références et bibliographie

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S. I. I.T.U. B.
Electrophorèse
Electrophorèse des protéines en gel d’acrylamide
Comme toutes molécules chargées, les protéines peuvent se mouvoir dans un champ
électrique. Cette charge provient des groupements ionisables des chaines latérales de
certains acides aminés composant la protéine. On peut donc se servir de
l'électrophorèse pour les séparer. Les méthodes les plus performantes pour séparer les
protéines sont faites en gel de polyacylamide (EGPA. "polyacrylamide tel
electrophoresis", PAGE). L'électrophorèse en général est expliquée dans la section
"électrophorèse" du SIITUB.
PRINCIPES DE BASE
Caractéristiques des protéines affectant la séparation
Charge
La charge nette d'une protéine est évidemment le principal facteur qui détermine la
direction (d'après sa polarité vers l'anode ou la cathode) et la vitesse (donc la distance)
de migration (proportionnelle à la densité de la charge) d'une protéine. La charge nette
d'une protéine dépend du pI de la protéine et du pH du milieu ambiant. (Réviser au
besoin ces concepts de pI vs pH vs charge nette d'une protéine ou d'un acide aminé)
Si on veut être rigoureux, il faudrait aussi tenir compte des contre-ions de petites
tailles (K+, Na+, Cl-, etc.) qui s'associent aux groupements ionisables de charge
opposée. Ces ions migrent en sens opposés aux protéines et, ce faisant, entraînent des
molécules d'eau, c'est que qu'on appelle l'endo-osmose. Ce déplacement des
molécules d'eau ralentit la migration des protéines. En pratique cependant, ces
considérations complexes sont plutôt académiques et ont un impact faible en EGPA.
Souvent, on ajoute aux protéines un agent (généralement un détergent) qui se
complexe à elles. Dans ce cas, la charge de cet agent peut déterminer la charge nette
de la protéine, en fait du complexe protéine-détergent. Cela permet d'égaliser
artificiellement la densité de charge de toutes les protéines de l'échantillon et de les
séparer seulement sur la base de leur masse moléculaire.
Pour deux protéines ayant des charges nettes égales, il faut tenir compte de la densité
de la charge (nombre de charge/unité de masse moléculaire). Ainsi, les autres facteurs
étant égaux, une protéine ayant 80 charges négatives (nettes) ayant une masse relative
50 kDa migrera plus vite qu'une protéine de 100 kDa ayant aussi 80 charges négatives
nettes.
Taille
La taille est un autre facteur qui détermine la vitesse de migration des protéines dans
une EGPA. Plus la protéine est grosse plus elle sera retardée par les mailles du gel,
donc plus elle migrera lentement. Il peut arriver qu'une protéine soit tellement grosse
qu'elle ne puisse même pas se mouvoir ni même entrer dans le gel. Inversement il
peut arriver qu'elle soit tellement petite qu'elle ne soit pas retardée du tout par les
pores du gel.
Comme la taille d'une protéine est dépendante de sa masse moléculaire, on a souvent
tendance à dire que la masse moléculaire est, en soi, le facteur qui détermine la
séparation des protéines sur EGPA. Mais en général il s'agit d'une approximation
(quelquefois trompeuse) puisque c'est bel et bien la taille qui est le facteur
fondamental, mais ce fateur est intimement lié à la masse moléculaire.
La forme d'une protéine est importante. À masse moléculaire égale, une protéine
globulaire (qui est plus ou moins sphérique) aura tendance à se déplacer un peu plus
rapidement qu'une protéine fibrillaire (plus ou moins en forme de bâtonnet) parce
qu'elle "se faufile" mieux dans les mailles du gel, sans avoir besoin de se réorienter
constamment.
On peut contrôler la forme et la densité de charge des protéines pour les uniformiser
afin de pouvoir les séparer sur la base de la masse moléculaire. Pour cela, on utilise
des détergents anioniques, comme le dodecylsulfate de sodium (SDS), ou cationiques,
comme le bromure de cétyltriammonium (CTAB).
Hétéroprotéines
Beaucoup de protéines ne sont pas constituées uniquement d'acides aminés. Certaines
d'entre elles contiennent divers types de groupements: polysaccharides
(glycoprotéines), des acides gras (lipoprotéines), etc. D'autres peuvent avoir été
modifées par phosphorylation (phosphoprotéines), méthylation, acétylation, etc. Ce
sont des hétéroprotéines. Ces modifications covalentes peuvent affecter la migration.
Ainsi l'addition de molécules chargées (e.g. le phosphate d'une phosphoprotéine) va
augmenter ou diminuer la charge nette d'une protéine, avec les conséquences sur la
vitesse de migration.
La présence d'oligosaccharides (glycoprotéine) aura aussi un effet. Évidemment cela
va augmenter la masse moléculaire de la protéine. Mais comme ces groupements sont
beaucoup moins compacts que les acides aminés et ont peu d'affinité pour les
détergents, la géométrie (forme de la protéine) et la densité de charge sont affectées.
Ce phénomène explique pourquoi la migration de protéines fortement glycosylées est
anormalement lente par rapport à des protéines non glycosylées de masse moléculaire
identique.
Facteurs physico-chimiques affectant la migration
Les conditions physico-chimiques dans lesquelles on fait l'électrophorèse vont
influencer sur la migration. Par exemple, il peut arriver que certaines des protéines à
séparer puissent avoir une affinité non covente (lien hydrogène, interaction van der
Vall, hydrophobe, etc.) pour la matrice dans laquelle la migration se fait. Cette affinité
va évidemment retarder la migration des molécules. C'est une des raisons pourquoi
l'acrylamide est une matrice très utile: elle n'est pas chargée et n'a pas d'affinité
particulière pour les chaînes latérales des acides aminés apolaires.
Le pH peut évidemment avoir un role capital dans les élecrophorèses. C'est lui
déterminera la charge des acides aminés des protéines, donc une composante
importance du processus électrophorétique. De plus, il faut ternir compte que les
protéines ne sont pas solubles ou stables dans toute la gamme des pH. Ainsi, des pH
acides (< 5 pour la majorité des protéines) font précipiter les protéines en aggrégats
plus ou moins massifs qui ne peuvent se déplacer dans le gel. D'un autre coté des
conditions trop alcalines conduisent à l'hydrolyse de certains acides aminés ou du lien
peptidique. En général, on maintient des conditions entre pH 6 et 10. Les histones,
protéines très basiques, supportent bien des conditions acides et requierrent des
conditions spéciales d'électrophorèse: milieu acide, urée concentrée.
