D o s s i e r d u C N H I M Revue d’évaluation sur le médicament Publication bimestrielle 2000, XX, 1 SOMMAIRE 2000, XXI, 1 Le Point sur Béthanéchol Fiche Nutrition parentérale : 3 - Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin Fiche Approche pharmaco-économique Fiche Cytochromes P 450 et interactions médicamenteuses Centre National Hospitalier d’Information sur le Médicament ISSN 0223.5242 Sommaire Dossier du CNHIM 2000 Tome XXI, 1 Tous les articles publiés dans DOSSIER sont le fruit d'un travail collectif, sur le fond et sur la forme, entre les Rédacteurs-Signataires, le Comité de Rédaction, et la Rédaction du CNHIM d'une part, le Comité de lecture et certains experts, spécialistes du sujet traité, d'autre part. Sur chaque sujet, DOSSIER du CNHIM ne publie donc pas les opinions de tel ou tel, mais réalise une analyse scientifique critique, la plus objective possible. Directeur de la Publication : J.M. Kaiser RÉDACTION Rédacteur en chef : M.C. Husson Secrétaire de rédaction : C. Fréville Comité de rédaction : D. Dardelle (), I. Debrix (Paris), C. Demange (St Dié), J.E. Fontan (Paris), C. Guérin (Paris), B. Sarrut (Paris). Secrétariat : M. Bouchot, F. Prince COMITÉ DE LECTURE : C. Advenier (Versailles), P. Assayag (Paris), A. Baumelou (Paris), P. Beaufils (Paris), C. Buffet (Bicêtre), D. Brossard (Saint-Germain en Laye), D. Cabrol (Paris), A. Certain (Paris), A. Escousse (Dijon), J.M. Extra (Paris), P. Faure (Paris), M. Feuilhade de Chauvin (Paris), P. Gayral (Paris), P.M. Girard (Paris), J.C. Koffel (Strasbourg), P. Maire (Lyon), C. Montagnier (Bayonne), M. Ollagnier (St Etienne), B. Quinet (Paris), Ch. M. Samama (Paris), X. Sauvageon (Paris), E. Singlas (Paris), G. Vedel (Paris), J.M. Vetel (Le Mans), T. Vial (Lyon) IMPRESSION : Express Service Est - 19, Bd Georges Bidault, 77183 Croissy-Beaubourg - Rythme de parution: 6 numéros par an N° ISSN 0223.5242. N° de commission paritaire: 71987 CENTRE NATIONAL HOSPITALIER D'INFORMATION SUR LE MÉDICAMENT (CNHIM) 7, rue du Fer à Moulin 75005 Paris - Tél. : + 33(0) 1 44 08 77 77 Fax : + 33(0) 1 43 36 76 49 - Email : [email protected] Le CNHIM est une association indépendante à but non lucratif (loi 1901) dont la vocation est de dispenser une information rigoureuse et scientifique sur le médicament. Président : J.M. Kaiser Président fondateur : A. Mangeot † Directeur : M.C. Husson Promotion : C. Grevot Secrétariat-Abonnement : M. Bouchot, F. Prince Conseil d'Administration : H. Allemand (Paris), P. Arnaud (Rouen), A. Baumelou (Paris), A. Becker (Paris) , F. Berthet (St Maurice), M.C. Bongrand (Marseille), O. Brault (Paris), S. Ferry (Lyon), J.E. Fontan (Paris), B. Fragonard (Paris), M.C. Gaillot (Paris), F. Gimenez (Paris), A. Graftieaux (Chalon sur Marne), G. Hazebroucq (Paris), G. Johanet (Paris), J.M. Kaiser (Paris), PJ. Lancry (Paris), J.F. Latour (Lyon), A.V. Lebelle (Angers), R. Leverge (Paris), A.M. Liebbe (Compiègne), C. Penot-Ragon (Marseille), JP Reynier (Marseille), M. Ricatte (Paris), A. Sarfati (Ivry), B. Sarrut (Paris), B. Van Bockstael (Lomme), G. Willoquet (Évry). Les articles de Dossier du CNHIM sont indexés dans BIBLIOGRAPHIF ®. Le CNHIM a la propriété des textes publiés dans ce numéro et se réserve tous les droits de reproduction (même partielle), d’adaptation, de traduction, pour tous les pays et par quelque procédé que ce soit (loi du 11 mars 1957, art. 40 et 41 du Code Pénal art. 425). Échos du CNHIM Marie Caroline Husson 2 Docteur Patrick 3 Le Point sur : Béthanéchol Éditorial Tounian 5 Introduction Pathologie et traitement actuel du RGO de l’enfant et du nourrisson : 5 - Symptomatologie et moyens d’exploration du RGO chez l’enfant et le nourrisson - Traitements disponibles et stratégie 10 Préparations hospitalières de béthanéchol à usage pédiatrique - Forme PCH - AGAM - Autres formes préparées en France par les pharmaciens hospitaliers 17 17 Chlorure de béthanéchol à usage pédiatrique - Propriétés physico-chimiques - Propriétés pharmacodynamiques - Propriétés pharmacocinétiques 18 18 20 Études cliniques chez l’enfant et le nourrisson - Études cliniques non retenues - Études cliniques comparatives randomisées - Bilan des études cliniques 20 20 20 Place du béthanéchol dans la stratégie thérapeutique - Intérêt du béthanéchol - Comparaison béthanéchol - cisapride 23 23 26 Conclusion Fiche : Nutrition parentérale : 3 - Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin 40 Fiche : Approche pharmaco-économique : évaluation pharmaco-médico-économique de stratégies thérapeutiques : éléments de méthodologie 52 Fiche : Cytochromes P450 et interactions médicamenteuses Tarif 2000 (prix TTC) Abonnement : Institutions hospitalières et Particuliers : 941,00 F, Laboratoires : 1882,00 F, Numéro : Institutions hospitalières et Particuliers : 178,00F Laboratoires : 355,00 F (tarif dégressif envisageable). Échos du CNHIM Une nouvelle approche des évaluations de Dossier du CNHIM : la pharmaco-économie Le sommaire de ce numéro 1 du nouveau millénaire, atypique voire disparate, témoigne de compétences bien spécifiques de la profession de pharmacien des hôpitaux. Tout d’abord un point sur le béthanéchol utilisé chez l’enfant et le nourrisson dans le traitement du reflux gastroœsophagien en seconde intention. Ce médicament est dépourvu d’AMM en France. Il est fabriqué par quelques pharmacies hospitalières, la pharmacie centrale des hôpitaux de l’AP-HP en particulier, sous le statut de préparation hospitalière. Puis, une fiche, la troisième d’une série destinée à faire le point sur la place de la nutrition parentérale dans différents contextes physiopathologiques spécifiques (1 - généralités, 2 - pancréatites, déjà traités), ici, les maladies inflammatoires chroniques de l’intestin, le Crohn en particulier (la prochaine traitera du sujet âgé). Ensuite, une fiche de synthèse sur l’implication des différentes familles de cytochromes P450 connues à ce jour, dans le métabolisme de divers médicaments, et les conséquences cliniques que cela peut entraîner au niveau des interactions entre plusieurs médicaments en particulier. Enfin, une dernière fiche, sur laquelle je souhaite attirer l’attention. Volontairement dense et informatif, cet article présente des éléments de méthodologie utilisés dans les études de pharmaco-économie. Rédigé sous la houlette de Marie Christine Woronoff-Lemsi (CHU de Besançon), il marque le départ d’une nouvelle approche, complémentaire, qui sera désormais traitée dans les «évaluations thérapeutiques», ou les «points sur» de Dossier du CNHIM. C’est un projet qui me tenait à cœur depuis plusieurs années, mais qui restait difficile à mettre en place. Voilà qui est fait, je m’en réjouis. En effet, dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses de santé, et donc de choix les plus éclairés possible entre plusieurs stratégies thérapeutiques - en termes de bénéfices obtenus au plan de la santé publique et des coûts correspondants - la seule évaluation clinique ne suffit pas. Notre objectif ici n’est pas de décortiquer les études économiques publiées comme les essais cliniques, mais de les analyser, et de produire des conclusions permettant leur utilisation comme outil d’aide à la décision. Seules les études impliquant les médicaments traités dans l’article seront sélectionnées, et cette sélection s’appuiera sur les recommandations édictées par M. Drummond*. Merci à notre collègue de Besançon et son équipe d’initier ce travail. Je forme le vœu que cette nouvelle implication de Dossier du CNHIM participe à la crédibilité que la pharmacoéconomie cherche encore à acquérir . Marie Caroline Husson Rédactrice en chef Directrice du CNHIM * Michael F. Drummond, Bernie JO’Brien, Greg L Stoddart, Georges W Torrance. Méthodes d’évaluation économique des programmes de santé. 