse critique de la seule étude empirique visant à
étudier le lien entre les dimensions de l’intangibilité et le risque perçu global (Laroche et al.,
2003). Nous présentons ensuite le design de l’étude exploratoire mise en place, ainsi que le
choix des instruments de mesure. Les résultats de cette nouvelle étude sont ensuite
développés, qui permettent la formulation des hypothèses de recherche à tester.
1. ANALYSE CRITIQUE DE L’ETUDE DE LAROCHE ET AL. (2003)
Pour rappel, Laroche et al. (2003) ont mené une étude empirique visant à analyser l’influence
des dimensions de l’intangibilité sur le risque perçu global. L’échelle de mesure
tridimensionnelle de l’intangibilité a été utilisée, ainsi que l’échelle de Stone et Gronhaug
(1993), pour mesurer le risque perçu global.
Les résultats concluent à l’impact significatif des trois dimensions de l’intangibilité sur le
risque perçu global. Néanmoins, en cas de connaissance forte ou d’implication faible à l’égard
du produit ou du service, les dimensions « intangibilité physique » et « généralité » n’exercent
plus d’impact significatif sur le risque perçu.
Cette étude est intéressante dans son approche et dans ses objectifs. Elle ne peut néanmoins
être considérée comme satisfaisante. En effet, elle s’appuie sur le modèle tridimensionnel de
141
l’intangibilité. Nous pensions, dans un premier temps, trouver dans cette nouvelle étude
publiée en 2003 une réplication de la validation de l’échelle tridimensionnelle développée en
2001. Il faut pourtant constater que les résultats relatifs au test de l’échelle sont en tout point
identiques entre l’étude de 2001 et celle de 2003. Cette étude n’est donc pas une réplication
de l’étude de 2001 (si nous nous plaçons au niveau de la validation de l’échelle de mesure de
l’intangibilité), mais elle se base sur les même données. Dès lors, toutes les critiques émises à
l’encontre de l’échelle tridimensionnelle de l’intangibilité restent valables pour la présente
étude (problème de validité de contenu, de validité convergente, faiblesses dues notamment à
l’échantillon de convenance, …).
En outre, l’étude de Laroche et al. (2003) propose d’étudier l’impact des variables de
connaissance et d’implication sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu. Si nous
considérons la variable de connaissance dans le cadre de la présente recherche, nous
choisissons délibérément de ne pas y intégrer la variable d’implication. La raison en est la
suivante : selon les auteurs, le risque perçu est un des éléments constitutifs de l’implication ou
ne l’est pas. Pour Kapferer et Laurent (1983, 1985 et 1993) ou Jain et Srinivasan (1990), le
risque perçu constitue une des dimensions de l’implication durable. Strazzieri (1994) ou
Ouzaka (2001), par contre, estiment que le concept de risque perçu doit être séparé du concept
d’implication. Néanmoins, comme le rappelle Ouzaka (2001), ces deux concepts partagent,
dans presque tous leurs instruments de mesure, une composante commune, qui est
l’importance perçue des conséquences d’un mauvais choix. Il y a donc des interférences
importantes entre ces deux concepts, et ce problème n’est pas abordé dans l’article de Laroche
et al. (2003). Dans le cadre de notre recherche, nous n’avons pas souhaité entrer dans ce débat
conceptuel, qui pourrait constituer une recherche doctorale à lui seul.
2. LE DESIGN DE L’ETUDE EXPLORATOIRE
Cette nouvelle étude exploratoire est administrée sur un échantillon de convenance de 510
nouveaux étudiants, aux caractéristiques semblables à celles des études précédentes
(différentes facultés, différents niveaux d’études). Elle porte sur cinq nouveaux services, en
vue d’élargir la base de test de l’échelle de mesure de l’intangibilité. Ces services sont : une
consultation chez un psychothérapeute, l’entretien de la voiture, un séjour dans un hôtel, un
service de nettoyage à sec et la gestion de comptes bancaires par Internet. En outre, nous
avons inclus dans l’analyse une marque de service : la chaîne hôtelière IBIS. Ces services ont
142
été choisis pour leur diversité attendue sur les deux continuums d’intangibilité. De même,
nous avons veillé à ce que les services retenus permettent de discriminer différents niveaux de
connaissance et d’utilisation.
Trois versions différentes du questionnaire ont été développées16, chacune reprenant deux
entités. Sur les 510 questionnaires distribués, 468 questionnaires dûment complétés furent
retournés et encodés. 36 observations furent encore éliminées sur la base d’une analyse des
données aberrantes17, ce qui conduit à une base de données finale de 890 observations.
2.1.Le choix des instruments de mesure
La mesure de l’intangibilité
Nous avons bien évidemment retenu l’échelle à sept indicateurs que nous avons développée et
présentée précédemment pour mesurer le degré d’intangibilité des entités à analyser. Les sept
items sont les suivants :
M1 :
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est item 1 = avec beaucoup de
facilité à 7 = avec beaucoup de difficulté
M2 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de très simple à 7 = de très
compliqué
M3 :
Je comprends ce qu'
est item 1 = très facilement à 7 = très difficilement
M4 :
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un item 1 = en étant très précis à 7 = en
étant très flou
P5 :
Je perçois item comme étant 1 = exclusivement matériel à 7 = exclusivement
immatériel
P6 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de totalement palpable à 7 = de
totalement impalpable
P7 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = qui est très facile à voir et à
toucher à 7 = qui est très difficile à voir et à toucher
16
Le questionnaire est disponible en annexe 5.
L’analyse des données aberrantes s’est faite sur base de l’analyse de la distance de Mahalanobis, à l’aide du
logiciel AMOS 4.
17
143
La mesure du risque perçu global
Pour rappel, nous souhaitons pouvoir mesurer le niveau de risque global qu’un client perçoit
lorsqu’il est confronté à une décision de choix d’achat ou d’utilisation d’une offre de services.
Dans le cadre d’une recherche quantitative hypothético-déductive, deux approches de mesure
basées sur des méthodes déclaratives directes coexistent, chacune présentant des avantages et
des inconvénients. Il s’agit de l’approche compositionnelle, avec, comme instrument de
mesure généralement présenté comme étant le plus avancé, celui développé par Peter et
Tarpey (1975), et de l’approche globale, avec l’échelle de mesure de Stone et Gronhaug
(1993). Pour rappel, l’approche compositionnelle vise à mesurer séparément les deux
composantes du risque perçu (incertitude et importance de la perte) pour les différentes
facettes du risque (risque financier, fonctionnel, psychologique, physique, temporel et social).
Les composantes et les facettes sont ensuite combinées pour recomposer un score de risque
global. L’approche globale, par contre, vise à mesurer directement le niveau de risque global
ressenti lors de l’achat ou de l’utilisation des facettes, sans passer par les composantes ou les
facettes du risque perçu.
Dans le cadre de cette recherche, nous avons choisi d’utiliser l’instrument de mesure
développé par Stone et Gronhaug (1993), qui s’appuie sur l’approche globale. Nous allons à
présent motiver les raisons de ce choix.
Pour rappel, le modèle de mesure proposé par Peter et Tarpey (1975) introduit simultanément
l’évaluation du degré d’incertitude et du degré d’importance de la perte pour les six facettes
du risque. Leur modèle de mesure du risque perçu est le suivant :
OPR =
où
6
( PLij * ILij )
i =1
OPR = Score global de risque perçu
PLij = probabilité de la perte i lors de l'
achat du produit/de la marque j
ILij = importance de la perte i lors de l'
achat du produit/de la marque j
i représente les 6 facettes du risque (physique, financier, psychologique, social,
fonctionnel et temporel).
144
Cette échelle est fidèle à la conceptualisation bi-composantes et multi-facettes du risque
perçu. En ce sens, elle présente un niveau de validité de contenu satisfaisant. En outre, c’est la
seule échelle qui évalue simultanément la composante d’incertitude et la composante
d’importance de la perte. Or, l’absence d’une composante (généralement l’importance de la
perte) peut entraîner l’élimination de tout risque (Mallet, 2002). En effet, un élément
constitutif de l’offre peut engendrer une grande incertitude, mais être jugé totalement
insiginifiant par le client, de sorte qu’il n’influence pas son processus de choix.
Toutefois, l’échelle de Peter et Tarpey (1975) nous semble contestable sous plusieurs aspects,
et l’échelle de Stone et Gronhaug (1993), basée sur l’approche globale de mesure du risque
perçu, semble remédier à certains de ces inconvénients majeurs.
•
L’échelle de Peter et Tarpey (1975) s’inscrit dans l’approche compositionnelle de la
mesure du risque perçu. Cette approche présuppose que les individus perçoivent le
risque de façon décomposée, puis recomposent inconsciemment les différentes
facettes pour arriver à une perception de risque global. Or, les travaux de Volle (1995)
ou de Mallet (2002) laissent plutôt penser que les individus réagissent davantage en
fonction d’un sentiment global de risque perçu, et non en fonction de facettes
particulières. Ceci plaide pour une mesure globale du risque perçu.
•
Le choix des échelles utilisées dans le modèle de mesure de Peter et Tarpey (1975) est
inadapté. L’échelle utilisée pour mesurer la probabilité d’occurrence d’une perte n’est
pas une échelle de rapport allant de 0 à 1. Cela est inacceptable pour mesurer une
probabilité qui va par la suite être multipliée par un score d’importance, puisqu’il
suffirait de modifier la valeur des bornes de l’échelle de probabilité (par exemple,
passer de 1
5 à –2
2) en laissant les bornes de l’échelle de mesure de
l’importance inchangées pour affecter le classement possible de différentes entités
selon leur score de risque global calculé.
•
L’utilisation stricte de l’échelle de Peter et Tarpey (1975) ne permet pas d’expliquer
certaines conclusions d’entretiens exploratoires que nous avons menés auprès de six
personnes, pour comprendre comment ils perçoivent le risque. Plusieurs de ces
personnes interrogées nous ont dit, par exemple, ressentir un très grand risque à
prendre l’avion, par peur de l’accident. Leur sentiment global de risque est important,
145
et les freins à voyager en avion sont réels, certains refusant même d’utiliser ce moyen
de transport. Selon eux, l’importance de la conséquence est maximale, puisqu’elle
porte sur le décès en cas d’accident. Par contre, ces personnes reconnaissent que la
probabilité d’occurrence d’un accident est très faible. Dès lors, dans la logique
multiplicative de recomposition de Peter et Tarpey (1975), le poids de la facette
physique du risque sur le score global de risque perçu serait moyennement important,
puisque l’importance des conséquences d’un accident possible, jugée élevée, serait
multipliée par une probabilité très faible que cet accident se produise. Or, c’est
précisément la crainte de l’accident (et de ses conséquences fatales) qui semble
générer une perception importante de risque chez certaines des personnes interrogées.
Cette observation soulève dès lors plusieurs commentaires :
o Elle plaide tout d’abord en faveur d’une perception globale du risque perçu.
Cet exemple suggère en effet que les individus sont confrontés à un sentiment
général de risque, qu’ils peuvent expliquer à travers les facettes, mais qu’ils ne
construisent pas forcément à partir d’elles, ou pas en tout cas dans une logique
compositionnelle
mêlant
uniquement
la
probabilité
d’occurrence
et
l’importance de la perte si elle survient. Or, l’échelle de Stone et Gronhaug
(1993) permet d’appréhender directement ce sentiment général de risque perçu,
sans passer par les facettes du risque, évitant ainsi toute recomposition,
délicate et le plus souvent contestable.
o Il manque un élément essentiel au modèle de mesure de Peter et Tarpey
(1975) : un poids mesurant l’importance de chaque facette du risque dans la
perception de risque global. L’importance est ici mesurée uniquement à
l’intérieur de chaque facette, mais la mesure d’importance n’est pas relative
entre les facettes. Or, la part d'
explication de chacune des facettes sur le risque
perçu global va considérablement varier de catégorie à catégorie, ou encore
selon le mode d’achat ou des caractéristiques propres à l’individu (Derbaix,
1983 ; Cases, 2001 ; Mallet, 2002). Ainsi, nous pouvons intuitivement penser
qu'
un vol en avion va impliquer davantage de risque physique et temporel que
de risque social, par exemple. De même, un accessoire de mode (un pantalon
marqué, par exemple) va davantage impliquer un risque social ou
psychologique qu'
un risque fonctionnel. Or, si nous envisageons l'
hypothèse
que le risque perçu global de voler en avion repose pour 80% sur une
perception de risque physique et temporel, et pour 20% sur les quatre autres
146
facettes de risque, la méthode de recomposition du score global de risque de
Peter et Tarpey (1975) ne prend pas en considération cette forte différence
d'
importance entre les facettes du risque, puisqu’il n’y a pas de poids attaché à
chaque facette, traduisant l’importance de la facette dans la perception globale
du risque. De façon plus générale, aucune mesure appartenant à l’approche
compositionnelle ne calcule ce poids, et sa mesure poserait des problèmes
pratiques.
o Finalement, il faut reconnaître que, dans sa définition originelle, Bauer ne
prédétermine pas le nombre de conséquences négatives. Ainsi, certaines
critiques ont été émises sur la pertinence de prédéfinir un nombre limité de
conséquences négatives à prendre en considération. Comme Mallet le signale
(2002, p.69), "on est en droit de penser qu'
à des produits et individus différents
s'
attachent des conséquences différentes". Dans leur étude, Stone et Gronhaug
permettent de conclure que les six facettes du risque perçu expliquent 88% du
risque perçu global, ce qui est très satisfaisant. Mais qu’en est-il des 12%
restants ? Sont-ils dus à une facette de risque non-identifiée, ou ce résultat
démontre-t-il que le sentiment global de risque ne repose pas sur une logique
de recomposition ?
•
Une autre limite majeure de l'
échelle de Peter et Tarpey est que, de par sa nature, il est
impossible d'
évaluer la fiabilité et la validité de l'
instrument de mesure retenu. Cela est
dû à la combinaison des composantes du risque en un score global de risque, rendant
dès lors le calcul des indices de fiabilité et de validité impossible. Or, l’échelle de
Stone et Gronhaug (1993) permet le calcul de tels indices. L’étude menée par
Dholakia en 1997 et par Laroche et al. en 2003 valide les conditions de fiabilité et de
validité convergente de l’échelle.
Pour toutes ces raisons, nous pensons que l’échelle mise en place par Stone et Gronhaug
(1993) offre une plus grande garantie d’appréhender le sentiment de risque perçu tel qu’il est
véritablement ressenti par les individus. En outre, comme le rappellent Volle (1995) et Mallet
(2002), la prise en compte du risque perçu global a plus de sens quant à la compréhension du
comportement du consommateur, ce dernier réagissant en fonction d’un sentiment global
d’incertitude, et non uniquement en fonction d’une facette particulière du risque.
147
L’échelle finalement utilisée dans le cadre de cette étude exploratoire est donc la suivante :
•
Globalement, je ressens un risque à acheter cette entité dans le sens où je m’expose
dès lors à des inconvénients plus ou moins probables
•
Globalement, l’idée d’acheter cette entité me rend inquiet(e) à la pensée des
dommages éventuels qui pourraient en résulter
•
En fin de compte, je pense vraiment que l’achat de cette entité m'
apporte des tracas
dont je pourrais bien me passer.
La formulation est chaque fois adaptée aux spécificités du service analysé (l’idée de séjourner
dans un hôtel …, l’idée de déposer mon linge dans un service de nettoyage à sec …).
Ces trois items sont mesurés à l’aide d’une échelle sémantique différentielle à sept points
allant de « Pas du tout d’accord » à « Tout à fait d’accord ».
La mesure de la connaissance
Nous avons adopté dans le cadre de cette recherche la conceptualisation de la connaissance
proposée par Korchia (2004) : il s’agit de toutes les informations relatives à un service ou à
une marque, et stockées dans la mémoire à long terme des individus.
Pour rappel, le niveau de connaissance peut être appréhendé de deux manières différentes :
soit via la connaissance objective (évaluation objective de ce que l’individu sait vraiment du
service ou de la marque analysés), soit via la connaissance auto-évaluée (perception de ce que
l’individu croit savoir du service ou de la marque).
Plusieurs recherches suggèrent que la connaissance subjective et la connaissance auto-évaluée
ne sont pas parfaitement corrélées (p.ex. Korchia, 2004 ; Alba et Hutchinson, 2000, Park et
al., 1994), ce qui est assez intuitif. Les raisons sont multiples. Il y a d’abord une tendance
naturelle à surestimer ses connaissances (Alba et Hutchinson, 2000). Toutefois, l’étude de
Park et al. (1994) démontre l’absence de lien significatif entre la connaissance auto-évaluée et
le sentiment général de confiance en soi. Ensuite, l’individu peut avoir en mémoire des
informations qui lui donnent l’illusion qu’il connaît le produit, le service ou la marque, alors
que ces informations sont erronées. Un individu peut, par exemple, penser que la marque
148
Chiquita est une marque d’Amérique Latine, alors que ce n’est pas le cas. Cela crée donc une
distorsion entre la connaissance objective et la connaissance auto-évaluée.
Dans la perspective de recherche qui nous occupe, nous allons davantage nous intéresser à la
connaissance auto-évaluée qu’à la connaissance objective, pour deux raisons essentielles :
•
Comme nous venons d’en discuter, une distorsion entre la connaissance objective et la
connaissance évaluée peut venir d’une information stockée en mémoire, mais qui est
erronée. Néanmoins, cette information erronée agit sur la perception que le client a du
service, et dès lors, elle peut agir sur le processus de tangibilisation ou sur son
sentiment de risque perçu.
•
Ensuite, la littérature suggère que l’individu a généralement tendance à surestimer son
niveau de connaissance lorsqu’il doit lui-même l’évaluer. Si c’est effectivement le cas,
et si, malgré tout, nous démontrons un impact significatif de la connaissance autoévaluée sur l’intangibilité ou sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu, la
conclusion de l’impact de la connaissance sur l’intangibilité perçue n’en sera que plus
robuste. En effet, dans le processus d’évaluation de l’intangibilité, le participant à
l’enquête se basera sur sa connaissance réelle – mais non nécessairement basée sur des
informations correctes – du produit, du service ou de la marque. Si le participant autoévalue sa connaissance de manière trop optimiste, la conclusion est qu’il en sait en fait
moins que ce qu’il prétend. Dès lors, si l’impact sur le degré d’intangibilité est malgré
tout validé, c’est que cette connaissance réelle, peut-être inférieure à sa connaissance
subjective, joue bien un rôle dans le processus d’évaluation de l’intangibilité.
Afin de mesurer le niveau de connaissance auto-évaluée de l’individu, nous nous basons sur
les travaux existants de Park, Mothersbaugh et Feick (1992) et de Kapferer et Laurent (1983)
pour proposer les trois items suivants :
•
Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais que je connais très bien l’entité
•
En matière de cette entité, je pourrais donner de bons conseils si on me le demandait
•
Comparé à un expert, je dirais que je connais bien l’entité
149
Ces items sont mesurés sur une échelle à cinq points allant de « Pas du tout d’accord » à
« tout à fait d’accord ».
Dans le cadre de l’analyse des résultats, nous souhaitons pouvoir discriminer deux niveaux de
connaissance, que nous qualifions de niveau faible, et de niveau élevé. Afin de créer ces deux
groupes de personnes selon leur niveau de connaissance, nous calculons un score moyen de
connaissance à l’aide d’une moyenne pondérée des charges factorielles, obtenues à l’aide
d’une analyse factorielle exploratoire (en ayant préalablement contrôlé la fiabilité et la
validité convergente de l’instrument de mesure). Tout individu dont le score moyen de
connaissance est strictement inférieur à trois appartient à la classe de niveau de connaissance
faible. De même, toute personne dont le score de connaissance est supérieur ou égal à trois est
assignée au groupe de niveau de connaissance élevé. Certains auteurs préconisent toutefois de
ne pas conserver le score médian (ici, trois) pour le groupe de niveau de connaissance élevé.
Nous choisissons néanmoins délibérément de conserver les personnes ayant un score de
connaissance égal à trois pour deux raisons : tout d’abord, cela améliore la taille d’échantillon
de ce sous-groupe ; ensuite, si l’impact de la connaissance sur nos variables et relations
d’intérêt est validé avec cette borne supérieure ou égale à trois, elle le serait à fortiori dans
une condition plus sévère où le score moyen de connaissance doit être strictement supérieur à
trois.
La mesure de l’utilisation
Nous avons décidé de mesurer le degré d’utilisation d’un service ou d’une marque à l’aide des
trois items suivants :
•
Avez-vous déjà utilisé l’entité ? (La phrase est chaque fois adaptée aux spécificités de
l’entité à analyser : avez-vous déjà séjourné dans un hôtel ? Avez-vous déjà fait
nettoyer votre linge dans un nettoyage à sec ? …)
•
Ces 12 derniers mois, j’ai régulièrement utilisé l’entité
•
Ces 10 dernières années, j’ai régulièrement utilisé l’entité
Le premier item est mesuré sur une échelle sémantique différentielle à cinq points allant de
« jamais » à « très souvent ». Les deux autres items sont mesurés sur une échelle sémantique
différentielle à cinq points allant de « pas du tout d’accord » à « tout à fait d’accord ». Ces
150
deux derniers items nous permettent de distinguer une utilisation récente d’une utilisation
ancienne, pour laquelle le souvenir pourrait être moins précis.
La discrimination des deux niveaux d’utilisation (faible et élevé) est réalisée de manière
identique à la discrimination des niveaux de connaissance (faible < 3 ; élevé ≥ 3).
3. PRESENTATION DES RESULTATS DE L’ETUDE EXPLORATOIRE
3.1. Validation du modèle de mesure du degré d’intangibilité d’une offre de services
Cette troisième étude exploratoire est une nouvelle occasion de mettre à l’épreuve l’échelle de
mesure du degré d’intangibilité d’une offre de services que nous avons développée
précédemment. De manière similaire à la phase de construction de l’échelle, nous avons
commencé par mener des analyses factorielles exploratoires, pour ensuite réaliser une analyse
factorielle confirmatoire sous Lisrel 8.50.
3.1.1. Les analyses factorielles exploratoires
Classiquement, nous avons mené à l’aide de SPSS 10.0 une analyse factorielle avec rotation
varimax sur l’ensemble des données collectées, ainsi que sur chaque service étudié
séparément. Ces analyses confirment à nouveau dans chaque cas l'
existence de deux facteurs
(valeurs propres initiales supérieures à 1). Le tableau ci-dessous présente les résultats de
l’analyse sur l’échantillon global. Le premier facteur relatif à la dimension mentale contribue
à raison de 54,0% de la variance expliquée, le second facteur relatif à la dimension physique
contribue pour 26,5%, soit un total de 80,54% de la variance totale pour les deux facteurs.
151
Tableau 6.1 : Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
FACTEUR
1
2
M1
0,869
M2
0,849
M3
0,895
M4
0,876
P5
0,887
P6
0,919
P7
0,892
Valeur propre
3,782
1,855
Variance expliquée
54,0%
26,5%
Alpha de Cronbach
0,90
0,90
Rhô de Joreskog
0,92
0,92
3.1.2. L’analyse factorielle confirmatoire
En utilisant une approche similaire à celle mise en place lors de la phase de développement de
l’échelle, nous avons réalisé une analyse factorielle confirmatoire à l’aide du logiciel Lisrel
8.50. Les résultats présentés ci-dessous révèlent une qualité d'
ajustement tout à fait
acceptable.
Tableau 6.2 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
Indicateurs
latentes
Contributions
Niveau de
factorielles
signification du
R²
t de Student
Dimension
M1
0,79
0,029
0,62
Mentale
M2
0,87
0,027
0,68
M3
0,96
0,026
0,93
M4
0,80
0,028
0,64
Dimension
P5
0,83
0,028
0,69
physique
P6
0,95
0,026
0,89
P7
0,89
0,027
0,79
152
Tableau 6.3 : Indices d'
ajustement du modèle - 7 indicateurs
Indices
Valeurs
Indices
Absolus
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
3,59
AGFI
0,97 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,08
Critical N
533,93 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,56
RMR
0,023
PGFI
0,42
RMSEA
0,054 < 0,08
3.1.3. Fiabilité et validité de l’instrument de mesure
L’examen des Alpha de Cronbach et des
de Joreskog présentés dans le tableau 6.1 renseigne
une fiabilité de l’instrument de mesure très satisfaisante. En outre, l’examen du tableau 6.4
nous permet d’établir les trois conditions de validité convergente. Finalement, la validité
discriminante est-elle aussi vérifiée, puisque le carré de la corrélation entre les deux variables
latentes étant de 0,13, cette valeur est bien inférieure aux deux variances moyennes extraites
correspondantes figurant dans le tableau ci-dessous ( (vc))
Tableau 6.4 : Evaluation de la validité convergente
Dimension
Nbre de non
Nbre de R² associé
(vc)
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
Mentale
0
0
0,74
Physique
0
0
0,79
L’ensemble de ces résultats plaident dès lors une nouvelle fois en faveur de la robustesse du
modèle de mesure bidimensionnel de l’intangibilité, et appuient l’hypothèse H1 formulée
précédemment.
153
3.2. Analyse de la relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
Pour rappel, la littérature suggère très largement que l’intangibilité exerce un impact
significatif et positif important sur le risque perçu par les acheteurs.
Dans le cadre de cette étude exploratoire, nous souhaitons prétester cette proposition, en vue
d’appuyer plus fermement notre hypothèse de recherche. Nous souhaitons dès lors tester le
modèle structurel suivant :
Figure 6.1 : Modèle structurel à tester
M1
M2
RISK1
M4
MENTALE
INTANG
M5
RISK
PHYSIQUE
RISK2
RISK3
P3
P6
P7
Dans cette analyse, nous proposons d’introduire une variable latente de second ordre pour
représenter le concept d’intangibilité. L’intangibilité est ainsi constituée de ses deux
dimensions, à savoir l’intangibilité physique et l’intangibilité mentale.
Avant de tester ce modèle structurel, nous devons nous assurer que le modèle de mesure du
risque perçu à trois indicateurs est fiable et valide.
154
Tableau 6.5 : Indices de fiabilité de la variable RISK
Alpha de Cronbach
Rhô de Joreskog
0,91
0,93
Tableau 6.6 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
Indicateurs
latentes
Contributions
Niveau de
factorielles
signification du
R²
t de Student
RISK
risk1
0,89
0,027
0,79
risk2
0,97
0,025
0,93
risk3
0,87
0,027
0,75
Tableau 6.7 : Evaluation de la validité convergente
Dimension
RISK
Nbre de non
Nbre de R² associé
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
0
0
(vc)
0,83
Comme nous le soulignions préalablement, un des intérêts de l’échelle de mesure de Stone et
Gronhaug (1993) réside dans le fait qu’il est possible de calculer des indices de fiabilité et de
validité convergente. Il n’aurait en effet pas été possible de calculer de tels indices avec
l’approche compositionnelle utilisée entre autres par Peter et Tarpey (1975). Les résultats
présentés ci-dessous montrent que tant les conditions de fiabilité que celles de validité
convergente sont rencontrées pour le modèle de mesure du risque perçu global. L’échelle de
mesure du risque perçu global semble donc présenter de bonnes qualités psychométriques, ce
qui appuie empiriquement notre choix de cette échelle.
155
Les modèles de mesure ayant été validés, le modèle structurel peut maintenant être testé.
Observons pour ce faire les indices d’ajustement du modèle :
Tableau 6.8 : Indices d'
ajustement du modèle structurel
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,98 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
3,46
AGFI
0,96 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,17
Critical N
428,66 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,68
RMR
0,030
PGFI
0,55
RMSEA
0,053 < 0,08
L’examen des indices d’ajustement du modèle nous permet de conclure à sa bonne qualité. Le
modèle peut dès lors être interprété.
Observons les liens structurels entre les variables d’intérêt :
Tableau 6.9 : liens structurels entre les variables
MENTAL
PHYSIQUE
INTANG
INTANG
INTANG
RISK
Lien structurel
T de Student
0,61
11,07
0,59
11,00
0,49
10,22
Ces résultats exploratoires suggèrent deux conclusions :
•
Le modèle de mesure de second ordre de l’intangibilité fait apparaître une structure de
l’intangibilité s’organisant bien autour des deux dimensions que sont l’intangibilité
physique et l’intangibilité mentale. Ceci vient donc une nouvelle fois appuyer la
pertinence de la conceptualisation bidimensionnelle de l’intangibilité.
•
Ces résultats permettent également de valider empiriquement – à titre exploratoire – que
l’intangibilité des services exerce bien un impact significatif important sur le risque perçu
global. Ceci peut être mis en regard avec la validité nomologique de nos instruments de
156
mesure de l’intangibilité et du risque perçu. La validité nomologique vise à évaluer si les
relations entre les mesures de concepts différents sont ou non en conformité avec les
prédictions issues de la théorie (Thiétart et al., 1999). Il n’est pas possible de conclure une
fois pour toutes à la validité nomologique d’un instrument de mesure, car cela
nécessiterait de tester les relations entre tous les concepts pour lesquels un énoncé
théorique existe. Néanmoins, nos résultats sont en conformité avec l’énoncé théorique
largement répandu selon lequel l’intangibilité d’une offre globale de services influence de
manière significative le niveau de risque perçu, ce qui contribue à accroître le niveau de
confiance que nous pouvons placer dans nos instruments de mesure.
Sur base du cadre conceptuel et de ces résultats exploratoires, nous proposons dès lors
l’hypothèse suivante :
H2 :
L’intangibilité d’une offre globale de services exerce un impact significatif positif (càd
dans le même sens) sur le risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre.
3.3. Analyse de la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu
global
Le modèle précédent nous a permis de valider à titre exploratoire que l’intangibilité exerce
bien une influence significative positive sur le risque perçu. Il est également intéressant
d’évaluer l’impact respectif des deux dimensions de l’intangibilité sur le risque perçu, sans
passer par une variable latente de second ordre. Ceci nous permettrait en effet de mieux
comprendre la nature du lien entre l’intangibilité et le risque perçu. De plus, connaître
l’impact distinct des deux dimensions de l’intangibilité sur le degré de risque perçu
permettrait d’affiner les recommandations en matière de stratégie de tangibilisation des
services, qui par extension pourraient réduire le niveau de risque perçu.
157
Pour conduire cette analyse, nous proposons d’adapter le modèle structurel à tester comme
suit :
Figure 6.2 : Modèle structurel à tester
M1
M2
RISK1
MENTALE
M4
RISK
M5
PHYSIQUE
RISK2
RISK3
P3
P6
P7
Classiquement, la qualité du modèle structurel est testée. La lecture du tableau 6.10 révèle une
qualité d’ajustement du modèle structurel très satisfaisante. Il est intéressant de noter que la
suppression de la variable latente de second ordre n’altère pas les indices d’ajustement du
modèle.
Tableau 6.10 : Indices d'
ajustement du modèle structurel
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,98 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
3,46
AGFI
0,96 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,17
Critical N
428,66 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,68
RMR
0,030
PGFI
0,55
RMSEA
0,053 < 0,08
158
Le modèle étant validé, il peut être interprété. Observons, pour ce faire, le tableau suivant, qui
présente les liens structurels entre les deux dimensions de l’intangibilité, et le risque perçu
global.
Tableau 6.11 : Relation entre intangibilité physique et mentale et risque perçu global
MENTAL
PHYSIQUE
Lien structurel
T de Student
0,23
6,16
0,20
5,60
RISK
RISK
Ces résultats nous permettent de conclure que, sur l’échantillon total, tant l’intangibilité
mentale que l’intangibilité physique exercent un impact significatif sur le risque perçu global.
En outre, il semblerait que l’intangibilité mentale influence plus fortement le risque perçu
global que l’intangibilité physique, même si les différences sont relativement faibles.
Ces conclusions peuvent être mises en regard avec celles de l’étude menée par Laroche et al.
(2003). Pour rappel, leur étude concluait qu’au niveau global, leurs trois dimensions de
l’intangibilité exerçaient un impact significatif sur le risque perçu, mais que les deux
dimensions reliées à la composante mentale semblaient influencer plus fortement le risque
perçu que la dimension physique. Sans pouvoir réellement comparer nos résultats aux leurs,
puisque les modèles de mesure de l’intangibilité sont différents, nous trouvons néanmoins une
cohérence entre les deux études.
Ces résultats nous permettent de préciser davantage la deuxième hypothèse de recherche, en
proposant les deux sous-hypothèses suivantes :
H2a :
La dimension mentale de l’intangibilité exerce un impact significatif positif sur le
risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre
H2b :
La dimension physique de l’intangibilité exerce un impact significatif positif sur le
risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre
Il est maintenant intéressant de se demander si les variables de connaissance et d’utilisation
sont susceptibles d’influencer ces résultats.
159
3.4. Impact de la connaissance sur la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité
et le risque perçu global
Nous souhaitons pouvoir identifier l’influence possible de la connaissance sur la relation entre
les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu par les individus. Pour ce faire, et
comme expliqué précédemment, nous distinguons deux niveaux de connaissance (faible
versus élevé). Pour ces deux niveaux, nous avons validé les modèles de mesure de
l’intangibilité et du risque perçu global. Dans chaque cas, les modèles de mesure sont stables,
et les conditions de fiabilité et de validité convergente et discriminante (entre les dimensions
physique et mentale de l’intangibilité) sont vérifiées.
Nous avons ensuite contrôlé l’ajustement des modèles structurels aux données, et ce pour les
deux niveaux. Pour les deux groupes (connaissance faible et connaissance élevée), les
modèles présentent des indices d’ajustement très satisfaisants. Ceci étant, il est donc possible
d’analyser si le niveau de connaissance affecte l’intensité de la relation entre les deux
dimensions de l’intangibilité et le risque perçu global. Pour ce faire, observons les liens
structurels entre intangibilité physique et mentale, et le risque perçu global, selon le niveau de
connaissance (voir tableau 6.12 ci-dessous).
Tableau 6.12 : Liens structurels selon les niveaux de connaissance
NIVEAU DE CONNAISSANCE FAIBLE
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,16
3,82
0,27
6,35
NIVEAU DE CONNAISSANCE ELEVEE
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,38
5,25
-0,01
-0,13 (non significatif)
Les conclusions pouvant être tirées de ces résultats sont intéressantes :
•
En cas de connaissance faible, les deux dimensions de l’intangibilité exercent un
impact significatif sur le risque perçu global. Sous cette condition, l’intangibilité
physique semble influencer davantage le risque perçu que l’intangibilité mentale.
160
•
En cas de connaissance élevée, par contre, les conclusions sont profondément
modifiées, puisque seule la dimension mentale de l’intangibilité exerce alors un
impact significatif sur le risque perçu global.
•
Nous pouvons dès lors proposer que le degré de connaissance affecte l’intensité de la
relation entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu global.
Si la comparaison de ces résultats avec ceux de l’étude de Laroche et al. (2003) est difficile,
puisque le modèle de mesure de l’intangibilité n’est pas le même, il est intéressant de
constater une cohérence entre les deux études. En cas de connaissance faible du service,
l’étude de Laroche et al. (2003) conclut à un impact significatif des trois dimensions de
l’intangibilité sur le risque perçu global. En cas de connaissance élevée, par contre, seule la
dimension « intangibilité mentale » (qui diffère cependant dans son contenu de notre
dimension « intangibilité mentale ») exerce encore un impact significatif sur le risque perçu
global. Les deux autres dimensions (intangibilité physique et généralité) ne présentent plus
d’impact significatif sur le risque perçu.
Ces conclusions exploratoires nous permettent de formuler les deux hypothèses suivantes :
Le degré de connaissance des individus à l’égard d’un service ou d’une marque influence la
relation entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu global. Plus
spécifiquement :
H3 : Lorsque les individus possèdent un niveau faible de connaissance de l’entité analysée,
les deux dimensions de l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque perçu.
H4 : Lorsque les individus possèdent un niveau élevé de connaissance de l’entité analysée,
seule la dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence significative sur le
risque perçu global. La dimension physique n’exerce plus, quant à elle, d’influence
significative sur le risque perçu global.
161
3.5. L’impact de l’utilisation sur la relation entre l’intangibilité (physique et mentale) et
le risque perçu global
Tout comme pour l’analyse de l’influence de la connaissance sur nos variables d’intérêt, nous
avons créé deux catégories d’utilisation : l’utilisation faible (score moyen d’utilisation < 3) et
l’utilisation élevée (score ≥ 3). Dans chaque cas, les modèles de mesure (intangibilité
physique, intangibilité mentale et risque) ont à nouveau été vérifiés et sont stables, et les
conditions de fiabilité et de validité convergente et discriminante (entre les dimensions
physique et mentale de l’intangibilité) sont vérifiées.
Nous avons également contrôlé l’ajustement des modèles structurels aux données, et ce pour
les deux niveaux d’utilisation. Pour les deux groupes, les modèles présentent des indices
d’ajustement très satisfaisants, qui nous permettent dès lors d’analyser les liens structurels
selon les conditions d’utilisation.
Tableau 6.13 : Liens structurels selon les niveaux d’utilisation
NIVEAU FAIBLE D’UTILISATION
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,17
3,99
0,26
5,98
NIVEAU ELEVE D’UTILISATION
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,22
3,07
0,03
0,37 (non significatif)
Tout comme pour la connaissance, le niveau d’utilisation affecte profondément l’intensité de
la relation entre l’intangibilité physique et mentale, et le risque perçu global :
•
En cas d’utilisation faible, les dimensions physique et mentale de l’intangibilité
exercent un impact significatif sur le risque perçu global. Sous cette condition,
l’intangibilité physique semble influencer davantage le risque perçu que l’intangibilité
mentale.
162
•
En cas d’utilisation élevée, par contre, les conclusions sont à nouveau profondément
modifiées, puisque seule la dimension mentale de l’intangibilité exerce alors un
impact significatif sur le risque perçu global.