Polymérisation de l'acrylamide
Il s'agit d'une réaction de polymérisation de monomères d'acrylamide. L'acrylamide
(monomérique) a la formule chimique suivante:
CH2=CH-CO-NH2.
Notez la présence du double lien C-C à l'extrémité de la molécule.
Quand un des carbones impliqués dans le double lien prend, sous l'influence d'un
initiateur, une forme radicalaire (radical libre), il peut attaquer le double lien C=C
d'une autre molécule. La réaction peut se résumer de la façon suivante où "M" est un
monomère, "I" l'initiateur, le symbole "*" indique un radical et "- "indique un lien
covalent.
La chaîne réactionnelle commence par la formation spontanée ou induite d'un radical
au niveau l'initiateur:
I -> I*
La propagation de ce radical enclenche alors la polymérisation:
M + I* -> M*
M* + M ->M-M*
M-M* + M -> M-M-M*
(répétition n autres fois de la réaction en chaîne)
M-M-M* + n M -> M-M-M-(M)n-M*
Ainsi les monomères d'acrylamide entrent ainsi une réaction en chaîne ou de longs
polymères linéaires sont formés par la propagation de ces radicaux libres. En plus de
l'acrylamide en tant que tel, la réaction de polymérisation doit se faire en présence
d'agents réticulants et de catalyseurs de la réaction.
Réticulation
Une solution de polyacrylamide polymérisé seulement avec de l'acrylamide est
cependant liquide, quoique très visqueuse, donc impossible à manipuler. En effet,
l'acrylamide ne possède qu'un seul site de formation de radical par molécule et ne peut
donc donner que des chaînes linéaires plus ou moins longues sans lien entre elles.
Gel d’acrylamide non réticulé (sans agent réticulant)
Il y a formation de longues chaines linéaires sans liens entre elles
Au contraire, la présence d'agents réticulants permettra la formation de "ponts" entre
les chaînes d'acrylamide. La solution formera donc un gel solide et manipulable,
quoique flexible et plus ou moins fragile. Un agent réticulant ("cross-linker") peut
s'incorporer dans les longues chaînes de polyacrylamide pour les relier entre elles et
former un "filet" tridimensionnel qui sera solide et non pas liquide. Un agent
réticulant est une molécule qui a deux doubles liens C-C, généralement un à chaque
extrémité de la molécule. Chacun d'entre eux pourra dont s'intégrer dans le processus
de polymérisation de deux chaînes voisines de polyacrylamide, les liant entre elles.
Les gels obtenus sont solides, quoique plus ou moins fragiles selon les quantités
d'acrylamide et d'agent réticulant.
Acrylamide
(monomère)
Agent réticulant
Illustration schématique de l'acrylamide et d'un agent réticulant
Remarquez que cette représentation ne respecte pas les angles interatomiques et n'est faite que pour faciliter les
explications en illustrant de façon schématique les structures impliquées.
Les agents réticulants ("cross-linkers") sont des molécules qui peuvent entrer dans le
processus de polymérisation parce qu'elles possèdent, comme l'acrylamide, une
structure chimique leur permettant de former et de propager des radicaux libres entre
autres des doubles liens C=C. Mais ils possèdent cette structure en double, en général
à chaque extrémité de la molécule.
Ils peuvent donc participer à la formation de deux chaînes linéaires d'acrylamide, ce
qui permet la formation de "ponts" entre chacune de ces chaînes. Il en résulte donc un
réseau complexe faisant songer à un filet tridimensionnel dont les "mailles, plus ou
moins grosses, laisseront passer les protéines plus ou moins facilement selon leur
taille. Puisque le processus de polymérisation se produit de façon aléatoire, il y aura
plusieurs grosseurs de maille dans un même gel.
Gel d'acrylamide polymérisé avec agent réticulant.
Il y a formation de longues chaines linéaires liées entre elles par l'agent réticulant
La proportion acrylamide/réticulant et la nature de ce dernier détermineront les
capacités de séparation du gel en modifiant la porosité de ce "filet tridimentsionel".
Ainsi, plus la proportion de réticulant est grande, plus les mailles seront petites. Cette
grosseur aura une importance capitale dans la séparation des protéines. En effet, plus
les mailles du gel sont petites plus il y aura un effet de "tamisage moléculaire"
ralentissant les protéines qui auront à passer au travers.
Catalyseurs de la polymérisation
La polymérisation est donc initiée par la formation de quelques radicaux libres sur des
doubles liens C-C de l'acrylamide ou de l'agent réticulant. Ces radicaux libres ne se
forment pas spontanément sur l'acrylamide. Il faut mettre dans la solution des
catalyseurs (ou initiateurs de la formation de radicaux libres).
Il faut donc ajouter à la solution un (ou des) catalyseurs capables, 1) d'initier la
formation de radicaux libres qui pourront alors démarrer la réaction en chaîne de la
polymérisation, ce sont des initiateurs, et 2) de stimuler la réaction de propagation des
radicaux libres pour l'accélérer et l'empêcher de "s'étouffer", ce sont des accélérateurs.
La formation de radicaux libres par ces composés peut être, soit, immédiate après leur
mise en solution, soit, déclenchée par un phénomène physico-chimique. Généralement
deux types de catalyseurs doivent être combinés: un initiateur de radicaux libres et un
accélérateur.
Le TEMED (N,N,N',N'-tétraméthylènediamine) est presque toujours utilisé comme
accélérateur. Le TEMED doit être sous forme basique pour avoir son action. Plus
rarement on se sert du DMNAPN (3-diméthylaminopropionitrile).
Le persulfate d'ammonium (PSA) est souvent utilisé comme initiateur. Le persulfate
forme spontanément des radicaux libres lorsque mis en solution. Un léger
inconvénient de ce produit est qu'il introduit des ions (NH4+ et SO4-) dans la
solution. On peut s'en débarrasser par une "pré-électrophorèse", en mettant le gel sous
tension un certain temps avant le dépôt des échantillons. Les ions sortiront du gel sous
l'influence du champ électrique. La pré-électrophorèse est cependant hors de question
dans des système où des ions doivent être présents dans le gel. C'est particulièrement
le cas des gels multiphasiques car la préélectrophorèse induirait le mélange des
constituants ioniques des phases, ce qui empêcherait le phénomène de tassement.
Cependant, les faibles quantités de PSA ont en général des effets négligeables, c'est
pourquoi on essaie d'en minimiser la concentration quitte à ralentir le phénomène de
polymérisation.
On peut utiliser aussi la riboflavine ou la riboflavine-phosphate qui est plus soluble.
