ALTO : Étude observationnelle prospective sur la prise en charge pharmacologique préventive de la douleur induite par la kinésithérapie ostéoarticulaire Denis Pouchain1, Virginie Rondeau2, Driss Kamar3, Rosine Arnaud4, Jean-Yves Milon4, Serge Perrot5 1 Département de médecine générale, Tours ; 2INSERM U897, Bordeaux ; 3Docs, Sèvres ; 4Bristol-Myers Squibb, Rueil-Malmaison ; 5Hôpital Hôtel-Dieu, Paris. Contact : [email protected] Méthodes Contexte La kinésithérapie de l’appareil locomoteur est susceptible de provoquer ou d’augmenter les douleurs articulaires des patients. Si les pédiatres sont relativement attentifs à la douleur provoquée par les procédures médicales, il n’y a pas d’étude ayant observé les pratiques des médecins généralistes (MG) pour prévenir ou soulager la douleur provoquée par la kinésithérapie de l’appareil locomoteur. Objectifs Décrire les caractéristiques des patients, leur pathologie, l’impact de la kinésiophobie des patients et les pratiques des MG relatives à la prévention des douleurs induites par la kinésithérapie de l’appareil locomoteur. 1.Registre observationnel multicentrique transversal constitué par un échantillon de MG tirés au sort à partir d’une base nationale. Pendant 6 semaines tous les patients adultes ayant reçu une première prescription de kinésithérapie pour des douleurs de l’appareil locomoteur ont été inclus. 2.Etude prospective sur les 4 premiers patients du registre ayant accepté de participer, à l’aide d’un questionnaire rempli par le médecin à l’inclusion et de 3 auto-questionnaires patient remplis avant la première, après la 5ème et après la dernière séance de kinésithérapie. La kinésiophobie du patient a été évaluée par le Tampa Scale for Kinesiophobia (kinésiophobie si TSK score ≥ 40). Analyse statistique Pour l’analyse, les données ont été redressées sur l’activité du médecin (pondération tenant compte du nombre de consultations dans le registre rapporté sur une durée de 6 semaines pour chaque médecin). Les analyses statistiques ont été réalisées en utilisant des méthodes statistiques usuelles : analyse de variance pour les variables quantitatives ; test du χ2 pour les variables qualitatives. Résultats • Caractéristiques des médecins 186 MG (âge moyen 52 ans, 73% d’hommes, 18% ayant suivi un cursus post-thèse sur la douleur) ont accepté de participer à l’étude. Ils étaient représentatifs sur les critères d’âge et de répartition géographique par rapport aux données de la DRESS 2011. Une proportion classiquement plus importante d’hommes par rapport à celle de la population des MG français (73% vs 59%) a été observée. • Données des patients du registre Les médecins généralistes ont inclus 2 987 patients dont 2 707 (91 %) ont reçu une prescription antalgique. Une prescription antalgique spécifique pour les douleurs induites par la kinésithérapie a été délivrée à 24 % d’entre eux dont 93 % de type pharmacologique (Figure 1 ). Figure 1. Répartition des patients de l’étude en fonction de leur prise en charge Registre (N = 2 987) Avec prescription antalgique (N = 2 707) Sans prescription antalgique (N = 280) Avec au moins une prescription spécifique (N = 650) Sans prescription spécifique (N = 2 057) Avec au moins une prescription pharmacologique spécifique (N = 603) Avec au moins une prescription non-pharmacologique spécifique (N = 181) Avec au moins une prescription pharmacologique spécifique seule (N = 469) Sans prescription non-pharmacologique (N = 424) Avec prescription non-pharmacologique non spécifique (N = 45) Avec au moins une prescription non-pharmacologique spécifique seule (N = 48) Avec une prescription non-pharmacologique ou pharmacologique spécifique (N = 134) Avec prescription pharmacologique non spécifique (N = 44) Sans prescription pharmacologique (N = 4) • Données des patients de l’étude ➔C aractéristiques des patients Les 700 patients de l’étude suivis prospectivement étaient âgés en moyenne de 50 ans et 54% d’entre eux étaient des femmes. Hormis le genre, les caractéristiques des patients de l’étude n’étaient pas différentes de celles des patients du registre selon l’âge, le mode évolutif de la pathologie, le type de la pathologie, le type de douleur, la prescription antalgique spécifique et le nombre de séances de kinésithérapie prescrites. ➔ Caractéristiques de la pathologie des patients Les caractéristiques de la pathologie sont présentées dans la figure 2. Figure 2. Mode évolutif, type de la pathologie et type de douleur Mode évolutif de la pathologie 22% Type de la pathologie 10% 34% 45% Chronique (= plus de 3 mois) Aigue Aigue sur fond chronique Type de douleur 7% 15% 36% 7% 36% 58% 33% Rhumatisme inflammatoire Pathologie post-traumatique Pathologie post-chirurgicale Pathologie dégénérative Autre Essentiellement au repos Essentiellement au mouvement Le plus souvent permanente En moyenne les patients avaient une douleur de 6,5 ± 1,8 sur une échelle numérique allant de 1 (pas de douleur) à 10 (douleur maximale). ➔ Analyse selon le score de kinésiophobie des patients Parmi les 643 patients avec un score de kinésiophobie évaluable avant la première séance de kinésithérapie, 507 (78,8%) avaient un TSK score ≥ 40. La prescription d’un traitement antalgique pharmacologique spécifique n’était pas corrélée à la kinésiophobie du patient (p = 0,06). En revanche, l’intensité et l’acceptabilité initiales de la douleur, la douleur à l’issue de la 5ème séance et la satisfaction du patient étaient corrélées à la kinésiophobie du patient (Tableau 1). Tableau 1. Analyse en fonction du score de kinésiophobie des patients Score < 40 Score ≥ 40 (N = 136) (N = 507) Prescription d’un traitement antalgique à l’issue de la consultation Acceptabilité de la douleur initiale Présence de douleur à l’issue de la 5ème séance de kinésithérapie Séances de kinésithérapie bénéfiques à l’issue de la 5ème séance Niveau initial de douleur Satisfaction globale à la 5ème séance Satisfaction globale à la dernière séance p 85% 95% < 0,001 76% 48% < 0,001 55% 72% 0,001 97% 86% 0,003 6,8 ± 1,7 6,7 ± 1,7 7,6 ± 2,0 < 0,001 0,003 0,010 5,9 ± 1,9 7,3 ± 1,5 8,2 ± 1,8 ➔A nalyse de la satisfaction des patients en fonction de la prescription d’un traitement antalgique pharmacologique spécifique seul. Entre la 5ème et la dernière séance de kinésithérapie, l’augmentation de la satisfaction moyenne des patients était de 35% chez ceux ayant reçu un traitement antalgique préventif pharmacologique seul et de 17% chez ceux n’ayant reçu aucun traitement préventif (p = 0,018). Conclusion La prise en charge préventive de la douleur induite par la kinésithérapie est insuffisante alors qu’elle améliore la satisfaction des patients. Etude réalisée grâce au support de Bristol-Myers Squibb France. Le data management et l’analyse statistique de cette étude ont été réalisés par ICTA (Fontaine les Dijon, France) 12ème Congrès national de CNGE, Lyon, France, 22-23 novembre 2012