Ces conclusions exploratoires nous permettent de formuler trois hypothèses supplémentaires :
Le degré d’utilisation par les individus d’un service ou d’une marque influence la relation
entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu global. Plus spécifiquement :
H5 : Lorsque les individus n’utilisent pas ou peu l’entité analysée, les deux dimensions de
l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque perçu
H6 : Lorsque les individus utilisent de façon plus intensive l’entité analysée, seule la
dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence significative sur le risque
perçu global. La dimension physique n’exerce plus, quant à elle, d’influence
significative sur le risque perçu global.
3.6. Impact de la connaissance sur chaque concept considéré isolément (intangibilité
physique et mentale, et risque perçu global)
A côté de l’analyse de l’influence de la connaissance sur la relation entre l’intangibilité
physique et mentale et le risque perçu global, il est intéressant de se demander comment la
connaissance est susceptible d’influencer chacune de ces variables individuellement. La
théorie suggère en effet que la connaissance est susceptible d’influencer tant l’intangibilité
physique et mentale que le risque perçu global.
Afin d’affiner les hypothèses sur l’influence possible de la connaissance sur nos trois
variables d’intérêt, nous avons mené une analyse à l’aide des indices de corrélations, et ce
pour chaque entité analysée individuellement. Il faut préciser ici que l’indice de corrélation
n’est qu’une mesure d’association entre deux variables, mais qu’il ne donne aucune
information sur la causalité entre ces variables. Ce sont les propositions issues de la théorie
qui nous permettent de suggérer que la connaissance et/ou l’utilisation peuvent
potentiellement influencer l’intangibilité mentale et physique ou encore le risque perçu global,
et dès lors de proposer implicitement un lien de cause à effet.
163
Le tableau ci-dessous renseigne les corrélations entre le degré de connaissance des individus à
l’égard du service analysé, et l’intangibilité physique, l’intangibilité mentale et le risque perçu
global.
Tableau 6.14 : Corrélation entre la connaissance et les variables d’intérêt
Corrélations
CN - MENT
CN - PHYS
CN - RISK
Consultation psychothérapeute
-0,496 **
-0,215 **
-0,248**
Entretien de la voiture
-0,617**
-0,193*
0,132 (ns)
Séjour de 3 nuits dans hôtel
-0,234**
-0,029 (ns)
-0,008 (ns)
Séjour de 3 nuits dans IBIS
-0,476**
-0,206**
-0,153*
Service de nettoyage à sec
-0,285**
-0,047 (ns)
-0,124 (ns)
E-banking
-0,695**
-0,234**
-0,343**
** : corrélation significative au seuil de 1%
* : corrélation significative au seuil de 5%
ns : corrélation non significative au seuil de 5%
D’après ces résultats, la connaissance semble exercer une influence significativement négative
pour la dimension mentale de l’intangibilité. Cette conclusion n’est par contre pas stable pour
toutes les entités analysées au niveau de la dimension physique de l’intangibilité et du risque
perçu global.
Ces résultats semblent être assez intuitifs :
•
Il est assez logique de penser que plus un individu connaît une entité, plus il est à
même de comprendre cette entité, son fonctionnement, son principe, et plus il est à
même de pouvoir la définir ou l’expliquer. Autrement dit, plus un individu possède un
niveau de connaissance élevé à l’égard d’un service, moins il le perçoit comme
mentalement intangible.
•
Au niveau de l’intangibilité physique, quatre entités sur six présentent des corrélations
significativement négatives avec le degré de connaissance. Deux corrélations ne sont
par contre pas significativement négatives. Il s’agit du séjour dans un hôtel, et du
service de nettoyage à sec. Or, ces deux services sont caractérisés par un
environnement physique important, qui pourrait tangibiliser le service dans l’esprit des
individus. Pour les individus, le service de séjour dans un hôtel (ou de nettoyage à sec
de son linge) pourrait être totalement associé au bâtiment (ou aux machines à laver et
164
au linge qui en ressort propre). Dès lors, le niveau de connaissance pourrait ne pas
affecter la perception que les gens ont de la réalité qu’ils associent au service (que je
m’y connaisse bien en matière d’hôtel ou non, j’y associe un bâtiment, qui est
physiquement tangible). Il est par contre intéressant de noter que, pour le séjour dans
l’hôtel IBIS, la corrélation est significative. Ce résultat ne nous paraît pas
contradictoire avec l’explication donnée ci-dessus, dans la mesure où un individu qui
ne connaît pas la marque IBIS peut ne pas y associer directement le bâtiment ou
l’environnement propre à IBIS. Pour cette personne, la marque IBIS pourrait n’être
qu’une abstraction, qu’il raccroche certes au secteur hôtelier, et à ses propres
expériences en matière hôtelière, mais qui ne se fige pas de manière claire dans
l’environnement physique caractéristique de la marque. Par contre, une personne qui
connaît bien IBIS va peut-être plus facilement associer cet univers physique propre à
IBIS à la marque, ce qui tangibilise davantage le service au niveau physique.
•
Au niveau du risque perçu global, il est intéressant de noter que trois corrélations sur
six sont significativement négatives, les autres ne l’étant pas. De plus, la corrélation
entre la connaissance et le risque associé à l’entretien de la voiture est positive, sans
être significative. Ces résultats nous paraissent pouvoir s’expliquer. Tout d’abord, il y
a peut-être un effet de seuil en matière de perception de risque perçu global, c’est à
dire un niveau de risque perçu en dessous duquel il est impossible de descendre, ce qui
pourrait expliquer que, pour des services intrinsèquement peu risqués, la connaissance
n’affecte pas de manière significative le risque perçu global. De plus, intuitivement,
nous pourrions penser que plus la connaissance est élevée, plus elle réduit l’incertitude
subjective, et donc le risque. Il est néanmoins possible qu’un gain de connaissance
puisse accroître la perception de la probabilité du risque. Si le niveau de certitude
qu’une conséquence négative va plus que probablement survenir augmente, le risque
peut augmenter, et non diminuer. Imaginons en effet qu’un individu ne connaisse pas
la marque d’hôtel Campanile, pour ne s’être jamais renseigné à son sujet, ou pour ne
l’avoir jamais essayée. Il peut y associer un niveau de risque relativement faible, se
disant qu’il s’agit là d’une enseigne internationale, appartenant à un grand groupe
hôtelier. Par la suite, un ami lui relate une expérience négative à l’égard d’un séjour
dans un Campanile. Notre individu gagne ainsi en connaissance (à travers un échange
d’informations), qui va s’accompagner d’un sentiment de risque accru. Le fait d’avoir
une corrélation positive entre la connaissance et le risque pour un service ne nous
paraît donc pas un résultat aberrant.
165
Ces résultats exploratoires nous permettent de formuler trois nouvelles hypothèses de
recherche à tester :
H7 : Le degré de connaissance influence significativement et négativement le degré
d’intangibilité mentale de manière systématique
H8 : Le degré de connaissance n’influence pas significativement le degré d’intangibilité
physique de manière systématique
H9 : Le degré de connaissance n’influence pas significativement le degré de risque perçu
global de manière systématique
3.7. Impact de l’utilisation sur chaque concept considéré isolément (intangibilité
physique, mentale, et risque perçu global)
De manière similaire, nous allons tester l’impact du degré d’utilisation d’un service ou d’une
marque sur son degré perçu d’intangibilité physique et mentale, de même que sur son degré
de risque global perçu. Observons pour ce faire le tableau des corrélations ci-dessous :
Tableau 6.15 : Corrélation entre l’utilisation et les variables d’intérêt
Corrélations
UTIL - MENT
UTIL - PHYS
UTIL - RISK
consultation psychothérapeute
-0,383**
-0,158*
-0,192*
entretien de la voiture
-0,361**
-0,108 (ns)
0,082 (ns)
Séjour de 3 nuits dans hôtel
-0,276**
0,020 (ns)
-0,146*
Séjour de 3 nuits dans IBIS
-0,416**
-0,092 (ns)
-0,162*
Service de nettoyage à sec
-0,247**
-0,111 (ns)
-0,176*
e-banking
-0,556**
-0,216**
-0,304**
** : corrélation significative au seuil de 1%
* : corrélation significative au seuil de 5%
ns : corrélation non significative au seuil de 5%
166
Les conclusions que nous pouvons tirer à ce stade sont proches de celles que nous avons
formulées à l’égard de la connaissance :
•
Le degré d’utilisation semble exercer une influence significativement négative sur le
degré perçu d’intangibilité mentale, et ce pour toutes les entités analysées. Ce résultat
est assez intuitif, dans la mesure ou une expérience directe avec un service ou une
marque est susceptible d’accroître la compréhension de ce qu’est ce service, de ses
modes de fonctionnement et d’utilisation. En outre, l’utilisation s’accompagne
généralement d’un accroissement de connaissance à l’égard du service ou de la
marque. Ainsi, un site Internet d’e-banking peut s’apparenter à une sorte de boîte noire
complexe et incompréhensible pour ceux qui ne l’ont jamais utilisée. Par contre, un
utilisateur intensif comprend beaucoup mieux comment le site fonctionne, et les
bénéfices qu’il peut retirer de son utilisation.
•
Sur six entités analysées, quatre présentent des corrélations non significatives entre le
degré perçu d’intangibilité physique et le degré d’utilisation du service. Cela est plus
surprenant, dans la mesure où nous pourrions nous attendre à ce qu’une expérience
directe avec un service matérialise davantage ce service dans l’esprit des clients. Il est
cependant intéressant de noter que les deux seuls services présentant des corrélations
significatives sont des services portant sur le mental des individus, alors que les quatre
autres services portent sur des personnes ou sur des biens (voir la classification des
services au chapitre 4). Nous attendons cependant les résultats de la phase conclusive
pour interpréter plus en détail ces résultats.
•
Le degré d’utilisation présente une corrélation significative pour cinq entités sur six.
Nous pensons en effet que l’utilisation n’est pas systématiquement associée à une
réduction de risque perçu, puisqu’une expérience directe peut par exemple mal se
dérouler, et générer un supplément de risque perçu dans l’esprit du client.
167
Ces résultats exploratoires nous permettent de formuler trois hypothèses supplémentaires :
H10 : Le degré d’utilisation influence négativement et significativement le degré
d’intangibilité mentale de manière systématique
H11 : Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le degré d’intangibilité physique
de manière systématique
H12 : Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le degré de risque perçu global
de manière systématique
3.8. Impact de la marque sur le processus de tangibilisation physique et mentale
Pour rappel, la littérature suggère qu’une marque de service forte tangibilise le service tant
mentalement que physiquement, et qu’elle réduit le risque perçu par le client. Par marque
forte, il faut comprendre, dans le cadre de cette recherche, une marque que l’individu connaît,
et à laquelle il associe un réseau d’associations globalement positives, favorables et uniques.
Au vu de ces considérations théoriques, il faut souligner plusieurs faiblesses méthodologiques
de cette troisième étude empirique, qui nous empêchent d’analyser en détail le rôle possible
de la marque comme levier de tangibilisation et comme réducteur de risque. Tout d’abord,
nous n’avons inclus dans cette étude qu’une seule marque, ce qui limite notre possibilité
d’analyse. De plus, si nous avons bien mesuré le degré de connaissance que l’individu
possède à l’égard de la marque, nous ne savons rien de l’image que les personnes interrogées
en ont. Or, certaines personnes qui connaissent la marque IBIS pourraient en avoir une image
négative. Finalement, la marque IBIS est globalement peu connue par les personnes
interrogées (21 personnes interrogées connaissent la marque IBIS). Ceci rend par conséquent
délicate toute analyse, vu la faible taille de ce sous-échantillon.
168
Nous nous appuyons donc exclusivement sur la théorie pour formuler les trois hypothèses
suivantes :
H13 : Une marque de service forte possède un score d’intangibilité physique significativement
plus faible que le score d’intangibilité physique du service lié mais non marqué.
H14 : Une marque de service forte possède un score d’intangibilité mentale significativement
plus faible que le score d’intangibilité mentale du service lié mais non marqué
H15 : Une marque de service forte est perçue comme étant moins risquée que le service lié
mais non marqué.
CONCLUSION DU CHAPITRE 6
Cette troisième étude exploratoire a eu pour vocation essentielle de préciser les hypothèses de
recherche à tester dans le cadre de la phase conclusive. Nous avons ainsi pu tester une
nouvelle fois le modèle de mesure de l’intangibilité. Les résultats de ces nouveaux tests, ainsi
que l’analyse du modèle de mesure de second ordre de l’intangibilité, plaident en faveur de
l’hypothèse de bidimensionnalité du concept (H1).
Cette étude exploratoire a également permis de prétester la relation entre l’intangibilité et le
risque perçu, et de formuler l’hypothèse d’une influence significative de cette première
variable sur la seconde. En outre, l’étude a permis de préciser les hypothèses sur la nature et
l’intensité du lien entre les dimensions physique et mentale de l’intangibilité et le risque perçu
global, en contrastant deux niveaux de connaissance et deux niveaux d’utilisation. Cette étude
a également permis d’affiner les hypothèses sur l’influence de la connaissance et de
l’utilisation sur l’intangibilité physique, sur l’intangibilité mentale et sur le risque perçu
global.
Finalement, des limites méthodologiques nous ont empêché de prétester les hypothèses
relatives à la marque comme levier de tangibilisation possible et comme réducteur de risque.
Ces hypothèses ont donc été posées exclusivement sur base du cadre conceptuel. Les limites
ont néanmoins été clairement identifiées, afin d’être prises en considération dans le design de
l’étude finale.
169
Le corps d’hypothèses finalement retenues dans le cadre de cette recherche est synthétisé et
structuré dans les tableaux et figures ci-dessous :
Les hypothèses principales
Tableau 6.16 : Les hypothèses principales de la recherche
H1
Le concept d’intangibilité est un concept bidimensionnel, constitué d’une dimension
physique faisant référence au manque de matérialité du service, et d’une dimension
mentale faisant référence à la difficulté accrue pour un intangible à être défini,
formulé ou compris de façon claire et précise
H2
L’intangibilité d’une offre globale de services exerce un impact significatif positif
(càd dans le même sens) sur le risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre
H2a : La dimension mentale de l’intangibilité exerce un impact significatif positif sur
le risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre
H2b : La dimension physique de l’intangibilité exerce un impact significatif positif sur
le risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre
Exprimées graphiquement, ces hypothèses peuvent être présentées de la manière suivante :
Figure 6.3. : Synthèse graphique des hypothèses principales
H2a+
MENTALE
H1
PHYSIQUE
H2+
INTANG.
H2B+
170
RISQUE
Les hypothèses complémentaires : analyse de l’impact des variables d’influence
L’impact de la connaissance et de l’utilisation sur la relation entre les deux
dimensions de l’intangibilité et le risque perçu global
Tableau 6.17: Premier corps d’hypothèses complémentaires : impact de la connaissance et de
l’utilisation sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu
H3
Lorsque les individus possèdent un niveau faible de connaissance de l’entité analysée,
les deux dimensions de l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque
perçu.
H4
Lorsque les individus possèdent un niveau élevé de connaissance de l’entité analysée,
seule la dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence significative sur le
risque perçu global. La dimension physique n’exerce, quant à elle, plus d’influence
significative sur le risque perçu global.
H5
Lorsque les individus n’utilisent pas ou peu l’entité analysée, les deux dimensions de
l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque perçu
H6
Lorsque les individus utilisent de façon plus intensive l’entité analysée, seule la
dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence significative sur le risque
perçu global. La dimension physique n’exerce, quant à elle, plus d’influence
significative sur le risque perçu global.
Ces quatre premières hypothèses complémentaires sont synthétisées graphiquement dans la
figure 6.4. ci-dessous :
Figure 6.4. : Synthèse graphique du premier corps d’hypothèses complémentaires
Connaissance faible / utilisation faible
MENTALE
MENTALE
+
H3 / H5
PHYSIQUE
Connaissance élevée / utilisation élevée
RISQUE
+
H4 / H6
+
PHYSIQUE
171
n.s.
RISQUE
L’impact de la connaissance et de l’utilisation sur les variables d’intangibilité
physique et mentale et sur le risque perçu global, considérées isolément
Tableau 6.18 : Deuxième corps d’hypothèses complémentaires : impact de la connaissance et
de l’utilisation sur l’intangibilité physique et mentale et sur le risque perçu
H7
Le degré de connaissance influence significativement et négativement le degré
d’intangibilité mentale de manière systématique
H8
Le degré de connaissance n’influence pas significativement le degré d’intangibilité
physique de manière systématique
H9
Le degré de connaissance n’influence pas significativement le degré de risque perçu
global de manière systématique
H10
Le degré d’utilisation influence négativement et significativement le degré
d’intangibilité mentale de manière systématique
H11
Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le degré d’intangibilité
physique de manière systématique
H12
Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le degré de risque perçu
global de manière systématique
La figure 6.5. propose une synthèse graphique de ces six hypothèses complémentaires.
Figure 6.5. : Synthèse graphique du second corps d’hypothèses complémentaires
Connaissance
Utilisation
MENTALE
MENTALE
-
-
H7
Connaissance
H8n.s.
H10
Utilisation
PHYSIQUE
H9n.s.
H11n.s.
PHYSIQUE
H12n.s.
RISQUE
RISQUE
172
L’impact de la marque de service sur les deux dimensions de l’intangibilité et sur le
risque perçu global
Tableau 6.19 : Troisième corps d’hypothèses complémentaires : impact de la marque de
service sur l’intangibilité physique et mentale et sur le risque perçu
H13
Une marque de service forte possède un score d’intangibilité physique
significativement plus faible que le score d’intangibilité physique du service lié mais
non marqué.
H14
Une
marque
de
service
forte
possède
un
score
d’intangibilité
mentale
significativement plus faible que le score d’intangibilité mentale du service lié mais
non marqué
H15
Une marque de service forte est perçue comme étant moins risquée que le service lié
mais non marqué.
La figure suivante synthétise ces trois dernières hypothèses complémentaires de recherche :
Figure 6.6. : Synthèse graphique du troisième corps d’hypothèses complémentaires
H14Marque forte
versus service ou
marque non forte
H15H13-
MENTALE
RISQUE
PHYSIQUE
Le corps d’hypothèses principales, de même que le premier corps d’hypothèses
complémentaires, peuvent être testés sur l’échantillon final global. Par contre, les deuxièmes
et troisièmes corps d’hypothèses nécessitent une approche d’analyse au niveau de chaque
entité (service ou marque) étudiée séparément.
173
174
PARTIE 3 : PHASE CONCLUSIVE
L’objectif principal de la phase conclusive vise à tester les hypothèses de recherche
préalablement définies sur base d’une étude menée sur un échantillon davantage représentatif
de la population qu’un échantillon d’étudiants.
La troisième partie de cette thèse s’articule en plusieurs chapitres. Le chapitre 7 présente le
design de l’étude finale. Le choix des services et des marques utilisées est ainsi justifié, de
même que le choix des instruments de mesure finalement retenus. En outre, le mode
d’administration du questionnaire est expliqué, ainsi que la méthode de construction de
l’échantillon final.
Le chapitre 8 vise à tester le modèle bidimensionnel de l’intangibilité sur une base de
données représentatives de la population. Notons que la notion de représentativité est discutée
plus en détail dans ce chapitre. Les résultats relatifs au test du modèle bidimensionnel de
l’intangibilité sont présentés.
Les conclusions du chapitre 8 nous amènent à distinguer, pour la présentation des résultats,
deux segments de la population, basés sur le niveau d’éducation18 des individus, puisque
celui-ci influence de manière importante les résultats. Le chapitre 9 est ainsi consacré à la
présentation des résultats sur un sous-échantillon de personnes possédant un faible niveau
d’éducation. Le chapitre 10 poursuit les mêmes objectifs que le chapitre 9, mais le niveau
d’analyse porte sur des personnes ayant un niveau d’éducation moyen à élevé.
Finalement, le chapitre 11 est consacré à la présentation de résultats complémentaires à ceux
présentés préalablement, en vue d’accroître les possibilités de discussions et d’interprétations
autour de cette recherche.
18
Nous utilisons le terme « niveau d’éducation » pour faire référence au « niveau d’instruction », la littérature
marketing privilégiant cette première appellation.
175
Notons que cette partie vise essentiellement à la seule présentation des résultats, sans que
ceux-ci ne fassent nécessairement l’objet d’une discussion approfondie. La discussion des
résultats, ainsi que les recommandations, seront en effet proposées au lecteur dans la
quatrième et dernière partie de ce document.
176
CHAPITRE 7 : DESIGN DE L’ETUDE FINALE
Il s’agit maintenant de confronter les modèles et les hypothèses de recherche à des données
empiriques issues d’un échantillon offrant une meilleure représentativité de la population
qu’un simple échantillon de convenance d’étudiants. L’objectif de ce chapitre est de détailler
le design de l’étude finale mise en place pour tester ces hypothèses de recherche. Nous allons
ainsi présenter les instruments de mesure finalement retenus dans le cadre de cette recherche,
de même que la justification du choix des services et des marques utilisées. Nous allons
également détailler la méthode de construction de l’échantillon, ainsi que le mode de collecte
des données et la procédure d’encodage des questionnaires.
1. CHOIX DES INSTRUMENTS DE MESURE POUR LE QUESTIONNAIRE FINAL
Les instruments de mesure sont présentés dans la séquence où ils apparaissent dans le
questionnaire final (dont une version est disponible en annexe 6).
La mesure de la connaissance
Tout comme dans la troisième étude exploratoire, nous mesurons la connaissance autoévaluée en nous fondant sur les travaux existants de Park, Mothersbaugh et Feick (1992) et de
Kapferer et Laurent (1983). Nous avons cependant remplacé le troisième item de l’étude
exploratoire par l’item CN1, afin d’insister sur le fait que la connaissance peut s’acquérir
autrement que par l’utilisation.
Les trois items retenus sont les suivants :
CN1 : Sans en être nécessairement utilisateur, je dirais que je m’y connais très bien en
matière de service/marque
CN2 : En matière de service/marque, je pourrais donner de bons conseils si on me le
demandait
CN3 : Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais que je m’y connais très bien
en matière de service/marque
177
Ces trois items sont chaque fois adaptés aux spécificités du service ou de la marque analysée.
Ils sont mesurés à l’aide d’une échelle à 5 points allant de « Pas du tout d’accord » à « tout à
fait d’accord ».
De manière similaire à ce qui a été réalisé dans le cadre de l’étude exploratoire, et pour les
mêmes raisons que celles déjà expliquées (voir p.150), nous distinguons deux niveaux de
connaissance. Le sous-groupe de niveau de connaissance faible rassemble les individus dont
le score moyen de connaissance est strictement inférieur à trois. Le sous-groupe de niveau de
connaissance élevé rassemble quant à lui les personnes dont le score de connaissance est
supérieur ou égal à trois.
La mesure de l’utilisation
Nous avons conservé les trois items utilisés dans la troisième étude exploratoire, mais nous
avons modifié les bornes, et par conséquent la formulation des items. Les trois items sont les
suivants :
UTIL1 : Avez-vous déjà utilisé service/marque ?
UTIL2 : Combien de fois avez-vous utilisé service/marque ces 12 derniers mois ?
UTIL3 : Combien de fois avez-vous utilisé service/marque ces 10 dernières années ?
La formulation des items est chaque fois adaptée au service ou à la marque analysée. Dans
l’étude exploratoire, les bornes allaient de « Jamais » à « Très souvent ». Lors du prétest du
questionnaire, plusieurs personnes nous ont dit que ces bornes étaient subjectives, et qu’elles
préféreraient avoir des bornes plus objectives. Nous avons donc spécifié une fréquence
d’utilisation sur une échelle à 5 points, adaptée à chaque service ou à chaque marque
isolément. Ces fréquences d’utilisation ont toutes été testées lors du prétest, pour s’assurer
qu’elles étaient réalistes, et permettaient bien de discriminer les faibles utilisateurs des
utilisateurs plus intensifs.
Comme pour la connaissance, nous avons distingué deux niveaux d’utilisation, construits de
manière similaire aux deux niveaux de connaissance.
178
La mesure de la valence de l’image de marque
Cette mesure ne s’applique évidemment qu’aux marques analysées. Lors de la troisième étude
exploratoire, nous n’avions pas mesuré la valence de l’image de marque, et, dès lors, nous ne
pouvions pas distinguer les individus pour qui la marque étaient une marque forte, au sens
défini préalablement.
Dans le cadre de cette recherche, une marque est considérée comme forte lorsqu’elle est
connue des individus, et lorsqu’elle possède un réseau d’associations fortes, uniques et
positives. Plusieurs remarques s’imposent par rapport à cette définition :
•
Au vu de notre méthodologie d’enquête, nous n’allons pas discriminer à l’avance les
marques fortes des marques faibles. Nous allons au contraire nous baser sur
l’évaluation que les individus font des marques analysées. Dans cette perspective, il
est plus correct de parler d’individus qui considèrent la marque comme étant forte,
plutôt que de parler de marque forte en général. Ainsi, une même marque peut être
positivement perçue par certains, et négativement perçue par d’autres. Nous allons
donc identifier au sein de notre base de données les personnes qui connaissent bien les
marques analysées, et qui en ont une bonne image. Sous ces conditions, nous
considérons alors que ces personnes perçoivent les marques comme étant fortes.
•
Pour opérationaliser correctement notre conceptualisation de la marque forte, il
faudrait, pour chaque individu, identifier le réseau d’associations présentes dans leur
mémoire à long-terme. Ensuite, pour chaque association identifiée, nous devrions en
mesurer la force, la valence et l’unicité. Pratiquement, cela est compliqué dans notre
cadre méthodologique, puisque la phase d’identification des associations notamment
repose sur des techniques d’enquête qualitatives. Aussi allons-nous uniquement
mesurer la valence de l’image de marque, de manière globale. Nous allons ainsi nous
demander si les personnes interrogées perçoivent la marque comme étant plutôt une
bonne marque ou une mauvaise marque.
Les trois items retenus pour mesurer la valence de l’image de marque se fondent sur les
travaux de Batra, Lehmann et Singh (1993) et de Campbell et Keller (2003).
179
Ces trois items sont les suivants :
PERCBR1 :
Lorsque je pense à marque, l’idée que j’y associe est globalement très
positive
PERCBR2 :
D’après moi, marque est une entreprise de service ayant une très bonne
réputation
PERCBR3 :
Marque me semble être une entreprise de service de très bonne qualité
La formulation des ces items est chaque fois adaptée aux spécificités de la marque analysée.
Ces trois items sont mesurés à l’aide d’une échelle à 5 points allant de « Pas du tout
d’accord » à « Tout à fait d’accord ».
La mesure de l’intangibilité
De manière similaire aux études exploratoires, nous allons utiliser l’échelle de mesure du
degré d’intangibilité à sept indicateurs que nous avons développée et présentée au chapitre 5.
La séquence d’apparition des items dans le questionnaire est la suivante :
P1 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de totalement palpable à 7 = de
totalement impalpable
M2 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de très simple à 7 = de très
compliqué
M3 :
Je comprends ce qu'
est item 1 = très facilement à 7 = très difficilement
P4 :
Je perçois item comme étant 1 = exclusivement matériel à 7 = exclusivement
immatériel
M5 :
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un item 1 = en étant très précis à 7 = en
étant très flou
P6 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = qui est très facile à voir et à
toucher à 7 = qui est très difficile à voir et à toucher
M7 :
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est item 1 = avec beaucoup de
facilité à 7 = avec beaucoup de difficulté
180
La mesure du risque perçu global
Pour les raisons évoquées dans la seconde partie du présent document, nous avons décidé de
retenir l’échelle de mesure du risque perçu global de Stone et Gronhaug (1993). Néanmoins,
par rapport à la troisième étude exploratoire présentée au chapitre six, nous avons apporté
quelques modifications dans la mesure du risque perçu. Ces modifications, ainsi que la
motivation de ces changements, sont les suivantes :
•
Sur base des recommandations de Dowling (1986), nous avons tout d’abord placé en
introduction de la mesure une brève explication sur la notion de risque perçu en
marketing. L’objectif est d’assurer une bonne compréhension d’un concept complexe,
dont le contenu ne pourrait pas toujours être clair pour le répondant. L’objectif est
également de s’assurer que la compréhension du contenu du concept est identique
d’individu à individu. Cette description est la suivante : « Lorsque nous achetons un
produit ou utilisons un service, nous pouvons ressentir un sentiment de risque, qui
provient essentiellement du fait qu’on n’est jamais certain à l’avance de ce que l’on
achète, et que quelque chose de désagréable pourrait dès lors survenir. Ainsi, nous
pourrions subir certains désagréments, p.ex. le risque d’être déçu de la qualité de ce
qu’on achète, le risque de mal dépenser son argent, le risque de mettre sa santé en
danger, le risque d’être mal jugé par les gens de son entourage, le risque d’être déçu
de soi-même, le risque de perdre du temps, … ». Notons que cette courte introduction
a été prétestée auprès de plusieurs personnes, pour s’assurer qu’elle est claire et
uniformément comprise. De même, elle a été soumise à un expert spécialisé dans
l’étude du risque perçu, pour qu’il valide sa capacité à bien représenter le concept de
risque perçu en marketing. Ceci étant, cette courte introduction devrait accroître le
niveau de validité de contenu de notre instrument de mesure du risque perçu global.
•
Avant l’administration des items, nous demandons à la personne interrogée de se
mettre dans une situation d’achat ou d’utilisation du service dans les six mois à venir
(« Attention : je vous demanderais de répondre aux questions suivantes comme si vous
alliez effectivement utiliser service dans les 6 mois à venir »). Ceci a pour objectif de
faire en sorte que le risque perçu global attaché au service ou à la marque soit
directement lié à une décision d’achat ou d’utilisation du service ou de la marque.
•
Nous introduisons ensuite un premier item unique destiné à appréhender le sentiment
global de risque perçu. Cet item est celui proposé par Spence, Engel et Blackwell
181
(1970) (« quel niveau de risque ressentez-vous à utiliser service ? (1 : risque très
faible à 5 risque très élevé »). Comme le préconise Dowling (1986), il n’est pas
contre-indiqué d’utiliser le vocable « risque » dans un item s’il a préalablement été
expliqué aux répondants, ce qui est bien le cas.
•
Ensuite, avant d’administrer les trois items de Stone et Gronhaug (1993), nous
demandons à la personne interrogée de qualifier par six questions supplémentaires la
nature du risque qu’elle ressent, même faiblement, à acheter ou à utiliser le service ou
la marque analysée (voir annexe 6 pour la formulation de ces questions). Plus
concrètement, il s’agit de demander au répondant s’il perçoit un risque financier,
fonctionnel, psychologique, social, temporel ou physique à acheter ou à utiliser le
service ou la marque dans un avenir proche. Notons qu’il ne s’agit pas de vouloir créer
une échelle de mesure mixte basée sur l’approche compositionnelle et sur l’approche
globale. Nous tenons simplement à mieux comprendre la nature du sentiment de
risque ressenti par la personne interrogée face au projet d’achat/d’utilisation d’un
service ou d’une marque. L’objectif est double. Sur un plan de la mesure du risque
global, la spécification de différentes sources de risque avant l’administration des trois
items de Stone et Gronhaug (1993) est susceptible d’accroître un peu plus encore le
degré de compréhension du concept de risque perçu. Sur un plan managérial ensuite,
cette qualification du risque nous permettra d’identifier les sources du risque perçu par
les clients selon le service ou la marque analysée. Comme discuté dans la partie
conceptuelle, ces sources de risque sont susceptibles de varier considérablement de
catégorie à catégorie, ou de marque à marque. Il est donc important pour un manager
d’activités de services de mieux comprendre la nature et l’intensité des différentes
sources possibles de risque, en vue notamment de mettre en place des stratégies de
réduction de risque adaptées.
•
Nous administrons ensuite les trois items de Stone et Gronhaug (1993), que nous
avons légèrement modifiés par rapport à l’étude exploratoire, afin d’être plus proches
des items de Stone et Gronhaug (1993) revisités par Laroche et al. (2003), qui
présentent de meilleurs qualités psychométriques (meilleur Alpha de Cronbach et
validité convergente assurée).
182
Les trois items sont dès lors les suivants :
o Globalement, je crois que je vais courir un ou des risques si j’achète/utilise
service (1 : Pas du tout d’accord à 5 : Tout à fait d’accord)
o Je ne me sens pas très à l’aise à l’idée d’acheter/utiliser service, car je crains
qu’il puisse arriver des éventualités fâcheuses (1 : Pas du tout d’accord à 5 :
Tout à fait d’accord)
o Globalement, j’ai le sentiment qu’acheter/utiliser service pourrait me causer
des désagréments (1 : Pas du tout d’accord à 5 : Tout à fait d’accord)
2. CHOIX DES SERVICES ET DES MARQUES
Dans le cadre de l’étude finale, nous avons volontairement décidé de nous consacrer
exclusivement à des services et à des marques de services, sans inclure de produits matériels.
L’objectif est d’accroître le nombre de services considérés dans l’étude, en vue d’accroître le
pouvoir de généralisation des résultats. En conséquence, les résultats de cette recherche ne
permettront pas de conclure de manière robuste à la discrimination des services et des
produits par la dimension physique de l’intangibilité, ce qui constitue une limite de ce travail.
Nous nous sommes fixé plusieurs contraintes lors du choix des services et des marques :
•
Nous souhaitons sélectionner des services destinés à des clients finaux (B2C et non
B2B). La raison essentielle réside dans le fait que les personnes interrogées seront des
clients finaux, et non des entreprises. La réplication d’une telle étude dans un contexte
B2B pourrait donc constituer une voie de recherche future intéressante.
•
Par rapport à nos objectifs de recherche, nous devons sélectionner des services pour
lesquels il existe des marques connues et non purement locales. Cette contrainte
élimine toute une série de services, comme la consultation chez un psychothérapeute,
les services d’architecture, les services d’avocats, … En fait, nous éliminons ainsi
quasiment toutes les professions libérales et les activités de services de proximité non
marquées. Néanmoins, les marques retenues ne doivent pas être leaders
monopolistiques dans leur catégorie, de sorte qu’il soit possible de discriminer
différents niveaux de connaissance et d’utilisation. En outre, elle doivent bien
évidemment se situer dans l’univers de consommation des personnes interrogées, ce
183
qui implique qu’elles soient présentes en Belgique francophone. Notons finalement
que, même si la personne interrogée ne connaît pas la marque, elle est néanmoins
invitée à répondre aux questions qui la concernent. En effet, l’individu est alors
capable de relier la marque à son service associé (puisque celui-ci est mentionné),
mais la marque pourrait dans ce cas ne constituer qu’une abstraction, qui détangibilise
le service, ou qui influence le degré de risque perçu qui y est attaché.
•
Nous souhaitons choisir des services qui se répartissent dans les différentes catégories
de services identifiées par Lovelock (1983), c’est-à-dire des services qui impliquent
plusieurs variables de classification différentes. L’objectif n’est pas de tester
formellement l’impact de ces variables de classification sur les résultats, ce qui
exigerait notamment de considérer un nombre très important de services, mais bien
d’assurer une diversité dans le choix des services analysés, et donc d’accroître la
capacité de généralisation des résultats. Nous souhaitons donc pouvoir choisir des
services qui portent tant sur des personnes que sur des biens, qui s’adressent tant au
mental qu’à des actifs intangibles. Nous voulons également distinguer des services où
les personnes et/ou les équipements font peu partie de l’expérience clients, de ceux
pour qui ces éléments sont très présents. Finalement, nous souhaitons introduire un
service délivré à travers un moyen de télécommunication, tel qu’Internet par exemple.
Ces critères de décision nous ont amené à retenir six services et huit marques appartenant à
ces univers de services. Il s’agit :
•
D’un vol en avion de ligne, et des marques Ryanair et SN Brussels Airlines (SNBA) ;
•
D’une assurance familiale, et d’une assurance familiale Ethias19 ;
•
D’un service de nettoyage à sec, et d’un service de nettoyage à sec chez 5 à Sec ;
•
D’un cours de langue, et d’un cours de langue chez Berlitz ;
•
D’un service d’e-banking, et du service PC Banking Fortis Banque
•
D’un abonnement de téléphonie mobile, et des abonnements Proximus et Base.
19
Notons qu’Ethias est une nouvelle marque issue du changement de nom de la marque SMAP. Pour
explicitement faire le lien avec l’ancienne marque, nous mentionnerons systématiquement dans les
questionnaires le lien entre Ethias et Smap (Ethias (=ex-Smap)).
184
Pour deux services (vol en avion de ligne et abonnement de téléphonie mobile), nous avons
souhaité analyser deux marques, au positionnement fondamentalement différent : Ryanair est
une compagnie aérienne à bas tarif (low cost), alors que SN Brussels Airlines est une
compagnie aérienne traditionnelle, axée sur la supériorité du service. Proximus est le leader
belge dans le secteur de la téléphonie mobile, et possède un positionnement plutôt haut de
gamme, traduit notamment par un niveau de prix globalement plus élevé que celui de ses deux
concurrents directs. Base est le plus petit opérateur belge, et se positionne davantage sur les
prix bas.
Les différents services couvrent toutes les catégories de la classification développée par
Lovelock (1983) et reprise dans Lovelock et Lapert (1999):
Tableau 7.1a : Classification des services selon le canevas proposé par Lovelock (1983)
Quelle est la nature de l’acte
de service ?
Actions tangibles
Qui ou quoi reçoit le service ?
Personnes
Service s’adressant aux
personnes
Vol en avion de ligne
Actions intangibles
Biens
Service s’adressant aux
possessions physiques
Nettoyage à sec
Service s’adressant au mental Service s’adressant à des
actifs intangibles
Cours de langue
Assurance familiale
E-banking
Abonnement de téléphonie
mobile
185
Tableau 7.1b : Classification des services selon le canevas proposé par Lovelock (1983)
Densité
Faible
Aperçu de services
où les personnes font
partie de
l'expérience
Aperçu de services
où les équipements
font partie de
l'expérience
Moyen
Elevé
• E-banking
• Assurance familiale
(après l’achat)
• Abonnement de
téléphonie mobile
(lors de
l’utilisation)
• Nettoyage à sec
• Assurance familiale
(lors de l’achat)
• Abonnement de
téléphonie mobile
(lors de l’achat)
• Vol en avion de
ligne
• Cours de langue
• Assurance familiale
• Abonnement de
téléphonie mobile
• E-banking
• Cours de langue
• Vol en avion
• Nettoyage à sec
Finalement, comme initialement prévu, nous avons intégré un service délivré à travers
Internet, à savoir le service d’e-banking.