La riboflavine ne forme des radicaux libres que lorsque la solution est exposée à une
lumière UV rapprochée (généralement de la lumière fluorescente suffit) qui provoque
la photoactivation de ce produit et la formation de radicaux libres. Cette propriété est
intéressante dans le cas où on veut contrôler précisément le début de la réaction de
polymérisation. Elle est particulièrement utile pour faire des gels en gradients.
Il faut se rappeler qu'il est préférable de combiner un initiateur et un accélérateur pour
que la polymérisation de l'acrylamide se fasse de façon rapide et fiable. Ainsi il faut
toujours qu'il y ait du TEMED en présence de PSA tandis que la riboflavine
fonctionne beaucoup mieux en présence de TEMED.
Ces produits initiateurs de polymérisation ot tendance à se dégrader avec le temps.
C'est pourquoi un même lot de produit semble devenir inefficace après quelques mois
de rangement. il est préférable de les garder au réfrigérateur. Malgré cela, ils finiront
par perdre peu à peu leurs capacités, on peut alors augmenter les quantités utilisées.
Effets des conditions physiques et chimiques sur la polymérisation
Quelques produits peuvent inhiber la réaction de polymérisation de l'acrylamide. En
particulier, ceux qui réagissent avec les radicaux libres sans s'intégrer dans la chaîne,
ont un effet très nuisible. En effet de tels produits vont "étouffer" la réaction en
bloquant la propagation de la réaction d'une molécule d'acrylamide à l'autre.
L'oxygène moléculaire (O2) inhibe la polymérisation de l'acrylamide de cette façon.
Lors de la préparation il faut donc minimiser le brassage excessif du mélange pour
réduire la présence d'air dans le mélange. On peut aussi dégazer la solution
d'acrylamide avant de la couler et d'induire la polymérisation.
D'autres produits peuvent interférer au niveau des réactifs eux-mêmes. Par exemple le
TEMED doit être sous sa forme basique pour accélérer la réaction de polymérisation.
Donc un produit abaissant le pH (donc un acide plus ou moins fort) ralentira ou
bloquera la formation de gel d'acrylamide.
Les conditions physiques peuvent affecter la polymérisation de l'acrylamide. La
température est un exemple. Plus la température est forte, plus les réactions chimiques
en général sont accélérées. La polymérisation de l'acrylamide n'est pas différente des
autres réactions et est donc plus rapide à haute qu'à basse température.
MÉTHODOLOGIE ET TECHNIQUES
Montage du gel
On fabrique un gel de polyacrylamide en mélangeant les composantes de base:
acrylamide, agent réticulant, tampons, détergents (s'il y a lieu), etc. Quelques
secondes avant de "couler" le gel, on ajoute le catalyseur et l'accélérateur puis on
verse immédiatement dans le moule formé par deux plaques de verre. On coule la
solution d'acrylamide avant qu'elle n'ait eu le temps de gélifier. On laisse polymériser
le gel qui devient alors solide. Le moule contenant le gel solide est alors prêt à être
introduit dans la cellule à électrophorèse. On ajoute les échantillons et on met le gel
sous tension dans les conditions de voltage et de courant pour que les protéines
migrent à la vitesse voulue. On démoule ensuite celui-ci pour colorer les protéines
dans le gel ou soumettre à d'autres analyses (immunodétection, etc.)
Les échantillons sont dissouts dans un tampon contenant divers produits facilitant les
procédures. Ce tampon comprend donc un agent destiné à augmenter la densité de
l`échantillon. Généralement on emploi du saccharose ("sucrose") ou du glycérol. Un
échantillon dense est plus stable, prévient le mélange de l'échantillon dans le tampon
d'électrode. Pour faciliter la visualisation de la migration, on ajoute dans l'échantillon
un traceur de migration ("tracking dye"). Ce produit est coloré et migre juste derrière
le front d'ions, ce qui permet de visualiser facilement la migration. Le bleu de
bromophénol est couramment employé. On arrête l'électrophorèse quand le traceur a
atteint le bas du gel.
De nos jours les gels d'acrylamide sont essentiellement sous forme de gels plats où on
peut creuser plusieurs puits permettant de séparer côte à côte plusieurs échantillons.
Ceci est très utile pour comparer le contenu en protéines de plusieurs sources
différentes. Ces gels plats sont faits en faisant un "sandwich" en joignant deux plaques
de verre pour ne laisser qu'un espace de 0.5 à 1.5 mm d'épais dans lequel on introduit
la solution liquide d'acrylamide.
Très peu utilisés de nos jours, sauf pour les séparations 2D, sont les gels cylindriques
(en carotte) où la polymérisation se fait dans des tubes de verre de moins de 5 mm de
diamètre interne. Chaque échantillon est mis dans un tube individuel. Certains
prétendent que les cylindres donnent une meilleure séparation et sont plus fiables.
L'acrylamide commercial tend à se dégrader pour produire des dérivés généralement
chargés. Ces dérivés interfèrent souvent avec la polymérisation ou la migration des
protéines. Une façon de se débarasser de ces produits interférents est d'exposer
l'acrylamide à une résine échangeuse d'ion mixte durant la préparation (e.g.
Mallinckrod MB-1 ou BioRad AG 501-X8)/L ou un mélange de Dowex 1-X8 et
Dowex 50W-X8). Une autre solution est de se procurer de l'acrylamide de haute
qualité en petites quantités à la fois; cela est cependant assez couteux. Une autre
approche consiste, lorsque c'est possible, de faire une prélectrophorèse.
Fixation et coloration
La façon la plus simple de visualiser le patron de migration des protéines est de les
colorer. Avant de procéder à cette coloration, il faut "fixer" les protéines. En effet,
lorsqu'on enlève la tension électrique, les protéines vont se mettre à diffuser dans le
gel. Ceci va évidemment diminuer la résolution de la séparation. Pour éviter cette
diffusion, on les fixe dans le gel, autrement dit, on précipite les protéines dans le gel.
Ces aggrégats de protéines intimement entremêlées dans les mailles du gel ne peuvent
plus diffuser. Cette fixation se fait normalement en mettant le gel dans une acide dilué
comme l'acide acétique ou l'acide trichloroacétique 1 à 10%. On peut omettre cette
fixation si le colorant lui-même contient de l'acide dilué, cela permet de fixer les
protéines en même temps qu'on les colore.
Le colorant le plus couramment utilisé est le bleu de Coomassie. Ce produit, en milieu
acide et en présence de méthanol, a une grande affinité pour les protéines. Sa petite
taille lui permet de pénétrer rapidement dans le gel pour atteindre les protéines. Sa
solubilité dans l'acide permet de combiner la coloration des protéines et leur fixation.