2è édition. Traduction de MO Carrère. Paris, Ed Economica, 1998. Dossier 2000, XXI, 1 2 É d i t o r i a l Le reflux gastro-œsophagien est-il LA maladie du nourrisson ? On serait tenté de répondre positivement à la question-titre tant le reflux gastro-œsophagien (RGO) est rendu responsable d'une multitude de maux chez le nourrisson. En effet, les pleurs (souvent attribués à des «coliques»!), les troubles du sommeil, les difficultés à boire, l'irritabilité, les rhinopharyngites itératives, les otites répétées lui sont fréquemment attribués. Mais la responsabilité du RGO est en fait loin d'être toujours évidente. Le RGO a également longtemps été considéré comme une des causes principales de la mort subite du nourrisson. Les travaux récents qui ont montré que les nourrissons allongés sur le dos faisaient deux fois moins de mort subite que ceux allongés sur le ventre a déculpabilisé en partie le RGO puisque la position sur le dos aggrave significativement le RGO, comparée à la position sur le ventre. La prescription excessive de certaines explorations du RGO est une des conséquences directes de cette accusation abusive. Ainsi, le moindre nourrisson qui pleure n'échappe pas à l'endoscopie digestive qui découvre la fameuse œsophagite congestive (parfois dénommée de grade 1 pour faire plus savant), fournissant enfin une origine à ces pleurs, légitimement angoissants, et soulageant alors parents et médecin traitant. Notre expérience démontre ô combien cette attitude est peu justifiée et entachée de nombreuses erreurs, quant à l'appréciation de l'état de la muqueuse du bas-œsophage. L'inexpérience de certains endoscopistes, ou la nécessaire rentabilité du coûteux matériel d'endoscopie, sont des explications possibles à ces "erreurs". Ces nombreuses suspicions diagnostiques de RGO aboutissent bien évidemment à des traitements anti-reflux intempestifs. On peut bien sûr constater, et se réjouir, que la sténose peptique de l'œsophage, qui constituait jadis une des complications les plus redoutables du RGO, ne se voie plus de nos jours. Il est donc nécessaire de traiter les RGO du nourrisson, mais point trop n'en faut ! Jusqu'à un temps pas encore très éloigné, le cisapride était presque autant prescrit aux nourrissons que la vitamine D et le fluor, alors que dans la grande majorité des cas, de simples mesures posturales et diététiques étaient suffisantes pour venir à bout de minimes régurgitations non compliquées. Mais voilà que le cisapride fait peur car d'exceptionnelles observations de troubles du rythme cardiaque ont été rapportées, dans tous les cas du fait d'une posologie élevée ou d'une association médicamenteuse proscrite. Ceci a conduit à une diminution de sa prescription, toutefois rapidement remplacée par celle de métoclopramide ou de dompéridone. Il est d'ailleurs remarquable de noter qu'aucun travail randomisé et contrôlé n'a fait la preuve formelle de l'efficacité de ces deux dernières thérapeutiques dans le RGO du nourrisson. Une fois encore, ce procès fait au cisapride est abusif. Comme tout médicament il est nécessaire de respecter ses posologies et les associations médicamenteuses interdites. Finalement, évitons d'accuser le RGO de tous les maux du nourrisson, mais sachons distinguer de banales régurgitations d'un vrai RGO compliqué qui, lui, justifie bien sûr un traitement adapté et efficace. Ce traitement devra toujours débuter par des mesures diététiques et posturales, clairement développée dans l'article qui suit, et, en cas d'échec de ces dernières, aboutir à la prescription de prokinétiques. Le chef de file de ces derniers demeure le cisapride car il est le seul à avoir fait la preuve de son efficacité dans des essais cliniques bien conduits. Il peut bien sur provoquer des effets indésirables, mais les plus graves sont dus à des règles de prescriptions non suivies. Et le béthanéchol dans tout cela ? Sa place dans le traitement du RGO est parfaitement précisée dans le travail qui suit. Il doit en effet rester pour l'instant une thérapeutique de deuxième intention, car non seulement son efficacité dans le RGO du nourrisson reste à démontrer, mais de plus ses effets indésirables sont probablement plus fréquents que pour le cisapride. Docteur Patrick Tounian Gastroentérologie et nutrition pédiatriques Dossier 2000, XXI, 1 3 Le Point sur Le Point sur Béthanéchol BÉTHANÉCHOL DANS LE TRAITEMENT DU REFLUX GASTRO-ŒSOPHAGIEN DE L'ENFANT ET DU NOURRISSON Aymeric Moty*, Bernard Sarrut* et la participation du comité de rédaction * SIMP : Service d’information médicopharmaceutique de la PCH AP-HP Remerciements : C. Faure (Paris), G. Hazebroucq (Paris), P. Tounian (Paris) Résumé Le chlorure de béthanéchol est un produit ancien, utilisé chez l’adulte dans plusieurs indications urologiques et digestives. En pédiatrie, il est utilisé pour le traitement du reflux gastro-œsophagien primaire (RGO) chez l’enfant et le nourrisson. Aucune spécialité contenant du béthanéchol n’a d’autorisation de mise sur le marché (AMM) en France. Le RGO est défini comme le passage involontaire d’une partie du contenu gastrique dans l’œsophage. Les RGO primaires peuvent être classés en 2 catégories : le RGO non compliqué ayant pour seule manifestation des régurgitations, plus fréquentes en période post-prandiale, et le RGO dit compliqué car provoquant ou aggravant certaines affections (digestives, oto-rhino-laryngées, broncho-pulmonaire, malaises graves du nourrisson et apnées). Les méthodes d’exploration et de diagnostic du RGO ou de ses complications sont assez nombreuses, chacune ayant sa spécificité, ses avantages et ses inconvénients : 1) la pH-métrie œsophagienne permet la mise en évidence d’un RGO acide compliqué, non évident cliniquement ; 2) la fibroscopie œso-gastro-duodénale, examen de référence pour le diagnostic d’œsophagite ; 3) l’examen radiologique ou technique du transit œso-gastro-duodénal (TOGD) permet de faire le bilan du RGO avant la décision chirurgicale ; 4) la manométrie œsophagienne permet d’évaluer la motricité œsophagienne notamment du sphincter inférieur œsophagien ; 5) l’échographie permet la recherche d’anomalies anatomiques ; 6) la scintigraphie au technétium permet l’étude de la vidange gastrique. Seule la pH-métrie œsophagienne permet de poser le diagnostic du RGO. Le but du traitement du RGO est de soulager les symptômes, de cicatriser les lésions éventuelles d’œsophagite et de prévenir les récidives et les complications. Selon l’ESPGAN (European Society of Paediatric Gastroenterology and Nutrition), la prise en charge du RGO peut se faire en 5 phases : 1) rassurer les parents, administrer des médicaments épaississants ; 2) administrer des prokinétiques : cisapride (et si les symptômes persistent dompéridone, métoclopramide) ; 3) en thérapie adjuvante aux phases 1 et 2 : position anti-Trendelenburg (décubitus ventral avec une inclinaison de 30°, tête surélevée) ; 4) anti H2 (cimétidine, ranitidine) ou inhibiteurs de la pompe à protons (oméprazole) ; 5) chirurgie. Certains auteurs ont recours aux antiacides. Le béthanéchol qui peut être classé dans les prokinétiques n’est pas explicitement proposé dans le schéma proposé par l'ESPGAN. La place de la diététique reste discutée. La Pharmacie Centrale des Hôpitaux de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (PCH - AGAM) fabrique un comprimé dispersible à 1 mg de béthanéchol à usage pédiatrique. Il existe d’autres