3. LA METHODE D’ECHANTILLONNAGE
Notre population de référence est la population francophone de Belgique située en Régions
wallonne et bruxelloise.
Nous avons décidé de nous baser sur la méthode des quotas pour construire un échantillon
représentatif de la population sur les quotas sélectionnés. La méthode des quotas est une
méthode d’échantillonnage empirique non-aléatoire, qui consiste à reproduire dans
l’échantillon certaines caractéristiques de la population (Lambin, 1990). Bien que cette
méthode soit très largement répandue, elle ne conduit pas à des échantillons véritablement
représentatifs de la population, puisque certaines caractéristiques de la population restent noncontrôlées. Néanmoins, si la méthode est bien menée, elle conduit généralement à des
échantillons de bonne qualité (Deroo et Dussaix, 1980). Ainsi, une étude de la Sofres a utilisé
la méthode empirique des quotas dans une enquête portant sur les intentions d’achat des
ménages français. La même étude a été réalisée par l’INSEE, mais elle utilisait une méthode
d’échantillonnage aléatoire. Les résultats ont montré qu’à l’exception d’un seul cas, les écarts
entre les deux méthodes n’excédaient pas 1% (Deroo et Dussaix, 1980).
186
Afin de rester prudent, nous ne nous permettons pas d’affirmer que notre échantillon est
réellement représentatif de toutes les caractéristiques de la population, mais bien qu’il est
représentatif des quotas sélectionnés.
Les trois variables de quotas sélectionnées sont l’âge, le genre et le niveau d’éducation. Nous
avons retenu ces variables car nous pensons qu’elles sont susceptibles d’influencer nos
variables et/ou relations d’intérêt. Ces trois variables de quotas se décomposent en plusieurs
niveaux :
•
Âge : quatre niveaux sont retenus : 18-24 ans ; 25-44 ans ; 45-64 ans et 65-80 ans.
Nous avons délibérément décidé de ne pas aller au-delà de 80 ans. La raison
essentielle réside dans la longueur du questionnaire, qui nous paraît exagérée pour des
personnes plus âgées. La raison est également liée à la complexité de notre étude. De
plus, il nous faut également reconnaître la difficulté d’accès des personnes plus âgées.
Notons finalement que les personnes de plus de 80 ans représentent 4,22% de la
population retenue, ce qui n’est pas de nature à biaiser largement notre échantillon.
•
Genre : nous souhaitons que l’échantillon reproduise les proportions d’hommes et de
femmes de la population.
•
Niveau d’éducation : nous distinguons quatre niveaux d’éducation, basés sur le
diplôme obtenu le plus élevé : secondaire inférieur, secondaire supérieur,
enseignement supérieur non-universitaire, enseignement universitaire ou assimilé.
La mise en œuvre de la méthode des quotas se fera de manière indépendante, et non pas de
manière croisée. Plus concrètement, nous veillerons à ce que l’échantillon final respecte les
différents niveaux des quotas indépendamment les uns des autres, sans croiser les quotas entre
eux.
4. LA COLLECTE DES DONNEES
Quatre versions différentes du questionnaire ont été établies, chacune étant déclinée en deux
sous-versions, afin de faire varier l’ordre d’apparition des services. L’annexe 7 présente un
tableau reprenant la séquence d’apparition des services et des marques dans ces différentes
versions de questionnaires.
187
Chaque personne interrogée est amenée à évaluer un ou deux services, et les marques liées.
En outre, le répondant doit d’abord évaluer le service, puis la marque qui y est liée.
Toutes les versions du questionnaire ont fait l’objet d’un large prétest auprès d’une
cinquantaine de personnes appartenant à toutes les classes des variables de quotas. Ce prétest
a conduit à quelques modifications, essentiellement de clarification et de forme.
En matière de taille d’échantillon, nous nous sommes initialement fixé comme objectif de
collecter au moins 1400 observations (soit 50 observations pour les niveaux d’analyse les plus
bas), équitablement réparties entre les diverses entités analysées. Une observation correspond
à l’évaluation d’une entité par un individu. Chaque questionnaire comprend donc trois ou
quatre observations selon les versions.
Ce chiffre empirique de 1400 s’est construit sur la logique suivante : nous voulons pouvoir
mener des analyses au niveau de chaque entité séparément. De plus, il nous faut pouvoir
discriminer, au sein de chaque entité, des personnes ayant un degré de connaissance faible ou
élevé du service ou de la marque analysée, de même que des niveaux d’utilisation différents.
Le plus petit niveau d’analyse que nous souhaitons pouvoir considérer est donc un niveau
spécifique de connaissance ou d’utilisation (faible ou élevé) pour chaque entité. Nous avons
arbitrairement fixé à 50 le nombre d’observations pour ce niveau d’analyse. Or, nous avons
quatorze entités analysées, chacune déclinée sur deux niveaux possibles de connaissance ou
d’utilisation, soit 28 classes d’analyse possibles. 1400 correspond au produit de 28 par 50.
Vu l’objectif ambitieux de la taille d’échantillon et la longueur du questionnaire, nous avons
décidé de réaliser une enquête auto-administrée. Toutes les consignes de l’enquête figurent
ainsi dans le questionnaire pour que le répondant soit complètement autonome dans sa
réponse.
Nous avons décidé de faire appel à une large équipe de « distributeurs » de questionnaires. Il
nous fallait en effet pouvoir diffuser les questionnaires le plus largement possible, pour
atteindre un nombre de retours suffisant. Nous avons contacté un nombre important de
personnes pour leur demander leur collaboration. Ce processus a abouti à une liste de 49
partenaires ayant accepté de diffuser des questionnaires. Nous avons veillé à ce que ces
188
personnes aient accès à toutes les strates de la population. Nous avons ainsi, par exemple, pu
compter sur la collaboration des personnes ou des organismes ou entreprises suivantes :
•
Des proches actifs dans des milieux variés ;
•
Plusieurs administrations publiques. Deux hauts responsables de la Région wallonne nous
ont autorisé à diffuser le questionnaire à l’ensemble du personnel de leur administration,
nous permettant d’atteindre des agents du service public.
•
Deux hypermarchés ont accepté de diffuser les questionnaires à leur personnel (de caisse
et de magasin), nous permettant d’atteindre des personnes ayant un niveau d’éducation
attendu plus faible.
•
Plusieurs services techniques de l’UCL ont diffusé le questionnaire à leur personnel
technique et administratif.
•
Des associations locales ont également transmis le questionnaire à leurs membres
(chorale, association de pensionnés, club de vélo, …).
Au total, près de 3500 questionnaires ont ainsi été distribués. Notons que le risque de fraude
ou de tricherie a été réduit au minimum, puisque les personnes distribuant les questionnaires
n’avaient aucun incitant à tricher (absence de rémunération liée au nombre de questionnaires
retournés, absence d’implication directe quant au sujet de l’étude, …). En outre, la majorité
des personnes-relais étaient des personnes connues directement ou indirectement, et dès lors
dignes de confiance.
5. L’ORGANISATION
DES RETOURS, LA PROCEDURE D’ENCODAGE ET LA VALIDATION DES
QUOTAS
Les retours de questionnaires se sont étalés sur une période d’environ trois mois. Les
questionnaires ont été soit renvoyés par courrier, soit rendus à des personnes-relais dans
chaque lieu de diffusion. Nous pensons que cette organisation des retours n’est pas
susceptible de créer un biais éventuel dans les réponses, puisque l’objet de l’étude ne touche
pas directement la personne-relais.
189
Au vu du mode de collecte des données, nous avons réalisé la recomposition des quotas au fur
et à mesure de la réception des questionnaires, et l’encodage s’est lui même réalisé de manière
séquentielle, dans le strict respect des quotas.
Au terme de notre procédure séquentielle d’encodage, nous avons obtenu une base de données
reproduisant fidèlement les proportions des variables de quotas de la population dans
l’échantillon. Cette procédure nous a permis d’encoder 389 questionnaires, soit 1320
applications des différentes échelles, ce qui est proche de notre objectif initial.
Néanmoins, il subsistait encore 366 questionnaires complets sur au moins une entité analysée.
Nous avons en effet reçu un nombre insuffisant de questionnaires émanant d’individus ayant
un niveau d’éducation faible (diplôme d’études secondaires inférieures comme diplôme le
plus élevé) pour pouvoir élargir la base de données représentative sur les quotas, et il nous
était difficile de trouver de nouveaux répondants dans cette catégorie particulière, vu leur
difficulté d’accès.
Etant soucieux de ne pas perdre cette information, nous avons décidé de créer une nouvelle
base de données dans laquelle nous avons encodé tous les questionnaires retournés, sans nous
soucier du respect des quotas. Cette base de données compte 2590 observations (soit 755
questionnaires). L’objectif est de permettre, si nécessaire, l’exploitation de ces données pour
descendre à des niveaux d’analyse plus précis, afin d’accroître l’étendue de nos analyses et de
nos discussions. Notons que sur les quelque 3500 questionnaires distribués initialement, nous
en avons récupéré 755 exploitables, soit un taux de retour de presque 22%, ce qui semble être
assez satisfaisant.
Finalement, une procédure de contrôle de l’encodage des données a été mise en place. Tout
d’abord, nous avons fixé une contrainte sur chaque cellule de la grille d’encodage, pour éviter
que ne soit encodées des données impossibles (un 9 par exemple pour une échelle allant de 1
à 7). Avec l’aide d’un proche, nous avons également contrôlé aléatoirement 10% des
observations. Une seule erreur a été identifiée sur une variable socio-démographique.
190
CONCLUSION DU CHAPITRE 7
Ce chapitre nous a permis de présenter le design de l’étude finale. Nous avons ainsi présenté
et justifié le choix des instruments de mesure finalement retenus pour l’étude empirique
finale. Nous avons également expliqué le choix des services et des marques utilisées dans
cette étude, de même que la méthode d’échantillonnage retenue. Nous avons finalement
exposé le mode de collecte des données, de même que l’organisation des retours des
questionnaires et la procédure d’encodage des données.
Au terme de la procédure de collecte des données, nous avons à notre disposition deux bases
de données :
•
Une première base de données de 1320 observations, représentatives de la population
belge francophone sur les trois variables de quotas sélectionnées ;
•
Une seconde base de données, comptant 2590 observations, et permettant éventuellement
de pouvoir réaliser des analyses statistiques plus fines, si besoin est.
L’exploitation de ces données nous permet maintenant de présenter les procédures d’analyse
mises en place pour tester nos hypothèses de recherche.
191
192
CHAPITRE 8 : TEST DU MODELE BIDIMENSIONNEL DE L’INTANGIBILITE
Pour rappel, au terme d’une revue de la littérature, d’une discussion s’appuyant sur la
linguistique, et d’entretiens avec des managers et des clients d’activités de services, nous
avons proposé la définition suivante du concept d’intangibilité :
•
Un manque de matérialité (se rapportant à la composante physique du
construit) ;
•
Une difficulté accrue à être défini, formulé ou compris de façon claire et
précise (se rapportant à la composante mentale du construit).
En vue d’opérationaliser le concept d’intangibilité dans le respect de cette définition, nous
avons conduit plusieurs études exploratoires destinées à développer un instrument de mesure
fiable et valide du degré d’intangibilité d’une offre commerciale. Ces études nous ont permis
de proposer un modèle de mesure de l’intangibilité constitué de deux dimensions. Celles-ci
sont synthétisées dans la première hypothèse de recherche principale à tester, qui, pour rappel,
est la suivante :
H1 :
Le concept d’intangibilité est un concept bidimensionnel, constitué d’une dimension
physique faisant référence au manque de matérialité du service, et d’une dimension
mentale faisant référence à la difficulté accrue pour un intangible à être défini, formulé
ou compris de façon claire et précise.
193
Pour tester cette hypothèse, nous allons travailler sur la base de données représentatives de la
population sur nos trois variables de quotas. Cet échantillon, composé de 1320 observations,
se présente comme suit :
Tableau 8.1 : Présentation de l’échantillon représentatif sur les quotas
Genre
Hommes
Femmes
Test de Chi-deux
Catégorie d’âge
18-24 ans
25-44 ans
45-64 ans
65-80 ans
Quotas théoriques de la
population
Quotas effectifs de
l’échantillon
48,58%
47,95 %
51,42 %
52,05 %
²observé = 0,20 < ²théorique = 3,84
11,68%
13,26%
39,48%
38,79%
31,71%
30,38%
17,13%
17,58%
²observé = 3,88 < ²théorique = 7,81
Niveau d’éducation
Primaire et secondaire inférieur
Secondaire supérieur
Non universitaire type court
Universitaires et assimilés
Test de Chi-deux
45,62%
45,61%
30,96%
30,91%
12,05%
12,50%
11,37%
10,98%
²observé = 0,39 < ²théorique = 7,81
Sans surprise au vu de notre procédure d’encodage, le test de chi-deux confirme l’absence de
différence significative entre les quotas théoriques et les quotas observés.
L’absence de non-normalité des données est contrôlée à l’aide des indices de Skewness et
Kurtosis. Comme le prescrit Roussel et al. (2002, p.47), lorsque les indices de Skewness sont
inférieurs à trois en valeur absolue, et lorsque les indices de Kurtosis sont inférieurs à huit en
valeur absolue, nous pouvons considérer que les variables ont une distribution proche d’une
distribution normale. Ces deux conditions sont bien vérifiées pour l’ensemble de nos
variables.
La procédure de validation du modèle de mesure de l’intangibilité peut dès lors commencer.
Elle va suivre celle mise en œuvre dans le test du modèle lors des études exploratoires20. Nous
20
Cette procédure est présentée au chapitre 5 de la présente étude.
194
allons commencer par réaliser une analyse factorielle exploratoire sous SPSS 10.0, pour
ensuite mener une analyse factorielle confirmatoire sous Lisrel 8.50.
1. ANALYSE FACTORIELLE EXPLORATOIRE SOUS SPSS
Classiquement, une analyse factorielle exploratoire a été menée sur l’ensemble des 1320
applications de l’échelle, ainsi que sur les 14 entités séparément. Ces analyses confirment
dans chaque cas la structure à deux facteurs (valeurs propres supérieures à 1). Le tableau cidessous présente les résultats de l’analyse sur l’échantillon total.
Tableau 8.2 : Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
Mentale
,912
,930
,935
,938
M2
M3
M5
M7
P1
P4
P6
Valeur propre
Variance expliquée
Facteur
4,502
64,32 %
Physique
,932
,939
,926
1,827
26,10 %
2. ANALYSE FACTORIELLE CONFIRMATOIRE SOUS LISREL
En utilisant une approche similaire à celle mise en place lors de la phase de développement de
l’échelle (voir chapitre 5), nous avons ensuite réalisé une analyse factorielle confirmatoire à
l’aide du logiciel Lisrel 8.50.
Au terme d’une procédure rigoureuse de test du modèle bidimensionnel, il faut constater que
le modèle de mesure ne s’ajuste pas aux données. Les indices d’ajustement sont
insatisfaisants, ce qui nous empêche de valider la première hypothèse de recherche.
Puisque le modèle bidimensionnel est rejeté, un éventuel modèle unidimensionnel est testé.
Ce dernier est rejeté plus sévèrement encore.
195
Nous décidons dès lors de procéder à de nouvelles analyses factorielles exploratoires, pour
tenter d’identifier ce qui pourrait causer le non-ajustement du modèle de mesure aux données.
3. NOUVELLES ANALYSES FACTORIELLES EXPLORATOIRES SOUS SPSS
Nous décidons d’analyser plus en détail les données selon les différentes variables de quotas,
afin d’évaluer si la structure à deux facteurs est stable entre les différents niveaux de quotas.
Les résultats de ces analyses factorielles exploratoires sont les suivantes :
Tableau 8.3 : Nombre de facteurs identifiés selon les niveaux de variables de quotas
Genre
•
Hommes
2 facteurs
•
Femmes
2 facteurs
Niveau d’éducation
•
Sans diplôme, primaire et secondaire inférieur
1 facteur
•
Diplôme secondaire supérieur
2 facteurs
•
Non universitaire type court
2 facteurs
•
Universitaire ou assimilé
2 facteurs
•
18 - 24 ans
1 facteur
•
24 - 44 ans
2 facteurs
•
45 – 64 ans
2 facteurs
•
65 – 80 ans
1 facteur
Age
Le niveau d’éducation faible et les niveaux d’âge 18-24 ans et 65-80 ans présentent une
structure factorielle à un seul facteur. Néanmoins, ces deux variables sont fortement
associées21. Ainsi, les personnes possédant comme diplôme le plus élevé un diplôme d’étude
secondaire inférieure sont surtout les jeunes ou les personnes plus âgées. Il faut donc pouvoir
distinguer l’impact de l’âge de l’impact du niveau d’éducation. Nous suspectons a priori que
le niveau d’éducation soit la variable explicative de cette structure unifactorielle plutôt que
21
Le test d’association de chi-deux entre les variables d’âge et de niveau d’éducation est hautement significatif
(χ²observé = 234,27 > χ²9 ddl = 16,9 ; p-valeur = 0,000)
196
l’âge. La raison est la suivante : lors des études exploratoires, l’échantillon était
majoritairement composé d’étudiants universitaires (donc de niveau d’éducation élevé) dont
l’âge variait entre 18 et 24 ans. Or, une structure à deux facteurs était obtenue.
Pour évaluer l’impact séparé de ces deux variables de quotas, deux groupes d’analyse
distincts sont considérés : le niveau d’éducation faible, et le niveau d’éducation moyen à
élevé. Pour ces deux niveaux, la structure factorielle est analysée pour chaque classe d’âge.
Les résultats sont présentés dans le tableau ci-dessous :
Tableau 8.4. : Nombre de facteurs identifiés selon le niveau d’éducation
NIVEAU D’EDUCATION FAIBLE – TRANCHE D’AGE
•
18 - 24 ans
1 facteur
•
24 - 44 ans
1 facteur
•
45 – 64 ans
1 facteur
•
65 – 80 ans
1 facteur
NIVEAU D’EDUCATION MOYEN A ELEVE – TRANCHE D’AGE
•
18 - 24 ans
2 facteurs
•
24 - 44 ans
2 facteurs
•
45 – 64 ans
2 facteurs
•
65 – 80 ans
2 facteurs
Ces résultats semblent suggérer que c’est le niveau d’éducation faible qui cause les problèmes
d’ajustement du modèle bidimensionnel aux données. Il est néanmoins important de prendre
une précaution supplémentaire : n’y aurait-il pas une influence des variables de connaissance
et d’utilisation au sein de ce niveau d’éducation ? Il faut en effet valider que le niveau
d’éducation faible n’est pas majoritairement composé de personnes qui possèdent un niveau
de connaissance et/ou d’utilisation faible.
197
Pour ce faire, nous allons distinguer dans ce sous-groupe de personnes ayant un niveau
d’éducation faible les niveaux de connaissance faible et élevé, ainsi que les niveaux
d’utilisation faible et élevé.
Tableau 8.5 : Nombre de facteurs identifiés pour le niveau d’éducation faible selon le degré
de connaissance ou d’utilisation
NIVEAU D’EDUCATION FAIBLE
•
Connaissance faible
1 facteur
•
Connaissance élevée
1 facteur
•
Utilisation faible
1 facteur
•
Utilisation élevée
1 facteur
Nous retrouvons bien à chaque fois une structure à un facteur, quel que soit le niveau de
connaissance ou d’utilisation. Nous pouvons donc supposer que le niveau d’éducation faible
affecte de manière importante la perception d’intangibilité.
Nous allons donc distinguer deux groupes distincts pour réaliser les nouvelles analyses
factorielles exploratoires et confirmatoires sous Lisrel :
•
Le niveau d’éducation faible (absence de diplôme, diplôme primaire ou diplôme
secondaire inférieur). Ce groupe se compose de 602 observations.
•
Le niveau d’éducation élevé (diplôme secondaire supérieur, non-universitaire de
type court ou universitaire et assimilés). Ce groupe se compose de 718
observations.
198
Les résultats des analyses factorielles exploratoires pour ces deux groupes sont présentés dans
les tableaux ci-dessous :
a) Le niveau d’éducation faible
Tableau 8.6 : Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
M2
M3
M5
M7
P1
P4
P6
Facteur
INT
,900
,916
,888
,902
,879
,851
,892
Valeur propre
Variance expliquée
Alpha de Cronbach
5,542
79,16%
0,96
Nous retrouvons bien une structure à un seul facteur, expliquant 79,16% de la variance totale,
et présentant un Alpha de Cronbach très satisfaisant de 0,96.
b) Le niveau d’éducation moyen à élevé
Tableau 8.7: Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
Facteur
Mentale
,944
,950
,956
,962
Physique
Valeur propre
Variance expliquée
3,816
54,51 %
2,597
37,10 %
Alpha de Cronbach
0,97
0,96
M2
M3
M5
M7
P1
P4
P6
199
,955
,959
,959
Nous retrouvons bien, dans ce cas, une structure à deux facteurs, expliquant un total de
91,61% de la variance totale. Les deux facteurs présentent en outre un Alpha de Cronbach très
satisfaisant.
4. NOUVELLES ANALYSES FACTORIELLES CONFIRMATOIRES SOUS LISREL
4.1. Le groupe « Niveau d’éducation faible »
En suivant la procédure déjà décrite précédemment, nous réalisons une analyse factorielle
confirmatoire sous Lisrel 8.50. Le modèle unidimensionnel est testé, et les résultats présentés
ci-dessous révèlent une qualité d’ajustement tout à fait acceptable lorsque nous supprimons
l’item p6.
Tableau 8.8 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
latentes
Indicateurs
Intangibilité M2
M3
M5
M7
P1
P4
Contributions
Niveau de
factorielles signification du
t de Student
0,94
0,031
0,99
0,029
0,86
0,032
0,88
0,032
0,81
0,034
0,76
0,035
R²
0,89
0,97
0,74
0,77
0,66
0,58
Tableau 8.9 : Indices d'
ajustement du modèle
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
3,31
AGFI
0,96 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,08
Critical N
515,7 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,39
RMR
0,007
PGFI
0,28
RMSEA
0,062 < 0,08
L’élimination de p6 n’altère en rien la capacité des autres indicateurs (p1 et p4) à bien
représenter le concept d’intangibilité tel que spécifié. Aussi, il n’y a aucune contre-indication
théorique à enlever cet item.
200
Pour valider ce modèle, il reste encore à vérifier les conditions de fiabilité et de validité
convergente. Les deux tableaux présentés ci-dessous révèlent des indices de fiabilité et de
validité convergente très satisfaisants :
Tableau 8.10 : Indices de fiabilité
INT
Alpha de Cronbach
0,96
Rhô de Joreskog
0,95
Tableau 8.11 : Evaluation de la validité convergente
Variable latente
Nbre de non
Nbre de R² associé
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
0
0
Intangibilité
(vc)
0,77
Nous pouvons donc conclure à la validation d’un modèle unidimensionnel à 6 indicateurs
pour le niveau d’éducation faible.
4.2. Le groupe « Niveau d’éducation moyen à élevé »
De manière similaire, nous allons tester le modèle bidimensionnel de l’intangibilité sur le
groupe de niveau d’éducation moyen à élevé.
Les tableaux suivants présentent les indices d’ajustement du modèle aux données, lorsque
nous enlevons l’item M3. Ces indices témoignent d’une qualité d’ajustement tout à fait
acceptable.
Tableau 8.12 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
latentes
Indicateurs
Dimension
Mentale
M2
M5
M7
P1
P4
P6
Dimension
physique
Contributions
Niveau de
factorielles signification du
t de Student
0,91
0,029
0,98
0,027
0.98
0,027
0,95
0,028
0,95
0,028
0,96
0,028
201
R²
0,83
0,96
0,96
0,90
0,91
0,92
Tableau 8.13 : Indices d'
ajustement du modèle
Indices
Valeurs
Indices
Absolus
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
2,88
AGFI
0,97 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,06
Critical N
616,64 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,53
RMR
0,01
PGFI
0,38
RMSEA
0,051 < 0,08
L’élimination de l’item M3 n’est pas contre-indiquée, car elle n’altère pas la bonne
représentation de la dimension mentale de l’intangibilité, grâce notamment à la présence de
M2.
Il nous faut en outre évaluer la fiabilité et les conditions de validité convergente et
discriminante du modèle de mesure.
Tableau 8.14 : Indices de fiabilité
MENT
PHYS
Alpha de Cronbach
0,96
0,96
Rhô de Joreskog
0,97
0,97
Les Alpha de Cronbach, complétés par les Rhô de Joreskog, témoignent d’un niveau de
fiabilité très satisfaisant du modèle de mesure bidimensionnel de l’intangibilité. En outre, le
tableau ci-dessous nous permet d’accepter les trois conditions de validité convergente.
Tableau 8.15 : Evaluation de la validité convergente
Dimension
Nbre de non
Nbre de R² associé
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
Mentale
0
0
0,92
Physique
0
0
0,91
202
(vc)
Finalement, la validité discriminante est également assurée, car le carré de la corrélation entre
les deux variables latentes étant de 0,02, cette valeur est bien inférieure aux deux variances
moyennes extraites correspondantes figurant dans le tableau ci-dessus ( (vc)).
CONCLUSION DU CHAPITRE 8
Le chapitre 8 nous a permis de tester le modèle de mesure de l’intangibilité. Les résultats des
analyses sont aussi inattendus qu’intéressants : l’hypothèse centrale de cette recherche, à
savoir l’hypothèse de bidimensionnalité du modèle de l’intangibilité, n’est que partiellement
validée. Le modèle bidimensionnel n’est validé que pour les individus possédant un niveau
d’éducation moyen à élevé. Pour les individus possédant un niveau d’éducation faible, le
modèle bidimensionnel est rejeté au profit d’un modèle unidimensionnel, à six indicateurs.
Le niveau d’éducation semble donc exercer un impact majeur sur la manière dont
l’intangibilité est perçue par les individus. Il semble donc qu’une de nos critiques à l’encontre
de l’échelle de mesure tridimensionnelle de Laroche et al. (2001), à savoir la stabilité de leur
modèle tridimensionnel sur un échantillon réellement représentatif de la population, est
parfaitement fondée.
Avant de discuter plus en détail de ce résultat majeur, nous souhaitons présenter les autres
résultats, en distinguant les analyses selon les groupes de personnes caractérisés par un niveau
d’éducation faible, ou un niveau d’éducation moyen à élevé. Le chapitre 9 va ainsi être
consacré à l’examen du modèle structurel et des variables d’influence sous la condition de
niveau d’éducation faible. Le chapitre 10 va quant à lui présenter ces résultats pour les
niveaux d’éducation moyen à élevé.
203
204
CHAPITRE 9 : RESULTATS POUR LE GROUPE « NIVEAU D’EDUCATION
FAIBLE »
Le test du modèle de mesure du degré d’intangibilité d’une offre de services ne nous a pas
permis de conclure à la stabilité du modèle bidimensionnel pour toutes les catégories de
personnes. Le groupe de personnes caractérisées par un niveau d’éducation faible perçoit en
effet l’intangibilité de manière unidimensionnelle. Ces personnes ne font pas de différence
entre l’intangibilité physique et l’intangibilité mentale.
Le présent chapitre vise à évaluer, pour ce groupe de personnes en particulier, les hypothèses
principales de la recherche (l’influence de l’intangibilité sur le risque perçu global), ainsi que
le premier corps d’hypothèses complémentaires (l’influence du degré de connaissance et du
degré d’utilisation sur la relation entre ces deux variables). Notons que les hypothèses telles
que spécifiées au chapitre 6 présupposaient la bidimensionnalité du concept d’intangibilité.
Au vu des résultats relatifs à la perception d’intangibilité par les personnes de faible niveau
d’éducation, ces hypothèses doivent désormais être analysées et traitées dans une perspective
unidimensionnelle de l’intangibilité..
Il faut par contre souligner qu’au vu de la faible taille d’échantillon par entité - et plus
particulièrement du faible nombre d’individus possédant un niveau de connaissance et/ou
d’utilisation élevé à l’égard de chaque entité considérée individuellement -, il ne nous sera
pas possible de procéder à des analyses conclusives au niveau des entités. Plus concrètement,
cela signifie qu’il n’est pas possible de mener des analyses sur l’impact de la connaissance et
de l’utilisation sur le degré d’intangibilité physique, mentale et sur le risque perçu (deuxième
corps d’hypothèses complémentaires), ou d’étudier l’impact possible de la marque forte sur
ces trois variables d’intérêt (troisième corps d’hypothèses complémentaires). Ceci constitue
une limite de cette recherche, liée au fait que le résultat de l’influence du niveau d’éducation
sur la perception d’intangibilité était largement inattendu, et que nous ne pensions pas devoir
scinder en deux notre base de données.
205
1. ANALYSE DE LA RELATION ENTRE L’INTANGIBILITE ET LE RISQUE PERÇU
Pour rappel, la seconde hypothèse principale de recherche à tester est la suivante :
H2 :
L’intangibilité d’une offre globale de services exerce un impact significatif positif (càd
dans le même sens) sur le risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre.
En vue de tester la relation entre l’intangibilité et le risque perçu, nous testons le modèle
structurel suivant :
Figure 9.1 : Le modèle structurel à tester
P1
M2
RISK1
M3
RISK2
INTANG
RISK
RISK3
P4
RISK4
M5
M7
Avant de soumettre le modèle structurel à une analyse confirmatoire sous Lisrel, il est
nécessaire de tester la qualité du modèle de mesure du risque perçu. La première étape
consiste classiquement à réaliser une analyse factorielle exploratoire sous SPSS 10.0. Les
résultats de l’analyse factorielle sont présentés ci-dessous.
206
Tableau 9.1 : Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
RISK1
RISK2
RISK3
RISK4
Facteur
RISK
,868
,953
,949
,954
Valeur propre
Variance expliquée
Alpha de Cronbach
Rhô de Joreskog
3,472
86,81 %
0,95
0,96
Les quatre indicateurs retenus permettent d’expliquer plus de 86% de variance. L’Alpha de
Cronbach et le Rhô de Joreskog témoignent d’une bonne fiabilité de l’instrument de mesure
du risque perçu global.
En outre, l’examen des tableaux 9.2 et 9.3 issus de l’analyse factorielle confirmatoire menée
sous Lisrel montrent que les trois conditions de validité convergente sont vérifiées.
Tableau 9.2 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
Indicateurs
latentes
Contributions
Niveau de
factorielles
signification du
R²
t de Student
RISK
RISK1
0,81
0,034
0,66
RISK2
0,94
0,030
0,90
RISK3
0,98
0,030
0,95
RISK4
0,98
0,029
0,96
Tableau 9.3 : Evaluation de la validité convergente
Variable latente
RISK
Nbre de non
Nbre de R² associé
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
0
0
207
(vc)
0,86
Nous pouvons donc à présent évaluer la qualité du modèle structurel.
Tableau 9.4 : Indices d'
ajustement du modèle structurel
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,96 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
4,21
AGFI
0,93 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,28
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,59
PGFI
0,47
Critical N 243,161 > 200
RMR
0,04
RMSEA
0,073 < 0,08
Les indices présentés dans le tableau ci-dessus permettent de conclure au bon ajustement du
modèle aux données. Ceci nous autorise dès lors à interpréter le modèle. Observons pour ce
faire le lien structurel entre l’intangibilité et le risque perçu global.
Tableau 9.5 : Relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
INT
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,40
9,75
Ce résultat nous permet de conclure à l’impact significatif de l’intangibilité sur le risque
perçu global. L’intangibilité exerce bien une influence significative positive (càd dans le
même sens) sur le risque perçu global lorsque nous considérons le groupe de personnes
possédant un niveau d’éducation faible dans son ensemble. Plus une offre de services est
perçue comme étant intangible par les personnes de niveau d’éducation faible, plus le
risque perçu est exacerbé.
L’hypothèse H2 est dès lors validée pour ce niveau d’analyse.
208
2. L’IMPACT DU DEGRE
DE CONNAISSANCE SUR LA RELATION ENTRE L’INTANGIBILITE ET
LE RISQUE PERÇU
Comme expliqué au chapitre 7 (voir p.150), nous distinguons deux niveaux de connaissance :
le niveau de connaissance faible (438 observations – score moyen de connaissance < 3) et le
niveau de connaissance élevé (162 observations – score moyen de connaissance ≥ 3).
Avant d’analyser la manière dont le degré de connaissance affecte la relation entre
l’intangibilité et le risque perçu, il faut tester la stabilité du modèle de mesure de
l’intangibilité et du modèle structurel sur les deux niveaux de connaissance.
L’examen des indices d’ajustement de ces modèles selon le degré de connaissance est
présenté dans les tableaux 9.6 et 9.7. Ils témoignent d’une bonne qualité des modèles, ce qui
les rend interprétables.
Tableau 9.6 : Indices d’ajustement du modèle de mesure de l’intangibilité
Facteurs
Connaissance
faible
Connaissance
élevée
1 facteur
int
= 0,94
1 facteur
int
= 0,96
Items
m2,m3,m5,
m7,p1,p4
m2,m5,m7,
p1,p4
Indices d’ajustement
² normé= 2,68 ; RMSEA=0,062 ; GFI =0,99 ;
AGFI =0,96 ; RMR =0,009 ; Critical N = 496,28
² normé= 1,20 ; RMSEA=0,036 ; GFI =0,99 ;
AGFI =0,96 ; RMR =0,005 ; Critical N = 502,57
Tableau 9.7 : Indices d’ajustement du modèle structurel
Indices d’ajustement
Connaissance
faible
Connaissance
élevée
² normé= 3,73 ; RMSEA=0,079 ; GFI =0,97 ; AGFI =0,92 ; RMR =0,05 ;
Critical N = 223,05
² normé= 1,95 ; RMSEA=0,077 ; GFI =0,97 ; AGFI =0,92 ; RMR =0,03 ;
Critical N = 219,13
Notons que la fiabilité et la validité convergente sont également vérifiées pour chaque
construit.
209
Observons à présent les liens structurels entre les variables d’intangibilité et de risque perçu :
Tableau 9.8 : Relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
INT
RISK
Contributions factorielles
T de Student
Base de données complète
0,40
9,75
Connaissance faible
0,46
9,57
Connaissance élevée
0,04 (n.s.)
0,55 (n.s.)
Ces résultats montrent que le degré de connaissance qu’un individu possède à l’égard d’un
service ou d’une marque influence de manière importante la relation entre l’intangibilité et le
risque perçu global :
•
En cas de connaissance faible, l’intangibilité influence positivement de manière
importante le risque perçu global. L’intangibilité explique à elle seule 20,7% de
la variance du risque perçu global (R² = 0,207).
•
En cas de connaissance élevée par contre, l’intangibilité n’exerce plus d’impact
significatif sur le risque perçu global.
210
3. L’IMPACT
DU DEGRE D’UTILISATION SUR LA RELATION ENTRE L’INTANGIBILITE ET LE
RISQUE PERÇU
Nous distinguons à nouveau deux niveaux d’analyse : le niveau d’utilisation faible (439
observations) et le niveau d’utilisation élevé (163 observations). Ces niveaux ont été
discriminés de la même façon que les niveaux de connaissance.
Il est intéressant de noter que le coefficient d’association Phi entre les variables de
connaissance et d’utilisation est de 0,445 (significatif au seuil de 1%). Bien que fortement
associées, ces deux variables n’apportent toutefois pas nécessairement la même information,
même si nous nous attendons à de faibles différences dans les résultats entre ces deux
variables. En effet, comme le montre la répartition des observations selon le niveau de
connaissance et le niveau d’utilisation, un individu peut être utilisateur intensif d’un service
ou d’une marque, sans en être pourtant un fin connaisseur. Il s’agirait par exemple d’un
individu qui fait régulièrement entretenir sa voiture, sans rien connaître en matière d’entretien.
Inversement, certaines personnes peuvent ne pas utiliser un service ou une marque, mais en
posséder un important niveau de connaissance. Un individu peut être passionné par le
Concorde, et posséder un niveau de connaissance élevé des caractéristiques d’un vol en
Concorde, sans pour autant avoir lui-même déjà volé à bord de cet avion.
Tableau 9.9 : Répartition des observations selon les niveaux de connaissance et d’utilisation
Nombre d’observations
Connaissance faible
438
Utilisation faible
439
Connaissance faible ET utilisation faible
373
Connaissance élevée
162
Utilisation élevée
163
Connaissance élevée ET utilisation élevée
96
Connaissance faible ET utilisation élevée
65
Connaissance élevée ET utilisation faible
66
211
Tout comme nous l’avons fait pour l’analyse par niveau de connaissance, nous commençons
par contrôler la stabilité du modèle unidimensionnel de l’intangibilité et du modèle structurel.
Ces modèles sont stables indépendamment du niveau d’utilisation, comme le montrent les
résultats présentés dans les deux tableaux ci-dessous :
Tableau 9.10 : Indices d’ajustement du modèle de mesure de l’intangibilité
Facteurs
Utilisation
1 facteur
faible
int
Utilisation
= 0,95
1 facteur
élevée
int
= 0,93
Items
Indices d’ajustement
m2,m3,m5,
² normé= 1,33 ; RMSEA=0,028 ; GFI =0,99 ;
m7, p1,p4
AGFI =0,98 ; RMR =0,01 ; Critical N = 1083,92
m2,m5,m7,
p1,p4,p6
² normé= 0,89 ; RMSEA=0,00 ; GFI =0,99 ; AGFI
=0,96 ; RMR =0,01 ; Critical N = 605,64
Tableau 9.11 : Indices d’ajustement du modèle structurel
Indices d’ajustement
Utilisation
faible
² normé= 3,29 ; RMSEA=0,072 ; GFI =0,97 ; AGFI =0,93 ; RMR =0,04 ;
Critical N = 256,92
Utilisation
élevée
² normé= 1,29 ; RMSEA=0,043 ; GFI =0,98 ; AGFI =0,94 ; RMR =0,02 ;
Critical N = 301,27
A nouveau, la fiabilité et la validité des instruments de mesure ont été contrôlées pour les
deux niveaux d’analyse.