Après un certain, on peut transférer le gel dans une solution méthanolique acide pour
enlever l'excès de colorant qui a diffusé dans le gel et empêche de voir les protéines.
A la fin de cette décoloration, on obtient un gel transparent avec les bandes de
protéines colorées en bleu. Le bleu de Coomassie est asez sensible. Il existe deux
variétés de bleu de Coomassie. Le R250 est employé pour colorer les protéines, le
G250 est plus indiqué pour les petites protéines et les polypeptides séparés dans des
gels de fort %T. En effet, le G250 est une suspension colloïdale. ce colorant est assez
sensible (limite de détection 0.5 ug et convient à la plupart des électrophorèse]
Une méthode extrèmement sensible est la coloration à l'argent (limite de détection 10
ng) (Merril et al, 1981). Elle est beaucoup plus sensible quoique plus complexe,
nécessitant des produits et des solvants de haute qualité, et difficile à réussir.
Détergents et agents dénaturants
On utilise souvent des détergents dans la préparation des échantillons avant
l'électrophorèse. Les détergents servent à dissocier les protéines pour éviter qu'elles ne
forment des agrégats impossibles à séparer. La partie hydrophobe du détergent peut
en effet interagir avec les chaînes latérales non chargées tandis que la partie
hydrophile interagit avec les molécules d'eau. Cela permet la solubilisation maximale
des protéines et le déploiement de ses parties hydrophobes. Certains détergents
comme le dodécylsulfate de sodium (SDS) servent aussi à détruire la structure
quaternaire des protéines pour séparer les protéines multimériques en leurs
polypeptides individuels. La plupart des protéines peuvent complexer de grandes
quantités de SDS, environ 1.4 g de dodécylsulfate/g de protéines (Reynolds et
Tanford, 1970). Cela représente une moyenne de deux molécules de dodécylsulfate
par résidu d'acide aminé. Cette quantité de molécules de dodécylsulfate complexées
aux protéines est tellement grande que les protéines prennent une charge négative
nette. Les charges endogènes sont tellement peu nombreuses par rapport à celles
apportées par le dodécylsulfate, que les toutes protéines ont à toute fin pratique une
densité de charge uniforme. Par exemple l'ovalbumine, une protéine de 43 kDa,
possède une charge nette de -10 à pH 7.0 et de -200 après dénaturation au SDS.
Dans certains cas, on veut dénaturer les protéines sans changer leur charge. On utilise
alors comme dénaturants des agents chaotropiques non ioniques comme l'urée.
Principaux agents réticulants
Il existe divers types d'agents réticulants qui auront des propriétés différentes, donc
permettant de préparer des gels appropriés pour divers usages.
L'agent réticulant le plus utilisé est le N,N'-méthylène bisacrylamide, plus
communément appelé "bis" ou "bisacrylamide". Structuralement, il peut être décrit
comme deux molécules d'acrylamide jointes par un méthyle entre les deux atomes
d'azote. Les liens chimiques du gel obtenu sont très stables et le gel obtenu est
suffisamment solide pour être facilement manipulé.
Le diacrylamide de piperazine est un autre réticulant. Il permet d'obtenir des gels un
peu plus solide et avec une résolution améliorée. Son principal avantage est de donner
un bruit de fond moins grand que le bis dans une coloration à l'argent. Il est cependant
passablement plus cher.
D'autres agents réticulants peuvent être utilisés si on veut des gels "resolubilisables"
après séparation des protéines, de façon à pouvoir récupérer ces dernières pour
analyse, utilisation, etc. Cependant, ces produits donnent souvent des gels plus
fragiles ou plus cassants. De plus, la quantité optimale pour séparer des protéines de
masse moléculaires donnés reste à être déterminée.
Le BAC (N,N'-bisacrylylcystamine) a des liens disulfures qui peuvent être détruits par
un réducteur de liens disulfures.
Le DATD (N,N'-diallyltartradiamide) a des liens diole, donnant un gel solubilisable à
l'acide périodique, ce qui est pratique pour les comptages de radio-activité. Il donne
aussi des mailles de gel plus grandes, ce qui est avantageux pour certaines protéines,
mais désavantageux dans la plupart des cas à cause de la perte de résolution qui
s'ensuit.
Le DHEBA (N,N'-dihydroxyéthylène bisacrylamide) a des liens diole et amidométhylole qui peuvent être détruits par l'acide périodique ou une base.
Contrôle de la porosité et pouvoir de séparation
La principale caractéristique d'un gel d'acrylamide est la taille des mailles du gel. Plus
les mailles seront petites, plus les grosses molécules auront de la difficulté à avancer
dans le gel, donc plus elles seront retardées. Inversement les molécules très petites
pourront s'infiltrer et avancer dans le gel sans obstacles. On utilisera donc diverses
grosseurs de mailles (ou porosité) selon que les protéines qu'on veut séparer sont
petites ou grosses.
Une porosité de gel donnée n'est optimale que pour une gamme de taille relativement
réduite car, et les protéines trop grosses, et les trop petites seront moins bien séparées.
Les protéines trop grosses seront toutes ralenties et se démarqueront mal une de
l'autre; quelque fois elles ne pourront même pas entrer dans le gel! D'autre part les
protéines trop petites ne seront presque pas ralenties car l'effet de tamisage est
négligeable. Elles migreront toutes pratiquement à la même vitesse. Il faut donc
choisir la concentration d'acrylamide et d'agent réticulant pour optimiser la migration
des protéines qui nous intéressent. On essaie de prendre une porosité qui fera migrer
les protéines qui nous intéressent le plus vers le milieu du gel de séparation.
Ce choix repose sur deux facteurs principaux qui influenceront la taille des pores du
gel: la quantité d'acrylamide et le rapport bisacrylamide/acrylamide (ou agent
réticulant/acrylamide). D'une part, plus il y a d'acrylamide en solution au moment de
la polymérisation, plus les mailles seront petites. D'autre part, plus le rapport
bis/acrylamide est élevé plus les mailles seront petites. En effet, plus il y a de bis, plus
les chaînes d'acrylamide seront réticulées, donc plus les pores seront petits.
On se sert donc souvent de deux valeurs pour caractériser la porosité d'un gel de
polyacrylamide:
%A (A pour acrylamide) qui est la concentration totale exprimée (en g/100 mL)
d'acrylamide
%T (T pour concentration totale) qui est la concentration totale exprimée (en g/100
mL) d'acrylamide et de l'agent réticulant combiné;
%C (C pour "cross-linking") qui est le rapport (en %) entre les poids de l'agent
réticulant sur celui de l'acrylamide et du réticulant combiné. Remarque: certains ne
tiennent pas compte du poids du réticulant parce qu'il le considère négligeable.