préparations hospitalières de béthanéchol. Le béthanéchol est un parasympathomimétique direct, possédant des propriétés prokinétiques. Les données pharmacocinétiques sont quasiment inexistantes. Les essais cliniques contrôlés sont rares. L’étude d’Euler montre une efficacité statistique sur le gain de poids à 6 semaines grâce à la diminution du nombre de vomissements. L’étude de Levi ne trouve pas de différence significative sur les scores cliniques et le nombre de reflux entre le groupe béthanéchol et le groupe MAALOX® (anti-acide). Quelques effets indésirables ont été retrouvés : étourdissement, maux de tête, augmentation des vomissements, douleurs de la poitrine, anorexie, bronchoconstriction. Il semble nécessaire de disposer d’études cliniques complémentaires pour confirmer les résultats disponibles. Sa prescription ne se conçoit qu’après échec des autres moyens médicaux et après étude de la pression du sphincter inférieur œsophagien par manométrie, son efficacité semblant en effet optimale en cas d’hypotonie sphinctérienne. Dans la pratique, le béthanéchol est réservé aux RGO sévères de l’enfant et du nourrisson, le plus souvent après échec ou contreindication du traitement par le cisapride (toxicité cardiaque, nombreuses interactions médicamenteuses donnant lieu à des torsades de pointes et à un allongement du QT) et après inefficacité constatée des mesures diététiques (laits épaissis) et posturales. Mots clés : béthanéchol, cisapride, enfant, nourrisson, pH-métrie, reflux gastroœsophagien, Dossier 2000, XXI, 1 4 Le Point sur Béthanéchol INTRODUCTION Chez l’enfant, en particulier le nourrisson, cette distinction est particulièrement importante, tant est grande la fréquence du RGO (1 pour 500 naissances) (34). La classification du RGO de l’enfant distingue les RGO dits primaires des RGO secondaires. Ces derniers se manifestent par des vomissements récurrents au cours d’affections très diverses (infections chroniques, insuffisances cardiaques, maladies métaboliques et neuro-musculaires, allergies alimentaires, erreurs diététiques...). Seuls sont traités dans cet article les RGO primaires. Le chlorure de béthanéchol est un produit ancien (brevet US n° 2.322.375 - 1943), utilisé chez l’adulte dans plusieurs indications urologiques et digestives. Aucune spécialité contenant du béthanéchol n’a d’autorisation de mise sur le marché (AMM) en France. À l’étranger, il n’a d’indication que chez l’adulte. Son action parasympathomimétique spécifique en fait, par ailleurs, un réactif pharmacologique. La Pharmacie Centrale des Hôpitaux de l’Assistance Publique - Hôpitaux de Paris (PCH - AGAM de l’AP-HP) a répondu en 1983 à une attente du milieu hospitalier : disposer d’une présentation de béthanéchol à usage pédiatrique pour le traitement du reflux gastro-œsophagien (RGO) chez l’enfant et le nourrisson. Une forme gélule, dosée à 0,5 mg et 1 mg, fut développée, puis abandonnée. En 1992, le statut du chlorure de béthanéchol est devenu celui de préparation hospitalière. Aujourd’hui, une forme comprimé dispersible à 1 mg est fabriquée par la PCH - AGAM. 1.2. RGO primaires Les RGO primaires peuvent être classés en 2 catégories : * Le RGO non compliqué de l’enfant Le RGO non compliqué de l’enfant a pour seule manifestation des régurgitations, plus fréquentes en période postprandiale. Les régurgitations débutent le plus souvent avant l’âge de 3 mois. Elles sont décrites comme survenant sans effort ; leur volume est en général faible ; leur fréquence peut aller jusqu’à 20 à 30 fois par jour, surtout chez le jeune nourrisson. Elles ne s’accompagnent pas d’autres symptômes, et l’enfant a un développement staturo-pondéral normal. L’évolution de ce RGO est en général favorable, les régurgitations disparaissant au cours du deuxième semestre de vie, ou lors de l’acquisition de la marche (1). PATHOLOGIE ET TRAITEMENT ACTUEL DU RGO DE L’ENFANT ET DU NOURRISSON * Le RGO compliqué de l’enfant Symptomatologie et moyens d’exploration du RGO chez l’enfant et le nourrisson Le RGO est dit compliqué lorsqu’il est prouvé qu’il provoque ou aggrave certaines affections. Ainsi, plusieurs manifestations peuvent être observées. 1. Symptomatologie du RGO chez l’enfant et le nourrisson — Reflux et manifestations digestives 1.1. Définitions La présence en quantité anormale ou anormalement prolongée de liquide gastrique dans l’œsophage peut engendrer une œsophagite dont les symptômes sont variables (1, 19). Les symptômes évocateurs sont une hématémèse, des pleurs persistant en cours de repas ou un refus réitéré du biberon chez le nourrisson, une anorexie, une dysphagie, une hypotrophie ou une diminution de la vitesse de la croissance staturo-pondérale, une anémie ferriprive après élimination des causes habituelles. L’enfant plus grand peut, de plus, décrire des douleurs rétrosternales. La sténose peptique de l’œsophage, expression d’un reflux sévère méconnu, est devenue exceptionnelle en France (14). Le RGO est défini comme le passage involontaire d’une partie du contenu gastrique dans l’œsophage. La nature du contenu gastrique peut varier au cours du temps et comprendre de la salive, des aliments ingérés, des sécrétions gastriques, et en cas de reflux duodéno-gastrique, des sécrétions pancréatiques ou biliaires. Il peut ainsi être distingué des RGO acides et non acides (neutres ou alcalins). Cette définition du RGO peut être source de confusion car tout individu peut présenter des épisodes de RGO, particulièrement en période post-prandiale immédiate. Il est donc nécessaire de différencier : — Reflux et manifestations oto-rhino-laryngées - le RGO non compliqué, dont la fréquence varie avec l’âge, la position et l’activité, La survenue de symptômes cliniques dans la sphère otorhino-laryngée est liée au passage de liquide gastrique acide en amont de l’orifice œsophagien supérieur et à l’inonda- - le RGO compliqué responsable de troubles digestifs ou extra-digestifs (1). Dossier 2000, XXI, 1 5 Le Point sur Béthanéchol tion du carrefour pharyngé au cours des épisodes de reflux. Les symptômes de cette inondation pharyngienne acide sont des otites à répétition, des rhinopharyngites chroniques et des atteintes chroniques du larynx ou des laryngites à répétition (10, 14). acide sur la muqueuse œsophagienne. 2. Moyens d’exploration du RGO Les méthodes d’exploration et de diagnostic du RGO ou de ses complications sont assez nombreuses, chacune ayant sa spécificité, ses avantages et ses inconvénients. Si les moyens d’exploration du RGO sont de plus en plus élaborés et leur utilisation de plus en plus consensuelle, il n’existe aucun critère diagnostique de RGO accepté par tous les cliniciens. — Reflux et manifestations broncho-pulmonaires Le RGO peut aggraver des affections respiratoires chroniques telles que l’asthme, la dysplasie broncho-pulmonaire des nourrissons traités par ventilation assistée, la mucoviscidose ou la bronchite chronique. Il peut aussi provoquer des toux spasmodiques, des bronchites obstructives et certains asthmes non allergiques (1, 14). L’ANDEM a publié en 1995 des recommandations de pratique clinique (RPC) intitulées ‘‘Indications des explorations dans le diagnostic et le suivi du reflux gastro-œsophagien du nourrisson et de l’enfant’’(1). — Reflux et malaises graves du nourrisson et apnées Cliniquement, il peut être noté un malaise survenant après un repas (parfois à distance, jusqu'à 2 heures), en pleine journée, lors de la manipulation de l’enfant (changement des couches) (19, 30). Un changement de couleur de la peau est souvent observé, avec cyanose ou parfois, à l’inverse, pâleur