Les modèles étant de bonne qualité, observons à présent les liens structurels entre les
variables d’intangibilité et de risque perçu :
Tableau 9.12 : Relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
INT
RISK
Contributions factorielles
T de Student
DB complète
0,40
9,75
Utilisation faible
0,47
9,92
Utilisation élevée
0,04 (n.s.)
0,45 (n.s.)
212
Tout comme pour la connaissance, le degré d’utilisation semble influencer de manière
importante la relation entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu par les
individus.
•
En cas d’utilisation faible ou de non utilisation, les individus associent à
l’intangibilité une part de risque non négligeable, puisque l’intangibilité
explique à elle seule 22,5% de la variance du risque perçu (R²=0,225).
•
En cas d’utilisation plus intensive par contre, l’intangibilité n’exerce plus
d’impact significatif sur le risque perçu. La nature à dominante intangible
d’une offre de service est alors déconnectée du sentiment de risque perçu à
l’égard de cette offre. Une stratégie de réduction du risque perçu à l’égard des
utilisateurs plus intensifs ne doit donc pas passer par une stratégie de
tangibilisation de l’offre.
CONCLUSION DU CHAPITRE 9
Le chapitre 9 a permis d’étudier la sous-population d’individus possédant un niveau
d’éducation faible.
Pour ces individus, l’intangibilité est perçue de manière unidimensionnelle, sans distinction
d’une dimension mentale et d’une dimension physique de l’intangibilité. Nous avons en outre
pu démontrer qu’au niveau global, l’intangibilité exerce un impact significatif positif sur le
degré de risque perçu par ces individus. Toutefois, les degrés de connaissance et d’utilisation
affectent profondément l’intensité de cette relation, puisqu’en cas de connaissance et/ou
d’utilisation élevée, l’intangibilité n’exerce plus d’impact significatif sur le risque perçu.
Finalement, il n’a pas été possible de mener des analyses plus fines au niveau de chaque
entité, au vu de la faible taille des sous-échantillons. Il n’a, par exemple, pas été possible
d’évaluer l’impact de la connaissance et de l’utilisation sur l’intangibilité et sur le risque
perçu, puisque ces analyses exigent qu’on se positionne au niveau des entités. Ceci constitue
donc une limite de notre recherche, qui ouvre une opportunité de recherche future.
213
214
CHAPITRE 10 : RESULTATS POUR LE GROUPE « NIVEAU D’EDUCATION
MOYEN A ELEVE »
L’analyse de la base de données représentatives sur les trois variables de quotas retenues a
permis de valider le modèle de mesure bidimensionnel de l’intangibilité pour le groupe de
personnes ayant un niveau d’éducation moyen à élevé (diplôme secondaire supérieur, non
universitaire ou universitaire et assimilés).
Le présent chapitre vise à étudier plus en détail ce groupe de personnes, en vue de tester les
hypothèses de recherche principales et complémentaires qui ont été préalablement définies.
Afin de permettre une analyse plus fine des résultats, nous avons décidé de ne plus travailler
sur la base de données initialement encodée dans le respect des quotas, mais bien sur la base
de données totale. Pour rappel, notre procédure d’encodage nous a d’abord permis de
construire une base de données de 1320 observations, cet échantillon respectant fidèlement les
différents niveaux de variables de quotas retenues. Par la suite, nous avons encodé dans une
autre base de données l’ensemble des questionnaires collectés, pour obtenir une base de 2590
applications des échelles de mesure. Si nous ne conservons que les observations des
personnes de niveau d’éducation moyen à élevé, nous obtenons une base de données
contenant 1988 observations.
Notons néanmoins que les analyses présentées dans ce chapitre, et réalisées sur cette nouvelle
base de données, ont également été menées sur la base de données initiale, représentative de la
population sur les quotas retenus22. Les résultats sont identiques en tout point.
22
Ces analyses portent sur le test du modèle de mesure de l’intangibilité, sur la relation entre l’intangibilité et le
risque perçu, et sur l’influence de la connaissance et de l’utilisation sur cette relation (hypothèses principales et
premier corps d’hypothèses complémentaires). Notons toutefois qu’en raison de la taille de cet échantillon initial
restreint aux individus de niveau d’éducation moyen à élevé, il n’est pas possible de réaliser les analyses au
niveau de chaque entité séparément (deuxième et troisième corps d’hypothèses complémentaires). C’est la raison
pour laquelle nous utilisons la nouvelle base de données de 1988 observations, où nous pouvons alors réaliser
des analyses plus fines.
215
Cet échantillon se répartit comme suit sur les niveaux des variables de genre et d’éducation
(l’âge n’est plus retenu, car il est fortement associé – en tout cas pour deux niveaux – avec le
niveau d’éducation).
Tableau 10.1 : Description de l’échantillon global
Quotas théoriques de la
Quotas effectifs de
population
l’échantillon
Hommes
49, 39%
52,4%
Femmes
50,61%
47,6%
Secondaire supérieur
56,13%
37,1%
Non universitaire type court
22,57%
26,2%
Universitaires et assimilés
21,30%
36,7%
Genre
Niveau d’éducation
Les écarts entre les quotas théoriques et les quotas observés étant importants, il a été décidé en concertation avec nos directeurs de thèse - de pondérer l’échantillon à l’aide d’un poids
dont le calcul est expliqué ci-dessous, afin qu’il présente des caractéristiques plus proches de
notre population sur les variables de genre et de niveau d’éducation.
La procédure de pondération a uniquement porté sur la variable de niveau d’éducation. Les
poids ont été calculés sur base de la formule suivante :
Poidsniveau d’éducation =
Proportion du niveau dans la population
Proportion du niveau dans l’échantillon
Sur base de cette formule, nous obtenons les poids suivants :
Secondaire supérieur
1,526
Non universitaire type court
0,851
Universitaires et assimilés
0,574
216
L’échantillon est ensuite pondéré à l’aide de ces poids sur SPSS d’abord, et sur Lisrel ensuite.
L’échantillon redressé présente alors les caractéristiques suivantes :
Tableau 10.2 : Description de l’échantillon redressé
Quotas théoriques de la
Quotas effectifs de
population
l’échantillon
Hommes
49, 39%
51,2 %
Femmes
50,61%
48,8 %
Genre
Test de Chi-deux
²observé sur échantillon redressé = 2,68 < ²théorique = 3,84
Niveau d’éducation
Secondaire supérieur
56,13%
56,8%
Non universitaire type court
22,57%
22,2%
Universitaires et assimilés
21,30%
21,0%
La procédure de redressement de l’échantillon ne portant que sur la variable de niveau
d’éducation, nous validons à l’aide du test de différence de Chi-deux l’absence de différence
significative entre les proportions d’hommes et de femmes issues de la population et de
l’échantillon. Il est inutile de réaliser ce test pour la variable de niveau d’éducation, puisque la
procédure de redressement de l’échantillon est réalisée de telle manière que l’échantillon
redressé respecte les proportions de la population en termes de niveau d’éducation.
Finalement, l’absence de non-normalité des données est vérifiée à l’aide des indices de
Skewness et de Kurtosis, selon le prescrit déjà présenté de Roussel et al. (2002). Nous
pouvons dès lors utiliser les tests statistiques paramétriques.
217
1.
TEST DU CORPS D’HYPOTHESES PRINCIPALES DE RECHERCHE
1.1.Nouvelle validation du modèle bidimensionnel de l’intangibilité
Cette base de données élargie est une nouvelle occasion de tester la structure
bidimensionnelle de l’intangibilité. Une analyse factorielle exploratoire est réalisée à l’aide de
SPSS sur l’ensemble des données, ainsi que sur chaque service et chaque marque considérés
séparément. A chaque fois, la structure à deux facteurs est confirmée. Les résultats sur
l’ensemble des données sont présentés dans le tableau ci-dessous :
Tableau 10.3 : Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
Facteur
Mentale
M2
,885
M3
,906
M5
,916
M7
,921
Physique
P1
,907
P4
,923
P6
,911
Valeur propre
4,507
1,626
Variance expliquée
64,38 %
23,23 %
Alpha de Cronbach
0,95
0,94
Deux facteurs sont identifiés, l’un présentant la dimension mentale de l’intangibilité, et l’autre
la dimension physique. Ces deux facteurs permettent d’expliquer 87,61% de variance.
Une nouvelle analyse factorielle confirmatoire est réalisée sous Lisrel. Cette analyse confirme
la structure bidimensionnelle de l’intangibilité sur un modèle à 5 indicateurs, trois indicateurs
pour la dimension mentale de l’intangibilité, et deux pour la dimension physique. Pour
satisfaire aux conditions de parcimonie ( ² normé), nous avons enlevé les items M7 et P4.
Comme le souligne Roussel et al. (2002), en cas de sur-spécification du modèle, il est
218
nécessaire d’éliminer des indicateurs si cela n’altère pas la capacité de l’instrument à mesurer
le concept tel qu’il a été spécifié, ce qui est le cas ici (les autres indicateurs permettant bien
d’appréhender les deux dimensions de l’intangibilité telles que nous les avons définies).
Les résultats de cette analyse font apparaître une qualité d’ajustement du modèle très
satisfaisante, comme le montrent les tableaux ci-dessous.
Tableau 10.4 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
latentes
Indicateurs
Dimension
Mentale
M2
M3
M5
P1
P6
Dimension
physique
Contributions
Niveau de
factorielles signification du
t de Student
0,93
0,017
0,96
0,017
0,87
0,018
0,92
0,020
0,93
0,020
R²
0,86
0,92
0,76
0,85
0,87
Tableau 10.5 : Indices d'
ajustement du modèle
Indices
Valeurs
Indices
Absolus
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
3,45
AGFI
0,98 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,02
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,40
PGFI
0,27
Critical N 1904,17 > 200
RMR
0,006
RMSEA
0,035 < 0,08
L’examen des Alpha de Cronbach et des Rhô de Joreskog nous permet de conclure à la bonne
fiabilité de l’instrument de mesure. De plus, les trois conditions de validité convergente sont
rencontrées, comme le montre l’examen des résultats présentés ci-dessous.
Tableau 10.6 : indices de fiabilité
MENT
PHYS
Alpha de Cronbach
0,93
0,91
Rhô de Joreskog
0,94
0,92
219
Tableau 10.7 : Evaluation de la validité convergente
Dimension
Nbre de non
Nbre de R² associé
(vc)
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
Mentale
0
0
0,85
Physique
0
0
0,86
Finalement, la condition de validité discriminante est également rencontrée, puisque le carré
de la corrélation entre les deux variables latentes est de 0,28. Cette valeur est bien inférieure
aux deux variances moyennes extraites correspondantes, figurant au tableau ci-dessus ( (vc)).
L’hypothèse H1 relative à la bidimensionnalité du concept d’intangibilité est donc
validée pour la sous-population d’individus possédant un niveau d’éducation moyen à
élevé.
Il est intéressant de noter que la population belge va compter de moins en moins de personnes
de niveau d’éducation faible. Nous assistons en effet, au niveau européen, à une tendance vers
un niveau d’éducation croissant (Kotler, Dubois et Manceau, 2004). L’échantillon de niveau
d’éducation moyen à élevé soumis à analyse dans ce chapitre va donc tendre vers plus de
représentativité au fil des ans.
1.2. Analyse de la relation entre l’intangibilité et le risque perçu global
Cette section vise à tester la seconde hypothèse de cette recherche, à savoir que
l’intangibilité exerce un impact significatif positif (càd dans le même sens) sur le risque
perçu par les individus. Pour rappel, cette hypothèse a été validée pour les personnes ayant
un
niveau
d’éducation
faible
(l’intangibilité
étant
alors
perçue
de
manière
unidimensionnelle).
Pour tester cette hypothèse, nous proposons d’analyser le modèle structurel suivant,
intégrant l’intangibilité comme variable latente de second ordre.
220
Figure 10.1: Modèle structurel à tester
M2
RISK1
MENTALE
M3
RISK2
INTANG
M5
RISK
RISK3
PHYSIQUE
P1
RISK4
P6
Classiquement, nous commençons par observer les charges factorielles des indicateurs de
risque perçu, de même que les coefficients du modèle de mesure et les indices de fiabilité et
de validité convergente. Ces indices témoignent d’une bonne fiabilité et d’une bonne validité
convergente. Notre échelle de mesure du risque perçu global offre donc de bonnes qualités
psychométriques.
Tableau 10.8 : Résultats de l’analyse factorielle exploratoire
RISK1
RISK2
RISK3
RISK4
Facteur
RISK
,871
,936
,943
,944
Valeur propre
Variance expliquée
Alpha de Cronbach
Rhô de Joreskog
3,416
85,39 %
0,95
0,96
221
Tableau 10.9 : Coefficients du modèle de mesure
Variables
Indicateurs
latentes
Contributions
Niveau de
R²
factorielles
signification du
t de Student
RISK
RISK1
0,83
0,018
0,69
RISK2
0,93
0,017
0,86
RISK3
0,97
0,016
0,94
RISK4
0,97
0,016
0,95
Tableau 10.10 : Evaluation de la validité convergente
Variable latente
Nbre de non
Nbre de R² associé
significatif à 0,05
inférieur à 0,5
0
0
RISK
(vc)
0,86
Le modèle structurel peut dès lors être évalué. L’analyse sous Lisrel nous donne les indices
d’ajustement suivants lors de l’étape de validation du modèle structurel :
Tableau 10.11 : Indices d'
ajustement du modèle structurel
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
4,76
AGFI
0,98 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,07
Critical N
791,36 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,52
RMR
0,021
PGFI
0,41
RMSEA
0,043 < 0,08
L’examen de ces indices révèle une qualité d’ajustement satisfaisante du modèle aux
données, ce qui nous autorise à examiner et interpréter les liens structurels entre les
variables.
222
Tableau 10.12 : liens structurels entre les variables
MENTAL
PHYSIQUE
INTANG
Lien structurel
T de Student
0,86
19,98
0,61
17,12
0,37
13,18
INTANG
INTANG
RISK
Ces résultats nous permettent de tirer les conclusions suivantes :
•
L’analyse confirmatoire de second ordre du modèle de mesure de l’intangibilité
confirme la conceptualisation bidimensionnelle de l’intangibilité pour le groupe de
personnes ayant un niveau d’éducation moyen à élevé. Pour ces personnes,
l’intangibilité est un concept composé d’une dimension physique et d’une
dimension mentale distincte, mais toutes deux reliées au concept d’intangibilité.
•
L’intangibilité d’une offre globale de services exerce bien une influence
significative et positive sur le risque perçu global que l’individu perçoit à l’égard
de cette offre. L’hypothèse H2 et donc validée pour l’ensemble de la population,
puisque cette hypothèse est également établie pour le groupe de niveau
d’éducation faible.
Il est maintenant intéressant d’évaluer l’influence respective de chaque dimension de
l’intangibilité sur le risque perçu global.
1.3. Analyse de la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu
global
Cette section a pour objectif de tester les deux sous-hypothèses de recherche suivantes :
H2a :
La dimension mentale de l’intangibilité exerce un impact significatif positif sur le
risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre.
H2b :
La dimension physique de l’intangibilité physique d’une offre globale de services
exerce un impact significatif positif sur le risque perçu par l’individu à l’égard de cette
offre.
223
En vue de tester ces deux hypothèses de recherche, nous analysons le modèle structurel
suivant :
Figure 10.2 : Modèle structurel à tester
M2
RISK1
MENTALE
M3
RISK2
RISK
M5
RISK3
PHYSIQUE
P1
RISK4
P6
Tout comme lors de la troisième étude exploratoire, la suppression de la variable latente de
second ordre n’altère pas les indices d’ajustement du modèle, comme observé ci-dessous.
Ceci nous autorise donc à interpréter les liens structurels entre nos variables d’intérêt.
Tableau 10.13 : Indices d'
ajustement du modèle structurel
Indices
Valeurs
Absolus
Indices
Valeurs
incrémentaux
Indices de
Valeurs
parcimonie
GFI
0,99 > 0,9
NFI
0,99 > 0,9
² normé
4,76
AGFI
0,98 > 0,9
IFI
0,99 > 0,9
ECVI
0,07
Critical N
791,36 > 200
CFI
0,99 > 0,9
PNFI
0,52
RMR
0,021
PGFI
0,41
RMSEA
0,043 < 0,08
Tableau 10.14 : Relation entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu global
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,28
10,16
0,08
2,95
224
Les résultats montrent qu’au niveau global, les deux dimensions de l’intangibilité
exercent un impact significatif sur le risque perçu par le client. Les hypothèses H2a et
H2b sont donc bien validées.
Il faut noter qu’au niveau de l’échantillon global, la dimension mentale de l’intangibilité
influence plus fortement le risque perçu que la dimension physique. Ce résultat n’est toutefois
pas concluant en soi, puisque les études exploratoires suggèrent que le degré de connaissance
ou le degré d’utilisation influencent de façon importante l’intensité des relations entre
l’intangibilité physique/mentale et le risque perçu global. Observons donc à présent
l’influence des variables de connaissance et d’utilisation sur les résultats.
2. TEST
DU PREMIER CORPS D’HYPOTHESES COMPLEMENTAIRES
:
L’IMPACT DE LA
CONNAISSANCE ET DE L’UTILISATION SUR LA RELATION ENTRE LES DEUX DIMENSIONS
DE L’INTANGIBILITE ET LE RISQUE PERÇU
2.1. Impact de la connaissance sur la relation entre les deux dimensions de
l’intangibilité et le risque perçu global
Pour rappel, les deux hypothèses à tester sont les suivantes :
H3 : Lorsque les individus possèdent un niveau de connaissance faible de l’entité analysée,
les deux dimensions de l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque perçu.
H4 : Lorsque les individus possèdent un niveau de connaissance élevé de l’entité analysée,
seule la dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence significative sur le
risque perçu global. La dimension physique n’exerce plus, quant à elle, d’influence
significative sur le risque perçu global.
Comme précédemment, nous distinguons dans cette analyse deux niveaux de connaissance
différents : le niveau de connaissance faible (1363 observations) et le niveau de connaissance
élevé (607 observations).
La première démarche d’analyse consiste à vérifier la stabilité du modèle de mesure de
l’intangibilité et du modèle structurel pour ces deux niveaux de connaissance.
225
Le modèle de mesure bidimensionnel de l’intangibilité est bien ajusté aux deux niveaux de
connaissance, comme le témoignent les indices d’ajustement présentés dans le tableau cidessous.
Tableau 10.15 : Ajustement du modèle de mesure de l’intangibilité entre les niveaux de
connaissance
Items
Connaissance
Indices d’ajustement
m2,m3,m5,p1,p6
² normé= 2,17 ; RMSEA=0,029 ; GFI =0,99 ; AGFI
faible
=0,99 ; RMR =0,005 ; Critical N = 2350,72
Connaissance
m2,m3,m5,m7,p1,p6
élevée
² normé= 4,41 ; RMSEA=0,075 ; GFI =0,98 ; AGFI
=0,95 ; RMR =0,019 ; Critical N = 351,742
De plus, les indices d’ajustement des modèles structurels sont eux aussi satisfaisants pour ces
deux niveaux d’analyse. Notons finalement que les conditions de fiabilité et de validité ont été
vérifiées pour les deux niveaux d’analyse.
Tableau 10.16 : Indices d’ajustement du modèle structurel
Indices d’ajustement
Connaissance
faible
² normé= 4,66 ; RMSEA=0,052 ; GFI =0,98 ; AGFI =0,97 ; RMR =0,03 ;
Critical N = 540,58
Connaissance
élevée
² normé= 4,61 ; RMSEA=0,077 ; GFI =0,96 ; AGFI =0,92 ; RMR =0,02 ;
Critical N = 209,36
Les modèles étant validés, observons à présent les liens structurels entre l’intangibilité
physique et mentale et le risque perçu global.
Tableau 10.17 : Relation entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu global
CN FAIBLE
MENTAL
RISK
PHYSIQUE
RISK
CN ELEVEE
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,16
4,57
0,15
4,28
Contributions factorielles
T de Student
0,45
10,30
0,02 (ns)
0,49
226
Ces résultats nous permettent de valider les hypothèses H3 et H4 (pour rappel, ces
hypothèses sont uniquement validées pour les personnes ayant un niveau d’éducation
moyen à élevé) :
•
En cas de connaissance faible de l’entité analysée, les deux dimensions de
l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque perçu. Notons que
l’intensité des liens structurels entre l’intangibilité mentale et le risque perçu, et
entre l’intangibilité physique et le risque perçu sont quasiment identiques.
•
En cas de connaissance élevée de l’entité, les résultats sont profondément modifiés,
puisque seule la dimension mentale de l’intangibilité influence significativement et
positivement le risque perçu. Le manque de matérialité n’a plus, quant à lui,
d’incidence sur la perception de risque perçu.
2.2. Impact de l’utilisation sur la relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et
le risque perçu global
Les hypothèses à tester relatives à l’impact de l’utilisation sur la relation entre les deux
dimensions de l’intangibilité et le risque perçu sont les suivantes :
H5 : Lorsque les individus n’utilisent pas ou peu l’entité analysée, les deux dimensions de
l’intangibilité exercent un impact significatif sur le risque perçu.
H6 : Lorsque les individus utilisent de façon plus intensive l’entité analysée, seule la
dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence significative sur le risque
perçu global. La dimension physique n’exerce plus, quant à elle, d’influence
significative sur le risque perçu global.
A nouveau, nous distinguons, dans cette analyse, deux niveaux d’utilisation différents : le
niveau faible d’utilisation (1460 observations) et le niveau élevé d’utilisation (495
observations).
La première démarche d’analyse de l’influence de l’utilisation sur la relation entre
l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu consiste à valider les modèles de mesure
227
et les modèles structurels pour les deux niveaux d’utilisation. Les résultats montrent que les
modèles conservent leur qualité d’ajustement à ces deux niveaux.
Tableau 10.18 : Ajustement du modèle de mesure entre les niveaux d’utilisation
Items
Utilisation
Indices d’ajustement
m2,m3,m5,p1,p6
² normé= 4,63 ; RMSEA=0,050 ; GFI =0,99 ; AGFI
faible
Utilisation
=0,98 ; RMR =0,01 ; Critical N = 1049,095
m2,m3,m5,m7,p1,p6
élevée
² normé= 4,05 ; RMSEA=0,079 ; GFI =0,98 ; AGFI
=0,94 ; RMR =0,019 ; Critical N = 298,076
Tableau 10.19 : Indices d’ajustement du modèle structurel
Indices d’ajustement
Utilisation
faible
Utilisation
élevée
² normé= 4,43 ; RMSEA=0,048 ; GFI =0,98 ; AGFI =0,97 ; RMR =0,02 ;
Critical N = 595,53
² normé= 3,52 ; RMSEA=0,071 ; GFI =0,95 ; AGFI =0,92 ; RMR =0,04 ;
Critical N = 221,44
Les modèles structurels étant bien ajustés, ils peuvent être interprétés. Observons dès lors les
liens structurels entre l’intangibilité physique et le risque perçu, et entre l’intangibilité
mentale et le risque perçu, aux deux niveaux d’utilisation.
Tableau 10.20 : Relation entre l’intangibilité physique et mentale et le risque perçu global
UTIL. FAIBLE
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
UTIL. ELEVEE
MENTAL
PHYSIQUE
RISK
RISK
Contributions factorielles
T de Student
0,22
7,11
0,13
4,25
Contributions factorielles
T de Student
0,27
4,75
0,01 (ns)
0,17
228
Ces résultats nous permettent de valider les hypothèses H5 et H6. En effet, nous pouvons
conclure que :
•
En cas d’utilisation faible de l’entité analysée, les deux dimensions de l’intangibilité
exercent un impact significatif sur le risque perçu global. Les conclusions sont donc
identiques à celles formulées pour le niveau de connaissance faible, à la différence de
l’intensité de la relation de chaque dimension de l’intangibilité sur le risque perçu.
En cas d’utilisation faible, la dimension mentale exerce un impact significatif plus
important sur le risque perçu global que la dimension physique (le niveau
d’influence des deux dimensions de l’intangibilité sur le risque étant quasiment
identique pour le niveau de connaissance faible).
•
En cas d’utilisation élevée, ces résultats sont à nouveau profondément modifiés,
puisque seule la dimension mentale de l’intangibilité exerce encore un impact
significatif positif sur le risque perçu global. Notons néanmoins que cette influence
de l’intangibilité mentale sur le risque perçu est moins forte en cas d’utilisation
élevée (lien structurel = 0,27) qu’en cas de connaissance élevée (lien structurel = 0,45)
3. TEST
DU DEUXIEME CORPS D’HYPOTHESES COMPLEMENTAIRES
:
L’IMPACT DE LA
CONNAISSANCE ET DE L’UTILISATION SUR LES DEUX DIMENSIONS DE L’INTANGIBILITE ET
SUR LE RISQUE PERÇU CONSIDERES ISOLEMENT
3.1. Impact de la connaissance sur l’intangibilité physique et mentale
Les hypothèses à tester à ce stade de l’analyse sont les suivantes :
H7 : Le degré de connaissance influence significativement et négativement le degré
d’intangibilité mentale de manière systématique.
H8 : Le degré de connaissance n’influence pas significativement le degré d’intangibilité
physique de manière systématique.
Afin d’évaluer l’impact de la connaissance sur l’intangibilité physique et mentale, nous
proposons d’examiner les indices de corrélation entre le score moyen de connaissance et le
degré d’intangibilité physique et mentale associé au service ou à la marque analysés. Les
229
indices de corrélation, ainsi que leur niveau de significativité (symbolisé par des étoiles) sont
présentés dans le tableau ci-dessous :
Tableau 10.21 : Indices de corrélation entre la connaissance et les deux dimensions de l’intangibilité
Connaissance – intangibilité Connaissance – intangibilité
mentale
physique
Vol en avion de ligne
-0,244 **
-0,222 **
Vol Ryanair
-0,404 **
-0, 284 **
Vol SNBA
-0,382 **
-0,297 **
Assurance familiale
-0,561 **
-0,364 **
Assurance Ethias
-0,523 **
-0,417 **
Nettoyage à Sec
-0,301 **
-0,243 **
5 à Sec
-0,359 **
-0,273 **
Cours de langue
-0,333 **
-0,230 **
Berlitz
-0,488 **
-0,351 **
E-banking
-0,646 **
-0,444 **
PC Banking Fortis
-0,430 **
-0,484 **
Abonnement GSM
-0,446 **
-0,290 **
Abonnement Proximus
-0,513 **
-0,280 **
Abonnement Base
-0,252 **
-0,282 **
** : significatif au seuil de 1%
Ces résultats nous montrent que, de manière systématique, il y a une relation négative et
significative entre le degré de connaissance et le degré d’intangibilité tant physique que
mentale. Plus un individu connaît un service ou une marque, moins il le perçoit comme
étant intangible sur le plan physique et mental. Ces résultats nous permettent donc de
valider H7, mais d’infirmer H8, puisque l’influence de la connaissance sur l’intangibilité
physique est systématique.
230
3.2. Impact de la connaissance sur le risque perçu
Finalement, la dernière hypothèse à tester impliquant la variable de connaissance est la
suivante :
H9 : Le degré de connaissance n’influence pas significativement le degré de risque perçu
global de manière systématique.
De manière similaire à l’analyse précédente, nous allons examiner les indices de corrélation
entre le score moyen de connaissance et le score moyen de risque perçu.
Tableau 10.22 : Indices de corrélation entre la connaissance et le risque perçu
Connaissance - risque perçu
Vol en avion de ligne
-0,182 *
Vol Ryanair
-0,141 *
Vol SNBA
-0,128
Assurance familiale
-0,062
Assurance Ethias
-0,324 **
Nettoyage à Sec
-0,163 *
5 à Sec
0,017
Cours de langue
-0,140
Berlitz
-0,215 **
E-banking
-0,521 **
PC Banking Fortis
-0,138
Abonnement GSM
-0,275 **
Abonnement Proximus
-0,212 **
Abonnement Base
-0,168 *
** : significatif au seuil de 1%
* : significatif au seuil de 5%
231
Ces résultats nous permettent de valider l’hypothèse H9 : une connaissance accrue ne
s’accompagne pas systématiquement d’une diminution significative du risque perçu
global.
Ce résultat peut paraître surprenant, dans la mesure où une des stratégies de réduction de
risque fréquemment citées dans la littérature est la stratégie de recherche d’information, qui
vise à améliorer le degré de connaissance de l’individu à l’égard d’un service ou d’une
marque. Ce résultat ne nous paraît néanmoins pas être contre-intuitif, même si l’explication
est peut-être à chercher dans des cas limites.
Il semble raisonnable de penser que la connaissance diminue le niveau d’incertitude
subjective de l’individu à l’égard de certaines conséquences possibles d’un acte d’achat. Mais,
si le niveau de certitude associé à l’occurrence d’une conséquence négative augmente, le
risque perçu global est exacerbé. Autrement dit, la recherche d’information peut conduire à
une réduction de risque, si l’information est de nature à rassurer. Mais elle peut tout aussi bien
exacerber le risque perçu, si elle donne une image négative du service ou de la marque. Une
illustration de ce phénomène pourrait être le bouche-à-oreille. Etant une source d’information,
le bouche-à-oreille permet d’améliorer le degré de connaissance de l’individu à l’égard d’un
service ou d’une marque (dans la mesure où la source est jugée fiable). Elle permet également
de mieux appréhender le risque perçu. Ainsi, un ami digne de confiance peut vous parler d’un
restaurant en des termes élogieux. Ce faisant, il améliore votre connaissance du restaurant, et
il réduit votre incertitude à l’égard de conséquences potentiellement négatives (vous savez,
par exemple, que le repas est bon, que le rapport qualité-prix est satisfaisant, ou encore que le
service à table est courtois et agréable). Mais, si cet ami vous fait part de sa mauvaise
expérience (le repas n’était pas à la hauteur de ses attentes, le service est exécrable, les prix
sont exagérés, …), votre gain de connaissance s’accompagne d’un accroissement du
sentiment général de risque perçu à l’égard de ce restaurant.
Il est toutefois intéressant d’analyser plus en détail les services ou les marques pour lesquels
la corrélation entre la connaissance et le risque perçu n’est pas significative.
•
Le vol SNBA : après examen des observations, nous avons identifié deux répondants qui
connaissent très bien le vol en avion de ligne sur SNBA (score moyen de connaissance
égal à 4 et à 4,67), mais qui y associent un niveau de risque perçu important (score moyen
232
de risque = 4 et 4,76). Il est intéressant de noter que ces deux personnes ayant déjà volé
sur SNBA ont une mauvaise image de cette compagnie (score moyen de valence de
l’image de marque = 1 et 1,34). Ces individus pourraient, par exemple, avoir été
confrontés à une ou plusieurs mauvaises expériences de service lors d’un vol opéré par
SNBA, ce qui leur a fait perdre confiance dans cette compagnie, et ce qui a dès lors
augmenté leur sentiment de risque perçu. Lorsque nous recalculons le score de corrélation
entre la connaissance et le risque perçu en éliminant ces deux observations, la corrélation
devient significative, et s’élève à –0,210**.
•
L’assurance familiale : une personne interrogée dit très bien connaître l’assurance
familiale (score de connaissance = 5), mais elle y associe un niveau de risque maximal
(score de risque = 5). En supprimant cette seule observation de l’analyse, l’indice de
corrélation entre la connaissance et le risque perçu devient significatif et s’élève à -0,143*.
•
L’assurance familiale, le service de nettoyage à sec chez 5 à Sec et le cours de langue sont
les trois entités analysées pour lesquelles la proportion d’individus associant un très faible
niveau de risque (score moyen < 1,5) est la plus élevée (soit 41,5% pour l’assurance
familiale, 40,8% pour 5 à Sec et 41,4% pour le cours de langue). Une large proportion
d’individus considèrent donc que cette marque et ces services sont intrinsèquement peu
risqués. Or, il est raisonnable de penser que l’accroissement de connaissance n’aura que
peu d’incidence sur le niveau de risque perçu lorsque celui-ci est déjà intrinsèquement
bas.
•
Le service d’e-banking Fortis Banque : comme pour l’assurance familiale ou le vol
SNBA, nous avons identifié une observation pour laquelle l’individu possède un niveau
de connaissance maximum de ce service marqué, mais où il y associe un niveau de risque
maximum. Par ailleurs, cette personne juge très mal ce service marqué (score moyen de
valence de l’image de marque = 1). Lorsque nous enlevons cette observation de l’analyse,
la corrélation entre la connaissance et le risque perçu devient significative (-0,168*).
Il est également intéressant d’observer la situation du service d’e-banking non marqué, qui
présente l’indice de corrélation entre la connaissance et le risque perçu le plus élevé. Lorsque
nous observons la répartition des niveaux de risque selon les niveaux de connaissance, nous
constatons que 69,2% des personnes ayant un degré de connaissance minimum du service
(moyenne de connaissance = 1) y associent un score de risque supérieur à 3 (et 41,1% y
associent un score de risque supérieur à 4). Pour une large majorité de personnes ayant une
faible connaissance de l’e-banking, ce service semble donc être perçu comme intrinsèquement
233
fort risqué. Par contre, pour 92,3% des personnes ayant une connaissance maximale de ce
service, l’e-banking présente un niveau de risque maximum de 2,75. Pour ce service en
particulier, un gain de connaissance s’accompagne donc d’une diminution significative du
risque perçu.
Ces analyses nous permettent de proposer plusieurs facteurs explicatifs à l’absence
d’influence systématique de la connaissance sur le risque perçu. Tout d’abord, des personnes
qui connaissent très bien un service ou une marque peuvent y associer un niveau de risque
élevé, si elles ont, par exemple, vécu une mauvaise expérience avec ce service ou avec cette
marque, ou si le gain de connaissance a permis à ces personnes d’identifier avec plus de
certitude des conséquences négatives, qu’elles n’appréhendaient pas aussi clairement
auparavant (en cas de bouche à oreille négatif par exemple). Notons que ces cas peuvent
constituer des situations limites, non représentatives de la perception de tous les individus à
l’égard du risque. Ainsi, une seule observation pour le service d’e-banking de Fortis Banque
et pour l’assurance familiale, et deux observations seulement pour le vol SNBA, permettent
d’expliquer pourquoi la corrélation entre la connaissance et le risque perçu n’est pas
significative. Il est donc pertinent, pour ce service ou ces marques, de conclure que, de
manière générale, toute action ou stratégie visant à accroître le degré de connaissance des
individus au moyen d’informations rassurantes est susceptible de réduire le niveau de risque
perçu des individus.
Un autre facteur explicatif pourrait être que, pour des services ou des marques jugés par une
large proportion d’individus comme étant intrinsèquement peu risqués, le niveau de risque est
peu susceptible de diminuer suite à un gain de connaissance. Dans certains cas limites, le
risque perçu pourrait même augmenter en cas de meilleure connaissance d’un service ou
d’une marque (si le gain de connaissance se base sur des informations peu rassurantes). De
manière plus générale, nous pouvons donc proposer que, plus un service ou une marque est
perçu comme intrinsèquement peu risqué par une large proportions d’individus appartenant à
sa cible marketing, plus il est inefficace et inutilement coûteux de vouloir mettre en place des
stratégies de réduction de risque, puisque celui-ci est déjà très bas. Au contraire, plus un
service ou une marque est perçu comme intrinsèquement risqué par les personnes qui en ont
une connaissance réduite (et plus cette proportion de personnes est élevée au sein de sa cible),
plus une stratégie de réduction de risque basée sur le développement des connaissances à
l’égard du service ou de la marque pourrait être justifiée et efficace.
234
3.3. Impact de l’utilisation sur l’intangibilité physique et mentale
Pour rappel, les hypothèses à tester à ce niveau d’analyse sont les suivantes :
H10 : Le degré d’utilisation influence négativement et significativement le degré
d’intangibilité mentale de manière systématique.
H11 : Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le degré d’intangibilité physique
de manière systématique.
Tout comme pour l’évaluation de l’impact de la connaissance sur les deux dimensions de
l’intangibilité, nous proposons d’examiner les indices de corrélation entre le score moyen
d’utilisation et les scores d’intangibilité physique et mentale, pour chaque entité étudiée
séparément.
Tableau 10.23 : Indices de corrélation entre l’utilisation et les deux dimensions de l’intangibilité
Utilisation – intangibilité
Utilisation – intangibilité
mentale
physique
Vol en avion de ligne
-0,209 **
-0,162 **
Vol Ryanair
-0,273 **
-0, 280 **
Vol SNBA
-0,349 **
-0,392 **
Assurance familiale
-0,340 **
-0,353 **
Assurance Ethias
-0,348 **
-0,302 **
Nettoyage à Sec
-0,208 **
-0,159 *
5 à Sec
-0,233 **
-0,270 **
Cours de langue
-0,286 **
-0,171 *
Berlitz
-0,290 **
-0,197 **
E-banking
-0,651 **
-0,488 **
PC Banking Fortis
-0,620 **
-0,543 **
Abonnement GSM
-0,332 **
-0,201 **
Abonnement Proximus
-0,448 **
-0,278 **
Abonnement Base
-0,255 **
-0,291 **
** : significatif au seuil de 1%
* : significatif au seuil de 5%
235
Ces résultats nous permettent de conclure à l’influence significative et systématiquement
négative de l’utilisation sur l’intangibilité physique et mentale. L’hypothèse H10 est dès
lors validée, et l’hypothèse H11 est infirmée, puisque l’influence de l’utilisation sur
l’intangibilité physique est systématique. L’utilisation permet donc de tangibiliser le
service ou la marque tant mentalement que physiquement.
3.4. Impact de l’utilisation sur le risque perçu global
La dernière hypothèse à tester impliquant la variable d’utilisation est la suivante :
H12 : Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le degré de risque perçu global
associé à un service ou à une marque de manière systématique.