Une autre façon d'exprimer la quantité de réticulant en terme de rapport entre les
poids d'acrylamide et celui de réticulant. Ce rapport s'exprime généralement sous la
forme acrylamide:réticulant, par exemple 25:1.
Exemple de calcul
Pour une solution de 50 mL contenant 5 g d'acrylamide et 100 mg de bisacrylamide
on a:
%A = (5 g/ 50 mL ) * 100 = 10%
%T = [(5 + 0.10 g) /50 mL] * 100 = 10.2 % ≈10%
%C = (0.1 g / (5 g + 0.1 g) ) * 100 = .1.96% = 2%
Rapport acrylamide:bis = 50:1
Pour obtenir la meilleure résolution possible, le %C optimal devrait varier selon le
%T. C'est pourquoi il est préférable de faire des solutions stock distinctes
d'acrylamide et de bisacrylamide. Cela permettra de préparer des gels au %C optimal
par rapport au %T. Au contraire on prépare une solution stock combinée d'acrylamide
et de bis, on ne peut obtenir que le même %C pour toutes les %T. Il faut aussi se
rendre compte que le %C des deux agents réticulants ne s'équivalent pas et qu'une
porosité similaire sera obtenue avec deux %C similaire
Gels homogènes et en gradient
Habituellement on fait des gels ou la concentration d'acrylamide est homogène, c'està-dire constante dans toute la plaque de gel. Les gels homogènes permettent une
séparation fine sur une plage réduite de masses moléculaires. Si on désire séparer
deux protéines une de l'autre, il est donc plus efficace d'utiliser un gel homogène
Il est cependant possible de faire des gels ou la concentration d'acrylamide sera
variable. Dans ce cas la concentration à la base du gel sera plus grande que celle au
sommet. Ainsi dans un gradient 3 à 25%, les protéines rentrent d'abord dans le gel ou
la concentration est de 3%, plus les protéines avancent dans le gel plus elles sont
mises graduellement en présence de grandes concentrations d'acrylamide jusqu'à 25%.
Ce système permet une meilleure séparation générale des protéines sur une vaste
gamme de masses moléculaires. En effet la taille des mailles du gel sera de plus en
plus petite à mesure que les protéines avanceront dans le gel. Donc, au fur et à mesure
de leur progrès dans le gel, les protéines finiront par être exposées à la concentration
d'acrylamide optimale pour leur séparation.
La principale difficulté des gels en gradients est qu'il faut éviter que la polymérisation
ne se produise durant le coulage du gel qui est un processus un peu lent. Pour cela, on
utilise soit un initiateur de polymérisation activable à volonté, comme la riboflavine,
ou de très faibles concentrations d'un iniateur spontané comme le PSA.
Systèmes discontinus
Pour obtenir la meilleure résolution possible, le %C optimal devrait varier selon le
%T. C'est pourquoi il est préférable de faire des solutions stock distinctes
d'acrylamide et de bisacrylamide. Cela permettra de préparer des gels au %C optimal
par rapport au %T. Au contraire on prépare une solution stock combinée d'acrylamide
et de bis, on ne peut obtenir que le même %C pour toutes les %T. Il faut aussi se
rendre compte que le %C des deux agents réticulants ne s'équivalent pas et qu'une
porosité similaire sera obtenue avec deux %C similaire
Gels homogènes et en gradient
Habituellement on fait des gels ou la concentration d'acrylamide est homogène, c'està-dire constante dans toute la plaque de gel. Les gels homogènes permettent une
séparation fine sur une plage réduite de masses moléculaires. Si on désire séparer
deux protéines une de l'autre, il est donc plus efficace d'utiliser un gel homogène
Il est cependant possible de faire des gels ou la concentration d'acrylamide sera
variable. Dans ce cas la concentration à la base du gel sera plus grande que celle au
sommet. Ainsi dans un gradient 3 à 25%, les protéines rentrent d'abord dans le gel ou
la concentration est de 3%, plus les protéines avancent dans le gel plus elles sont
mises graduellement en présence de grandes concentrations d'acrylamide jusqu'à 25%.
Ce système permet une meilleure séparation générale des protéines sur une vaste
gamme de masses moléculaires. En effet la taille des mailles du gel sera de plus en
plus petite à mesure que les protéines avanceront dans le gel. Donc, au fur et à mesure
de leur progrès dans le gel, les protéines finiront par être exposées à la concentration
d'acrylamide optimale pour leur séparation.
La principale difficulté des gels en gradients est qu'il faut éviter que la polymérisation
ne se produise durant le coulage du gel qui est un processus un peu lent. Pour cela, on
utilise soit un initiateur de polymérisation activable à volonté, comme la riboflavine,
ou de très faibles concentrations d'un iniateur spontané comme le PSA.
Souvent les tampons d'électrode et le tampon dans lequel l'acrylamide a été solubilisé
(i.e. tampon du gel en tant que tel) sont les mêmes, il s'agit de systèmes qu'on qualifie
de continus. Il existe cependant des modes d'électrophorèse où plusieurs tampons sont
utilisés. On qualifie ces systèmes de discontinus ou multiphasiques.
Système continu
Système discontinu
Résolution
plus ou moins bonne
dépendante de la taille de l'échantillon
bonne
indépendante de la taille de l'échantillon
Facilité
d'emploi
facile
étapes peu nombreuses
plus complexe
étapes nombreuses
Acrylamide
1 seule concentration
2 concentrations
Systèmes
tampons
1 seul
3 (tampon d`électrode, gel de tassement, gel
de séparation)
Mécanisme de
séparation
séparation immédiate selon la mobilité
déterminée par la masse, la
conformation, la charge, etc.
étape de tassement de l'échantillon précédent
la séparation qui est basée uniquement sur la
masse (en principe)
Les systèmes discontinus sont des systèmes triphasiques, c'est-à-dire contenant trois
compartiments différents de pH et de composition ionique. Ces trois compartiments
constituent respectivement trois parties du montage de l'électrophorèse: tampon
d'électrode, échantillon et gel de tassement, ainsi que gel de séparation.