intense. La physiopathologie de ces malaises est variable : tantôt il s’agit de fausses routes avec inondations naso-pharyngotrachéales, tantôt le malaise survient secondairement à une bradycardie réflexe ou à une apnée engendrée par le contact 2.1. pH-métrie œsophagienne (1, 34, 47, 50) * Généralités Ces 15 dernières années, le monitorage du pH œsophagien des 24 heures est devenu la référence pour la documentation d’un RGO. La pH-métrie œsophagienne est reconnue comme l’élément le plus fiable du diagnostic positif et de la quantification d’un RGO acide. Figure 1 : structure de l’œsophage et de l’estomac Dossier 2000, XXI, 1 6 Le Point sur Béthanéchol vent être les plus proches possibles des activités habituelles. La survenue de toux, de pleurs, d’apnées, doit être précisée. Au niveau européen, un important effort de standardisation des méthodes de mesure et d’interprétation des résultats a permis d’uniformiser les pratiques et d’améliorer ainsi la reproductibilité de la pH-métrie œsophagienne (50). — Le compte rendu de l’examen doit comporter : - le tracé de l’enregistrement du pH, - une interprétation quantitative, comportant au minimum l’index de reflux, défini comme le pourcentage de temps où le pH œsophagien est inférieur à 4 ; cet index est interprété en fonction de normes ; cependant, entre l’absence de RGO acide et l’existence d’un RGO acide certain, il subsiste une zone d’incertitude diagnostique, * Principe La pH-métrie œsophagienne repose sur la mesure, par sonde dans le bas de l’œsophage, des variations du pH, 2 à 3 cm au dessus du cardia ou 3 à 5 cm au-dessus du sphincter inférieur de l’œsophage (SIO). - une interprétation qualitative du tracé, prenant en compte la concordance d’évènements relatés en cours d’examen et la survenue d’épisodes de RGO acides. * Inconvénient et limites — Inconvénient Remarque : il n’existe pas de consensus sur l’intérêt de nombreux index proposés dans la littérature, par exemple : nombre d’épisodes de pH < 4 d’une durée supérieure à 5 minutes, durée du plus long épisode de pH < 4, aire sous la courbe sous le seuil de pH 4. La pH-métrie œsophagienne nécessite un enregistrement prolongé pour éliminer les faux positifs et les faux négatifs. — Limites - La pH-métrie œsophagienne ne décèle que l’acidité sans préjuger des conséquences sur la muqueuse œsophagienne. * Indications de la pH-métrie œsophagienne - Elle n’est pas adaptée pour détecter et quantifier les reflux alcalins en raison de la faible variation de pH et peut se montrer normale chez un nourrisson régurgiteur en cas d’achlorhydrie ou de reflux duodéno-gastrique de bile. L’enregistrement continu de longue durée (supérieure à 18 heures) du pH œsophagien est la méthode diagnostique de référence du RGO acide. La reproductibilité des résultats de cet examen est néanmoins imparfaite. * Domaines d’application La pH-métrie œsophagienne est indiquée : — Couplée à un enregistrement cardio-respiro-graphique et à un EEG si nécessaire, la pH-métrie œsophagienne de longue durée permet d’apprécier la responsabilité du RGO dans la survenue de malaises graves chez le nourrisson. - pour prouver l’existence d’un RGO acide compliqué, non évident cliniquement, - pour prouver la responsabilité d’un RGO acide dans le déclenchement de manifestations extra-digestives telles que : apnée, bradycardie, malaise grave du nourrisson, bronchospasme, en démontrant une relation temporelle entre le RGO et ces manifestations. — L’enregistrement simultané du pH gastrique et œsophagien (pH-métrie bicanal) permet de distinguer le pH gastrique et du pH œsophagien. Cette technique pourrait améliorer ainsi la fiabilité de l’examen, en particulier chez le nourrisson. Il reste cependant nécessaire d’en établir les valeurs normales chez l’enfant sain. Elle permet de plus de ne pas méconnaître les reflux duodéno-gastriques. * Non-indications de la pH-métrie œsophagienne — L’enregistrement du pH œsophagien n’est pas indiqué en cas de RGO non compliqué de l’enfant, et en cas de RGO compliqué cliniquement évident (régurgitations et/ou vomissements fréquents) dont les complications peuvent à l’évidence lui être attribuées (exemple de l’œsophagite). — L’enregistrement simultané de pH à la partie basse et haute de l’œsophage pourrait s’avérer d’un grand intérêt au cours des manifestations respiratoires et ORL récidivantes du RGO (10). — Il n’est pas indiqué de contrôler par une pH-métrie œsophagienne un RGO qui répond au traitement médical ou qui a guéri spontanément après l’âge de la marche. * Recommandations techniques Les RPC ont particulièrement détaillé la pH-métrie dans la rubrique des principaux examens complémentaires. — La durée des examens est, si possible, de 24 heures, et dans tous les cas supérieure à 18 heures. 2.2. Fibroscopie œso-gastro-duodénale (1, 22, 36) * Domaines d’application — Le recueil des circonstances de l’examen comporte la mention des heures et de la nature des repas (alimentation habituelle), des traitements administrés, des changements de position et la description des activités de l’enfant qui doiDossier 2000, XXI, 1 — La fibroscopie œso-gastro-duodénale permet d’analyser la morphologie œsophago-gastrique et d’apprécier parfaitement la souffrance de la muqueuse pouvant montrer une 7 Le Point sur Béthanéchol œsophagite. — La fibroscopie œso-gastro-duodénale permet aussi de : TOGD, ce qui peut s’avérer pénible pour lui. Les manoeuvres nécessaires de provocation du RGO - compression abdominale, position de Trendelenburg ou épreuve de siphonnage - ne sont pas recommandées chez l’enfant. - rechercher une béance du cardia et une malposition, - détecter des maladies inflammatoires de l’estomac ou du duodénum qui peuvent contribuer aux vomissements ou aux reflux, * Indications du TOGD Le TOGD constitue un examen important pour le bilan du RGO avant la décision chirurgicale. - diagnostiquer précocement une sténose du pylore. La pratique des biopsies améliore la sensibilité de l’examen endoscopique. Cet examen peut être indiqué pour rechercher des troubles de déglutition par le radio-cinéma, ou éliminer des anomalies anatomiques en cas de RGO résistant au traitement, persistant au-delà de l’âge de la marche, ou faisant envisager une intervention chirurgicale antireflux. * Recommandations techniques Selon les RPC, la fibroscopie doit être œso-gastro-duodénale, réalisée avec un matériel adapté à la taille de l’enfant, et en milieu pédiatrique chez le nourrisson. Son intérêt doit être comparé à celui de l’échographie, en fonction de l’expérience du radiologue. * Indications de la fibroscopie * Non-indications du TOGD - La fibroscopie œsophagienne est l’examen de référence pour le diagnostic d’œsophagite. Elle ne montre pas le RGO. Selon les RPC, le TOGD n’est pas indiqué pour poser le diagnostic du RGO. Le taux de faux positifs atteint 35 %, et le taux de faux négatifs 14 %. - Toute suspicion d’œsophagite doit faire pratiquer une fibroscopie chez un enfant suspect ou atteint d’un RGO. 2.4. Manométrie œsophagienne (1, 26) - Une œsophagite ulcérée nécessite un contrôle endoscopique après traitement médical. * Principe - Les indications des biopsies œsophagiennes, pour le diagnostic des formes mineures d’œsophagite ou la classification histologique du stade de l’œsophagite, restent discutées. La technique de manométrie œsophagienne repose sur la mesure simultanée en divers points de l’œsophage, dont le sphincter inférieur œsophagien, de la pression intra-œsophagienne ; cette pression varie avec les mouvements de la paroi. La manométrie, couplée à une électromyographie de la