A nouveau, observons les indices de corrélation entre le score moyen d’utilisation et le risque
perçu associé au service ou à la marque :
Tableau 10.24 : Indices de corrélation entre l’utilisation et le risque perçu
Utilisation - risque perçu
Vol en avion de ligne
-0,208 **
Vol Ryanair
-0,057
Vol SNBA
-0,048
Assurance familiale
-0,163 *
Assurance Ethias
-0,229 **
Nettoyage à Sec
-0,169 *
5 à Sec
0,043
Cours de langue
-0,045
Berlitz
-0,093 *
E-banking
-0,548 **
PC Banking Fortis
-0,258 **
Abonnement GSM
-0,356 **
Abonnement Proximus
-0,282 **
Abonnement Base
-0,122
** : significatif au seuil de 1%
236
* : significatif au seuil de 5%
Ces résultats nous permettent de valider l’hypothèse H12 : le degré d’utilisation
n’influence pas de manière systématique le degré de risque associé à un service ou à une
marque.
Ce résultat peut paraître surprenant, mais il peut s’expliquer. L’utilisation peut permettre
d’élargir dans la perception des individus l’étendue du risque perçu, en faisant prendre
conscience de certaines conséquences négatives auxquelles l’individu n’avait initialement pas
pensé. Si nous prenons l’exemple d’un service de nettoyage à sec, un individu non-utilisateur
pourrait percevoir un risque relativement faible à utiliser le service. Puis, au fur et à mesure
du développement de son expérience client à travers une utilisation du service, il peut
constater que, parfois, le nettoyage à sec est peu efficace pour certains types de taches. De
plus, il peut être confronté à la perte d’un vêtement par la chaîne de nettoyage. Or, il n’avait
pas imaginé cette conséquence négative potentielle au départ.
Il est donc possible et intuitif que dans certaines situations, l’augmentation de l’expérience à
travers l’utilisation s’accompagne d’un accroissement de risque perçu à l’égard d’un service
ou d’une marque, si cette expérience est négative ou si elle conduit à identifier de nouvelles
sources de risque. De plus, généralement, l’intensification de l’utilisation d’un service
s’accompagne d’un niveau d’exigence plus grand à l’égard du prestataire de services. Les
attentes étant plus élevées, le risque de décevoir est plus grand, ce qui peut également
contribuer à exacerber le risque perçu.
4. TEST
DU TROISIEME CORPS D’HYPOTHESES COMPLEMENTAIRES
:
L’IMPACT DE LA
MARQUE DE SERVICE SUR LES DEUX DIMENSIONS DE L’INTANGIBILITE ET SUR LE RISQUE
PERÇU
Pour rappel, nous souhaitons tester les trois hypothèses suivantes sur le rôle possible de la
marque forte comme levier de tangibilisation physique et mentale, et sur la marque forte
comme réducteur de risque perçu.
H13 : Une marque de service forte possède un score d’intangibilité physique significativement
plus faible que le score d’intangibilité physique du service lié mais non marqué.
H14 : Une marque de service forte possède un score d’intangibilité mentale significativement
plus faible que le score d’intangibilité mentale du service lié mais non marqué
237
H15 : Une marque de service forte est perçue comme étant moins risquée que le service lié
mais non marqué.
Pour tester ces hypothèses, nous avons mis en place la procédure d’analyse suivante : nous
identifions, parmi les observations portant sur la marque, celles qui rencontrent les deux
conditions suivantes :
•
Le degré de connaissance de l’individu à l’égard de la marque est élevé (score de
connaissance supérieur ou égal à 3)
•
La valence de l’image de marque est positive (score d’image de marque supérieur ou égal
à 4)
Ces deux conditions nous permettent de retenir 156 observations, c’est-à-dire que, pour ces
observations, les personnes interrogées jugent la marque analysée comme étant forte (connue
et bénéficiant d’une image positive).
Nous avons ensuite créé une base de données dans laquelle nous avons placé sur une même
ligne - pour chacune de ces 156 observations - le degré d’intangibilité physique et mentale et
le niveau de risque perçu associé à la marque, et le degré d’intangibilité physique, mentale et
le risque perçu associé au service lié mais non marqué (l’évaluation de la marque et du service
étant, bien sûr, réalisée par la même personne). Ceci nous permet de réaliser un test de
différence de moyennes sur des échantillons appariés.
Les résultats du test de différence de moyennes sont les suivants :
Paired Samples Statistics
Pair
1
Pair
2
Pair
3
MENT MARQUE
MENT SERVICE
PHYS MARQUE
PHYS SERVICE
RISK MARQUE
RISK SERVICE
Mean
2,5260
2,6201
2,8992
3,0440
1,5977
1,7742
N
156
156
156
156
156
156
Std. Deviation
1,0875
1,2058
1,2535
1,2500
,7692
,8483
238
Std. Error
Mean
8,707E-02
9,654E-02
,1004
,1001
6,159E-02
6,792E-02
Paired Samples Test
Paired Differences
Pair 1
Pair 2
Pair 3
Mean
MENT MARQUE- MENT SERVICE -9,E-02
PHYS MARQUE - PHYS SERVICE -,1448
RISK MARQUE - RISK SERVICE
-,1765
Std.
Deviation
,8684
,8826
,6298
Std. Error
Mean
6,953E-02
7,066E-02
5,043E-02
Sig.
(2-tailed)
,178
,042
,001
Ces résultats montrent que le score d’intangibilité physique de la marque perçue par le
répondant comme étant forte est significativement plus faible que le score d’intangibilité
physique associé par ce même répondant au service lié mais non marqué. De même, le degré
de risque perçu associé à la marque forte par l’individu est significativement plus faible que le
degré de risque associé par ce même individu au service lié mais non marqué. Nous pouvons
donc conclure à ce stade que la marque forte – c’est-à-dire la marque connue et positivement
perçue – constitue un levier de tangibilisation physique du service, de même que la marque
forte est un réducteur de risque perçu. Les hypothèses H13 et H15 sont donc validées.
Les résultats ne permettent pas, par contre, de valider l’hypothèse H14 : la différence entre le
score d’intangibilité mentale de la marque et le score d’intangibilité mentale du service lié
mais non marqué va certes dans le bon sens, mais elle n’est pas significative au seuil de 5%.
Le rôle de la marque forte comme levier de tangibilisation mentale ne peut donc pas être
démontré. Il nous faut toutefois souligner une limite à ce résultat, lié à notre méthodologie. Il
y a peut-être un effet de halo dans notre procédure de test. Les personnes qui sont amenées à
évaluer le degré d’intangibilité du service se projettent déjà peut-être dans une marque
particulière. Si on demande à un individu d’évaluer le degré d’intangibilité d’un vol en avion
de ligne, et qu’il connaît particulièrement bien SNBA pour y voyager très souvent, il est
possible qu’il projette dans sa réponse pour le vol en avion de ligne la marque SNBA. Le
phénomène se fait probablement moins ressentir pour l’évaluation du risque perçu, car
l’individu pourrait alors se dire qu’il y a un écart de risque perçu entre différentes compagnies
aériennes (il y a de bonnes et de mauvaises compagnies), et dès lors, le risque perçu associé à
un vol en avion de ligne serait davantage déconnecté d’une marque en particulier, pour
239
éventuellement intégrer cette perception de variabilité plus grande du risque perçu entre
différentes compagnies aériennes.
Cet effet de halo est probablement plus présent pour l’évaluation du degré d’intangibilité. Il
faut alors se demander pourquoi l’impact de la marque forte sur le processus de tangibilisation
a pu être démontré pour la dimension physique de l’intangibilité, mais pas pour la dimension
mentale. Une explication pourrait être que la marque perçue comme forte va
systématiquement agir en faveur de la tangibilisation physique des services, parce que la
marque est un véhicule d’éléments immatériels, mais aussi matériels (logo, couleur,
environnement physique, …). En revanche, elle pourrait ne pas agir de manière systématique
sur le processus de tangibilisation mentale. Certaines marques perçues comme fortes
pourraient tangibiliser mentalement le service, parce qu’elles véhiculent du sens, et qu’elles
apportent de la signification au service ou à ses bénéfices. D’autres marques pourraient par
contre être perçues comme étant fortes parce qu’appréciées et connues, sans pour autant
permettre de rendre le service plus clair à comprendre, n’apportant pas d’éclairage particulier
sur le fonctionnement du service ou sur l’ensemble de ses bénéfices.
CONCLUSION DU CHAPITRE 10
Le chapitre 10 nous a permis de présenter les procédures mises en place pour tester
l’ensemble des hypothèses de recherche. Ces procédures ont été conduites sur l’échantillon de
personnes possédant un niveau d’éducation moyen à élevé. Dès lors, les hypothèses de
recherche sont validées ou infirmées pour cette seule partie de la population.
Les résultats des analyses ont montré que, pour ce groupe de personnes :
•
L’intangibilité est un concept bidimensionnel, constitué d’une dimension physique et
d’une dimension mentale.
•
L’intangibilité, constituée de ses deux dimensions, exerce au niveau global un impact
significatif sur le risque perçu par les individus. De manière plus précise, les deux
dimensions de l’intangibilité exercent un impact positif significatif sur le risque perçu.
•
Le degré de connaissance et le degré d’utilisation affectent profondément l’intensité de la
relation entre les deux dimensions de l’intangibilité et le risque perçu global. En cas de
connaissance ou d’utilisation faible, les deux dimensions de l’intangibilité exercent un
impact significatif sur le risque perçu global. En cas de connaissance ou d’utilisation
240
élevée par contre, seule la dimension mentale de l’intangibilité influence significativement
le risque perçu. Le manque de matérialité n’a plus, quant à lui, d’influence significative
sur le risque perçu.
•
Le degré de connaissance et le degré d’utilisation influencent significativement et
négativement le degré d’intangibilité physique et mentale associé à un service ou à une
marque. Plus un individu connaît ou utilise une marque, moins il la perçoit comme étant
intangible selon les deux dimensions de l’intangibilité.
•
Le degré de connaissance et le degré d’utilisation n’influencent pas de manière
systématique le risque perçu par les individus à l’égard d’un service ou d’une marque.
•
La marque de service forte est perçue comme étant significativement moins risquée que le
service associé mais non marqué.
•
La marque de service forte tangibilise le service sur sa dimension physique. Une marque
forte est en effet perçue comme physiquement moins intangible que le service lié mais
non marqué.
•
Finalement, nous n’avons pas pu valider le rôle de la marque forte sur le processus de
tangibilisation mentale des services.
241
242
CHAPITRE 11 : RESULTATS COMPLEMENTAIRES
L’objectif du chapitre 11 consiste à présenter des résultats complémentaires à ceux exposés
préalablement, en vue d’enrichir les possibilités de discussion et d’interprétation liées à cette
recherche. Comme précédemment, ces résultats sont exposés de manière relativement brute et
descriptive, et feront l’objet d’une discussion plus approfondie dans la quatrième et dernière
partie de ce document.
1.
LES CONTINUUMS D’INTANGIBILITE
Les résultats relatifs à la perception de l’intangibilité montrent que le niveau d’éducation
affecte la manière dont l’intangibilité est perçue par les individus. Si les personnes de niveau
d’éducation moyen à élevé distinguent deux dimensions dans le concept - la dimension
physique et la dimension mentale -, les personnes de faible niveau d’éducation perçoivent
l’intangibilité de manière unidimensionnelle. Il est donc nécessaire de séparer ces deux
segments de marché dans la présentation des continuums d’intangibilité.
1.1. Le continuum d’intangibilité pour les personnes de faible niveau d’éducation
La présentation du continuum d’intangibilité pour le groupe d’individus possédant un faible
niveau d’éducation est d’abord l’occasion de souligner une limite de cette recherche. Si la
taille globale de l’échantillon (602 observations) est satisfaisante pour ce niveau d’analyse,
elle l’est beaucoup moins au niveau de chaque entité, et elle est insatisfaisante si l’on souhaite
discriminer différents niveaux de connaissance et d’utilisation au sein de ces entités, comme
le montrent les tableaux ci-dessous.
243
Tableau 11.1 : Taille des sous-échantillons
Nombre
d’observations pour le
niveau d’éducation
faible
Vol en avion de ligne
Taille
« connaissance
faible »
Taille
« connaissance
élevée »
42 (85,7%)
7 (14,3%)
Assurance familiale
28 (66,6%)
14 (33,4%)
Nettoyage à Sec
31 (70,45%)
13 (29,55%)
Cours de langue
20 (51,30%)
19 (48,70%)
E-banking
27 (69,23%)
12 (30,77%)
Abonnement GSM
32 (72,73%)
12 (27,27%)
Taille
« utilisation
faible »
Taille
« utilisation
élevée »
35 (71,43%)
14 (28,57%)
Assurance familiale
29 (69,05%)
13 (30,95%)
Nettoyage à Sec
14 (31,82%)
30 (68,18%)
Cours de langue
34 (87,18%)
5 (12,82%)
E-banking
27 (69,23%)
12 (30,77%)
Abonnement GSM
34 (77,27%)
10 (22,73%)
Nombre
d’observations pour le
niveau d’éducation
faible
Vol en avion de ligne
Les possibilités d’analyse sur ce groupe de personnes sont freinées par cette limite, et une
nouvelle étude, plus large, serait nécessaire pour étoffer et préciser les conclusions propres
aux individus de faible niveau d’éducation. Nous allons ici limiter la présentation du
continuum d’intangibilité de ce segment de personnes au niveau global, pour les services.
Mais même ces résultats généraux doivent être vus comme illustratifs plutôt que réellement
conclusifs.
Le modèle de mesure unidimensionnel de l’intangibilité nous permet de calculer un score
moyen d’intangibilité par entité. Ce score moyen est classiquement calculé à l’aide d’une
somme pondérée des charges factorielles des indicateurs validés lors de l’analyse factorielle
confirmatoire (soit p1, m2, m3, p4, m5 et m7).
244
Observons le continuum d’intangibilité pour les six services analysés dans l’étude :
Figure 11.1 : continuum d’intangibilité pour le niveau d’éducation faible
Degré d'intangibilité
7
6
5
4
3
2
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b
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V
Eme
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o
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Certains services sont positionnés de manière assez logique sur le continuum d’intangibilité,
alors que d’autres ont des positions plus surprenantes. L’assurance familiale et le cours de
langue, par exemple, sont perçus comme faiblement intangibles, alors que nous pourrions
nous attendre à ce que ces services soient plus fortement intangibles. De manière plus
intuitive par contre, le service d’e-banking est perçu comme étant plus intangible. Une
discussion plus détaillée de ces résultats est menée au chapitre 12 du présent document.
1.2. Les continuums d’intangibilité pour les personnes de niveau d’éducation moyen à
élevé
Les personnes de niveau d’éducation moyen à élevé distinguent, à côté de l’intangibilité
physique, l’intangibilité mentale propre à une offre de services ou à une marque.
Observons les continuums d’intangibilité pour les entités analysées dans le cadre de cette
recherche. L’échelle de mesure bidimensionnelle du degré d’intangibilité d’une offre globale
a été testée sur sept services et deux produits lors des phases exploratoires, et sur six services
lors de la phase conclusive. Nous proposons de présenter ces deux produits et ces treize
services sur un même graphique, pour plus de clarté. Il est néanmoins important de bien
245
distinguer les entités évaluées lors de la phase exploratoire (en clair) des entités évaluées lors
de la phase conclusive (en foncé). Les évaluations des entités réalisées par les étudiants lors
des phases exploratoires ne peuvent en effet pas être considérées comme aussi robustes que
les entités évaluées par un échantillon représentatif de la population sur les quotas retenus. En
effet, les étudiants sont jeunes, et ils peuvent être moins expérimentés (pour l’entretien de la
voiture p.ex.) ou plus expérimentés (pour le jeans p.ex.) dans certains produits ou certains
services que des personnes plus âgées. Or, nous avons vu que la connaissance et l’utilisation
influencent particulièrement le degré d’intangibilité, tant physique que mental. Il faut donc
garder les spécificités des échantillons à l’esprit lorsque nous interprétons les résultats. En
effet, même si, tant au niveau de l’échantillon d’étudiants qu’au niveau de l’échantillon
représentatif sur les quotas retenus, les scores d’intangibilité utilisés dans les graphiques cidessous sont calculés sur des bases de données incorporant différents niveaux de connaissance
et d’utilisation, la proportion des ces différents niveaux sera plus que probablement différente
selon l’échantillon d’étudiants ou selon l’échantillon représentatif. Ceci est de nature à créer
un biais dans l’évaluation de l’intangibilité physique et mentale pour l’échantillon d’étudiants.
Les figure 10.3a et 10.3b présentent les deux produits et les treize services sur les deux
continuums d’intangibilité, où sont distinguées les deux dimensions identifiées.
Figure 11.2a : Le continuum d’intangibilité physique
5
4
3
2
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Degré d'intangibilité physique
6
246
Figure 11.2b : Le continuum d’intangibilité mentale
Degré d'intangibilité mentale
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1
Le premier continuum, relatif à la dimension physique, est fidèle à la proposition de Shostack
(1977), et présente les produits et services du plus tangible au plus intangible sur le plan
matériel. Le second continuum (dimension mentale) classe les produits et services du plus
tangible au moins tangible sur le plan mental, et présente plusieurs différences par rapport au
premier continuum. Ainsi, par exemple, le score d'
intangibilité physique du dîner dans une
pizzeria est nettement supérieur à celui de l'
ordinateur portable. Cependant, l'
ordinateur
portable présente un score d'
intangibilité mentale supérieur à celui du dîner dans la pizzeria, et
légèrement supérieur au score observé pour la consultation chez le médecin. Le dîner dans
une pizzeria est quant à lui proche du jeans au regard de son score observé sur la dimension
mentale. Ces deux continuums feront l’objet d’une discussion plus détaillée dans le chapitre
12 du présent document.
Représentés sur un seul graphe reprenant les deux dimensions de l'
intangibilité (voir figure
11.3), ces produits et services se répartissent entre différents cas de figure possibles, selon le
degré d'
intangibilité de chacune des dimensions (faible, modéré, élevé ou extrême). Il est fort
probable que peu de produits ou services puissent être perçus en moyenne comme
extrêmement intangibles sur les deux dimensions. C'
est la raison pour laquelle la dernière
catégorie de cette représentation est appelée "extrême". Néanmoins, certains services virtuels,
247
délivrés à l’aide d’Internet par exemple, pourraient être perçus comme ayant un score
d'
intangibilité physique élevé, voire extrême, pour des personnes n’ayant aucune familiarité
avec ce média. Par ailleurs, certains clients n'
ayant aucune familiarité avec un produit ou un
service analysé, pourraient y associer un score d'
intangibilité physique ou mentale également
extrême.
Figure 11.3 : Positionnement des 15 entités analysées dans un graphe à deux dimensions
Faible
Modéré
Extrême
Elevé
Extrême
7
Elevé
5
Consultation psy
4
Ab. GSM
Vol avion
3
Ne ttoyage à sec
Ordinateur
portable
2
Modéré
Assurance familiale
Entretien voiture
Assurance annulation
e -banking
Cours langue
Compte épargne
Consultation
médecin
Séjour
hôtel
Faible
Intangibilité mentale
6
Dîner
pizzeria
Jeans
1
1
2
3
4
Intangibilité physique
248
5
6
7
2.
LA NATURE DU RISQUE PERÇU A L’EGARD D’UN SERVICE OU D’UNE MARQUE
Pour rappel, nous avons appréhendé le niveau de risque associé à un service ou à une marque
de manière globale, l’approche globale de la mesure du risque nous paraissant plus
satisfaisante que l’approche compositionnelle. Nous avons néanmoins souhaité qualifier la
nature du risque tel qu’il est perçu par les individus, de manière à en affiner la compréhension
et les possibles recommandations en matière de stratégies de réduction de risque. Face à cet
objectif, les questionnaires finaux ont intégré, pour chaque entité analysée, six questions
destinées à évaluer respectivement le risque financier, le risque fonctionnel, le risque
psychologique, le risque social, le risque temporel et le risque physique.
Nous allons maintenant présenter les résultats de la qualification du risque pour chaque entité
analysée. Pour ce faire, nous allons observer le score moyen de risque perçu global, ainsi que
le score moyen de chacune de ses facettes, pour les différentes entités étudiées. Notons que,
pour les marques de service, nous souhaitons non seulement mieux comprendre la nature du
risque tel qu’il est perçu en moyenne par l’ensemble des personnes interrogées, mais nous
souhaitons également présenter ces résultats pour les personnes qui jugent la marque comme
forte (c’est-à-dire pour les personnes qui connaissent la marque, et qui y associent une image
positive). Comme discuté préalablement, c’est en effet lorsque la marque est perçue comme
forte qu’elle est de nature à réduire le risque perçu.
Tout comme pour le score global de risque, chacune des facettes a été évaluée sur une échelle
sémantique différentielle à 5 points. Notons que les résultats présentés ci-dessous intègrent
l’ensemble des données, c’est-à-dire tant les personnes de niveau d’éducation faible que les
personnes de niveau d’éducation moyen à élevé. Observons donc pour chaque service et pour
la (les) marque(s) correspondante(s) l’intensité des différentes facettes du risque perçu.
249
Le vol en avion de ligne et les vols Ryanair et SNBA
Figure 11.4 : Qualification du risque perçu pour le vol en avion
Vol Ryanair - perçue comme
forte
Vol Ryanair
4
4
3
2,71
2,49
2,43
2,66
3
2,14
2
Vol en avion
1,79
2
1,59
2,00 2,00
1,75
1,38
1
2,29
2
2,09
an
IS
K
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
2,58
2,37
1,25
1
fin
R
3
1,38
R
I
f in SK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
4
1,63
2,06
1,98
Vol SNBA - perçue comme
forte
Vol SNBA
1,41
R
I
fin SK
an
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
1
4
4
3
2,12
2
2,34
2,29
1,98
1,87
1,86
3
2
1,40
1
1,70
1,58 1,57 1,61
1,26
1,35
1,09
R
I
fin SK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
R
I
fin SK
an
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
1
Au niveau global, le risque de voler en avion de ligne est essentiellement lié à un risque
physique (risque d’accident), à un risque fonctionnel (problème de qualité fonctionnelle
durant le vol, qui fait que le vol ne corresponde pas aux attentes du client), et dans une
moindre mesure à un risque temporel (risque de retard ou de perte de temps) et financier.
Il est intéressant de comparer les niveaux de risque associés au vol en avion (non marqué) et
aux deux marques analysées. Globalement, un vol sur SN Brussels Airlines est perçu comme
moins risqué qu’un vol en avion de ligne non marqué. De même, excepté pour la facette
financière du risque perçu, toutes les autres facettes du risque associées à SNBA sont
inférieures à celles du vol en avion de ligne non marqué. Le vol sur Ryanair est par contre
perçu par l’ensemble des personnes interrogées comme étant plus risqué que le vol en avion
250
de ligne non marqué, tant au niveau global que sur chacune des facettes, excepté sur la facette
financière du risque. Toutefois, conformément aux résultats relatifs à l’hypothèse 15, les
personnes qui perçoivent ces marques comme étant fortes y associent un niveau de risque plus
faible que la moyenne des individus. Cela se vérifie aussi bien au niveau du sentiment général
de risque qu’au niveau de chacune des facettes, et cela rappelle le rôle de la marque perçue
comme forte dans le processus de réduction du risque perçu.
L’assurance familiale et l’assurance Ethias
Figure 11.5 : Qualification du risque pour l’assurance familiale
Assurance familiale
4
2,98
3
2,44
3
2,65
2,27
2,01
1,93
1,60
1,51
1
2
1,97
2,14
3
2,03
1,96
1,48
2,09
1,43
IS
K
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
an
R
2
1,45
1,69
1,66
1,54
1,26
1,34
1
fin
an
IS
K
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
1
fin
R
4
R
I
fin SK
an
cie
r
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
4
2
Ass. Ethias - perçue comme
forte
Assurance Ethias
Les facettes de risque les plus fortement associées à une assurance familiale sont le risque
fonctionnel, le risque financier, et, dans une moindre mesure, les risques psychologique et
temporel. Ceci est assez intuitif, et conforme à une idée souvent véhiculée à travers le grand
public, qui soutient que les assureurs sont certes enclins à encaisser rapidement les primes
d’assurance, mais que les procédures de recouvrement des sinistres et de remboursement
peuvent être un vrai parcours du combattant, pouvant parfois prendre plusieurs années en cas
de litige. En outre, l’assurance étant un service qui vend essentiellement de la tranquillité
d’esprit, puisqu’il s’agit de couvrir des risques potentiels, il est assez logique que la facette
psychologique du risque soit relativement importante (elle caractérise le fait de craindre d’être
furieux sur soi-même en cas de mauvais choix, ce qui peut effectivement être le cas si, par
exemple, un sinistre n’est pas remboursé parce que repris dans une clause d’exclusion à
laquelle l’assuré n’a pas prêté attention lors de la signature du contrat).
251
Au niveau global, le score de risque perçu associé à la marque Ethias (1,97) est légèrement
supérieur à celui associé à l’assurance familiale non marquée, mais cette différence n’est pas
significative. Notons que lorsque nous isolons les personnes qui perçoivent la marque Ethias
comme forte, les scores de risque obtenus sont conformes aux énoncés théoriques relatifs à la
marque forte comme réducteur de risque perçu.
Les autres entités
Observons et commentons brièvement les résultats pour les autres entités :
Figure 11.6 : Qualification du risque pour les autres entités
Nettoyage à Sec
5 à Sec
4
4
2,92
3
1,98
2,09
4
3
1,96
2
1,75
1,23
3
2,57
1,98 2,03
1,93
1,29
1,21
1,48
1,10
1,24
1,00
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
a
te l
ph mps
ys
iq
ue
1
Cours de langue
Berlitz - perçue comm e forte
Berlitz
4
1,86
1,56 1,57
1,26
1
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
1
2
1,73
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
2
5 à Sec - perçue com me forte
4
4
3,35
2
2,72
2,85
2,96
3
2,59
3
2,75 2,67
2,46
2,23
2,01
2
1,60
1,71
1,24
1,43
1,14
1
1
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
ph mps
ys
iq
ue
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
1
2
1,48
252
1,14
1,36
1,00
1,14
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
m
ph ps
ys
iq
ue
3
1,00
E-banking
4
3
PC Bkg Fortis - perçue
com m e forte
PC Banking Fortis
4
2,68
2,80
2,94
3
2,69
2,43
2
1,77
1,70
4
2,61
2,83
2,97
3
2,63
2,48
1,94
2
1,76
2
1,79
1,65
1,91
1,96
1,65
1,17
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
m
ph ps
ys
iq
ue
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
ph mps
ys
iq
ue
Proxim us - perçue com m e
forte
Abonnem ent Proxim us
4
4
2,96
3
3
2,25
2,23 2,21
1,92
2
Abonnem ent GSM
1,46
1,40
4
1,43
1,29
1,21 1,29
1,07
2,31
1,92
2
1,27
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
ph mps
ys
iq
ue
1
Abonnem ent Base
1,48
Base - perçue com m e forte
4
3
4
2,89
2,98
2,55
3
2,37
2
2,24
1,56
1
2
1,50
1,78
1,72
1,44
1,67
1,33
1,22 1,22
1
253
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
m
ph ps
ys
iq
ue
2,16
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
p s t.
yc
h
so .
ci
a
te l
m
ph ps
ys
iq
ue
2,52
1,57
1,27
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
m
ph ps
ys
iq
ue
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
ph mps
ys
iq
ue
3,14
2
1
1
3
1,09
1
1
R
fin ISK
an
ci
er
fo
nc
ps t.
yc
h
so .
ci
te al
ph mps
ys
iq
ue
1
•
Le nettoyage à sec va principalement occasionner une perception de risque fonctionnel et
financier (crainte de ne pas récupérer un linge propre, crainte que le vêtement soit abîmé,
et qu’il faille alors le remplacer, …). A nouveau, la marque perçue comme forte joue
pleinement son rôle de réducteur de risque.
•
Les facettes de risque les plus fortement connectées au cours de langue sont les risques
fonctionnel, psychologique, financier et temporel. Il est intéressant de noter que ce service
est celui qui occasionne le niveau le plus élevé de risque psychologique. Etant relié à
l’acquisition de compétences, ce résultat est assez intuitif, car il est légitime de penser que
le risque d’être déçu de soi existe si l’on juge que ses capacités d’apprentissage ne sont
pas des plus performantes. De plus, les résultats d’un cours de langue sont facilement
observables, et peuvent être auto-évalués, puisqu’ils touchent directement à la capacité de
l’individu à mieux s’exprimer dans une langue étrangère. Il est donc à nouveau intuitif de
penser que le risque d’être déçu de soi en cas d’apprentissage lent est grand. Il est par
contre plus surprenant que ce service ne génère pas un plus grand risque social (qui ferait
référence au fait d’être mal jugé par son entourage professionnel, par exemple, en cas de
mauvais apprentissage). Notons également l’écart très important de la structure du risque
perçu de la marque Berlitz au niveau global (tous niveaux de connaissance et de
perception confondus) et au niveau des personnes qui jugent cette marque comme forte.
•
Le risque fonctionnel, le risque financier et le risque temporel sont plus particulièrement
associés au service d’e-banking. Si les deux premières facettes de risque ne sont pas
surprenantes, la troisième l’est davantage, dans la mesure où la possibilité de gérer ses
opérations bancaires depuis son PC constitue un gain de temps objectif, puisqu’il ne faut
plus se rendre à la banque. Il est donc plus que probable que les individus ne comparent
pas le temps gagné à gérer leurs comptes depuis leur maison ou leur bureau par rapport à
la nécessité de se rendre à la banque, mais qu’ils jugent le service d’e-banking isolément.
Ainsi, un des facteurs d’adoption et de satisfaction liés à l’utilisation d’Internet est le
temps d’attente, et la rapidité avec laquelle les opérations nécessaires à l’utilisation du site
peuvent être réalisées (Szymanski et Hise, 2000). Avec ce support, les gens sont
généralement intransigeants avec le temps d’attente, et dès lors, le temps perçu à réaliser
les opérations bancaires via e-banking pourrait paraître long au regard des attentes de
rapidité avec lesquelles elles devraient pouvoir s’effectuer.
•
Finalement, les risques financier, fonctionnel et psychologique sont les trois facettes les
plus fortement associées à l’abonnement de téléphonie mobile. Notons à nouveau que,
254
comme pour le vol SNBA et le vol Ryanair, il existe des différences parfois importantes
dans la structure de risque des deux marques de téléphonie mobile. Tant le score global de
risque perçu que les scores des différentes facettes (excepté la facette financière du risque)
sont plus élevées pour l’abonnement Base que pour l’abonnement Proximus. Ce résultat
fera l’objet d’une discussion plus détaillée dans la suite de notre étude.
3.
LA MARQUE DE SERVICE ET L’IMAGE DE MARQUE : RÉSULTATS COMPLÉMENTAIRES
Lors du test des hypothèses relatives au rôle de la marque forte dans le processus de
tangibilisation physique et mentale, nous avons montré que, conformément aux propositions
théoriques, à la marque perçue comme forte est associé un score d’intangibilité physique
significativement plus faible que celui du service lié mais non marqué. Cette conclusion n’a
toutefois pas pu être acceptée pour la dimension mentale de l’intangibilité. Rappelons que ces
analyses portant sur la marque n’ont pu être réalisées que pour le groupe de personnes de
niveau d’éducation moyen à élevé, pour les raisons déjà invoquées de taille d’échantillon
insuffisante pour l’autre groupe.
Afin d’accroître notre compréhension du mode d’influence de la marque sur le processus de
perception de l’intangibilité pour ce groupe de personnes, il est intéressant de comparer les
marques jugées fortes par les individus (connaissance ≥ 3 et valence de l’image ≥ 4), par
rapport aux observations des gens qui connaissent les marques, mais qui ne les perçoivent pas
de manière aussi positive (connaissance ≥ 3 et valence de l’image < 4). Une telle analyse
permet d’isoler l’impact de la valence de l’image de marque sur le niveau d’intangibilité
perçue, puisque la connaissance est bloquée sur le niveau élevé.
Ce type d’analyse nous impose de travailler au niveau des marques en particulier, et, dès lors,
il nous faut mentionner une limite à nouveau liée à la taille de ces sous-échantillons, qui sont
assez faibles, comme le montre le tableau ci-dessous.
255
Tableau 11.2 : Répartition des observations selon les caractéristiques de la marque
connaissance ≥ 3 et valence
connaissance ≥ 3 et valence
de l’image ≥ 4
de l’image < 4
Ryanair
8 observations
33 observations
SNBA
21 observations
22 observations
Assurance Ethias
38 observations
15 observations
5 à Sec
14 observations
21 observations
Cours Berlitz
18 observations
5 observations
PC Banking Fortis
26 observations
44 observations
Proximus
21 observations
30 observations
Base
10 observations
17 observations
Taille des sous-échantillons
Les résultats présentés ci-dessous sont donc illustratifs, et devraient être validés à plus grande
échelle. La marque Berlitz est toutefois éliminée de l’analyse, en raison d’une taille
d’échantillon vraiment trop insuffisante (5 observations).
Comparons les niveaux d’intangibilité physique et mentale pour ces deux classes d’analyse,
marque par marque. Observons pour ce faire les deux figures suivantes :
Figure 11.7 : Différence dans les scores d’intangibilité selon la valence de l’image de marque
Degré d'intangibilité physique
Marque connue mais moins bien évaluée
Marque forte
5
4
3
2
1
Vol Ryanair
5 à Sec
Vol SNBA
PC Banking
Fortis
256
Abonnement
Proximus
Abonnement
Base
Assurance
Ethias
Degré d'intangibilité mentale
Marque connue mais moins bien évaluée
Marque forte
4
3
2
1
Vol Ryanair
Vol SNBA
5 à Sec
Abonnement
Proximus
PC Banking
Fortis
Assurance
Ethias
Abonnement
Base
Nous pouvons constater que, de manière systématique, la marque connue et bien perçue
possède un score d’intangibilité physique et mentale inférieur à celui de la marque connue,
mais moins bien perçue. Les différences de scores sont d’ailleurs significatives concernant la
dimension physique pour les marques SNBA, Ethias et Base, et concernant la dimension
mentale pour les marques SNBA, 5 à Sec, PC Banking Fortis et Proximus, et ce malgré les
faibles tailles d’échantillons.
Nous pouvons dès lors suggérer que la marque est susceptible d’influencer aussi bien
l’intangibilité physique (comme cela a été formellement démontré) que l’intangibilité
mentale. De plus, ce constat nous permet de proposer qu’à côté de la connaissance, l’image de
marque pourrait influencer le degré d’intangibilité physique et mentale de manière
appréciable.
257
CONCLUSION DU CHAPITRE 11
Ce chapitre a été l’occasion de mettre en évidence des résultats complémentaires à ceux déjà
présentés précédemment, en vue d’enrichir la possibilité de discussions et d’interprétations
liées à cette recherche.
Nous avons ainsi présenté les continuums d’intangibilité pour les deux grands segments de
marché identifiés dans cette recherche, discriminés par le niveau d’éducation des individus.
Nous avons également analysé plus en détail la nature du risque tel qu’il est ressenti par les
individus, en observant non seulement le score de risque perçu global associé aux services ou
aux marques analysées, mais également les scores de risque par facette. Finalement, des
analyses complémentaires portant sur l’influence de la marque perçue comme forte – et plus
particulièrement de l’image de marque – sur la perception d’intangibilité, suggèrent que la
marque et l’image de marque sont susceptibles d’influencer tant le degré d’intangibilité
physique (comme cela a été montré sur base de la validation de l’hypothèse 13) que le degré
d’intangibilité mentale.
258
PARTIE IV : DISCUSSIONS, RECOMMANDATIONS, LIMITES, VOIES
DE RECHERCHE FUTURES ET CONCLUSION
Les résultats de cette recherche ont été présentés de manière assez brute, sans faire l’objet de
commentaires détaillés. La quatrième et dernière partie de ce document est donc l’occasion de
discuter plus en profondeur de ces résultats. Ceci nous permet non seulement de mettre en
évidence les implications théoriques et managériales de cette recherche (chapitre 12), mais
aussi d’en souligner les limites, et d’en dégager les voies de recherches futures (chapitre 13).
En guise d’introduction à cette partie, nous souhaitons rappeler les résultats de la recherche, à
l’aide d’un tableau synoptique des hypothèses et des résultats qui leur sont liés.
TABLEAU SYNOPTIQUE DES HYPOTHESES DE RECHERCHE
Niveau
d’éducation
faible
Corps d’hypothèses principales
H1
H2
Le
concept
d’intangibilité
est un
concept
bidimensionnel, constitué d’une dimension physique,
7
caractérisée par un manque de matérialité, et d’une Le concept est perçu
dimension mentale, caractérisée par une difficulté
de manière
accrue à être défini, formulé ou compris de façon claire unidimensionnelle
et précise
L’intangibilité d’une offre globale de services exerce un
impact significatif positif (càd dans le même sens) sur
3
le risque perçu par l’individu à l’égard de cette offre
H2a : La dimension mentale de l’intangibilité exerce un
Non pertinent
impact significatif positif sur le risque perçu par
l’individu à l’égard de cette offre
H2b : La dimension physique de l’intangibilité exerce
Non pertinent
un impact significatif positif sur le risque perçu par
l’individu à l’égard de cette offre
259
Niveau
d’éducation
moyen à élevé
3
3
3
3
Premier corps d’hypothèses complémentaires – impact de la connaissance et de l’utilisation sur la
relation entre l’intangibilité et le risque perçu
H3 Lorsque les individus possèdent un niveau de Impact significatif de
connaissance faible de l’entité analysée, les deux l’intangibilité sur le
3
dimensions de l’intangibilité exercent un impact risque perçu en cas de
connaissance
faible
significatif sur le risque perçu.
H4 Lorsque les individus possèdent un niveau de
connaissance élevé de l’entité analysée, seule la Impact non significatif
dimension mentale de l’intangibilité exerce une influence de l’intangibilité sur le
3
significative sur le risque perçu global. La dimension risque perçu en cas de
connaissance
élevée
physique n’exerce plus, quant à elle, d’influence
significative sur le risque perçu global.