Les gels d'électrophorèse nécessitent souvent l'application de "grosses" quantités de
protéines (pour une électrophorèse, grosses quantités veut dire plus de 75 µg !!!) pour
pouvoir détecter les protéines peu abondantes du mélange. Cependant cela veut dire
qu'il faut mettre de "gros" volumes (pour une électrophorèse gros volume veut dire
plus de 50 µL !!!). Malheureusement, l'application de gros volumes donne une faible
résolution des protéines. En effet les bandes de protéines individuelles seront toujours
un peu plus épaisses que la bande originale de l'échantillon de protéines à cause de la
diffusion des molécules durant la migration et la coloration. Pour résoudre ce
problème, les systèmes discontinus triphasiques permettent d'appliquer de gros
volumes d'échantillon qui vont se compacter en une zone mince dans un gel de
tassement (ou gel de concentration) avant d'être séparés en bandes bien résolues dans
le gel de séparation.
Ce système comprend les compartiments suivants:
Le tampon d'électrode, dans lequel baignent la cathode et l'anode, et fait contact avec le gel en tant que
tel. Il contient le tampon d'électrode (TEL) caractérisé par une abondance de l'ion de traîne ("trailing
ion"), l'absence d'ion frontal et la présence du tampon/contre-ion. Au pH du tampon d'électrode, l'ion
de traîne est très chargé. Il n'y a évidemment pas d'acrylamide dans ce tampon.
L'échantillon de protéines qui contient les protéines dissoutes dans un tampon d'échantillon (TEC). Le
TEC contient un marqueur de migration, un détergent, un agent réducteur de liens disulfure, etc., en
plus du tampon de gel de tassement (TGT). Le TEC, comme le TGT, se caractérise par une abondance
de l'ion frontal ("front ion"), mais ne contient pas d'ion de traîne, et contient évidemment le
tampon/contre-ion. Au pH du TGT, l'ion de traîne sera peu chargé et l'ion frontal est très chargé. Il n'y a
évidemment pas d'acrylamide dans le TEC.
Le gel de tassement ("stacking gel") est la phase dans laquelle les protéines entrent dans l'acrylamide. Il
sert à entasser les diverses espèces protéines en bandes très minces pour augmenter la résolution de la
séparation. Dans cette section du gel les protéines ne se séparent pas, elles migrent ensemble en
s'entassant dans un volume plus petit que le dépôt. Il contient le tampon du gel de tassement (TGT)
caractérisé par une abondance de l'ion frontal ("front ion") et l'absence d'ion de traîne. Tel que
mentionné précédemment, au pH du TGT, l'ion de traîne (quand il y entrera) deviendra peu chargé et
l'ion frontal est très chargé. L'acrylamide y est très peu concentré de sorte que toutes les protéines
migrent ensemble à la même vitesse.
Le gel de séparation ("separating gel") est la phase dans laquelle les protéines entassées dans le gel de
tassement se séparent les unes des autres. Il contient le tampon du gel de séparation (TGS) qui contient
l'ion frontal (peu concentré). Au pH du TGS, l'ion de traîne et l'ion frontal sont très chargés, ils migrent
donc tous deux très vite parce qu'ils ne sont pas ralentis par les mailles du gel. L'acrylamide y est plus
concentré de sorte que les protéines se séparent puisqu'elles migrent à des vitesses différentes, étant
retardées selon leure masse moléculaire.
L'ion frontal doit toujours conserver sa charge et être de très petite taille. Un ion inorganique (Cl, Na,
etc.) est généralement employé à cette fin. Le contre-ion des ions de traîne et frontaux est normalement
le produit tampon qui assure la stabilité du pH dans chaque compartiment. Donc, l'ion frontal est
généralement aussi utilisé sous forme d'acide ou de base fortes servant à ajuster le pH du produit
tampon. L'ion de traine doit être un produit pouvant changer de charge (très chargé à très peu chargé)
en fonction du pH des divers compartiments. Un acide aminé ayant un pI entre les entre les deux pH,
mais très près du pH du gel de tassement est souvent employé. On pourait aussi utiliser un produit
ayant un pK adéquat pour que le produit adopte les charges requises par le processus. Il est le même
dans chaque compartiment car il doit migrer, évidemment à contre-courant des ions frontaux et de
traîne ainsi que des protéines, mais sans affecter le pH des compartiments qu'il traverse. De plus les pH
choisis doivent être compatibles avec la stabilité et la solubilité des protéines.
Diagramme de la structure d'un gel triphasique
Noter que seulement une rangée d'ions frontaux et de traine est illustrée pour simplifier l'illustration. Pour la même raison, les proportions
respectives de chaque compariment et des molécules ne sont pas à l'échelle. Il est à remarquer qu'au début de l'électrophorèse il n'y a pas
d'ion de traine présents dans le gel de tassement, ni dans l'échantillon de protéines, ni dans le gel de séparation. Au pH du tampon
d'électrode, les ions de traine (T) sont complètement chargés de sorte qu'il entrent et peuvent se mouvoir vite. Il est à remarquer qu'au
début de l'électrophorèse il n'y a pas d'ions frontaux présents dans le tampon d'électrode.
Lorsqu'on applique un voltage dans ce système, les ions frontaux vont se déplacer
rapidement puisqu'ils ont une forte densité de charge. Les ions de traîne, en entrant
dans l'échantillon qui a une composition de pH identique au gel de tassement,
prennent une charge très faible et vont donc se déplacer très lentement. Ces deux ions
vont se déplacer à des vitesses différentes. Ils vont donc créer un "vide" électrique
entre les deux: l'espace ou l'ion frontal, très mobile, est déjà parti mais où l'ion de
traîne, peu mobile, n'est pas encore entré. Dans des conditions électriques constantes,
ce "vide" aura toujours la même distance (1-2 mm). Ce "vide" électrique aura
tendance à "aspirer" les molécules ayant une densité de charge et une mobilité
intermédiaire. Dans notre cas, les protéines sont plus mobiles que l'ion de traîne, mais
moins que l'ion frontal. Au fur et à mesure que ce système passe à travers l'échantillon
de protéines, celles-ci s'entasseront donc dans cet espace séparant les deux ions. Le
gel de tassement a une faible concentration d'acrylamide, de 3 à 5%, insuffisante pour
séparer les protéines du mélange. Les ions ne sont évidemment pas retardés non plus
par cette concentration d'acrylamide.
Le gel de séparation a une concentration en acrylamide plus forte que celle du gel de
tassement, suffisamment pour séparer les protéines. Les ions frontaux ou de traine ne
sont cependant pas retardés par cette concentration d'acrylamide. Le pH du gel de
séparation est compatible avec la charge que l'on veut donner aux protéines d'intérêt.