déglutition, permet de différencier : 2.3. Examen radiologique (1, 26, 36) L’examen radiologique, également appelé technique du transit œso-gastro-duodénal (TOGD), est le doyen d’âge des moyens d’exploration du RGO. - les ondes propagées induites (ondes primaires), - les ondes secondaires succédant à des stimuli au niveau du corps œsophagien, * Domaines d’application — Le TOGD analyse finement la morphologie de l’œsophage et de l’estomac, montrant une éventuelle hernie hiatale. Il peut montrer, au niveau œsophagien, les conséquences d’un RGO comme la sténose peptique ; c’est alors un examen permettant d’apprécier l’étendue et la topographie de cette sténose. - les ondes tertiaires incoordonnées témoignant d’une souffrance œsophagienne. * Domaines d’application 3 zones doivent être explorées. — Le sphincter inférieur œsophagien afin d’étudier une éventuelle malposition, une hauteur insuffisante, une hypotonie ou des dysfonctionnements. Une hypotonie importante du sphincter inférieur œsophagien est rare et n’est à l’origine que de 10 à 15 % des RGO du nourrisson (22). Cette anomalie n’est pas uniquement en rapport avec une malposition sphinctérienne. — Le TOGD présente aussi l’intérêt majeur d’analyser la vidange gastrique et le cadre duodénal, en recherchant un obstacle fonctionnel et/ou anatomique associé : une malposition cardio-tubérositaire, une sténose du pylore et une malrotation intestinale. * Inconvénients Le petit nourrisson doit être attaché et manipulé dans différentes positions pendant une vingtaine de minutes lors du Dossier 2000, XXI, 1 8 Le Point sur Béthanéchol Chez certains patients le dysfonctionnement du sphincter inférieur œsophagien est caractérisé par la survenue de relaxations inappropriées itératives du sphincter inférieur œsophagien, indépendantes de la déglutition et corrélées au reflux observé en pH-métrie, alors que le fonctionnement du sphincter inférieur œsophagien peut être normal entre ces relaxations. Les essais cliniques évaluant des médicaments dans le traitement du RGO utilisent fréquemment cette technique. 2.5. Échographie (1) Selon les RPC, l’intérêt de l’échographie reste à évaluer. L’échographie n’est pas indiquée pour poser le diagnostic de RGO. Dans des cas de RGO du nourrisson associé à des malaises graves, il a été observé une alternance de dysfonctionnements du sphincter inférieur œsophagien à type de relaxations itératives et d’achalasie partielle à la déglutition. La réalisation et l’interprétation de cet examen nécessitent un opérateur entraîné. L’échographie permet de faire le diagnostic d’anomalies anatomiques (malposition cardio-tubérositaire, sténose du pylore). — La motricité du corps de l’œsophage La présence d’ondes tertiaires peu fréquentes est bien corrélée à la souffrance œsophagienne et à l’œsophagite endoscopique et/ou histologique, et peut être responsable d’un allongement de la clairance acide œsophagienne. 2.6. Scintigraphie au technétium (1, 26) * Inconvénients et limites - Le sphincter supérieur de l’œsophage Son tonus peut être modifié dans le reflux pathologique soit dans le sens d’une élévation par mécanisme réflexe de protection, soit dans le sens d’une baisse ce qui est bien corrélé avec les broncho-pneumopathies récidivantes du RGO. Il peut exister une association au RGO d’un asynchronisme pharyngo-sphinctérien qui aggrave encore le risque respiratoire par la survenue possible d’apnées. La scintigraphie au technétium a l’inconvénient d’être coûteuse et astreignante et n’est donc pas effectuée en routine La scintigraphie n’est pas indiquée pour poser le diagnostic de RGO. * Indications de la scintigraphie Selon les RPC, la scintigraphie n’est pas un examen de première intention. * Indications de la manométrie œsophagienne La scintigraphie peut permettre le diagnostic d’inhalation pulmonaire post-prandiale. Elle permet également une étude de la vidange gastrique. La scintigraphie peut être utilisée chez les enfants qui vont être opérés, afin de savoir s’il est nécessaire, en plus de la fundoplication (cf traitement chirurgical), de faciliter la vidange gastrique par un procédé chirurgical adéquat. Les indications de la manométrie œsophagienne résident dans la recherche d’anomalies, rares, de la motricité œsophagienne, telles que l’achalasie et les dyskinésies, responsables de RGO secondaires. Dans les formes les plus sévères, la manométrie permet de faire l’analyse de la motricité du corps de l’œsophage et du sphincter inférieur œsophagien et constitue une aide précieuse lors du choix thérapeutique des reflux de longue durée. 3. Arbre décisionnel d’exploration d’un RGO chez l’enfant et le nourrisson * Non indications de la manométrie œsophagienne Un groupe de travail européen dans le cadre de l’ESPGAN (European Society of Paediatric Gastroenterology and Nutrition), sur le RGO, chez le nourrisson et l’enfant a émis des recommandations sur le diagnostic (45) et le traitement du RGO (48, 49). D’après les RPC, la manométrie œsophagienne ne permet pas le diagnostic de RGO. La manométrie œsophagienne n’est jamais un examen de première intention. La figure 2 regroupe les résultats de ce groupe de travail et ceux des RPC établis par l’ANDEM (1). * En pratique, cette technique est proposée : - en cas de malaise, pour la recherche de signes d’immaturité du système nerveux entérique, - en cas de résistance au traitement médical et dans le bilan préopératoire, pour la recherche de la motricité (achalasie...) (20). Dossier 2000, XXI, 1 9 Le Point sur Béthanéchol RGO RGO compliqué RGO compliqué œsophagite suspectée régurgitation persistante Pas d’examens complémentaires Interrogatoire Fibroscopie Traitement (épaississant des laits ± prokinétiques) Forme atypique (uniquement forme extradigestive. Exemple : maladie respiratoire chronique, malaise grave...) pH-métrie œsophagienne de longue durée Traitement (épaississant des laits ± prokinétiques) Traitement (épaississant des laits ± prokinétiques) + traitement positionnel + antihistaminiques H2 + inhibiteurs pompe à protons Investigation complète si persistance des symptômes si les symptômes persistent ou si une œsophagite est suspectée Figure 2 : Arbre décisionnel du traitement du RGO chez l’enfant Traitements disponibles et stratégie thérapeutique du RGO de l’enfant et du nourrisson Le but du traitement du RGO est de soulager les symptômes, de cicatriser les lésions éventuelles d’œsophagite et de prévenir les récidives et les complications. Il est important de contrôler la maladie à court terme mais aussi à long terme, ce qui peut, chez certains enfants, nécessiter un traitement médicamenteux d’entretien ou une intervention chirurgicale. L’ESPGAN a mis au point des recommandations sur le traitement de cette maladie (47, 48, 49, 50). Dans le cadre de la stratégie thérapeutique du RGO, il a proposé en 1993 une classification (45) qui a été revue et modifiée en 1995 (48, 49) (cf Tableau I). Dossier 2000, XXI, 1 10 Tableau I : Classification ESPGAN 1995 Phase 1 A - Rassurer les parents B - Médicaments épaississants Phase 2 Prokinétiques : cisapride Si les symptômes persistent : dompéridone, métoclopramide Phase 3 Thérapie adjuvante aux phases 1 et 2 : Position anti-Trendelenburg : position décubitus ventrale avec une inclinaison de 30° (tête surélevée) Phase 4 A - AntihistaminiquesH2 : cimétidine, ranitidine ... B - Inhibiteurs de la pompe à protons : oméprazole Phase 5 Chirurgie Le Point sur Béthanéchol Le béthanéchol qui peut être classé dans les prokinétiques n’est pas explicitement proposé dans le schéma proposé par l'ESPGAN. Seules les spécialités suivantes ont une AMM dans l’indication de reflux gastro-œsophagien ou d’œsophagite par RGO avec posologie pédiatrique : - montmorillonite : BEDELIX®, sphincter inférieur œsophagien, - d’une augmentation de la toux (démontrée chez le nourrisson), - d’une clairance œsophagienne des aliments épaissis éventuellement plus basse (47, 48, 49). 