H5 Lorsque les individus n’utilisent pas ou peu l’entité Impact significatif de
analysée, les deux dimensions de l’intangibilité exercent l’intangibilité sur le
3
risque perçu en cas
un impact significatif sur le risque perçu
d’utilisation faible
H6
Lorsque les individus utilisent de façon plus intensive
l’entité analysée, seule la dimension mentale de Impact non significatif
l’intangibilité exerce une influence significative sur le de l’intangibilité sur le
3
risque perçu global. La dimension physique n’exerce risque perçu en cas
plus, quant à elle, d’influence significative sur le risque d’utilisation élevée
perçu global.
Deuxième corps d’hypothèses complémentaires – impact de la connaissance et de l’utilisation sur
les deux dimensions de l’intangibilité et sur le risque perçu
H7 Le degré de connaissance influence significativement et
n.a.*
négativement le degré d’intangibilité mentale de manière
3
systématique
degré
de
connaissance
n’influence
pas
H8 Le
7
n.a.
significativement le degré d’intangibilité physique de
manière systématique
degré
de
connaissance
n’influence
pas
H9 Le
n.a.
significativement le degré de risque perçu global de
3
manière systématique
H10 Le degré d’utilisation influence négativement et
n.a.
significativement le degré d’intangibilité mentale de
3
manière systématique
H11 Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le
n.a.
7
degré d’intangibilité physique de manière systématique
H12 Le degré d’utilisation n’influence pas significativement le
n.a.
3
degré de risque perçu global de manière systématique
Troisième corps d’hypothèses complémentaires : impact de la marque sur les deux dimensions de
l’intangibilité et sur le risque perçu
H13 Une marque de service forte possède un score
d’intangibilité physique significativement plus faible que
n.a.
3
le score d’intangibilité physique du service lié mais non
marqué.
H14 Une marque de service forte possède un score
d’intangibilité mentale significativement plus faible que
n.a.
7
le score d’intangibilité mentale du service lié mais non
marqué
H15 Une marque de service forte est perçue comme étant
n.a.
3
moins risquée que le service lié mais non marqué.
n.a. : non analysé en raison de la trop faible taille des sous-échantillons.
260
CHAPITRE
12 :
DISCUSSION
DES
RESULTATS
ET
IMPLICATIONS
MANAGERIALES DE LA RECHERCHE
Ce chapitre a pour objectif de discuter plus en profondeur des résultats de cette recherche, et
d’en dégager les implications théoriques. Il vise également à présenter les implications de
cette recherche pour la pratique managériale.
1. LA PERCEPTION D’INTANGIBILITE PAR LES INDIVIDUS
L’hypothèse centrale de notre recherche, à savoir la bidimensionnalité du concept
d’intangibilité, n’a pu être validée pour l’ensemble de la population. Après analyse, il ressort
que le niveau d’éducation des individus influence de manière importante la façon dont ils
perçoivent l’intangibilité d’une offre de services ou d’une marque.
Si la structure bidimensionnelle de l’intangibilité a pu être validée pour les personnes de
niveaux d’éducation moyen à élevé, elle n’est pas stable pour les personnes de niveau
d’éducation faible. Ces individus ne discriminent pas la dimension mentale de l’intangibilité
de la dimension physique. Plus précisément, il y a une association tellement forte entre ces
deux dimensions qu’elles ne sont plus dissociables l’une de l’autre. Tâchons à présent de
mieux comprendre ces résultats.
1.1. Discussion des résultats relatifs aux personnes de faible niveau d’éducation
La présentation du continuum d’intangibilité pour les personnes de faible niveau d’éducation
(cf. figure 11.1 p.245) nous a permis de constater que, si certains services (comme l’ebanking) sont positionnés de manière assez intuitive sur le continuum, d’autres par contre
(comme l’assurance familiale ou le cours de langue) ont des scores d’intangibilité plus
surprenants.
Une analyse plus détaillée de ces résultats nous permet tout d’abord de noter que l’assurance
familiale et le cours de langue sont les deux services qui disposent de la plus grande
proportion de répondants possédant un niveau de connaissance élevé (un tiers des répondants
pour l’assurance familiale, et près de 49% pour le cours de langue – cf. tableau 11.1 p.244).
261
Ceci peut partiellement expliquer les faibles scores d’intangibilité, puisque la connaissance est
négativement corrélée avec l’intangibilité perçue pour ces deux services. Il faut toutefois noter
que, si près de 49% des personnes interrogées disent relativement bien connaître ce qu’est un
cours de langue, moins de 13% de ces personnes ont effectivement déjà utilisé ce service.
Cette différence pourrait peut-être s’expliquer par un éventuel référent au cours de langue
durant sa propre scolarité, ou celle de ses enfants (les cours de langue figurant dans le
programme du cycle secondaire inférieur, et étant parfois dispensés dès le cycle
d’enseignement primaire). Ce référent pourrait amener les individus interrogés à juger qu’ils
connaissent bien le service de cours de langue, alors même qu’ils n’ont effectivement pas eu
recours à un cours de langue dispensé par un centre de formation n’appartenant pas au réseau
scolaire subventionné.
Pour mieux comprendre et interpréter la position d’un service sur le continuum
d’intangibilité, et plus généralement la perception d’intangibilité par les individus, une
question centrale doit néanmoins être posée : quelle réalité les individus interrogés associentils au service ? Nous ne pouvons pas répondre formellement à cette question, mais seulement
émettre des suppositions, puisque nous n’avons pas collecté d’informations à ce sujet. Ainsi,
la position d’un service comme l’assurance familiale sur le continuum pourrait suggérer que
la réalité associée à ce service n’est pas la protection en cas de sinistre, mais peut-être plutôt
des éléments plus matériels comme le contrat signé par l’individu, ou le courtier qui pourrait
incarner le service aux yeux du client. Pour le cours de langue, il pourrait s’agir du professeur,
des notes de cours, de la classe, plutôt que l’échange de savoir et l’acquisition de
compétences. Une autre explication pourrait être que le cours de langue et l’assurance
familiale seraient perçus par les répondants comme plus simples ou plus faciles à comprendre
dans leur mécanisme ou dans leurs bénéfices que le service d’e-banking par exemple. Si
l’individu associe uniquement au service d’assurance familiale le paiement par prélèvement
automatique de primes, et qu’il est confiant dans la qualité de sa couverture de risque,
simplement parce qu’il a confiance en son courtier, il peut juger que ce service est finalement
très simple à comprendre (je paie des primes, c’est géré automatiquement par ma banque, et,
si j’ai un problème, mon courtier s’occupe de tout, et je suis remboursé des dégâts liés au
sinistre). Le bénéfice du service serait donc perçu comme relativement concret.
La position sur le continuum du service de gestion de ses comptes bancaires par Internet (ebanking) est davantage conforme à nos attentes. Tout d’abord, l’e-banking se réfère à un
262
service bancaire, et nous pouvons nous attendre à ce que les services bancaires soient
caractérisés par un degré d’intangibilité élevé (tant sur un plan physique que mental). En
outre, le mode de délivrance du service à travers Internet peut détangibiliser un peu plus
encore ce service pour les populations de faible niveau d’éducation, ayant un faible accès à
Internet, et étant dès lors en moyenne moins compétentes avec cette technologie que des
individus plus éduqués, ayant un meilleur accès à l’Internet. En effet, plusieurs études (dont
l’étude sur l’usage et la diffusion des technologies de l’information et de la communication
menée par l’agence wallonne des télécommunications - AWT) suggèrent une corrélation forte
entre l’accès et l’utilisation d’Internet et le niveau d’éducation. Le graphe ci-dessous montre
que peu de personnes de niveau d’éducation faible utilisent de manière régulière Internet.
Figure 12.1 : Utilisation d’Internet en fonction du niveau d’éducation
Source : Etude « Usage de l’Internet en Wallonie », menée par l’Agence
Wallonne des Télécommunications, et publiée le 14/04/2004
Ce faible taux d’utilisation d’Internet par les personnes de niveau d’éducation faible peut
partiellement expliquer pourquoi le service d’e-banking est perçu comme fortement
intangible. Non seulement, le service bancaire serait par essence plutôt intangible, mais son
support qu’est Internet pourrait être perçu lui aussi comme fortement intangible. Pour une
majorité de personnes de faible niveau d’éducation, Internet pourrait n’être qu’une
abstraction, quelque chose avec quoi ils n’ont jamais été en contact, et qu’ils sont dès lors
incapables de matérialiser et de comprendre avec facilité. Notons que, même en cas de
connaissance ou d’utilisation élevées du service d’e-banking par les personnes de faible
263
niveau d’éducation, le score d’intangibilité qui y est associé reste très élevé (4,95), ce qui
suggère que tant le service que le support restent relativement abstraits pour ces personnes.
Afin d’analyser plus finement ce résultat, se pose à nouveau la question de la réalité associée
à ce média.
Ces possibles interprétations soulèvent une question plus fondamentale pour ce groupe
spécifique de la population : que dissimule le concept unidimensionnel d’intangibilité pour les
personnes de faible niveau d’éducation ? Plus spécifiquement, quel est le contenu exact de ce
concept pour ces personnes ? Est-ce que l’une des dimensions (physique et mentale) absorbe
systématiquement l’effet de l’autre dimension, pour n’en former qu’une seule ? Ou est-ce que
ce construit unidimensionnel serait autre chose qu’une équivalence pure et simple à l’une de
ces deux dimensions ?
Plusieurs possibilités nous semblent envisageables :
•
L’intangibilité physique pourrait systématiquement absorber l’effet de l’intangibilité
mentale, pour ne plus former plus qu’une seule dimension (la tangibilité physique
garantissant alors la tangibilité mentale).
•
L’intangibilité mentale pourrait au contraire systématiquement absorber l’effet de
l’intangibilité physique.
•
Finalement, le concept unidimensionnel d’intangibilité pourrait ne pas être relié
uniquement et directement à l’une de ces deux dimensions, mais se situer à un autre
niveau, à déterminer, qui engloberait des éléments physiques et/ou mentaux
indissociables.
Nous ne pouvons pas formellement prendre position en faveur de l’une ou l’autre de ces
options, car l’objet de notre étude et la méthodologie mise en place ne s’y prêtent pas. Une
méthodologie qualitative serait notamment nécessaire pour apporter des éléments de réponse.
Plusieurs réflexions peuvent néanmoins être menées.
•
L’examen du seul continuum d’intangibilité peut être interprété de plusieurs façons. Si,
pour expliquer le faible score d’intangibilité associé à l’assurance familiale par exemple,
nous acceptons l’idée que la réalité qui y est associée est le contrat ou le courtier
(éléments physiques associés au service), nous pouvons suggérer (sans pour autant être
264
catégorique) que la dimension physique prédomine dans le concept unidimensionnel de
l’intangibilité. Si nous acceptons par contre, comme base d’explication du faible score
d’intangibilité associé à l’assurance familiale, l’idée que les bénéfices ou le
fonctionnement de ce service sont aisés à comprendre (parce que peut-être simplifiés dans
une vision réductrice du service), ou si nous présupposons que l’intangibilité élevée du
service d’e-banking est liée à un manque de compréhension des offres bancaires, couplée
à un manque de compréhension de ce qu’est Internet ou de son mode de fonctionnement,
nous pourrions alors privilégier la prédominance de la dimension mentale dans le concept
unidimensionnel d’intangibilité.
•
Dans le cadre de cette réflexion, la comparaison des résultats de la perception
d’intangibilité par les personnes de faible niveau d’éducation ou par les personnes de
niveau d’éducation moyen à élevé est intéressante. Elle ne permet toutefois à nouveau pas
de prendre formellement position en faveur de l’une ou l’autre options. Observons ces
résultats à travers le tableau suivant :
Tableau 12.1 : Comparaison des résultats entre les niveaux d’éducation
NIVEAU D’EDUCATION FAIBLE
NIVEAU D’EDUCATION MOYEN A ELEVE
Au niveau global (sans distinction de niveaux de connaissance ou d’utilisation)
INT
RISK : impact significatif
MENT
RISK : impact significatif
PHYS
RISK : impact significatif
Connaissance faible / utilisation faible
INT
RISK : impact significatif
MENT
RISK : impact significatif
PHYS
RISK : impact significatif
Connaissance élevée / utilisation élevée
MENT
INT
RISK : impact non significatif
PHYS
RISK : impact significatif
RISK : impact non significatif
Bien que la comparaison des résultats soit à proprement parler impossible, nous pouvons
noter une similarité des effets significatifs de l’impact de l’intangibilité ou de ses
dimensions sur le risque perçu, entre la dimension unique d’intangibilité pour le niveau
d’éducation faible, et la dimension d’intangibilité physique pour le niveau d’éducation
moyen à élevé. Dans les deux cas, sous la condition de connaissance ou d’utilisation
265
faible, l’influence de notre variable d’intérêt sur le risque perçu est significative. De
même, en cas de connaissance ou d’utilisation élevée, l’intangibilité d’une part, et
l’intangibilité physique d’autre part, ne présentent plus d’impact significatif sur le risque
perçu.
Cette similitude dans les résultats peut suggérer, sans la démontrer, l’hypothèse selon
laquelle, pour les personnes de niveau d’éducation faible, l’intangibilité physique
capturerait l’effet de l’intangibilité mentale, pour ne constituer qu’une seule dimension.
Dit autrement, les personnes de faible niveau d’éducation pourraient estimer qu’un
élément matériel est mentalement tangible, alors qu’un élément immatériel est
mentalement intangible. Il n’y aurait pas de distinction entre les deux dimensions
physique et mentale, mais le lien de cause à effet irait de la dimension physique vers la
dimension mentale. C’est parce qu’une entité est plus matérielle qu’une autre qu’elle
serait plus facile à comprendre, à définir ou à formuler pour ces individus (qui pourraient
dès lors avoir une vision réductrice et simplificatrice de ces services).
Si cette hypothèse se vérifie, les conclusions à tirer seraient intéressantes : nous pourrions
remplacer le terme « intangibilité » par le terme « intangibilité physique » pour le niveau
d’éducation faible, ce qui permettrait de faire plus facilement des comparaisons et des
généralisations entre les différents niveaux d’éducation. De plus, il serait alors plus
opportun – pour les personnes de niveau d’éducation faible – de tangibiliser
physiquement le service (par rapport à des techniques de tangibilisation mentale). En cas
de connaissance ou d’utilisation faible, la tangibilisation physique du service permettrait
par extension de réduire le risque perçu par l’individu à l’égard de ce service. En cas de
connaissance ou d’utilisation élevée, par contre, une éventuelle stratégie de
tangibilisation ne permettrait plus de diminuer le niveau de risque perçu. D’autres
stratégies de réduction de risque perçu devraient alors être mises en place.
•
La littérature relative à la « littératie » des individus, et à son impact sur le mode de
raisonnement ou sur le processus de prise de décision, est également intéressante dans la
présente discussion. D’après une définition proposée par le Ministère de l’Education du
Québec, la littératie « est la capacité de comprendre, d’utiliser, et de traiter l’information
écrite nécessaire pour bien fonctionner en société, réaliser des objectifs personnels,
266
développer des compétences, et acquérir des connaissances ». Le niveau de littératie d’un
individu est fortement corrélé à son niveau d’éducation23.
Plusieurs études suggèrent que les personnes de faible niveau de littératie montrent une
prédisposition à raisonner de manière concrète, et qu’elles disposent d’une capacité
d’abstraction limitée (Wallendorf, 2001 ; Viswanathan, Rosa et Harris, 2005). Ces
personnes ont ainsi tendance à s’appuyer pour raisonner sur des caractéristiques
physiques ou élémentaires d’une situation, en éprouvant des difficultés à voir les relations
entre plusieurs de ces caractéristiques, ou à traiter des caractéristiques plus abstraites. Ils
cherchent à traiter l’information en la faisant correspondre à des éléments « réels » du
monde physique, et fonctionnent essentiellement dans le monde visuel et concret, plutôt
que dans le monde symbolique et abstrait. Et s’ils doivent néanmoins effectuer des
transactions incluant des éléments symboliques, ils concrétisent le processus de décision
en s’appuyant sur des éléments plus concrets tels que le prix (Viswanathan et al., 2005,
p.22).
Viswanathan et al. (2005) ont par exemple étudié le processus de prise de décision des
personnes de faible niveau de littératie dans un contexte d’achat en grand magasin. Ils ont
notamment montré que, face à une décision de choix entre deux produits de marque
identique, mais de taille - et donc de prix - différents, la majorité de ces personnes ne
considèrent qu’un seul élément – le plus souvent le prix dans cette situation – pour
effectuer leur choix. Ainsi, entre une petite boîte de céréales coûtant 0,90$, et une grande
boîte de la même marque coûtant 2,5$, le choix porte généralement sur la petite boîte, car
le prix est, dans l’absolu, inférieur à celui de la grande boîte. Lorsque les chercheurs
demandent aux personnes interrogées s’il ne serait pas plus intéressant d’acheter la
grande boîte, en raison d’un prix relatif inférieur (le prix augmentant moins
proportionnellement que la quantité), ces personnes montrent une incapacité à raisonner
en termes de prix relatif (prix/quantité). Même lorsque l’information de prix relatif est
mentionnée sur une étiquette, ils ne la prennent pas en considération dans leur processus
de décision. De façon plus générale, cette étude suggère que les personnes de faible
niveau de littératie basent le plus souvent leur choix sur un seul attribut, concret, plutôt
23
Source : Enquête internationale sur la littératie des adultes (janvier 2001) – disponible sur le site web du
gouvernement du Canada (http://www11.rhdcc.gc.ca/fr/sm/ps/rhdcc/ra/2001-002583/page00.shtml)
267
que sur la combinaison de plusieurs attributs qui leur permettrait d’accroître la valeur
perçue de leur choix.
Parce que les services sont par nature à dominante intangible, les résultats de cette étude
questionnent la manière dont ils pourraient être perçus par les personnes de faible niveau
d’éducation. L’intangibilité perçue par ces personnes ne pourrait-elle pas être reliée à ce
mode de raisonnement, et être reformulée en termes d’abstrait-concret ? Les services ne
seraient plus alors perçus comme étant plus ou moins intangibles, ou plus ou moins
matériels, mais plutôt comme plus ou moins concrets ou abstraits. Or, si ce qui est
matériel concrétise les choses, un individu peut également concrétiser un service par la
clarté de ses bénéfices. Puisqu’il semblerait que les individus de faible niveau de littératie
tendent à raisonner en s’appuyant sur des éléments d’une offre concrets et plus limités, ils
pourraient donc avoir une vision simplificatrice d’un service en se raccrochant à
l’élément concret qui crée le plus de sens pour eux (soit le support matériel, soit le
caractère concret du bénéfice du service). Ce caractère abstrait-concret ne pourrait
toutefois plus à notre sens être mis en équivalence avec la dimension physique ou
mentale de l’intangibilité, car ce caractère intègre des éléments qui sont à la fois
physiques et mentaux. En outre, les personnes de niveau d’éducation moyen à élevé
seraient capables de distinguer les deux dimensions de l’intangibilité, grâce notamment à
leur capacité d’abstraction plus grande. Ils auraient donc une perception moins
simplificatrice, et dès lors plus complète et plus nuancée, des services ou des marques qui
les entourent.
1.2. Discussion des résultats relatifs aux personnes de niveau d’éducation moyen à élevé
L’examen des deux continuums d’intangibilité pour les personnes de niveau d’éducation
moyen à élevé nous permet de formuler plusieurs conclusions. Tout d’abord, si la dimension
physique de l'
intangibilité semble permettre de discriminer les produits des services, ce n'
est
plus nécessairement le cas de la dimension mentale. Au vu des résultats, l'
ordre sur le
continuum pourrait être modifié entre les services et les produits, selon qu’ils apparaissent sur
le continuum physique ou sur le continuum mental de l'
intangibilité. En conséquence, la
caractéristique d’intangibilité, perçue par les personnes de niveau d’éducation moyen à élevé
comme étant un concept bidimensionnel, ne peut plus être considérée comme étant une
268
caractéristique permettant de discriminer les services des produits, puisque certains produits
peuvent être perçus comme étant mentalement plus intangibles que certains services.
Notre étude suggère par contre que l’intangibilité physique puisse constituer un critère
discriminant entre les produits et les services. Néanmoins, pour confirmer cette proposition, il
serait nécessaire de mettre en place une nouvelle étude, incluant un plus grand nombre de
produits matériels. Elle permettrait d’apporter un éclairage plus solide au débat naissant sur le
paradigme fondateur du marketing des services, et sur la remise en question des
caractéristiques différenciatrices des services par rapport aux produits. Certes, l’étude de
Laroche et al. (2001) semble également conclure que la dimension physique de l’intangibilité
n’est pas discriminante. Mais les limites - déjà évoquées - de leur échelle (voir chapitre 5
p.119), de même que l’échantillon utilisé, ne rendent pas ce résultat suffisamment robuste
pour être conclusif.
En outre, parmi les variables de classification des offres de services, il est nécessaire de
distinguer l’intangibilité physique, déjà utilisée, de l’intangibilité mentale. Ceci permettrait de
créer de nouvelles typologies de services, reflétant le degré de compréhension de l’offre de
services. De façon plus générale, il est important de prendre conscience que qualifier une
entité d’intangible ne se limite pas à l’immatérialité pour une large partie de la population. Par
là même, la tangibilisation d’une offre de services doit être précisée : soit elle porte sur la
dimension physique, soit sur la dimension mentale, soit sur les deux.
L’examen des continuums d’intangibilité pour les personnes de niveau d’éducation moyen à
élevé nous permet également de faire des constatations plus spécifiques. Il est ainsi intéressant
de noter que le service d’e-banking est perçu comme plus intangible physiquement que
mentalement. Toutefois, les scores d’intangibilité sur les deux dimensions sont nettement plus
faibles que le score d’intangibilité observé pour les personnes de faible niveau d’éducation
(même si la comparaison ne peut pas être directe). Cela peut une nouvelle fois être mis en
regard avec le taux d’équipement des ménages en ordinateurs, et avec le taux d’utilisation de
l’Internet, qui, comme nous l’avons vu, est positivement corrélé avec le niveau d’éducation.
Cela peut également être mis en parallèle avec la capacité d’abstraction plus grande des
personnes de niveaux d’éducation plus élevés. L’univers virtuel qu’est Internet est en effet par
nature plus abstrait que l’univers réel, appelé par les adeptes de l’e-business l’univers
« briques et mortier ». Il est également intéressant de constater que le compte épargne est
269
perçu comme physiquement plus intangible que le service d’e-banking, alors que les scores
d’intangibilité mentale entre ces deux services sont plus proches. Si le support Internet est
susceptible de « détangibiliser » un peu plus encore un service pour les personnes qui sont peu
familières et peu compétentes par rapport à ce média, et qui raisonnent essentiellement de
manière concrète, ne pourrait-il pas par contre constituer un moyen de tangibilisation
physique de certains services bancaires, pour les personnes davantage éduquées,
expérimentées et compétentes avec ce média ? Ceci est appuyé par les indices de corrélation
négatifs élevés que nous avons observés entre le score d’intangibilité physique et le niveau de
connaissance (-0,444) ou le niveau d’utilisation pour le service d’e-banking (-0,488). Plus une
personne connaît ce service, ou plus il l’utilise, moins il le perçoit comme étant physiquement
intangible. Notons que, pour appuyer plus fermement cette proposition, une méthodologie
qualitative serait à nouveau nécessaire afin de mieux comprendre la réalité associée à ce
service et à son support électronique.
Il est également intéressant de comparer l’assurance annulation voyage et l’assurance
familiale, avec toutes les précautions nécessaires, puisque la première a été évaluée par
l’échantillon d’étudiants, alors que la seconde a été évaluée par l’échantillon représentatif sur
les quotas retenus. L’assurance annulation voyage est perçue comme un peu plus intangible
physiquement que l’assurance familiale, ce qui peut paraître surprenant. Ceci peut néanmoins
s’expliquer par le fait que l’assurance annulation voyage a été évaluée par des étudiants lors
d’une enquête exploratoire, et que la population étudiante est probablement moins familière
avec le monde des assurances qu’une population représentative du niveau d’éducation moyen
à élevé. Par contre, l’assurance familiale est perçue comme mentalement plus intangible que
l’assurance annulation voyage. Ce résultat soulève la question suivante : les bénéfices
associés à ces deux types d’assurance sont-ils aussi clairs l’un que l’autre ? Si les bénéfices de
l’assurance annulation voyage sont soulignés dans le nom même de l’assurance, les bénéfices
d’une assurance familiale sont moins évidents. Quelle est la portée de la couverture du risque
de cette assurance? Et, plus spécifiquement, quels risques sont pris en charge ? Les bénéfices
de l’assurance familiale sont probablement moins clairs et immédiats que les bénéfices d’une
assurance annulation voyage. En outre, l’assurance familiale est susceptible de couvrir une
multiplicité de risques, alors que l’assurance annulation voyage assure un seul type de risque.
Ceci pourrait expliquer pourquoi elle est perçue comme mentalement plus intangible. Au sein
d’une même catégorie de services, il peut donc y avoir des écarts importants entre les scores
d’intangibilité des différentes offres, à cause de leurs spécificités respectives.
270
2. LA MESURE DU RISQUE PERÇU
Les résultats de cette recherche plaident, selon nous, en faveur de la mesure globale du risque
perçu (telle qu’adoptée dans cette recherche). Ainsi, observons le score de risque perçu global
et le score associé à chacune des facettes du risque pour le service d’assurance familiale et
pour la marque d’assurance Ethias par exemple. Ces scores sont repris graphiquement dans la
figure ci-dessous.
Figure 12.2 : Scores de risque global et de chaque facette pour l’assurance familiale et
l’assurance Ethias
Assurance familiale
Assurance Ethias
3
2,5
Différences
significatives
2
1,5
1
RISK
financier
fonct.
psych.
social
temps
physique
A l’exception du risque temporel (pour lequel la différence n’est pas significative entre le
service non marqué et le service marqué), les scores des autres facettes de risque perçu
associés à l’assurance Ethias sont plus faibles que ceux associés à l’assurance familiale en
général, et les différences sont significatives pour les risques financier, fonctionnel et
psychologique. Nous devrions dès lors nous attendre à ce que le risque perçu global soit plus
faible pour la marque Ethias que pour le service non marqué. Pourtant, le score global de
risque perçu est légèrement plus élevé pour la marque Ethias que pour le service non marqué
(cette différence n’étant toutefois pas significative). Ce constat mérite une discussion. Notons
tout d’abord que ce résultat n’est pas incohérent avec les propositions théoriques relatives au
rôle de la marque comme réducteur de risque. Pour rappel, la marque doit être perçue comme
forte pour jouer son rôle de réducteur de risque.
271
Rappelons également que, comme discuté préalablement, les détracteurs de la mesure du
risque perçu basée sur une approche décompositionnelle - recompositionnelle suggèrent qu’un
client ou un prospect réagit plutôt en fonction d’un sentiment global de risque, qu’en fonction
d’une facette en particulier, et ils estiment entre autres que l’approche par facette ne permet
pas d’expliquer la totalité du sentiment global de risque.
Cette dernière proposition semble se vérifier à travers nos résultats, puisque, si la plupart des
facettes de risque de la marque Ethias sont plus faibles que celles du service non marqué, le
score global est légèrement plus important. Il y a donc un décalage entre la perception globale
du risque perçu et l’intensité perçue des six facettes communément admises dans la littérature.
Notons que ce décalage apparaît également pour d’autres entités analysées dans cette
recherche (le service d’e-banking et l’abonnement de téléphonie mobile).
Ce résultat appuie selon nous la méthode de mesure globale du risque perçu. Il est en effet
raisonnable de penser que la perception globale d’un risque se fonde sur un ensemble
important de paramètres, dont certains sont conscients et d’autres inconscients, qui ne peuvent
être intégralement couverts par les six facettes du risque perçu. Ceci ouvre de nouvelles
perspectives dans les recherches sur le risque perçu. Comme le rappellent Stone et Gronhaug
(1993), la recherche sur le risque s’est trop focalisée sur les composantes et les facettes du
risque, en ignorant le plus souvent la mesure directe du risque perçu. Ce faisant, l’intégralité
des paramètres conduisant à une perception globale de risque n’a peut-être pas été entièrement
appréhendée, et le risque perçu associé aux entités analysées dans ces travaux a pu être
surestimé ou sous-estimé, selon que les paramètres non pris en considération rassurent, ou
exacerbent le risque perçu.
3. LA RELATION ENTRE L’INTANGIBILITE ET LE RISQUE PERÇU
Les conclusions des chapitres 9 et 10 sur l’étude de la relation entre l’intangibilité (et ses deux
dimensions pour les niveaux d’éducation moyen à élevé) et le risque perçu permettent de
préciser considérablement la nature et l’intensité du lien entre ces variables. Elles mettent
également en question des propositions largement répandues dans la littérature sur le
marketing des services.
272
La littérature sur le marketing des services propose majoritairement que la nature à dominante
intangible des services – entendez le plus souvent à dominante immatérielle – occasionne un
supplément de risque perçu par l’acheteur. En outre, et comme développé précédemment, le
besoin de tangibiliser le service est largement reconnu dans la discipline, une des
justifications étant que la réduction d’intangibilité va s’accompagner d’une réduction du
risque perçu à l’égard d’un service ou d’une marque. Finalement, la grande majorité des
techniques de tangibilisation présentées dans la littérature sont des techniques de
tangibilisation physique des services.
En cas de connaissance ou d’utilisation faible du service ou de la marque par sa clientèle cible
(lors du lancement d’une nouvelle offre, par exemple), les propositions théoriques sont
validées. L’intangibilité influence le risque perçu de manière significative, et une
tangibilisation physique du service permettrait par extension de réduire le risque perçu. Ce
dernier résultat est formellement démontré pour les personnes de niveau d’éducation moyen à
élevé. Néanmoins, les propositions théoriques peuvent être complétées. Pour la population de
niveau d’éducation moyen à élevé à tout le moins, la tangibilisation mentale des services
serait tout aussi efficace, sinon plus efficace, pour réduire le sentiment général de risque.
Certaines propositions théoriques sont par contre infirmées dans le cas où la clientèle cible
connaît bien le service ou la marque, ou si elle l’utilise de manière relativement fréquente. Le
risque perçu est alors déconnecté de la nature à dominante immatérielle (ou intangible pour le
niveau d’éducation faible) de l’offre de services. Dès lors, une stratégie de tangibilisation
physique, qui aurait pour objectif de réduire le risque perçu, est vouée à l’échec. Chez les
personnes de niveau d’éducation moyen à élevé, le seul moyen de réduire le risque perçu à
travers la tangibilisation du service consisterait à le tangibiliser mentalement, puisque cette
dimension de l’intangibilité continue à influencer de manière importante le risque perçu par le
client. Pour les personnes de niveau d’éducation faible, par contre, les stratégies de réduction
de risque ne devraient plus passer par la mise en œuvre de techniques de tangibilisation.
273
4. IMPLICATIONS MANAGERIALES DE CETTE RECHERCHE
4.1. Segmentation et qualification des cibles marketing
Cette recherche suggère que le niveau d’éducation des individus, ainsi que leur degré de
connaissance et leur degré d’utilisation à l’égard du service ou de la marque, puissent
constituer des critères de segmentation particulièrement intéressants à prendre en
considération par les managers d’activités de services.
Le niveau d’éducation - fortement relié au niveau de littératie – semble influencer de manière
importante la façon dont les individus raisonnent, et par conséquent la façon dont ils
perçoivent les services et les marques. Ce critère socio-démographique est dès lors de nature à
affecter de manière importante les besoins des individus, ainsi que leur capacité à réagir de
façon opportune à un programme marketing donné. Certains diront que les personnes de
faible niveau d’éducation ne disposent que d’un pouvoir d’achat limité, et qu’ils représentent
des segments peu attractifs. Une étude menée aux Etats-Unis (Kirsch, Jungeblut et Campell,
1992 dans Viswanathan, 2005) signale qu’une personne de faible niveau de littératie possède
en moyenne un pouvoir d’achat équivalent à 40% de celui des personnes de niveau de
littératie plus élevé. Mais parce qu’entre 46 et 51% des Américains sont des personnes de
faible niveau de littératie, ces consommateurs contrôlent environ 380 milliards de dollars de
dépenses, ce qui est loin d’être négligeable. Et ce segment de marché semble montrer une
fidélité plus importante que la moyenne à l’égard des prestataires ou des marques qui sont
capables de s’adapter à leurs besoins spécifiques. Bien comprendre les besoins de ces
segments, et bien comprendre leur mécanismes de raisonnement et de prise de décision, est
donc un enjeu potentiellement important pour les entreprises de services dont les cibles
comporte entre autre ces segments. Ceci soulève néanmoins toute une série de difficultés,
développées dans le chapitre 13 de la présente recherche.
Le degré de connaissance et le degré d’utilisation peuvent également constituer, pour les
managers d’activités de services, des critères pouvant influencer la formulation de certaines
stratégies ou plans d’action. Plus spécifiquement, si un manager d’activités de service
souhaite mettre en place une stratégie visant à tangibiliser le service, ou à réduire le risque qui
y est associé, il est nécessaire qu’il connaisse le degré de connaissance et d’utilisation des
274
personnes à qui vont s’adresser ces stratégies, puisque ces variables influencent de manière
importante l’efficacité de ces stratégies.
4.2. Choix du positionnement marketing et du nom de marque, et impact sur la gestion
de la marque de service
Face à une offre fortement intangible, le positionnement marketing et le nom de la marque
sont parmi les premiers éléments à pouvoir potentiellement créer du sens et clarifier l’offre
pour le client ou le prospect. La formulation du positionnement et le choix du nom de marque
sont donc essentiels, et devraient intégrer les problématiques de tangibilisation du service et
de réduction du risque qui y est associé.
Le positionnement constitue une puissante association potentiellement créatrice de sens pour
les clients ou les prospects. Il faut en outre faire remarquer que son choix semble ne pas être
anodin par rapport à la nature et l’intensité du risque perçu dans les différentes facettes du
risque. Comparons ainsi les structures de risque perçu pour les marques SNBA et Ryanair.
Figure 12.3 : Structure de risque perçu pour le vol en avion
Vol non marqué
Vol Ryanair
Vol SNBA
3
2,5
2
1,5
1
RISK
financier
fonct.
psych.
social
temps
physique
Avant toute chose, il faut rappeler que Ryanair est une compagnie aérienne à bas tarif, alors
que SNBA est une compagnie aérienne traditionnelle. Les positionnements très différents de
ces compagnies sont parfaitement cohérents avec les scores de risque observés par facette.
275
Ryanair engendre un faible risque financier (low cost), mais toutes les autres facettes de
risque sont exacerbées par rapport à un vol en avion de ligne non marqué. Les gens pourraient
donc associer à Ryanair une compagnie certes bon marché, mais où le service est réduit à son
strict minimum (risque fonctionnel élevé), où les risques de retard sont plus grands, et où le
risque d’accident est plus élevé. Ce dernier résultat est assez cohérent avec le message
souvent véhiculé dans le grand public, à savoir que le positionnement low cost imposerait aux
compagnies de comprimer les coûts de maintenance des avions, et que dès lors les avions
seraient moins sûrs. Les conclusions sont complètement inversées pour SNBA : le risque
financier est supérieur, mais toutes les autres facettes de risque perçu sont évaluées comme
étant moins risquées que pour le vol non marqué. Il est donc intéressant de constater que la
perception et la nature du risque perçu sont parfaitement cohérentes avec le positionnement
adopté par ces deux entreprises de services. L’examen des marques Proximus et Base (voir
figure 11.6 p. 253) autorise les mêmes conclusions.
Ceci nous conduit à recommander aux managers d’activités de services d’introduire dans le
processus de définition ou de redéfinition du positionnement les questions relatives à la
tangibilisation de leur service d’une part, mais aussi les questions relatives aux types de risque
que le client accepte ou n’accepte pas de supporter. Ainsi, il est nécessaire de se demander
quelle est l’incidence du choix ou de la reformulation du positionnement sur l’intangibilité
perçue d’une part (en termes d’associations générées et de sens créé pour le client), et sur le
risque associé à la marque par les clients ou les prospects d’autre part.
Le nom même de la marque peut également agir sur le processus de tangibilisation physique
et mentale, puisqu’il constitue la première association la plus fortement ancrée à l’entité
marquée, et qu’elle peut lui donner du sens. Le directeur général d’une société de conseil en
marketing nous soulignait récemment le handicap que leur confère leur nom depuis
l’élargissement de leurs activités. Ce nom, désormais limitatif au vu de ces nouvelles
activités, rend d’après lui l’accès aux nouveaux marchés plus difficile, car il restreint dans la
perception des prospects l’expertise de ce bureau de conseil. Le choix du nom de marque peut
donc être, pour les managers, une première occasion de tangibiliser le service physiquement
(à travers une analogie ou une métaphore) ou mentalement (en créant du sens par rapport au
service offert ou par rapport à ses bénéfices).
276
En matière de gestion de marque de service, la littérature propose que la marque puisse
constituer un levier de tangibilisation des services. Nous avons pu formellement montrer le
rôle de la marque forte dans le processus de tangibilisation physique du service, et dans la
réduction du risque perçu. En outre, les résultats complémentaires suggèrent que la marque
perçue comme forte, et plus spécifiquement l’image de marque, peut également influencer
l’intangibilité mentale. Parler de la marque forte comme levier de tangibilisation implique
néanmoins un sens unique du lien de causalité. C’est parce que le service est marqué, et que la
marque est perçue comme forte, que le service serait tangibilisé. Ce lien est logique, mais son
contraire le serait tout autant. Une marque pourrait être perçue comme plus forte qu’une autre
marque, parce que le service associé serait perçu comme plus tangible. Il est donc délicat de
vouloir dissocier le processus de développement de la marque forte et le processus de
tangibilisation du service, ou plus précisément, de vouloir proposer un lien de causalité
unidirectionnel entre ces deux processus. Le lien serait davantage circulaire, un processus
aidant l’autre et inversement. Dès lors, plutôt que de parler de marque comme levier de
tangibilisation des services, il serait plus judicieux d’intégrer les problématiques de
développement de marque forte et de tangibilisation des services dans l’élaboration des
stratégies marketing, du mix marketing, et plus particulièrement de la politique de
communication. Nous recommandons dès lors aux managers de marques de service d’intégrer
ces problématiques de développement de marque forte et de tangibilisation des services au
niveau des différents outils et leviers de gestion de marque (nous allons détailler ci-après plus
précisément des techniques de tangibilisation pouvant être utilisées à cette fin).