Au pH du gel de séparation, l'ion de traîne reprend une charge qui lui permet de
migrer aussi presque aussi rapidement que l'ion frontal. Donc, le "vide" électrique
entre ces deux ions disparaît et l'effet d'entassement des protéines ne se fait plus
sentir. Au pH du gel de séparation, les protéines deviennent généralement plus
chargées. Mais comme l'acrylamide est substantiellement plus concentré, elles
rencontrent une résistance qui les ralentit plus ou moins selon leur taille. La séparation
des protéines s'effectue alors comme dans une électrophorèse normale.
Etat du système au avant l'application de la tension.
La tension vient d'être appliquée. Les ions frontaux ont avancé rapidement tandis que les ions de traîne,
en entrant dans l'échantillon, sont devenus peu chargés et avancent plus lentement. Un "vide" électrique
s'est formé entre les ions frontaux et de traîne. Les protéines avancent plus rapidement que les ions de
traine mais plus lentement que les ions frontaux. Les ions frontaux ont commencé à "rattraper" les
protéines.
Les ions frontaux et les ions de traîne et les protéines continuent d'avancer à leur vitesse. Le processus
de tassement, amorcé dans l'échantillon, se poursuit dans le gel de tassement proprement dit. La
distance entre les ions frontaux et de traîne se stabilise et les protéines commencent à s'y entasser.
Le processus se poursuit. La distance entre les ions frontaux et de traîne se maintient toujours et les
protéines s'y accumulent de plus en plus.
Le processus se poursuit. La distance entre les ions frontaux et de traîne se maintient toujours et les
protéines s'y accumulent de plus en plus.
Le processus de tassement est pratiquement terminé. Les protéines sont presque arrivées au gel de
séparation. Elles se sont toutes entassées dans le "vide" électrique. Elles occupent un volume (en
hauteur) beaucoup plus compact qu'au début. En entrant dans le gel de séparation, elles se sépareront
selon leur masse.
Electrophorèse avec détergents
Diverses conditions affectent la migration et la séparation des protéine, parmi les plus importantes sont
la géométrie et la charge des protéines. Si on veut les séparer selon leur masse moléculaire, il faut
abolir les différences entre ces deux types de caractéristiques. Pour cela, on emploie des détergents
cationiques (chargés positivement comme le bromure de cétyltriméthylammonium CTAB) ou
anioniques (chargés négativement comme le dodécylsulfate de Na (SDS), le déoxycholate de sodium
(DOC). Ce détergent confère une charge uniforme (positive ou négative selon le cas) et une
conformation dénaturée similaire à toutes les protéines du mélange. La composition ionique (type
d'ions, pH, etc.) de chaque phase devra tenir compte de ce fait pour maintenir des ions frontaux et de
traine ayant les caractéristiques requises.
APPLICATION À LA BIOCHIMIE
Préparation des échantillons et conditions de migration
Les échantillons de protéines qu'on dépose dans un puit de gel doivent être le plus possibles exempts de
produits contaminants. Les ions sont particulièrement à éviter puiqu'ils peuvent nuire au déroulement
correct des phénomènes électriques permettant la concentration des protéines dans le gel de tassement.
Si on veut séparer des protéines métaboliquement marquées, par exemple avec un acide aminé, du
phosphate, des précurseurs d'oligosaccharides, etc., il faut aussi enlever les molécules qui ne se seraient
pas incorporées dans les protéines. En effet elles peuvent souvent créer un bruit de fond réduidant la
sensibilité d'une autoradiographie ou d'une fluorographie.
Plusieurs approches sont couramment utilisées pour éliminer ces contaminants. La plus simple est la
précipitation acide des protéines avec de l'acide trichloroacétique. Les protéines précipitent dans ces
conditions et peuvent ètre récupérées sous forme de sédiment après centrifugation, tandis que les
petites molécules contaminantes restent dans le surnageant. Cette méthode a cependant plusieurs
défauts. Elle ne permet pas une récupération de toutes les protéines et le précipité de protéines est
souvent difficile à redissoudre. Une approche plus efficace quoique plus longue est la précipitation au
phénol (Sauvé et al, 1995). Cette méthode vient du fait que les protéines en solution aqueusse mises en
présence de phénol se dénaturent et, soit deviennent soluble dans le phénol, soit forment un film à
l'interface eau-phénol; les petites molécules contaminantes demeurent dans la phase aqueuse. On peut
donc récupérer les protéines et les soumettre à une électrophorèse. D'autres précipitation avec des
solvants organiques (éthanol, acétone) sont aussi faisable mais ont aussi des inconvénients (SIITUB:
Précipitation des protéines). Une façon très efficace, mais un peu plus couteuse, est l'emploi de tubes à
centrifuger munis d'une membrane à dyalise (Salodof MacNeil (2003). En centrifugeant, on force les
petites molécules et la gande majorité du solvant aqueux à travers la membrane et on peut recueillir à la
surface de la membrane des protéines concentrées et débarassées des contaminants ayant une masse
inférieure à la limite d'exclusion ("cut-off"), de l'ordre de 5 à 10 kDa. De nombreux fabricants
fournissent ces dispositifs.
Il faut aussi que les conditions ioniques et de pH soient compatibles avec la stabilité des protéines
analysées. On évite généralement les milieux trop acides ou trop alcalins. Pour la plupart des protéines,
les pH acceptables sont de l'ordre de 6 à 10.
La chaleur perturbe aussi la migration électrophorétique. Il faut particulièrement éviter les situations où
le gel est soumis à des températures différentes. Les gels en plaque sont particulièrement sensible et il
était fréquent que le centre des gels surchauffait. Cela causait une migration plus lente des échantillons
des puits périphériques caractérisé par des bandes protéiques ayant migré plus rapidement au centre du
gel, créant un patron ayant la forme d'un sourire.... De nos jours cependant, les dispositifs à
électrophorèse sont conçus pour assurer un refroidissement uniforme de tout le gel.
Si on laisse des puits inoccupés par un échantillon, les protéines des puits adjacents peuvent mal
migrer, c''est ce qu'on appelle 'l'effet de bordure". Ce problème est facilement réglé en mettant
simplement du tampon d'échantillon (1 X) dans ces puits inutilisés.
Le tampon dans lequel est dissout l'échantillon de protéine contient aussi un marqueur de migration
("tracking dye"), une petite molécule colorée, qui migre devant toutes les protéines permettant de
suivre le progrès de la migration.
Électrophorèse des protéines en gel de polyacrylamide-SDS (EPGP-SDS) et estimation de la
masse moléculaire
De nos jours, l'électrophorèse le plus utilisé est sûrement l'EGPA-SDS. Le système triphasique trisglycine-Cl- est de loin le plus utilisé. Il a été développé par Laemmli (1970), d'où le nom
électrophorèse de Laemmli qu'on lui donne quelquefois.