1.4. Indications - diméticone, gomme de caroube : POLYSILANE JOULLIÉ®, - alginate de sodium, bicarbonate de sodium : nourrisson, GAVISCON® - cisapride : PREPULSID®, - dompéridone : PÉRIDYS®, - cimétidine : TAGAMET®, STOMEDINE®, CIMETIDINE G GAM®, CIMETIDINE GER, CIMETIDINE GNR®, CIMETIDINE MERCK®, CIMETIDINE RATIOPHARM®, CIMETIDINE RPG®, - oméprazole : MOPRAL®, ZOLTUM®. 1. Médicaments épaississants - Phase 1 (36, 48, 49, 50) L’augmentation de la viscosité des aliments ou des laits par des agents épaississants a pour but de réduire le nombre d’épisodes de reflux ; cependant, des études pH-métriques et scintigraphiques ont montré qu’un tel effet n’est pas prédictible. L’épaississement des aliments n’est pas recommandé dans le RGO compliqué d’une œsophagite. D’ailleurs, dès 1987, des articles ont mentionné l’existence d’effets négatifs des épaississants sur les symptômes de la toux et de l’œsophagite (36). 1.5. Tolérance 1.1. Principe Les épaississants sont en général bien tolérés malgré la possible survenue de douleurs abdominales. Pour épaissir les laits, il y a 2 possibilités : Les cas de constipation avec GÉLOPECTOSE® et de diarrhée avec GUMLIK® sont assez fréquents (17). - soit ajouter des médicaments épaississants tels que GÉLOPECTOSE® (à base de dextrine maltose) ou GUMLIK® (à base de mucilage), - soit employer des laits épaissis (contenant comme agent épaississant de l’amidon de riz ou de maïs, ou de la caroube) tels que : ALMA AR®, ENFAMIL AR®, GALLIA AR®, GUIGOZ CONFORT®, MILUMEL AR®, MODILAC AR®, NIDAL AR®, NUTRILON AR®. 1.2. Efficacité clinique Les laits épaissis diminuent les régurgitations chez le nourrisson et améliorent le sommeil. L’épaississement des aliments semble donc une approche intéressante, permettant de diminuer les symptômes de régurgitations et de vomissements. 1.3. Limites de la méthode Pour un certain nombre de patients, la diminution du nombre de reflux s’accompagne : - d’une durée des épisodes de RGO plus prolongée, identifiée en pH-métrie par un temps passé à pH inférieur à 4 plus important, la durée du plus long reflux étant augmentée de façon significative ou restant inchangée ; ces résultats sont en accord avec des données récentes montrant que l’augmentation du volume de nourriture et de son osmolalité augmente le taux de relaxation transitoire du sphincter inférieur œsophagien et entraîne une chute de la pression du Dossier 2000, XXI, 1 11 L’utilisation prolongée de GÉLOPECTOSE® peut entraîner des lithiases rénales du fait de la présence de silice dans la préparation (17). Les complications sévères sont rares. Des cas d’obstruction intestinale aiguë chez des petits nourrissons ont été rapportés. 1.6. Conseils diététiques Une réévaluation clinique de la littérature effectuée en 1995 (47, 48) signale que les mesures diététiques supplémentaires à titre de fragmentation des repas plus petits, peu gras, avec des formules riches en hydrates de carbone ne font pas partie du traitement du RGO. Cependant, les conseils diététiques vis-à-vis des enfants plus âgés, bien que théoriques, restent d’actualité (40). — L’enfant doit éviter de prendre un repas trop gras. Il doit éviter le chocolat, la menthe, le café, le thé, la cola et autres boissons très riches en glucides, les aliments épicés, les aliments ou boissons glacés. Il ne doit pas être exposé à un environnement tabagique. — Les repas tardifs le soir sont à éviter de même que les prises d’aliments entre les repas. — Les enfants obèses doivent perdre du poids. Cependant, alors que la perte de poids chez l’adulte est une composante du traitement du reflux, elle ne l’est pas chez l’enfant non Le Point sur Béthanéchol obèse. 1.7. Autres recommandations — Les enfants doivent éviter de porter des vêtements trop serrés. — Les médicaments diminuant la pression du SIO doivent être évités, quand cela est possible, tels les xanthines et leurs dérivés (ex. : la théophylline), les médicaments anticholinergiques, les inhibiteurs calciques, les dérivés nitrés, les bêta-bloquants, le diazépam... de déficits neurologiques. Plusieurs observations chez le nourrisson et l’adulte ont montré que le cisapride pouvait permettre la disparition de l’œsophagite associée au RGO. Neuf essais cliniques randomisés en double aveugle, menés chez l’enfant montrent l’efficacité du cisapride aussi bien au niveau des paramètres du RGO que des symptômes. * Posologie — Enfants de moins de 25 kg : 0,2 mg/kg 3 ou 4 fois par jour, au moins 15 minutes avant les repas, et au moment du coucher si la 4ème prise est nécessaire, sans dépasser 0,8 mg/kg/j. 2. Agents prokinétiques - Phase 2 2.1. Cisapride (46, 47, 48) Le cisapride (PREPULSID®) est un dérivé benzamide, proche chimiquement du métoclopramide. — Enfants de plus de 25 kg : 5 mg, 3 ou 4 fois par jour, au moins 15 minutes avant les repas, et au moment du coucher si la quatrième prise est nécessaire, sans dépasser 20 mg/j. * Propriétés pharmacologiques * Effets indésirables/Contre-indications/Précautions d’emploi/Interactions médicamenteuses Le cisapride stimule la libération d’acétylcholine au niveau des plexus mésentériques, ce qui augmente la motilité gastro intestinale et améliore la coordination antroduodénale. Il agit principalement comme agoniste des récepteurs 5HT4 et comme antagoniste des récepteurs 5HT3 de la sérotonine (21). Suite à une enquête nationale de pharmacovigilance, les contre-indications, les précautions d’emploi, les interactions médicamenteuses et la posologie du cisapride ont été réévaluées et modifiées en 1997. Le cisapride, contrairement au métoclopramide et à la dompéridone, est pratiquement dépourvu d’effets centraux et/ou dopaminergiques (21). * Forme pharmaceutique utilisée La forme pharmaceutique du cisapride utilisée chez le nourrisson et chez l’enfant est la suspension buvable. * Efficacité clinique Chez le nourrisson, le cisapride a cliniquement démontré une diminution du nombre de régurgitations, une amélioration des régurgitations, de la vidange gastrique, des variables pH-métriques œsophagiennes du RGO, et une augmentation de l’amplitude et de la durée des contractions œsophagiennes. L’amélioration des paramètres pH-métriques a été démontrée à différentes périodes de la journée (période totale, nuit, éveillé, endormi…) et dans différentes positions (assis, allongé sur le dos et sur le ventre). Il est possible que le cisapride soit moins efficace dans le traitement du reflux postprandial. Le cisapride augmente la pression du SIO, mais cet effet n’est pas observé chez les nourrissons ayant une œsophagite avec une pression du SIO normale. L’effet du cisapride est plus faible chez les enfants atteints Dossier 2000, XXI, 1 12 La toxicité du cisapride est dominée par ses effets indésirables cardiovasculaires (torsades de pointes et allongement du QT) qui limitent fortement ses possibilités d’association avec d’autres médicaments (risques de potentialisation des effets toxiques au niveau cardiaque) (2, 5, 6, 32, 46). Entre 1987 et 1992, 8 observations de tachycardies ou de palpitations de patients traités par du cisapride ont été rapportées. En 1995 et en 1996, puis en été 1999, la FDA rapporte des observations d’allongement du QT, d’arythmies ventriculaires et de torsades de pointes chez des patients traités