La marque « Car Glass », par exemple, nous paraît être un succès en la matière. Ses managers
ont réussi à développer une marque plus que probablement perçue comme forte par un grand
nombre de personnes, en y intégrant des techniques de tangibilisation des bénéfices du
service. Ils ont ainsi créé des associations fortes à travers une communication narrative simple
et directe, en parvenant à rendre le service offert par Car Glass très clair et très explicite,
même pour les non-clients de l’enseigne. Leur communication testimoniale radiophonique,
par exemple, explique comment, en cas d’éclat dans un pare-prise, la réparation permet
d’éviter le remplacement onéreux de la vitre endommagée, en appliquant une technique bien
moins coûteuse, dont le résultat est proche de la solution de remplacement. En outre, ils
opposent les bénéfices du service aux risques encourus à ne pas réparer, à travers des
exemples probants. Et ils tangibilisent de manière habile les bénéfices du service dans la
perception des clients.
277
4.3.
Impact sur le marketing interne
Cette recherche souligne, si besoin est, l’importance du marketing interne au sein des
entreprises de service. Il est largement reconnu que des employés satisfaits, fidèles et
productifs sont de nature à engendrer des clients satisfaits et fidèles. En matière de service, le
personnel de contact est une ressource éminemment stratégique pour l’entreprise, puisque les
employés sont les ambassadeurs du service auprès des clients, et qu’ils peuvent même aller
jusqu’à incarner le service à leurs yeux. Ils constituent en outre une puissante association au
service ou à la marque, et un levier de tangibilisation important, tant physiquement que
mentalement.
Le prérequis indispensable à un message cohérent autour d’un service ou d’une marque
consiste à s’assurer que l’ensemble du personnel d’une organisation de service comprend la
nature même du service ou de la marque offerts, et qu’il partage une vision consensuelle et
identique de la réalité associée à ce service ou à cette marque. Si cette réalité est probablement
claire et évidente pour certains services simples ou hautement standardisés, elle peut être
différemment perçue chez les membres du personnel, lorsque les services sont complexes, ou
qu’ils sont fortement personnalisés, et dès lors variables en terme de contenu. De même,
l’identité d’une marque peut ne pas être claire pour l’ensemble du personnel. Au-delà de la
mission de l’entreprise, les dirigeants d’une société de services doivent donc s’assurer que la
compréhension du service ou de la marque par leur personnel est claire, sans quoi elle ne
pourrait pas être claire pour les clients. Cette recommandation semble évidente, mais nous
avons rencontré plusieurs dirigeants de sociétés de services qui ont reconnu que, si chaque
membre du personnel avait à décrire précisément la réalité qu’il associe au service ou à la
marque, les copies seraient probablement fort différentes selon les individus. Un directeur
général nous a même affirmé qu’au sein de son comité de direction, il pensait que cet exercice
conduirait à des visions différentes des services offerts aux clients. Ceci est donc
particulièrement pertinent, en particulier pour les nouvelles personnes recrutées par
l’entreprise.
Le personnel doit ensuite être capable de délivrer le service de manière compréhensible pour
le client. Une étude que nous avons menée dans le domaine bancaire (Sempels et Zanin,
2004) montre ainsi que la première qualité qu’une banque idéale devrait posséder est un
personnel qui explique clairement les choses. Cette qualité fait directement référence à la
278
tangibilisation mentale du service. En outre, cette étude a permis de montrer que cette qualité
de première importance pour les clients n’est associée à aucune des trois plus grandes
institutions financières belges, et qu’elle peut dès lors constituer un levier de différenciation
important.
Face à ces défis, les programmes de formation des membres du personnel – et plus
particulièrement du personnel d’interaction – devraient intégrer la thématique de
l’intangibilité physique et mentale du service, et insister sur les techniques de tangibilisation
physique, mais aussi mentale, que les membres du personnel peuvent mettre en œuvre dans
leur interaction avec les clients (voir ci-dessous pour des recommandations en matière de
techniques de tangibilisation). Ces formations devraient également insister sur le rôle possible
du personnel de contact dans la réduction du risque perçu par le client, en donnant des
informations rassurantes et réalistes sur le service. Comme déjà discuté, cela est
particulièrement important pour les services perçus comme intrinsèquement fort risqués par
une proportion importante de la clientèle, puisque le gain de connaissance de ces services –
basé sur des informations rassurantes et réalistes – est alors susceptible de diminuer le risque
perçu.
4.4.
Simplification des offres et du programme marketing
Trout (1998) ou Cristol et Sealey (2000) prônent, dans leurs ouvrages, le retour à la simplicité
dans le marketing. Ils partent du constat que les clients sont de plus en plus stressés face à la
complexité des choix qu’ils ont à faire quotidiennement. Les entreprises ont en effet multiplié
à outrance les catégories et les variétés de produits ou de services offerts, les options tarifaires
complexes et peu transparentes, ou le nombre de marques différentes. Il faut reconnaître que
le marketing devient de plus en plus sophistiqué, et qu’il perd ainsi parfois en
compréhensibilité. Il suffit d’analyser l’offre d’un opérateur de téléphonie mobile, par
exemple, pour réaliser combien les formules d’abonnement et les tarifs proposés sont
diversifiés et peu clairs. Le site Internet d’un grand opérateur belge est ainsi à ce point confus
dans la présentation de sa gamme qu’il est impossible de lister et d’énumérer l’entièreté des
formules d’abonnements possibles. Comment le client peut-il dès lors naviguer face à une
telle complexité ? Comment peut-il être capable de saisir les nuances entre les alternatives, et
d’identifier celle qui répond le plus adéquatement à ses besoins ? Comment les opérateurs - et
plus largement les sociétés de services ou de produits - peuvent-ils communiquer clairement
279
face à une telle pléthore d’offres ou de prix différents ? Au-delà des offres ou de leur grille
tarifaire, la communication elle-même est souvent devenue peu explicite, développant des
concepts créatifs parfois fort peu compréhensibles pour les clients ou les prospects, et parfois
peu raccrochés à l’univers de référence des produits ou des services concernés.
Cette recherche a mis en avant le bien-fondé de la tangibilisation mentale du service,
notamment grâce à son influence sur le processus de réduction du risque perçu. Or, la
tangibilisation mentale du service passe par une clarification du service, de ses
caractéristiques ou de ses bénéfices. Comme le suggèrent Trout (1998) ou Cristol et Sealey
(2000), nous encourageons donc les managers d’activités de service, et plus largement les
praticiens du marketing, à simplifier leurs offres et leurs programmes marketing. Plus
spécifiquement, nous pensons que les managers devraient être vigilants à limiter l’extension
sans fin des gammes de produits ou de services, de les consolider et de les rationaliser lorsque
c’est possible, ou de parfois remplacer plutôt qu’ajouter systématiquement de nouvelles offres
à celles déjà existantes. La création d’offres conjointes - notamment en couplant des produits
et des services complémentaires -, pourrait également simplifier le processus de prise de
décision si ces offres créent du sens. Il pourrait également être judicieux de mettre en place
des grilles tarifaires plus transparentes, de penser les stratégies de positionnement et
d’architecture de marques plus simplement, et de les communiquer de manière accessible au
client.
L’exemple du lancement de l’i-Mac d’Apple est un succès en la matière. Alors que Microsoft
proposait une très large gamme d’options ou d’extra, la campagne de lancement de l’i-Mac a
insisté sur la simplification du choix du client, avec des propositions telles que
« Extraordinairement simple, simplement extraordinaire », « Une décision, une boîte, un
prix » ou encore « Pour tout ceux qui pensent que les ordinateurs sont trop compliqués ».
Cet effort de simplification est plus essentiel encore lorsque les cibles marketing sont
composées de personnes de faible niveau d’éducation, puisqu’il semble que ces personnes
basent essentiellement leur choix sur un attribut unique et concret, et qu’elles éprouvent des
difficultés à raisonner en termes abstraits. Plus généralement, il est nécessaire d’adapter le
degré de simplicité de son approche marketing aux spécificités et aux aptitudes de la cible
visée. Il faut toutefois souligner que certaines cibles particulières pourraient rejeter l’idée
d’une trop grande simplification (en B2B par exemple, une clientèle de techniciens ou
280
d’ingénieurs valorisera une explication technique par essence compliquée, parce que ces
personnes sont en mesure de comprendre le contenu et la nature de cette explication).
4.5.
Nouvelles pistes en matière de tangibilisation des services
Les chercheurs et les praticiens du marketing des services s’accordent à dire que les services
doivent être tangibilisés, entendez le plus souvent qu’ils doivent être matérialisés dans l’esprit
des clients ou des prospects. A côté de la tangibilisation physique des services, cette recherche
souligne également l’importance de la tangibilisation mentale de l’offre de services. Ainsi, en
plus des leviers de tangibilisation déjà évoqués dans le cadre conceptuel de cette recherche,
nous pouvons proposer aux managers d’activités de service de nouvelles pistes pour
tangibiliser le service, tant physiquement que mentalement.
4.5.1. Améliorer la connaissance et stimuler l’utilisation comme levier de tangibilisation
Les conclusions de cette recherche nous ont permis de démontrer que le gain de connaissance
ou l’intensification de l’utilisation influencent négativement (càd en sens opposé) le degré
d’intangibilité physique et mentale d’une offre de services ou d’une marque. Pour les
personnes de faible niveau d’éducation, ce résultat n’a pas pu être formellement démontré.
Notons toutefois que, pour ce groupe de personnes, tous les indices de corrélation entre
intangibilité et connaissance ou utilisation sont négatifs, sans pour autant tous être
significatifs (en raison probablement de la faible taille des sous-échantillons).
Toutes actions visant à améliorer le degré de connaissance des clients ou des prospects à
l’égard du service ou de la marque, ou à en intensifier l’utilisation, peuvent donc contribuer à
tangibiliser le service.
Comme déjà évoqué dans la partie conceptuelle, la communication au sens large, la force de
vente ou l’interaction avec un personnel de contact formé et compétent, la formation (en cas,
par exemple, de services BtoB complexes), l’expérience directe, la stimulation du bouche-àoreille, …
sont ainsi de nature à tangibiliser le service, notamment grâce au gain de
connaissance qui en résulte pour les clients
281
En outre, si l’utilisation accrue s’accompagne d’une réduction de l’intangibilité perçue et
d’une déconnexion de l’intangibilité (physique) avec le risque perçu, il peut être judicieux de
favoriser l’accès au service ou à la marque pour des non-utilisateurs. Ceci est particulièrement
vrai en cas de lancement de nouveaux services ou de nouvelles marques.
Plusieurs techniques peuvent être mises en œuvre pour stimuler l’essai :
•
Proposer, pendant une période de lancement, l’utilisation gratuite ou à prix réduit du
service ou de la marque. C’est la stratégie mise en place par BeTV lors du lancement de
son nouveau bouquet numérique. Les managers de BeTV proposent gratuitement des
extensions du bouquet pour que les gens puissent essayer cette offre pendant une période
de 6 mois. Un des objectifs visés par cette action est que les gens puissent mieux évaluer
et comprendre les bénéfices du bouquet total par rapport à un bouquet télévisuel réduit, en
diminuant temporairement le risque associé à ce service. En ce sens, il s’agit d’une
technique de tangibilisation mentale d’une offre fonctionnellement assez complexe, et
d’une technique de réduction de risque qui pourrait y être associée. Un autre exemple est
le prodéo comptable, qui permet à un futur créateur d’entreprise en Belgique de consulter
une première fois gratuitement un expert-comptable pour être aidé dans ses démarches de
création. Si la Fédération belge des Comptables a pris cette initiative, c’est notamment
pour permettre au porteur de projet de mieux comprendre la valeur ajoutée d’un expertcomptable tant lors de la phase de création que pendant la période d’activité de
l’entreprise (même si l’objectif principal est un objectif d’acquisition de nouveaux clients,
d’autant plus que le prospect pourrait se sentir redevable envers le comptable qu’il a
rencontré gratuitement, et lui confier ainsi plus facilement sa comptabilité).
•
Proposer des garanties consécutives à l’achat pendant une période de temps. Actimel est
ainsi une marque de lait fermenté à boire, qui a, d’après la firme Danone, des vertus
positives sur l’organisme. Cette marque mène actuellement une campagne de
communication massive pour encourager les non-utilisateurs d’Actimel à tester le produit
(il s’agit du programme Actimel Challenge). Danone garantit le remboursement de quinze
Actimel à boire si, au terme d’une prise quotidienne d’une petite bouteille pendant quinze
jours, le client ne sent pas une différence dans son organisme. Cette action vise
essentiellement à recruter de nouveaux utilisateurs, en stimulant l’achat, et en réduisant le
risque financier associé à l’achat. En outre, elle vise à permettre aux non-utilisateurs de la
282
marque de mieux comprendre les bénéfices de la consommation de ce produit à travers
une expérience directe. En ce sens, l’action peut également être vue comme un moyen de
tangibiliser mentalement les bénéfices du produit. Et si l’exemple a été volontairement
choisi dans le domaine des produits et non des services, c’est pour souligner que parler de
tangibilisation en matière de produits n’est pas une aberration, puisque les produits
peuvent être mentalement intangibles.
•
Parmi les outils de communication marketing, la promotion des ventes vise à stimuler
l’utilisation d’un service ou l’achat d’un produit pendant une période de temps limitée.
Les techniques de promotion des ventes consistent, au sens large, en une communication
avec incitant à l’achat. Elles peuvent prendre la forme de bons de réduction et autres
rabais, de cadeaux, de jeux concours, …(Lovelock, Wirtz et Lapert, 2004). Les grands
restaurants étoilés bruxellois organisent ainsi chaque année des soirées spéciales où les
jeunes peuvent fréquenter le restaurant pour un montant forfaitaire accessible à leur
budget. Les chefs participants à ces actions promotionnelles veulent ainsi montrer les
bénéfices d’une cuisine gastronomique auprès de jeunes qui, sans ces actions, ne
pourraient pas fréquenter de tels établissements. L’intérêt commercial est évidemment
présent, puisque les jeunes d’aujourd’hui peuvent se transformer en clients de demain,
s’ils sont séduits par l’expérience. Et précisément, l’expérience directe peut leur faire
mieux comprendre la valeur ajoutée de tels établissements, tant en matière de qualité du
repas qu’en matière de supériorité du service.
4.5.2. Accroître la visibilité du service et sa valeur ajoutée perçue
Un des problèmes liés à l’intangibilité du service est la difficulté à faire percevoir au client ou
au prospect la valeur ajoutée de son offre. Ce problème est particulièrement criant en B2B. Un
consultant, expliquant une possible intervention chez un client, peut ainsi éprouver des
difficultés à faire prendre conscience de la valeur ajoutée de l’investissement à consentir par
rapport à sa proposition de mission. Des prestataires de services internes, tels que des services
IT, doivent s’efforcer de faire percevoir leurs services autrement que comme des commodités.
En outre, ils doivent pouvoir faire prendre conscience au reste de l’organisation que la valeur
ajoutée de leurs services n’existe pas seulement en cas de rupture du service et d’intervention
pour le rétablir, mais qu’elle est continue. Finalement, ils doivent pouvoir donner de la
visibilité à un service dont une partie seulement est visible pour ses utilisateurs.
283
Une des stratégies pour faire percevoir la valeur ajoutée d’un service pourrait consister à
documenter le service, en utilisant des indicateurs mesurables ou des bénéfices concrets du
service pour ses bénéficiaires.
Nous avons récemment assisté à une présentation de prospection commerciale d’un
consultant, qui cherchait à vendre un projet de rationalisation du portefeuille clients, en vue
d’établir des priorités en termes d’actions marketing et commerciales sur base du potentiel de
rentabilité des clients. La présentation était passionnante pour le chercheur que nous sommes,
car elle détaillait la méthodologie mise en place pour assigner un score aux clients. Elle
semblait toutefois être commercialement peu efficace, aux dires du consultant. Ceci pourrait
s’expliquer par le fait qu’à aucun moment, le consultant n’a évoqué les bénéfices de son
service pour le client, alors même qu’il possédait des indicateurs mesurables de rentabilisation
de projets identiques, déjà implémentés chez d’autres clients. Sa présentation est restée à un
niveau conceptuel relativement abstrait, et les étapes-clés du processus d’intervention n’ont
pas été appuyées par des éléments concrets et évocateurs de ses bénéfices pour le client.
Une autre stratégie viserait à permettre au client de se faire une idée du résultat attendu du
service à travers des témoignages. Il s’agirait, par exemple, pour une compagnie d’assurance,
de s’appuyer sur l’un de ses assurés relatant l’efficacité de la prise en charge de son sinistre
par sa compagnie.
Afin de faire prendre conscience de la valeur ajoutée du service – ou simplement de son
existence en dehors des périodes d’incidents –, le contenu même du service pourrait être
documenté. Certaines grandes sociétés ont ainsi adjoint au service IT des account managers,
qui visitent de manière régulière les clients internes pour expliquer le contenu des services
prestés par l’IT. Ces visites sont ainsi l’occasion de passer en revue l’ensemble des incidents
IT sur la période écoulée, ainsi que les actions mises en œuvre pour les corriger. L’account
manager va également expliquer les actions futures qui seront mises en place par le service
IT, et qui seront susceptibles d’influencer le département interne concerné. Finalement, il peut
également profiter de ces réunions pour expliquer les tâches réalisées par le service IT, qui
n’ont pas un impact direct sur le département visité. Ce faisant, il accroît considérablement la
visibilité d’un service qui, autrement, pourrait passer inaperçu.
284
Un autre outil permettant d’améliorer la visibilité d’un service aux yeux d’un client interne ou
externe est le « time tracking system ». Toujours dans l’exemple d’un service IT d’une grande
entreprise, des outils peuvent être mis en place pour imputer à chaque département de
l’entreprise le temps consacré au développement ou au support IT qui les concerne. Ce temps
est ensuite traduit en budget, également imputé au budget de fonctionnement des
départements concernés. Si l’objectif est de répartir les coûts IT sur les différentes entités de
l’entreprise, il vise également à accroître la visibilité des services prestés pour ces entités. En
ce sens, ce genre de système permet de tangibiliser physiquement et mentalement ces
services.
4.5.3. Améliorer la compréhension du mécanisme de l’offre et de son processus
Certains leviers peuvent également être mis en place pour améliorer la compréhension du
mécanisme de l’offre dans l’esprit du client ou du prospect, ce qui peut agir sur la
compréhension des bénéfices de l’offre. Voici quelques exemples :
•
Informer le client sur le déroulement du processus de service dans ses propres termes.
Ceci vise par exemple à expliquer à un patient le déroulement concret de sa journée
d’hospitalisation pour chaque étape clé : spécifier l’heure de la prise en charge, le lieu, la
(les) personne(s) rencontrée(s), l’objectif de l’examen ou de l’intervention, le rôle attendu
du patient et du prestataire de soins, la durée, les conséquences éventuelles, …
•
La visualisation de certaines étapes du processus de production du service, telles que le
suivi des commandes via Internet, peut permettre de mieux comprendre le
fonctionnement de ce service. Ainsi, la possibilité de suivi du colis chez Fedex permet de
se représenter le processus de production du service, et de mieux comprendre comment le
service est délivré aussi rapidement.
•
Visualiser une expérience de service ou de partie de service à l’aide d’un support
(audio)visuel retraçant le parcours d’un client-type. Ainsi, une publicité pour McDonald
montrant une famille qui entre dans le restaurant, passe sa commande, est servie, mange à
table, puis sort satisfaite, constitue une aide pour mieux comprendre comment le service
est délivré dans ce fast-food.
285
•
Accroître la visualisation des éléments matériels du service avant l’acte d’achat ou de
consommation, afin de créer une expérience factice de service. Le fait de pouvoir
visualiser à 360° les cabines des avions de Singapore Airlines sur leur site web permet,
outre un accroissement de la tangibilité physique perçue, d’appréhender plus facilement
le niveau élevé de service à bord.
Il est intéressant de noter que les recommandations présentées dans cette section permettent,
pour la plupart, d’agir conjointement sur le processus de tangibilisation des services et sur le
processus de réduction du risque qui y est associé, accentuant l’idée que ces deux processus
sont liés l’un à l’autre.
CONCLUSION DU CHAPITRE 12
Ce chapitre a permis de discuter plus en détail des résultats de cette recherche, et d’en
souligner les implications théoriques pour la discipline du marketing des services, et plus
largement du marketing.
Nous avons ainsi discuté plus en profondeur des facteurs pouvant potentiellement expliquer la
perception unidimensionnelle d’intangibilité par les personnes de faible niveau d’éducation,
en évoquant et commentant trois pistes d’explication possibles. La discussion des résultats
observés pour les personnes de niveau d’éducation plus élevé à été l’occasion de questionner
le paradigme fondateur du marketing des services, et d’apporter quelques éléments de
réflexion à son propos. Ce chapitre a également souligné l’intérêt que peut représenter la
mesure du risque perçu global, en constatant un décalage entre la mesure globale du risque et
sa mesure à travers les six facettes communément admises. Finalement, les propositions
théoriques relatives à l’influence de l’intangibilité sur le risque perçu ont pu être
considérablement précisées.
Ce chapitre a également été l’occasion de souligner l’intérêt de cette recherche pour la
pratique managériale, notamment en matière de gestion d’une marque de service, ou plus
spécifiquement en matière de choix du nom de marque et de formulation du positionnement.
Ce travail suggère également de nouvelles variables de segmentation potentiellement
286
pertinentes à mettre en œuvre. L’importance du marketing interne au sein des organisations de
services a une nouvelle fois été soulignée, de même que nous plaidons pour une simplification
de la pratique et des programmes marketing. Finalement, de nouvelles pistes en matière de
tangibilisation des services ont été suggérées.
La discussion de ces résultats a également été l’occasion de pointer des limites de ce travail,
qui constituent autant de voies de recherches futures. Nous allons à présent présenter plus
précisément ces limites et ces nouvelles perspectives de recherche.
287
288
CHAPITRE 13 : LIMITES ET VOIES DE RECHERCHES FUTURES
Ce chapitre vise à présenter les limites de cette recherche, ainsi que les nombreuses
opportunités de recherches futures.
1.
LES PERSONNES DE FAIBLE NIVEAU D’EDUCATION
L’analyse et la discussion des résultats relatifs aux personnes de faible niveau d’éducation ont
été l’occasion de souligner plusieurs limites, appelant à de nouvelles études sur ce groupe de
personnes.
•
La relative faible taille de l’échantillon de « niveau d’éducation faible » nous a empêché
de mener des analyses fines au niveau de chaque entité considérée isolément. Nous
n’avons ainsi pas pu tester les deuxième et troisième corps d’hypothèses pour ce segment
de la population.
•
L’interprétation des résultats a été limitée par le manque de connaissance et de
compréhension de la réalité associée aux services ou aux marques analysées. En tout état
de cause, nous n’avons pu que formuler des hypothèses sur la nature de cette réalité
associée, ainsi que sur la nature et le contenu même de l’intangibilité telle que perçue par
ce groupe de personnes. Des études spécifiques – notamment qualitatives - seraient dès
lors nécessaires pour mieux comprendre comment les personnes de faible niveau
d’éducation perçoivent les services et les marques de service qui les entourent.
Au delà de ces considérations spécifiques, cette recherche pose une question plus
fondamentale : comment interroger des personnes de faible niveau d’éducation ? Comment
s’assurer que les instruments de mesure ou les techniques d’enquête utilisés soient adaptés à
cette classe de personnes ? Et au besoin, comment adapter les outils et les techniques de
recherche marketing à ces individus ?
Nous avons évoqué dans le chapitre précédent le concept de littératie des individus, fortement
corrélé avec le niveau d’éducation. Pour rappel, la littératie fait référence à « la capacité de
comprendre, d’utiliser et de traiter l’information écrite nécessaire pour bien fonctionner en
société, réaliser des objectifs personnels, développer ses compétences, et acquérir des
289
connaissances ». Une enquête internationale24 réalisée sous l’égide de l’OCDE, et portant sur
la littératie des adultes, illustre toute la difficulté mise en évidence à travers ces questions
posées.
En vue de mesurer le degré de littératie de populations de différents pays, l’étude
internationale de l’OCDE a évalué les capacités des personnes interrogées à effectuer trois
types de tâches :
•
La lecture de texte (PROSE), qui vise à évaluer la capacité d’un individu à comprendre et
à pouvoir utiliser les informations contenues dans des textes (tels que, par exemple, des
éditoriaux, des brochures ou des modes d’emploi).
•
L’utilisation de documents (DOC), qui vise à évaluer la capacité d’un individu à repérer et
à utiliser l’information présentée sous diverses formes (par exemple, une demande
d’emploi, une fiche de paie, un horaire de transport en commun, une carte routière, des
tableaux et des graphiques).
•
La numératie (QUANT), qui vise à évaluer la capacité des individus à appliquer des
opérations arithmétiques, séparément ou successivement, à des nombres contenus dans
des imprimés (comme, par exemple, calculer un prix relatif, établir le solde d’un comptechèques, calculer un pourboire, remplir un bon de commande ou calculer l’intérêt d’un
emprunt à partir d’une annonce publicitaire).
Le score de littératie de chaque individu sur chacun de ces trois domaines peut varier de 0 et
500, et cinq niveaux de capacité sont distingués selon le score obtenu dans chaque domaine :
•
Niveau 1 : entre 0 et 225
•
Niveau 2 : entre 226 et 275
•
Niveau 3 : entre 276 et 325
•
Niveau 4 : entre 326 et 375
•
Niveau 5 : entre 376 et 500
L’étude estime que les personnes appartenant aux niveaux 1 et 2 ne peuvent pas fonctionner
correctement dans les sociétés modernes. Le niveau 3 est considéré comme le niveau
minimum convenable pour éviter les principales difficultés de la vie quotidienne et
24
Werquin, P. (2001), « La littératie à l’ère de l’information : rapport final de l’enquête internationale sur la
littératie des adultes », rapport OCDE.
290
fonctionner correctement dans le contexte social et économique des sociétés modernes.
Finalement, les niveaux 4 et 5 regroupent des individus de bon ou très bon niveau, manipulant
l’information avec facilité, et pouvant réaliser des tâches complexes et variées.
L’étude – menée en trois vagues successives entre 1994 et 1998 – a été administrée dans 20
pays sur un échantillon représentatif de la population âgée de 45 à 65 ans. La Belgique était
l’un de ces pays (enquête menée en Flandre uniquement). Les résultats sont interpellants,
comme le montre le tableau ci-dessous (où le premier chiffre représente la proportion
observée en Belgique (Flandre), et où le chiffre entre parenthèses représente la proportion
moyenne calculée pour les 20 pays) :
Tableau 13.1 : Proportion de la population flamande âgée de 45 à 65 ans, répartie selon les
niveaux de littératie
PROSE
DOC
QUANT
Niveau 1
Niveau 2
Niveau 3
Niveau 4/5
28,5%
35,9%
28,1%
7,6%
(28,4%)
(30,8%)
(28,1%)
(12,7%)
26,1%
29,0%
36,6%
8,3%
(29,5%)
(30,7%)
(27,9%)
(12,0%)
27,4%
26,4%
32,4%
13,9%
(25,0%)
(28,0%)
(30,5%)
(16,5%)
Source : rapport final de l’enquête internationale sur la littératie des adultes – données disponibles pour les 20
pays sur le site http://www11.hrsdc.gc.ca/fr/sm/ps/rhdcc/ra/2001-002583/page01.shtml
D’après cette étude, il y aurait donc en Flandre parmi les personnes âgées de 45 à 65 ans entre
54 et 64% environ de personnes de niveaux 1 et 2 de littératie, soit des niveaux jugés
insuffisants pour fonctionner correctement dans les sociétés modernes. En outre, cette étude
suggère qu’une corrélation forte existe entre le score de littératie et le niveau d’éducation.
Ainsi, à titre de comparaison, environ 55% des Flamands âgés de 45 ans à 65 ans possèdent
un niveau d’éducation faible. Finalement, en Belgique en 2004, on estime que 10% de la
population adulte ne sait ni lire ni écrire25.
Ces proportions très élevées interpellent, mais doivent toutefois être relativisées, sans être
minimisées. Elles portent sur la proportion des 45-65 ans. Or, nous avons vu que l’âge est
25
Statistique de l’Unesco, publiée par l’association Lire et Ecrire.
291
corrélé avec le niveau d’éducation, et que, plus spécifiquement, le niveau d’éducation va
augmenter au sein des personnes jeunes, en vertu des réglementations en matière
d’enseignement obligatoire. Néanmoins, ces résultats viennent largement questionner
l’aptitude des individus possédant un faible niveau de littératie à participer à des enquêtes
s’appuyant sur des questionnaires parfois complexes. Or, il nous faut reconnaître le niveau
relativement complexe de notre instrument de mesure, couplé à un mode auto-administré du
questionnaire, où la personne peut dès lors ne pas bénéficier d’assistance.
Ces résultats suggèrent donc plusieurs commentaires et voies de recherche futures :
•
A la lumière de ces constatations, notre questionnaire d’enquête a peut-être été mal
compris par certaines de ces personnes interrogées, au vu de sa relative complexité, et du
mode d’administration choisi. Ce constat appelle dès lors à de nouvelles études portant
spécifiquement sur les individus peu éduqués.
•
Cet appel à de nouvelles études soulève la question de l’adaptation de nos outils de
recherche marketing à ces personnes de faible niveaux de littératie. L’étude menée par
Viswanathan et al. (2005) s’appuie ainsi sur des méthodologies qualitatives pour
interroger ces personnes. Il serait donc nécessaire de mener de telles études sur le thème
de l’intangibilité des services, pour évaluer comment ces individus perçoivent les services,
et ce qu’ils utilisent comme stratégies pour faire face à l’intangibilité relative des services.
Il serait également nécessaire de développer un instrument simplifié de mesure de
l’intangibilité pour ces groupes de personnes, et d’adapter le mode d’administration du
questionnaire, pour éventuellement apporter une assistance à ces personnes. Ceci nous
amènerait à nous interroger sur le biais possible d’une telle assistance. Il faudrait donc
reconsidérer toute la procédure de sondage pour ces personnes aux caractéristiques
particulières.
•
La littératie des individus est généralement considérée comme acquise dans la majorité
des études menées en marketing (Viswanathan et al., 2005). En outre, un grand nombre
d’études et de modèles marketing ont été développés ou testés sur base d’échantillons
d’étudiants, le plus souvent universitaires. Quel est donc le pouvoir de généralisation des
résultats issus de ces études ? Sont-ils stables et valides pour les personnes de faible
niveau d’éducation, sachant que leur mode de raisonnement et leur capacité d’abstraction
sont plus limités ? Nous avons ainsi pu montrer que le modèle bidimensionnel de
l’intangibilité n’est pas stable pour ces personnes. Qu’en est-il des autres modèles
développés en marketing des services, et plus largement en marketing ? Avons-nous
292
correctement compris les besoins plus spécifiques de ces individus ? L’étude de
Viswanathan et al. (2005) suggère que la pratique marketing actuelle ne répond
majoritairement pas à leurs besoins et aptitudes spécifiques, notamment en matière de
recherche marketing, de communication, et plus spécifiquement en matière de promotion
des ventes, en matière de changement fréquent de noms de marque ou de logos, etc.
•
Les possibilités et les voies de recherche propres à ce groupe de personnes sont donc
immenses, et elles constituent un enjeu de taille dans une perspective globale. Ainsi, si les
faibles niveaux de littératie sont déjà importants dans les pays industrialisés, que dire des
pays émergents ? Des pays comme la Chine ou l’Inde, par exemple, souvent présentés
comme les puissances économiques de demain, comptent un nombre extraordinairement
élevé de personnes de faible niveau de littératie. En outre, ces voies de recherches futures
dépassent le cadre du marketing commercial, et prennent une importance non négligeable
en marketing non marchand, ou en protection du consommateur notamment.
2.
APPORT LIMITE POUR LA DISCUSSION SUR LE PARADIGME FONDATEUR DU MARKETING
DES SERVICES
Nous n’avons pas intégré de produits dans l’étude conclusive. Ce faisant, nous ne pouvons
pas conclure de manière solide quant à la capacité de la dimension physique de l’intangibilité
à discriminer les produits et les services. Il serait donc intéressant de mener une nouvelle
étude destinée à mesurer le degré d’intangibilité physique et mentale d’un nombre plus
important de services et de produits matériels, pour évaluer si l’intangibilité physique ne serait
pas un critère discriminant stable entre les produits et les services. Cette nouvelle étude
devrait intégrer une panoplie plus large de services, dont la variabilité en termes de spectre
d’intangibilité perçue est plus large. Dans la présente étude, nous nous sommes fixé comme
contrainte de retenir des services pour lesquels il existe des offres marquées. Ce faisant, nous
n’avons pas intégré, par exemple, des services comme une consultation chez un
psychothérapeute, un service d’avocat ou de comptable, etc., dont l’intangibilité attendue dans
ses deux dimensions serait plus élevée.
Il serait également intéressant de travailler sur des offres dites miroirs, c’est-à-dire sur des
offres de produits et des services qui remplissent la même fonction de base (acheter un plat
surgelé pour le préparer à domicile ou aller prendre son repas au restaurant ; acheter un bien
293
ou le louer ; acheter un compact disque ou assister à un concert ; acheter un médicament antistress ou pratiquer une séance de sophrologie ; etc.).
Finalement, des analyses sectorielles pourraient être menées pour évaluer comment les
conclusions évoluent au sein d’un même secteur. Ainsi, nous pourrions par exemple étudier le
secteur du transport, qui regroupe des offres de produits (la voiture, la moto, …), et des offres
de services (le transport public, le taxi, …).
3.
ANALYSE COMPLEMENTAIRES SUR LA MARQUE ET L’IMAGE DE MARQUE
Une autre limite de notre recherche est relative à la marque. Nous n’avons pas étudié le réseau
d’associations à la marque présent dans la mémoire à long terme des individus. Nous ne
savons dès lors pas le type d’associations à développer autour de la marque pour agir de
manière intégrée sur le processus de développement d’une marque forte et pour agir sur le
processus de tangibilisation des services. Il serait donc intéressant de mener des recherches
plus approfondies sur le réseau d’associations présentes dans la mémoire à long terme des
individus, et d’évaluer comment ce réseau d’associations conditionnerait la perception
d’intangibilité. Une démarche qualitative serait nécessaire pour mener un tel objectif de
recherche. En outre, il serait intéressant d’analyser un plus grand nombre de marques pour un
même service, pour en identifier les différences possibles. Cela nécessiterait également
d’approfondir, pour chaque marque, le réseau d’associations présent dans la mémoire des
individus.
4.
AUTRES VOIES DE RECHERCHE FUTURES
•
Nous avons évoqué le problème de réalité associée au service, à une marque ou à un
support pour les personnes de faible niveau d’éducation. Ce problème ne se limite pas à
cette catégorie de personnes. Pour l’ensemble des cibles marketing visées, il est essentiel
de bien comprendre la réalité associée à l’offre commercialisée. Cette information est
nécessaire pour affiner les recommandations en matière de stratégies de tangibilisation et
de stratégies de réduction de risque. De façon plus générale, la bonne compréhension de la
réalité associée au service ou à la marque par la cible marketing est un prérequis
indispensable pour développer des stratégies marketing solides, et pour les opérationaliser
de manière cohérente. Plus particulièrement, les décisions en matière de positionnement et
294
d’identité de marque au niveau stratégique, et les décisions en matière de communication,
d’extension de marque, et de choix des canaux de distribution, vont être particulièrement
dépendantes de la réalité associée au service.
•
Les résultats et la discussion relatifs à la mesure du risque perçu suggèrent que les facettes
de risque ne permettent pas d’absorber l’intégralité du sentiment global de risque. Il serait
dès lors intéressant de partir de ce constat pour tenter de qualifier plus précisément encore
la nature du risque globalement perçu par les individus face à une situation de choix de
consommation. Autrement dit, l’objectif serait de réconcilier l’approche par facette et
l’approche globale, pas nécessairement au niveau de la méthodologie de la mesure, mais
plutôt au niveau du pouvoir explicatif des facettes sur le risque perçu global, dans un souci
de qualification du risque global. Mieux qualifier la nature de ce risque global permettrait
en effet de mettre en place des stratégies de réduction de risque plus spécifiques, et dès
lors probablement plus efficaces.
•
Cette étude a été menée dans un contexte BtoC. Il serait intéressant de répliquer l’étude
dans un contexte B2B. L’intangibilité des services est en effet un enjeu de taille dans un
grand nombre de services professionnels. Nous avons ainsi évoqué la difficulté pour les
prestataires de services B2B de faire percevoir la valeur ajoutée de leur offre, ou
l’existence même du service en dehors de ses ruptures éventuelles. D’autres questions se
posent, comme par exemple la gestion de l’externalisation de services hautement
intangibles. Comment définir les accords contractuels d’externalisation sur les indicateurs
clés du service ? Comment en contrôler la performance ? Comment en évaluer le risque,
etc. ?
295
296
CONCLUSION GENERALE
Trois grands objectifs ont été assignés à cette recherche doctorale. Le premier vise à
comprendre la nature du concept d’intangibilité d’une offre globale de services, et d’en
proposer une définition probante, et un outil de mesure fiable et valide. Le second vise à tester
l’impact de l’intangibilité et de ses éventuelles dimensions sur le risque perçu par le client de
service. Finalement, le troisième objectif cherche à identifier et à tester l’impact possible de
variables d’influence sur la relation entre l’intangibilité et le risque perçu, et sur ces variables
considérées isolément.