Il s'agit d'un système ou les protéines ont été traitées avec le détergent anionique, le SDS, tel que
préconisé par Weber et Osborne (1969). Ce détergent s'adsorbe avec les protéines. Le traitement des
protéines comprend aussi du b-mercaptoéthanol (bME) qui réduit les ponts disulfure et accentue encore
l'uniformisation de la charge et de la géométrie des protéines. Un court traitement à la chaleur,
généralement à 90-100°C, accélère les réactions de dénaturation des protéines du SDS et du bME. Le
SDS détruit les structures secondaires, tertiaires et quaternaires des protéines; on dit souovent qu'il les
"linéarise". De plus, il s'adsorbe sur les protéines pour leur conférer une charge négative. On obtient
donc des protéines de géométrie et de densité de charge uniformes. La seule différence entre les
protéines de l'échantillon devient leur masse, donc à toute fin pratique, leur taille.
La grande innovation de Laemmli a été de séparer les protéines traitées au SDS (un détergent
anionique) avec le système triphasique très performant, au niveau de la résolution, à base de Cl- ,
glycine et tris développé par Davis et Ornstein (1969). L'ion frontal est le Cl-, dont la charge ne varie
pas en fontion du pH. L'ion de traîne est la glycine. Cette dernière, dont le pI est de 6.0 (pK 2.34 et
9.78), est peu chargée à pH 6.8 (TGT) mais très chargée négativement à pH 8.8 (TGS et TEL). Le
contre-ion et produit tampon est le tris (pK 8.08).
Une des utilités de l'EPGP-SDS est d'estimer la masse moléculaire des protéines qu'on sépare. Pour ce
faire, il suffit de faire migrer dans le gel des étalons de masse moléculaire connue. On obtient une
résolution enocre meilleure en employant un gradient de concentration d'acrylamide. On peut alors
construire une courbe de distance de migration (ou Rf linéaire entre le) vs log (masse moléculaire). La
masse approximative des protéines des échantillons pourra donc être facilement déterminée. Pour
obtenir une mesure valable de la masse moléculaire, on doit faire migrer dans le même gel des étalons
cote-à cote avec la protéine dont on veut connaitre la masse. Il est important de choisir des conditions
de migrations, essentiellement la porosité du gel (%A et %C) où les étalons auront une relation Rf vs
log MM linéaire et que la protéine de masse inconnue migre à l'intérieur de cette zone de linéarité. Plus
il y a d'étalons dans la zone de linéarité, meilleure est la détermination de la masse. Le Rf est le rapport
entre la distance de migration de la protéine (échantillon ou étalon) et le front d'ion déterminé par la
position d'un indicateur coloré (bleu de bromophénol). La compagnie BioRad a produit un dépliant (en
format pdf) sur le sujet.
Cette méthode a une précision satisfaisante mais n'est pas infaillible. En effet, la mobilité de la majorité
des protéines varie entre 5-20% par rapport la moyenne (Weber et Osborne, 1969) . De plus, quelques
protéines ont un comportement carrément anormal. En effet, même si la grande majorité des protéines
adsorbent entre 1.1 et 1.7 g de dodécylsulfate par g, certaines ont une faible affinité pour ce détergent
(Nelson, 1971; Rizzolo et al, 1976). Par exemple la papaïne et la glucose oxydase ne lient que 0.2 g de
dodécylsulfate/g, ce qui leur donne une densité de charge réduite par rapport à la moyenne des
protéines. Une autre exception est celle des protéines fortement glycosylées. En effet les résidus
glycosyles de ces protéines ne se lient pratiquement pas au SDS, impliquant encore une fois une densité
de charge réduite. Certaines protéines, comme les histones et des protéines ribosomiques, sont très
basiques et ont un grand nombre de charges positives proportionnellement aux molécules de
dodécylsulfate qu'elles peuvent complexer. C'est pourquoi on doit considérer que l'EPGP-SDS ne
permet de mesurer qu'une masse moléculaire apparente.
Une variante de l'EPGP-SDS est le système tris-tricine. Il vise à solutionner la limite majeure du
système de Laemmli, le manque de résolution des polypeptides de petite masse moléculaire (< 15 kDa).
En effet ceux-ci sont emprisonnés dans les micelles de SDS qui migrent derrière le front d'ions et ne
sont pas séparées. En remplaçant la glycine par la tricine (un tripeptide de glycine) on peut dissocier les
petits polypeptides, aussi petits que 1 kDa, des micelles de SDS, ce qui leur permet de migrer selon leur
masse.
Autres systèmes de séparation électrophorétique des protéines
Un système triphasique basé sur un autre détergent a été mis au point, mais il est beaucoup moins
employé. Ce système utilise comme agent dénaturant le détergent cationique bromure de
cétyltriméthylammonium (CTAB). Le principal avantage du CTAB est qu'il engendre une dénaturation
généralement réversible des protéines, contrairement à celle du SDS qui est généralement irréversible.
Si on veut dénaturer les protéines sans affecter leur charge intrinsèque, on peut utiliser l'urée, un agent
chaotropique non ionique. Des concentrations de l'ordre de 6 M d'urée sont requises et la migration se
fait en milieu acide.
Électrophorèse préparative
On peut utiliser l'électrophorèse comme étape de purification de protéines. Généralement on utilise des
conditions de migration non dénaturantes pour préserver les protéines.
Il existe un montage spécialisé à cette fin, il ressemble à une colonne à chromatographie munie
d'électrodes. Il s'agit d'un gros tube cylindrique dans lequel on peut couler de l'acrylamide. On dépose
l'échantillon pour le soumettre à l'électrophorèse. On continue la migration sans l'arrêter et on recueille
les fractions protéiques au fur et à mesure qu'elles sortent du gel.
Une approche plus simple, quoique plus "artisanale", est de faire l'électrophorèse dans un gel plat
conventionnel sauf que les puits sont très grands et peuvent contenir un grand volume d'échantillon.
Après le temps voulu, on récupère le gel, on le coupe et on récupère la bande dans laquelle est la
protéine qu'on veut isoler. On broie cette bande pour en libérer les protéines. Pour ce faire, on peut
utiliser un broyeur de type "Potter-Evelhjem", un sonicateur, etc. Pour faciliter cette extraction, on peut
polymériser l'acrylamide avec un agent réticulant solubilisable (e.g. BAC avec b-mercapto-éthanol).
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électrophorèse]
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