par le cisapride. Ces patients recevaient d’autres traitements inhibant le cytochrome P 450-3A4 pouvant entraîner une accumulation du cisapride. Plusieurs observations du même type ont été mises en évidence chez le nourrisson et l’enfant (6, 42). Une étude prospective américaine en aveugle confirme le risque d’arythmie associé à la prise du cisapride chez 35 enfants atteints de RGO, complications particulièrement fréquentes (31 % des enfants) dans cette étude (4). Le bulletin du 21 septembre 1998 (2) du Committee on Safety of Medicines (CSM) britannique fait mention des risques de mort subite du nourrisson, d’arythmies et de prolongations de l’intervalle QT. Aussi, le CSM conclut que, compte tenu du caractère imprévisible de la pharmacocinétique du cisapride chez le nouveau-né prématuré, il est contre-indiqué de l’utiliser au cours du premier trimestre de la vie. Voir également le tableau V, page 24. Le Point sur Béthanéchol * Conclusion Au vu des données concernant la tolérance cardiaque, il semble peu recommandé de prescrire le cisapride chez le jeune enfant, bien qu’en pratique il soit le plus souvent utilisé en première intention. Lorsque les symptômes du RGO sont résistants au cisapride ou qu’il y a une contre -indication, la dompéridone ou le métoclopramide peuvent être utilisés. nouveau né y étant particulièrement sensibles) et des effets endocriniens, ainsi que des effets cardio-vasculaires (2). 2.3. Dompéridone * Propriétés pharmacologiques Le dompéridone est une benzimidazole, proche chimiquement des neuroleptiques du groupe des butyrophénones (chef de file : halopéridol). Il bloque les récepteurs dopaminergiques D2. Le passage au niveau du système nerveux central est moins important qu’avec le métoclopramide, mais il existe. 2.2. Métoclopramide * Forme pharmaceutique utilisée * Propriétés pharmacologiques Le métoclopramide est un benzamide substitué du groupe du sulpiride. Il s’agit d’un neuroleptique antagoniste des récepteurs dopaminergiques, ce qui participe à un grand nombre de ses effets indésirables. Il possède aussi des propriétés cholinomimétiques entraînant l’augmentation de la libération d’acétylcholine, en particulier au niveau digestif. * Forme pharmaceutique utilisée La forme pharmaceutique la plus utilisée en France chez l'enfant et le nourrisson est la solution buvable en gouttes (PRIMPÉRAN®). Remarque : cette forme contient des sulfites et est donc contre-indiquée en cas d’allergie à ceux-ci. * Efficacité clinique Les données cliniques concernant l’efficacité du métoclopramide chez le nourrisson dans le traitement du RGO sont contradictoires (26, 48, 49) ; les résultats positifs ne sont observés que lors d’administration IV (48). Les études randomisées en double aveugle du métoclopramide versus placebo per os , sont peu nombreuses (4 retrouvées dans la littérature) ; elles ne prouvent pas une efficacité supérieure du métoclopramide sur le placebo (38). Des aggravations de symptômes du RGO ont même été rapportées (48, 49). * Posologie Nourrissons et enfants : 0,1 mg/kg 3 à 4 fois par jour, par voie orale, intramusculaire ou intraveineuse, 10 à 30 minutes avant chaque repas et au moment du coucher. Le dompéridone est utilisé sous forme de solution buvable chez l’enfant et le nourrisson. * Efficacité clinique Les études cliniques démontrant l’efficacité du dompéridone dans l’amélioration du RGO chez le nourrisson sont peu nombreuses. La plupart ont été réalisées chez des enfants plus âgés, l’investigation portant sur l’efficacité de l’administration conjointe du dompéridone avec d’autres agents antireflux (anti-acides, GAVISCON® ...) (48). Trois essais cliniques randomisés en double aveugle, dompéridone versus placebo, montrent une efficacité de la dompéridone sur les signes cliniques (pour 2 d’entre eux) mais pas sur les paramètres pH-métriques et scintigraphiques du RGO ni ceux de la vidange gastrique (une seule étude l’ayant évaluée) (48). * Posologie La posologie chez le nourrisson et l’enfant est de 0,6 mg/kg, 4 fois par jour, 30 minutes avant chaque repas et au moment du coucher (12). * Effets indésirables Il a été rapporté avec le dompéridone des effets neurologiques (moindres qu’avec le métoclopramide), des effets endocriniens et cardio-vasculaires (suite à la survenue de torsades de pointe avec la forme injectable IV, forme injectable qui a été retirée du marché) (6). 3. Traitement postural - Phase 3 Il est recommandé de ne pas dépasser 0,75 mg/kg/j (33). 3.1. Choix de la position * Effets indésirables En dépit des effets positifs de la gravité, la position assise entraîne plus d’épisodes de reflux - épisodes qui sont de plus importants - que la position simple en décubitus ventral et la position proclive à 30°, que le nourrisson soit endormi ou éveillé. Ceci s’explique l’augmentation de la L’emploi du métoclopramide peut être limité par des effets neurologiques, une méthémoglobinémie (le prématuré et le Dossier 2000, XXI, 1 13 Le Point sur Béthanéchol pression intra-abdominale et intragastrique qui résulte de la position assise. Par rapport à la position en décubitus ventral, la position assise est associée à un temps de sommeil moindre et à une durée de cris plus grande. La position assise n’est donc pas recommandée chez les nourrissons (48, 49). Les positions couchées sur le dos et couchées sur les côtés ont des résultats intermédiaires sur les mesures pHmétriques du RGO mais ne semblent pas avoir de conséquences sur les symptômes du RGO. Les antiacides forment une classe hétéroclite d’associations de différents sels. Les antiacides sont des substances inorganiques capables d’élever le pH gastrique en limitant par différents mécanismes l’acidité gastrique. Ils réduisent ainsi la toxicité du contenu du RGO sur l’œsophage. 3.2. Position proclive ventrale à 30° Les produits les plus utilisés en France sont le bicarbonate de sodium, le carbonate de calcium, les médicaments à base de magnésium (hydroxyde, oxyde, trisilicate, carbonate), ceux à base d’aluminium (hydroxyde, glycinate, phosphate). Il a été prouvé que la position proclive ventrale à 30° avec une inclinaison de 30°, tête surélevée (dite aussi position décubitus ventral anti-Trendelenburg) est plus efficace sur l’incidence du RGO que la position debout, en décubitus dorsal ou la position couchée latérale. L’application de cette position n’est pas facile chez le nourrisson et l’enfant car elle est compliquée à mettre en place correctement et est inconfortable, les sujets devant être maintenus sur leurs lits pour éviter qu’ils ne glissent en raison de l’importance de l’angle à respecter. Cette position réduit la pression abdominale, élève la jonction gastro-œsophagienne et augmente l’effet de la gravité. Une étude a montré que les variables du RGO ont été normalisées chez 25 % des nourrissons, en utilisant cette position. Si le traitement postural en position proclive ventrale à 30 ° a été préconisé en première intention il y a quelques années (47), il est maintenant utilisé en troisième intention (48, 49) car les connaissances épidémiologiques actuelles ont établi une relation entre la mort subite du nourrisson et la position de couchage (18). Donc, bien qu’efficace dans le traitement du RGO, il est peu envisageable de préconiser cette position en première intention pour des enfants malades, sachant qu’elle est contre- indiquée, par les autorités sanitaires, chez l’enfant sain (47). Les autorités sanitaires ont mené de nombreuses campagnes pour mettre en garde le grand public vis à vis de cette position. Ils sont difficiles à classer. Il s’agit pour la plupart