Au terme d’une importante revue de la littérature, d’une réflexion sur les spécificités
linguistiques qui entourent le concept d’intangibilité, sur des entretiens exploratoires auprès
de managers et de clients d’activités de services, nous avons retenu la définition suivante du
concept d’intangibilité, fidèle à la conceptualisation de Bateson (1979) et de Berry (1980) :
1. Un manque de matérialité ;
2. Une difficulté accrue à être défini, formulé et compris de façon claire et précise.
Des études à vocation exploratoire ont ensuite été menées pour développer une échelle de
mesure du degré d’intangibilité d’une offre de services, puisque les instruments de mesure
identifiés ont été jugés insatisfaisants pour la présente recherche. Ces études ont abouti à la
proposition d’une échelle à 7 indicateurs, qui distingue deux dimensions au concept étudié, la
dimension physique et la dimension mentale.
L’étude conclusive permet toutefois de proposer que le niveau d’éducation des individus
affecte la manière dont ils perçoivent l’intangibilité. Si la structure bidimensionnelle est
validée pour les personnes de niveau d’éducation moyen à élevé, elle est rejetée pour les
personnes de faible niveau d’éducation, au profit d’une structure unidimensionnelle.
L’étude conclusive permet également de conclure à l’impact significatif de l’intangibilité sur
le risque perçu par les acheteurs. Plus spécifiquement, pour les personnes de niveau
297
d’éducation moyen à élevé, les deux dimensions de l’intangibilité affectent positivement le
risque perçu, de manière significative.
Toutefois, le degré de connaissance des individus à l’égard des services ou des marques, ainsi
que le degré d’utilisation, sont de nature à modifier la relation entre l’intangibilité ou ses
dimensions et le risque perçu, de même qu’ils influencent de manière variée ces concepts
considérés isolément. En cas de connaissance ou d’utilisation faible des services ou des
marques, l’intangibilité d’une part, et ses deux dimensions d’autre part - selon que nous
analysons les personnes de faible niveau d’éducation ou les personnes de niveau d’éducation
moyen à élevé - influencent positivement et significativement le risque perçu. En cas de
connaissance ou d’utilisation élevée, par contre, seule la dimension mentale de l’intangibilité,
distinguée par les personnes de niveau d’éducation moyen à élevé, continue à exercer un
impact significatif sur le risque perçu. L’intangibilité perçue de manière unidimensionnelle
par les personnes de niveau d’éducation faible, et l’intangibilité physique distinguée par les
personnes plus éduquées, n’exercent, quant à elles, plus d’influence sur la variable de risque.
Cette recherche a également pu montrer que, pour le groupe de personnes de niveau
d’éducation moyen à élevé, un accroissement de connaissance ou d’utilisation s’accompagne
d’une diminution systématique de l’intangibilité physique et mentale perçue, mais ne
s’accompagne pas systématiquement d’une réduction du risque perçu. Ce dernier résultat, à
première vue surprenant, fait l’objet d’une large discussion.
Finalement, cette recherche a pu formellement valider la proposition qu’à la marque perçue
comme forte sont associés un score d’intangibilité physique et un degré de risque perçu
inférieurs à ceux associés au service lié mais non marqué. En outre, si l’impact de la marque
perçue comme forte sur l’intangibilité mentale n’a pas pu être formellement démontré, des
analyses complémentaires suggèrent que la marque et l’image de marque permettent
également d’influencer cette dimension de l’intangibilité.
L’ensemble de ces résultats a fait l’objet d’une discussion approfondie, qui a notamment
permis de souligner les implications théoriques et managériales de cette recherche, mais
également ses limites. Finalement, les perspectives de recherche futures ont été présentées, et
ne manqueront pas de nous inspirer dans la poursuite de notre travail de chercheur.
298
299
300
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316
ANNEXES
317
ANNEXE 1 : LOGOS DE SOCIETES DE SERVICES
A l’endroit
Une fois retourné, on
retrouve un escargot
stylisé
318
ANNEXE 2 : LISTE DES 17 ITEMS GENERES
P1 :
Je perçois item comme étant 1 = exclusivement matériel à 7 = exclusivement
immatériel
M2 :
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est item 1 = avec beaucoup de facilité à 7
= avec beaucoup de difficulté
M3 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de très précis à 7 = de très flou
M4 :
Je suis capable de me représenter à l'
esprit ce qu'
est un item 1 = très facilement à 7 =
très difficilement
P5 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = qui est très facile à voir et à toucher à 7
= qui est très difficile à voir et à toucher
M6 :
Je comprends ce qu'
est item 1 = très facilement à 7 = très difficilement
P7 :
Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de totalement palpable à 7 = de
totalement impalpable
M8 :
Le mot "item" évoque pour moi quelque chose 1 = de tout à fait délimité dans mon
esprit à 7 = de pas du tout délimité dans mon esprit
M9 :
Pour comprendre clairement ce qu'
est un item, 1 = j'
ai besoin de plus d'
explications
sur ce que c'
est à 7 = je n'
ai pas besoin de plus d'
explications sur ce que c'
est
M10 : Quand on évoque le mot "item", j'
en ai immédiatement en tête une image 1 = très
précise à 7 = très floue
P11 : Un item évoque pour moi quelque chose 1 = qui est très facile à voir à 7 = qui est très
difficile à voir
M12 : Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un item 1 = de manière très précise à
7 = de manière très floue
M13 : Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de très simple à 7 = de très compliqué
M14 : Je suis en mesure de définir ce qu'
est un item 1 = en étant très précis à 7 = en étant
très flou
M15 : Un item évoque pour moi quelque chose 1 = de très concret à 7 = de très abstrait
M16 : Le mot "item" évoque pour moi quelque chose 1 = de très clair à 7 = de très vague
P17 : Un item évoque pour moi quelque chose 1 = qui est très facile à toucher à 7 = qui est
très difficile à toucher
Le mot "Item" est remplacé par le produit ou service correspondant.
319
ANNEXE 3 : QUESTIONNAIRE DE LA PREMIERE ETUDE EXPLORATOIRE (VERSION 1A)
I.
La consultation chez le médecin
1. Je perçois une consultation chez le médecin comme étant …
2. Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est une
consultation chez le médecin …
3. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
…exclusivement
matérielle
1
2
6
2
3
4
5
6
…de très précis
1
2
3
4
5
6
…de très flou
7
5. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
2
…très
facilement
1
2
…de totalement
palpable
1
2
2
8. Le mot "consultation chez le médecin" évoque pour moi
quelque chose…
…de tout à fait délimité
dans mon esprit
1
2
9. Pour comprendre clairement ce qu'
est une consultation chez le …j'ai besoin de
plus d'
explication
médecin …
sur ce que c'
est
1
2
10. Quand on évoque le mot "consultation chez le médecin", j'
en
ai immédiatement en tête une image …
5
…avec beaucoup
de difficulté
7
…très
facilement
1
7. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
4
…avec beaucoup
de facilité
1
4. Je suis capable de me représenter à l'
esprit ce qu'
est une
consultation chez le médecin …
6. Je comprends ce qu'
est une consultation chez le médecin …
3
…exclusivement
immatérielle
7
…très
précise
1
2
3
4
5
3
4
5
3
4
5
…très
difficilement
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
6
7
…très
difficilement
6
7
5
…de totalement
impalpable
7
3
4
3
4
5
3
4
5
3
4
5
6
…de pas du tout délimité
dans mon esprit
6
7
…je n'
ai pas besoin de
plus d'
explication
sur ce que c'
est
6
7
6
7
…très
floue
11. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
…qui est très
facile à voir
1
12. Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est une
consultation chez le médecin...
…de manière
très précise
1
13. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
14. Je suis en mesure de définir ce qu'
est une consultation chez le
médecin …
15. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
16. Le mot "consultation chez le médecin" évoque pour moi
quelque chose …
17. Une consultation chez le médecin évoque pour moi quelque
chose …
II.
2
3
4
5
6
…qui est très
difficile à voir
7
2
3
4
5
6
…de manière
très floue
7
…de très compliqué
1
2
3
4
5
6
…de très simple
7
…en étant très
précis
1
2
3
4
5
6
… en étant très
flou
7
…de très concret
1
2
3
4
5
6
… de très abstrait
7
3
4
5
6
3
4
5
…de très clair
7
…qui est très facile
à toucher
6
7
5
…exclusivement
immatériel
7
…de très vague
1
2
…qui est très difficile
à toucher
1
2
L'ordinateur portable
1. Je perçois un ordinateur portable comme étant …
2. Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un ordinateur
portable …
3. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
4. Je suis capable de me représenter à l'
esprit ce qu'
est un
ordinateur portable …
…exclusivement
matériel
1
…avec beaucoup
de facilité
1
…de très précis
1
…très
facilement
1
2
3
4
6
2
3
4
5
6
2
3
4
5
6
…avec beaucoup
de difficulté
7
…de très flou
7
6
…très
difficilement
7
2
3
4
5
5. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
6. Je comprends ce qu'
est un ordinateur portable …
7. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
8. Le mot "ordinateur portable" évoque pour moi quelque
chose…
9. Pour comprendre clairement ce qu'
est un ordinateur portable
…
10. Quand on évoque le mot "ordinateur portable", j'
en ai
immédiatement en tête une image …
11. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
12. Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un ordinateur
portable...
13. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
14. Je suis en mesure de définir ce qu'
est un ordinateur portable
…
15. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
16. Le mot "ordinateur portable" évoque pour moi quelque chose
…
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
2
…très
facilement
1
2
…de totalement
palpable
1
2
…de tout à fait délimité
dans mon esprit
1
2
…j'
ai besoin de
plus d'
explication
sur ce que c'
est
1
2
…très
précise
1
…qui est très
facile à voir
1
…de très vague
1
4
5
3
4
5
3
4
5
3
4
5
3
4
5
…de pas du tout délimité
dans mon esprit
6
7
…je n'
ai pas besoin de
plus d'
explication
sur ce que c'
est
6
7
2
3
4
5
6
2
3
4
5
6
…de manière
très précise
1
2
…de très compliqué
1
2
…en étant très
précis
1
…de très concret
1
3
…qui est très difficile
à voir et à toucher
6
7
…très
difficilement
6
7
…de totalement
impalpable
6
7
3
4
5
6
3
4
5
6
…très
floue
7
…qui est très
difficile à voir
7
…de manière
très floue
7
…de très simple
7
2
3
4
5
6
2
3
4
5
6
… en étant très
flou
7
… de très abstrait
7
2
3
4
5
6
…de très clair
7
17. Un ordinateur portable évoque pour moi quelque chose …
III.
…qui est très difficile
à toucher
1
2
3
4
5
…qui est très facile
à toucher
6
7
5
6
…exclusivement
immatérielle
7
L'assurance annulation voyage
1. Je perçois une assurance annulation voyage comme étant …
…exclusivement
matérielle
1
2. Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est une assurance …avec beaucoup
annulation voyage …
de facilité
1
3. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
…de très précis
1
2
2
3
4
5
6
2
3
4
5
6
…de très flou
7
…très
facilement
1
5. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
2
…très
facilement
1
2
2
7. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
…de totalement
palpable
1
8. Le mot "assurance annulation voyage" évoque pour moi
quelque chose…
…de tout à fait délimité
dans mon esprit
1
2
…j'
ai besoin de
plus d'
explication
sur ce que c'
est
1
2
9. Pour comprendre clairement ce qu'
est une assurance
annulation voyage …
4
…avec beaucoup
de difficulté
7
4. Je suis capable de me représenter à l'
esprit ce qu'
est une
assurance annulation voyage …
6. Je comprends ce qu'
est une assurance annulation voyage …
3
2
3
4
5
3
4
5
3
4
5
…très
difficilement
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
6
7
…très
difficilement
6
7
5
…de totalement
impalpable
7
3
4
3
4
5
3
4
5
6
…de pas du tout délimité
dans mon esprit
6
7
…je n'
ai pas besoin de
plus d'
explication
sur ce que c'
est
6
7
10. Quand on évoque le mot "assurance annulation voyage", j'
en
ai immédiatement en tête une image …
11. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
…très
précise
1
…qui est très
facile à voir
1
12. Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est une assurance …de manière
annulation voyage...
très précise
2
3
4
5
6
2
3
4
5
6
7
…qui est très
difficile à voir
7
2
3
4
5
6
…de manière
très floue
7
…de très compliqué
1
2
3
4
5
6
…de très simple
7
1
13. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
14. Je suis en mesure de définir ce qu'
est une assurance annulation …en étant très
voyage …
précis
15. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
16. Le mot "assurance annulation voyage" évoque pour moi
quelque chose …
17. Une assurance annulation voyage évoque pour moi quelque
chose …
…très
floue
1
…de très concret
1
2
3
4
5
6
… en étant très
flou
7
2
3
4
5
6
… de très abstrait
7
3
4
5
6
3
4
5
…de très vague
1
2
…qui est très difficile
à toucher
1
2
…de très clair
7
…qui est très facile
à toucher
6
7
ANNEXE 4 : QUESTIONNAIRE DE LA SECONDE ETUDE EXPLORATOIRE (ECHELLE PURIFIEE)
Le compte épargne
Je suis en …avec beaucoup
mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un compte épargne …
de facilité
1
compte épargne évoque pour moi quelque chose …
compte épargne évoque pour moi quelque chose …
épargne …
qu'
est un compte épargne …
moi quelque chose …
comme étant …
2
3
4
5
2
3
4
5
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
2
3
4
5
6
…avec beaucoup
de difficulté
7
Un
…de très simple
1
Un
…de très compliqué
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
6
7
Je comprends ce qu'
est un compte …très
Je suis en mesure de définir ce
Un compte épargne évoque pour
Je perçois un compte épargne
facilement
1
…en étant très
précis
1
…de totalement
palpable
1
…exclusivement
matériel
1
2
3
4
5
6
2
3
4
5
6
…très
difficilement
7
… en étant très
flou
7
6
…de totalement
impalpable
7
6
…exclusivement
immatériel
7
2
2
3
3
4
4
5
5
Le jeans
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un jeans …
Un jeans évoque pour moi quelque chose …
Un jeans évoque pour moi quelque chose …
Je comprends ce qu'
est un jeans …
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un jeans …
Un jeans évoque pour moi quelque chose …
Je perçois un jeans comme étant …
…avec beaucoup
de facilité
1
…de très simple
1
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
…très
facilement
1
…en étant très
précis
1
…de totalement
palpable
1
…exclusivement
matériel
1
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
…avec beaucoup
de difficulté
6
7
…de très compliqué
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
6
7
…très
difficilement
6
7
… en étant très
flou
6
7
…de totalement
impalpable
6
7
…exclusivement
immatériel
6
7
Le dîner dans une pizzeria
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un dîner dans une …avec beaucoup
pizzeria …
de facilité
Un dîner dans une pizzeria évoque pour moi quelque chose …
Un dîner dans une pizzeria évoque pour moi quelque chose …
Je comprends ce qu'
est un dîner dans une pizzeria …
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un dîner dans une pizzeria
…
Un dîner dans une pizzeria évoque pour moi quelque chose …
Je perçois un dîner dans une pizzeria comme étant …
1
…de très simple
1
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
…très
facilement
1
…en étant très
précis
1
…de totalement
palpable
1
…exclusivement
matériel
1
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
2
3
4
5
…avec beaucoup
de difficulté
6
7
…de très compliqué
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
6
7
…très
difficilement
6
7
… en étant très
flou
6
7
…de totalement
impalpable
6
7
…exclusivement
immatériel
6
7
ANNEXE 5 : QUESTIONNAIRE
DE LA TROISIEME ETUDE EXPLORATOIRE VISANT A PRETETSER LA RELATION ENTRE L’INTANGIBILITE ET LE
RISQUE PERÇU
Chère étudiante, Cher étudiant,
Tout d'
abord, je tiens à vous remercier vivement pour votre participation à cette enquête. Cette étude s'
inscrit dans le cadre de ma recherche
doctorale. Elle est strictement anonyme, et n'
a aucune fin commerciale.
Certaines phrases du questionnaire pourraient vous paraître un peu théoriques, étranges ou redondantes. Soyez cependant certains qu'
elles sont
toutes nécessaires à l'
objet de l'
étude. Aussi, nous vous demandons de veiller à répondre à l'
ensemble des questions, et à prêter attention aux
nuances entre chacune d’elles. En effet, si des réponses sont manquantes, votre questionnaire ne pourra malheureusement pas être exploité dans
l'
analyse des résultats. Une fois encore, merci pour votre aide
Les services analysés dans cette enquête sont une consultation chez un psychothérapeute, et l’entretien d’une voiture par un
professionnel (c’est à dire l’entretien planifié par un mécanicien des 30.000 Km p.ex – il ne s’agit donc pas d’une réparation consécutive
à une panne)
1. Une consultation chez un psychothérapeute
Pour chacune de ces questions, pourriez-vous entourer le chiffre qui correspond le mieux à votre avis :
Avez-vous déjà consulté un psychothérapeute ?
Jamais
1
2
3
4
1
2
3
4
2
3
4
Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais que je connais très Pas du tout d’accord
bien le service de consultation chez un psychothérapeute
En matière de consultation chez un psychothérapeute, je pourrais
donner de bons conseils si on me le demandait
Pas du tout d’accord
1
Très souvent
5
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Comparé à un expert, je dirais que je connais bien le service de
Pas du tout d’accord
1
consultation chez un psychothérapeute
Ces 12 derniers mois, j’ai régulièrement consulté un
Pas du tout d’accord
1
psychothérapeute
Ces 10 dernières années, j’ai régulièrement consulté un
Pas du tout d’accord
1
psychothérapeute
2
3
2
4
3
2
4
3
4
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Pour chacune de ces questions, pourriez-vous entourer le chiffre qui correspond le mieux à votre avis :
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est une consultation
chez un psychothérapeute …
…avec beaucoup
de facilité
1
2
…de très simple
Une consultation chez un psychothérapeute évoque pour moi
quelque chose …
1
2
Je comprends ce qu'
est une consultation chez un psychothérapeute …très facilement
…
1
2
Je suis en mesure de définir ce qu'
est une consultation chez un
psychothérapeute …
Je perçois une consultation chez un psychothérapeute comme
étant …
Une consultation chez un psychothérapeute évoque pour moi
quelque chose …
Une consultation chez un psychothérapeute évoque pour moi
quelque chose …
…en étant très
précis
3
4
5
6
3
4
5
6
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
…exclusivement
matériel
…de totalement
palpable
…qui est très facile
à voir et à toucher
…avec beaucoup
de difficulté
7
…de très compliqué
7
…Très difficilement
7
… en étant très
flou
7
…exclusivement
immatériel
7
…de totalement
impalpable
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
7
Globalement, je ressens un risque à consulter un psychothérapeute
dans le sens où je m’expose dès lors à des inconvénients plus ou
moins probables
Globalement, l’idée de consulter un psychothérapeute me rend
inquiet(e) à la pensée des dommages éventuels qui pourraient en
résulter
En fin de compte, je pense vraiment que consulter un
psychothérapeute m'
apporte des tracas dont je pourrais bien me
passer.
Pas du tout
d’accord
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
Pas du tout
d’accord
Pas du tout
d’accord
Tout à fait
d’accord
7
Tout à fait
d’accord
7
Tout à fait
d’accord
7
2. Un service d’entretien de la voiture par un professionnel (garagiste, mécanicien)
Pour chacune de ces questions, pourriez-vous entourer le chiffre qui correspond le mieux à votre avis :
Avez-vous déjà fait entretenir votre voiture ?
Jamais
1
2
3
4
1
2
3
4
Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais que je connais très Pas du tout d’accord
bien le service d’entretien de la voiture
En matière de services d’entretien de la voiture, je pourrais donner de
bons conseils si on me le demandait
Comparé à un expert, je dirais que je connais bien le service
d’entretien de la voiture
Pas du tout d’accord
1
Pas du tout d’accord
1
2
3
4
2
3
4
1
2
3
4
1
2
3
4
Ces 12 derniers mois, j’ai régulièrement fait entretenir ma voiture
Pas du tout d’accord
Ces 5 dernières années, j’ai régulièrement fait entretenir ma voiture
Pas du tout d’accord
Très souvent
5
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Tout à fait d’accord
5
Pour chacune de ces questions, pourriez-vous entourer le chiffre qui correspond le mieux à votre avis :
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce qu'
est un entretien de la
voiture par un professionnel …
Un entretien de la voiture par un professionnel évoque pour moi
quelque chose …
Je comprends ce qu'
est un entretien de la voiture par un
professionnel …
…avec beaucoup
de facilité
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
1
2
3
4
5
6
…de très simple
…très
facilement
…en étant très
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un entretien de la voiture par précis
un professionnel …
Je perçois un entretien de la voiture par un professionnel comme
étant …
Un entretien de la voiture par un professionnel évoque pour moi
quelque chose …
Un entretien de la voiture par un professionnel évoque pour moi
quelque chose …
Globalement, je ressens un risque à faire entretenir ma voiture par
un professionnel dans le sens où je m’expose dès lors à des
inconvénients plus ou moins probables
Globalement, l’idée de faire entretenir ma voiture par un
professionnel me rend inquiet(e) à la pensée des dommages
éventuels qui pourraient en résulter
En fin de compte, je pense vraiment que l’entretien de la voiture
par un professionnel m'
apporte des tracas dont je pourrais bien me
passer.
…exclusivement
matériel
…de totalement
palpable
…qui est très facile
à voir et à toucher
Pas du tout
d’accord
Pas du tout
d’accord
Pas du tout
d’accord
…avec beaucoup
de difficulté
7
…de très compliqué
7
…très
difficilement
7
… en étant très
flou
7
…exclusivement
immatériel
7
…de totalement
impalpable
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
7
Tout à fait
d’accord
7
Tout à fait
d’accord
7
Tout à fait
d’accord
7
Finalement, afin de permettre des traitements statistiques, pouvez-vous me donner les renseignements suivants vous concernant :
Vous êtes :
Votre âge : ………………. Ans
Un homme
Une femme
Votre langue maternelle : Français
Votre nationalité :
Belge
Autre
Autre
……………………………………………
……………………………………….
Etude et année d’étude : ………………………………………………………………………………..
ANNEXE 6 : QUESTIONNAIRE DE L’ETUDE FINALE (VERSION 1A)
Chère Madame, Cher Monsieur,
Permettez-moi avant toute chose de vous remercier très chaleureusement pour votre
participation à cette étude, qui s'
inscrit dans le cadre de ma recherche doctorale. Cette étude
est strictement anonyme, et elle n'
a aucune fin commerciale.
Certaines phrases de ce questionnaire pourraient vous paraître un peu théoriques, étranges ou
redondantes. Soyez cependant certain(e)s qu'
elles sont toutes nécessaires à l'
objet de l'
étude.
Aussi, je vous demanderais de veiller à répondre à l'
ensemble des questions, et à prêter
attention aux nuances entre chacune d’elles. En effet, si des réponses sont manquantes, votre
questionnaire ne pourra malheureusement pas être exploité dans l'
analyse des résultats.
Je sais que votre temps est précieux, c’est la raison pour laquelle je vous suis profondément
reconnaissant pour l’attention que vous allez accorder à ce questionnaire.
En vous remerciant,
Christophe Sempels, UCL, IAG
Place des Doyens, 1
1348 Louvain-la-Neuve
Comment répondre au questionnaire ?
•
•
•
•
Bien lire la question avant de répondre
Il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses. Répondez à toutes les questions
naturellement, et sans a priori.
Soyez vigilant(e) à répondre à toutes les questions. Ne revenez jamais en arrière.
Entourez le chiffre qui correspond le mieux à votre avis, par exemple :
Je trouve que la Wallonie est une région où il fait
bon vivre
Pas du tout
d’accord
1
Tout à fait
d’accord
2
3
4
5
CELA SIGNIFIE QUE VOUS ÊTES TOUT A FAIT D’ACCORD
Je trouve que la Wallonie est une région où il fait
bon vivre
Pas du tout
d’accord
1
Tout à fait
d’accord
2
CELA SIGNIFIE QUE VOUS ÊTES MOYENNEMENT D’ACCORD
1A
334
3
4
5
Les questions qui vont suivre vont porter sur un vol en avion de ligne. Par vol en avion de
ligne, nous entendons un vol de courte ou de moyenne distance reliant deux aéroports
européens, et opéré par une compagnie aérienne régulière ou charter.
Pour chacune de ces questions, pourriez-vous entourer le chiffre qui correspond le
mieux à votre avis :
Sans en être nécessairement utilisateur, je dirais que
je m’y connais très bien en matière de vol en avion
de ligne
En matière de vol en avion de ligne, je pourrais
donner de bons conseils si on me le demandait
Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais
que je m’y connais très bien en matière de vol en
avion de ligne
Quelque soit le type de vol :
Jamais
Pas du tout
d’accord
Tout à fait
d’accord
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1 à 2 fois
3 à 5 fois 6 à 10 fois
+ de 10
fois
5
Avez-vous déjà pris l’avion
1
2
3
4
Combien de fois avez-vous pris
1
2
3
4
5
l’avion ces 12 derniers mois ?
Combien de fois avez-vous pris
1
2
3
4
5
l’avion ces 10 dernières années ?
Si vous avez déjà pris l’avion, pouvez-vous cocher la (les) classe(s) dans lesquelles vous avez
déjà volé :
En classe économique
En classe Business class
En classe First
…de totalement
palpable
1
2
3
Un vol en avion de ligne évoque pour moi …de très simple
quelque chose …
1
2
3
Je comprends ce qu'
est un vol en avion de …très facilement
ligne …
1
2
3
…d’exclusivement
Je perçois un vol en avion de ligne comme
matériel
étant quelque chose …
1
2
3
…en étant très
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un
précis
vol en avion de ligne …
1
2
3
…qui est très facile
Un vol en avion de ligne évoque pour moi
à voir et à toucher
quelque chose …
1
2
3
…avec beaucoup
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce
de facilité
qu'
est un vol en avion de ligne …
1
2
3
Un vol en avion de ligne évoque pour moi
quelque chose …
335
4
4
4
4
4
4
4
…de totalement
impalpable
5
6
7
…de très compliqué
5
6
7
…très difficilement
5
6
7
…d’exclusivement
immatériel
5
6
7
… en étant très
flou
5
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
5
6
7
…avec beaucoup
de difficulté
5
6
7
Lorsque nous achetons un produit ou utilisons un service, nous pouvons ressentir un
sentiment de risque, qui provient essentiellement du fait qu’on n’est jamais certain à l’avance
de ce que l’on achète, et que quelque chose de désagréable pourrait dès lors survenir. Ainsi,
nous pourrions subir certains désagréments, p.ex. le risque d’être déçu de la qualité de ce
qu’on achète, le risque de mal dépenser son argent, le risque de mettre sa santé en danger, le
risque d’être mal jugé par les gens de son entourage, le risque d’être déçu de soi-même, le
risque de perdre du temps, …
ATTENTION : je vous demanderais de répondre aux questions suivantes comme si vous
alliez effectivement voler en avion de ligne dans les 6 mois à venir.
Quel niveau de risque associez-vous à voler en
avion de ligne ?
Risque très
faible
1
2
3
Risque très
élevé
4
5
Pour vous, le risque que vous percevez (même très faiblement) à voler en avion de ligne
provient essentiellement :
du risque de faire une mauvaise dépense (=prix du
billet plus cher que prévu, existence d'
un vol
équivalent à prix plus bas, …)
du risque que la qualité du vol ne soit pas conforme
à vos attentes (mauvais service à bord, mauvais
confort, …)
du risque que vous soyez déçu(e) vis-à-vis de vousmême (à cause d'
un mauvais choix de compagnie
p.ex.)
du risque que vous donniez une mauvaise image de
vous à votre entourage en volant en avion de ligne
du risque que vous perdiez du temps ( à vous
plaindre, à attendre, …)
du risque de mettre votre santé ou votre intégrité
physique en danger
Globalement, je crois que je vais courir un ou des
risques si je vole en avion de ligne
Je ne me sens pas très à l’aise à l’idée de voler en
avion de ligne, car je crains qu’il puisse arriver des
éventualités fâcheuses
Globalement, j’ai le sentiment que voler en avion de
ligne pourrait me causer des désagréments
336
Je ne ressens pas
du tout ce risque
Je ressens très fort
ce risque
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Pas du tout
d’accord
Tout à fait
d’accord
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Je vous demanderais maintenant de répondre aux mêmes genres de questions, mais cette fois
pour un vol en avion de ligne opéré par la compagnie aérienne RYANAIR. Le vol est
toujours de courte ou de moyenne distance et relie deux aéroports européens. Veuillez
répondre, même si vous n’avez jamais volé avec la compagnie aérienne Ryanair.
Pour chacune de ces questions, pourriez-vous entourer le chiffre qui correspond le
mieux à votre avis :
Pas du tout
Tout à fait
d’accord
d’accord
Sans en être nécessairement utilisateur, je dirais que
1
2
3
4
5
je connais très bien la compagnie aérienne Ryanair
En matière de vol avec Ryanair, je pourrais donner
1
2
3
4
5
de bons conseils si on me le demandait
Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais
que je connais très bien la compagnie aérienne
1
2
3
4
5
Ryanair
Lorsque je pense à Ryanair, l’idée que j’y associe
1
2
3
4
5
est globalement très positive
D’après moi, Ryanair est une compagnie aérienne
1
2
3
4
5
ayant une très bonne réputation
Ryanair me semble être une compagnie aérienne de
1
2
3
4
5
très bonne qualité
Jamais
1 à 2 fois
1
2
3
4
+ de 10
fois
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Avez-vous déjà volé avec Ryanair ?
Combien de fois avez-vous volé avec
Ryanair ces 12 derniers mois?
Combien de fois avez-vous volé avec
Ryanair ces 5 dernières années ?
Un vol Ryanair évoque pour moi quelque
chose …
Un vol Ryanair évoque pour moi quelque
chose …
Je comprends ce qu'
est un vol Ryanair …
Je perçois un vol Ryanair comme étant
quelque chose …
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un
vol Ryanair…
Un vol Ryanair évoque pour moi quelque
chose …
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce
qu'
est un vol Ryanair …
3 à 5 fois 6 à 10 fois
…de totalement
palpable
1
2
3
…de très simple
1
2
3
…très facilement
1
2
3
…d’exclusivement
matériel
1
2
3
…en étant très
précis
1
2
3
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
2
3
…avec beaucoup
de facilité
1
2
3
337
4
4
4
4
4
4
4
…de totalement
impalpable
5
6
7
…de très compliqué
5
6
7
…très difficilement
5
6
7
…d’exclusivement
immatériel
5
6
7
… en étant très
flou
5
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
5
6
7
…avec beaucoup
de difficulté
5
6
7
ATTENTION : je vous demanderais de répondre aux questions suivantes comme si vous
alliez effectivement voler avec Ryanair dans les 6 mois à venir.
Quel niveau de risque associez-vous à voler avec
Ryanair ?
Risque très
faible
1
2
3
Risque très
élevé
4
5
Pour vous, le risque que vous percevez (même très faiblement) à voler avec Ryanair provient
essentiellement :
du risque de faire une mauvaise dépense (=prix du
billet plus cher que prévu, existence d'
un vol
équivalent à prix plus bas, …)
du risque que la qualité du vol ne soit pas conforme
à vos attentes (mauvais service à bord, mauvais
confort, …)
du risque que vous soyez déçu(e) vis-à-vis de vousun mauvais choix de compagnie
même (à cause d'
p.ex.)
du risque que vous donniez une mauvaise image de
vous à votre entourage en volant avec Ryanair
du risque que vous perdiez du temps ( à vous
plaindre, à attendre, …)
du risque de mettre votre santé ou votre intégrité
physique en danger
Globalement, je crois que je vais courir un ou des
risques si je vole avec Ryanair
Je ne me sens pas très à l’aise à l’idée de voler avec
Ryanair, car je crains qu’il puisse arriver des
éventualités fâcheuses
Globalement, j’ai le sentiment que voler avec
Ryanair pourrait me causer des désagréments
338
Je ne ressens pas
du tout ce risque
Je ressens très fort
ce risque
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Pas du tout
d’accord
Tout à fait
d’accord
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Je vous demanderais finalement de répondre aux mêmes genres de questions, mais cette fois
pour un vol en avion de ligne opéré par la compagnie aérienne SN BRUSSELS AIRLINES
(SNBA). Il s’agit toujours d’un vol courte ou moyenne distance reliant deux aéroports
européens. Veuillez répondre aux questions, même si vous n’avez jamais volé avec SNBA.
Sans en être nécessairement utilisateur, je dirais que
je connais très bien la compagnie aérienne SNBA
En matière de vol avec SNBA, je pourrais donner
de bons conseils si on me le demandait
Par rapport à mes amis ou mon entourage, je dirais
que je connais très bien la compagnie aérienne
SNBA
Lorsque je pense à SNBA, l’idée que j’y associe est
globalement très positive
D’après moi, SNBA est une compagnie aérienne
ayant une très bonne réputation
SNBA me semble être une compagnie aérienne de
très bonne qualité
Jamais
Pas du tout
d’accord
Tout à fait
d’accord
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1 à 2 fois
3 à 5 fois 6 à 10 fois
+ de 10
fois
5
Avez-vous déjà volé avec SNBA ?
1
2
3
4
Combien de fois avez-vous volé avec
1
2
3
4
5
SNBA ces 12 derniers mois ?
Combien de fois avez-vous volé avec
1
2
3
4
5
SNBA ces 3 dernières années ?
Si vous avez déjà volé avec SNBA, pouvez-vous cocher dans quelle(s) classe(s) vous avez volé :
En classe économique
En classe Business class
En classe First
Un vol SNBA évoque pour moi quelque
chose …
Un vol SNBA évoque pour moi quelque
chose …
Je comprends ce qu'
est un vol SNBA …
Je perçois un vol SNBA comme étant
quelque chose…
Je suis en mesure de définir ce qu'
est un
vol SNBA …
Un vol SNBA évoque pour moi quelque
chose …
Je suis en mesure d'
expliquer à un ami ce
qu'
est un vol SNBA …
…de totalement
palpable
1
2
3
…de très simple
1
2
3
…très facilement
1
2
3
…d’exclusivement
matériel
1
2
3
…en étant très
précis
1
2
3
…qui est très facile
à voir et à toucher
1
2
3
…avec beaucoup
de facilité
1
2
3
339
4
4
4
4
4
4
4
…de totalement
impalpable
5
6
7
…de très compliqué
5
6
7
…très difficilement
5
6
7
…d’exclusivement
immatériel
5
6
7
… en étant très
flou
5
6
7
…qui est très difficile
à voir et à toucher
5
6
7
…avec beaucoup
de difficulté
5
6
7
ATTENTION : je vous demanderais de répondre aux questions suivantes comme si vous
alliez effectivement voler avec SN Brussels Airlines dans les 6 mois à venir.
Quel niveau de risque associez-vous à voler avec
SNBA ?
Risque très
faible
1
2
3
Risque très
élevé
4
5
Pour vous, le risque que vous percevez (même très faiblement) à voler avec SNBA
provient essentiellement :
du risque de faire une mauvaise dépense (=prix du
billet plus cher que prévu, existence d'
un vol
équivalent à prix plus bas, …)
du risque que la qualité du vol ne soit pas conforme
à vos attentes (mauvais service à bord, mauvais
confort, …)
du risque que vous soyez déçu(e) vis-à-vis de vousun mauvais choix de compagnie
même (à cause d'
p.ex.)
du risque que vous donniez une mauvaise image de
vous à votre entourage en volant avec SNBA
du risque que vous perdiez du temps ( à vous
plaindre, à attendre, …)
du risque de mettre votre santé ou votre intégrité
physique en danger
Globalement, je crois que je vais courir un ou des
risques si je vole avec SNBA
Je ne me sens pas très à l’aise à l’idée de voler avec
SNBA, car je crains qu’il puisse arriver des
éventualités fâcheuses
Globalement, j’ai le sentiment que voler avec
SNBA pourrait me causer des désagréments
340
Je ne ressens pas
du tout ce risque
Je ressens très fort
ce risque
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Pas du tout
d’accord
Tout à fait
d’accord
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
1
2
3
4
5
Pour terminer, je vous demanderais de me communiquer les éléments suivants vous
concernant. Ces données n’ont pour seul objectif que de réaliser des traitements statistiques
spécifiques à certains traits personnels.
Genre :
Homme
1
Femme
2
Age : …………………. ans
Diplôme le plus élevé obtenu à ce jour :
Primaire ou sans diplôme
Secondaire inférieur
Secondaire supérieur
Enseignement supérieur non universitaire type court
Enseignement supérieur non universitaire type long
Universitaire
1
2
3
4
5
6
Profession :
Etudiant(e)
Ouvrier(ère) secteur public
Employé(e) secteur public
Ouvrier(ère) secteur privé
Employé(e) secteur privé
Indépendant
Profession libérale
Sans emploi
Retraité(e)
1
2
3
4
5
6
7
8
9
JE VOUS REMERCIE CHALEUREUSEMENT POUR VOTRE PRECIEUSE
COLLABORATION !!!
341
ANNEXE 7 :
SEQUENCE D’APPARITION DES SERVICES ET DES MARQUES DANS LES
DIFFERENTES VERSIONS DE QUESTIONNAIRES
Version 1A
Vol en avion de ligne, vol Ryanair, vol SNBA
Version 1B
Vol en avion de ligne, vol SNBA, vol Ryanair
Version 2A
Assurance familiale, assurance Ethias, nettoyage à sec, 5 à Sec
Version 2B
Nettoyage à sec, 5 à Sec, assurance familiale, assurance Ethias
Version 3A
Cours de langue, Berlitz, e-banking, PC banking Fortis Banque
Version 3B
E-banking, PC banking Fortis Banque, cours de langue, Berlitz
Version 4A
Abonnement de téléphonie mobile, abonnement Proximus, abonnement Base
Version 4B
Abonnement de téléphonie mobile, abonnement Base, abonnement Proximus
342
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