d’associations d’antiacides proprement dits ayant un pouvoir tampon, de substances neutres adsorbantes de protons, de films protecteurs et/ou de pansements gastriques inertes. * Formes pharmaceutiques utilisées Les formes utilisées chez l’enfant sont : — les suspensions buvables : - avec sucre : . hydroxyde d’aluminium et hydroxyde de magnésium (MAALOX®) . alginate de sodium + bicarbonate de sodium (GAVISCON® nourrisson) - sans sucre : phosphate d’aluminium(PHOSPHALUGEL®) — les granulés : diméticone, et gomme de caroube (POLYSILANE JOULLIÉ® nourrisson). * Efficacité clinique — Les études cliniques concernant les antiacides chez le nourrisson sont limitées et peu probantes (48, 49). Aussi, l’ESPGAN en 1995 a préféré ne pas les inclure dans la stratégie thérapeutique alors qu’elle les avait retenus en 1993. En revanche, les fiches de transparence d’octobre 1996 (3) placent les alginates et les antiacides en première intention du traitement médical du RGO de l’enfant et du nourrisson. Ainsi le positionnement ventral dans le RGO du nourrisson doit être considéré actuellement comme une thérapeutique à part entière, mais en 3ème intention, comme adjuvant à la thérapie, chez les patients ne répondant pas aux premières phases du traitement (49, 50). Il ne doit être proposé que dans les circonstances où le bénéfice attendu est supérieur au risque induit (18). — Le GAVISCON® a une AMM chez l’enfant et le nourrisson dans le traitement symptomatique du RGO. 4. Antiacides (47, 48, 49) La posologie en alginate est de 50 à 100 mg/kg/j. Les alginates peuvent être considérés comme une classe séparée des antiacides. Ils agissent en constituant une couche de gel neutre, comprenant du gaz carbonique, qui flotte à la surface du conte- 4.1. Généralités Dossier 2000, XXI, 1 Bien que les préparations à base d’alginates aient donné des résultats positifs, des études récentes n’ont pas retrouvé d’effets positifs vis à vis des symptômes cliniques et des paramètres mesurés par la pH-métrie (47). 14 Le Point sur Béthanéchol nu stomacal. 4.2. Effets indésirables Les effets indésirables rencontrés avec les antiacides en général (6), sont : - une hypermagnésémie (pour ceux qui contiennent du magnésium), - des effets rebonds acides avec les carbonates de calcium, - une hyperphosphatémie (pour ceux qui possèdent du phosphate), - des diarrhées pour les préparations contenant des sels de magnésium, - une absorption trop importante d’aluminium (pour ceux qui en possèdent) qui peut être néfaste pour le nouveau-né, le nourrisson ou l’enfant en raison du risque d’occlusions gastro-intestinales par formation de bézoard (également rapportée avec l’utilisation d’alginates), - une augmentation d’absorption de sodium qui peut être néfaste surtout pour les prématurés (6). 6. Antihistaminiques H2 et inhibiteurs de la pompe à protons - Phase 4 6.1. AntiH2 - Phase 4 A (48, 49) * Généralités Les antihistaminiques H2 constituent une famille homogène d’analogues structuraux de l’histamine. Ce sont des inhibiteurs puissants de la sécrétion acide au niveau des cellules pariétales. Les antihistaminiques H2 n’ont aucun effet sur le SIO et la motricité du corps œsophagien. — Efficacité clinique L’efficacité de ces médicaments ne peut pas être évaluée par le monitorage du pH œsophagien car ils inhibent la sécrétion acide de l’estomac ; cependant, l’endoscopie peut renseigner sur l’amélioration de l’œsophagite obtenue (47). De hautes doses de ranitidine apparaissent comparables à l’effet de l’oméprazole sur la cicatrisation de l’œsophagite chez le nourrisson due au RGO. 4.3. Interactions médicamenteuses Les antiacides présentent un risque élevé d’interactions médicamenteuses par formation de sels hydrosolubles, rarement par complexation, par modification du pH gastrique ou de la vidange gastrique. Il est donc nécessaire de les administrer en dehors d’une autre prise médicamenteuse. Les antihistaminiques H2 ont l’inconvénient de provoquer des rebonds nocturnes de sécrétion acide. Ils sont efficaces dans le traitement des œsophagites sévères par RGO chez la plupart des enfants. — Effets indésirables 5. Le sucralfate Le sucralfate est un médicament utilisé comme antiulcéreux chez l’adulte. Il agit localement en formant un gel visqueux adhérant aux ulcérations qu’il protège. Ce gel forme une barrière physique qui s’oppose au contact de la zone ulcérée avec le contenu de l’estomac. Le sucralfate - comparé à la cimétidine dans les œsophagites dues à un RGO - a montré une efficacité comparable bien que la cicatrisation de l’œsophagite observée par l’endoscopie soit moins prononcée (48). Les effets indésirables du sucralfate sont essentiellement une constipation, une formation de bézoard ayant donné lieu à des cas d’obstructions intestinales chez le nouveau né et chez l’enfant (6). L’EPSGAN en 1993 a mis en garde contre l’utilisation du sucralfate chez le prématuré (47). Dossier 2000, XXI, 1 15 Les antihistaminiques H2 présentent des effets neuropsychiques, cardiaques, hépatiques et hématologiques nécessitant un suivi de traitement (6). * Cimétidine — La cimétidine (TAGAMET®, STOMEDINE®, CIMETIDINE G GAM®, CIMETIDINE GER, CIMETIDINE GNR®, CIMETIDINE MERCK®, CIMETIDINE RATIOPHARM®, CIMETIDINE RPG®) est le seul anti H2 à posséder une AMM en pédiatrie dans l’œsophagite associée au RGO et dans l’ulcère gastroduodénal. — La posologie chez le nourrisson et l’enfant est de 20 à 40 mg/kg/j per os en 3 ou 4 prises pendant les repas (8). — La cimétidine possède les effets indésirables communs à tous les anti H2. Elle possède aussi des effets particuliers comme des effets endocriniens importants et un effet inhibiteur enzymatique hépatique au niveau des cytochromes P450. Il en résulte un effet anti-androgène observé aussi bien chez l’adulte que chez l’enfant, et des risques d’interactions médicamenteuses qui peuvent limiter son utilisation. Le Point sur Béthanéchol La vidange gastrique est plus rapide et le reflux moindre, en raison d’un plus faible volume des sécrétions gastriques. * Ranitidine — Efficacité clinique — La ranitidine a une puissance d’action beaucoup plus importante que la cimétidine. Plusieurs études (11, 23, 28) ont montré une amélioration sous oméprazole d’enfants atteints d’un RGO sévère compliqué d’une œsophagite réfractaire aux anti-H2, notamment chez deux enfants réfractaires à la chirurgie (23). Elle est plus efficace que les antiacides dans la cicatrisation des œsophagites par RGO. La combinaison ranitidine - dompéridone est plus efficace que la dompéridone seul. — La posologie chez le nourrisson et l’enfant est de 1,25 à 2 mg/kg toutes les 12 heures (per os) (2 heures après les repas) (39). — Les effets indésirables sont ceux communs à la classe des anti H2, mais contrairement à la cimétidine, elle a très peu d’effets inhibiteurs enzymatiques hépatiques. Cependant elle peut modifier le débit hépatique et ainsi modifier le métabolisme de certains médicaments associés (6). * Famotidine La famotidine n’a pas de forme adaptée à la pédiatrie. — Sa puissance d’action est pourtant nettement supérieure à celles de la cimétidine et de la ranitidine. — La posologie chez le nourrisson et l’enfant est de 1 à 2 mg/kg/j mais elle reste mal évaluée (16). — Elle possède très peu d’effets anti-androgènes, et n’a pas d’action inhibitrice enzymatique hépatique. 6.2. Les inhibiteurs de la pompe à protons - Phase 4 B * Généralités Les inhibiteurs de la pompe à protons sont des benzimidazoles substitués, antisécrétoires beaucoup plus puissants que les antihistaminiques H2. Ils agissent en inhibant l’activité enzymatique de l’ATPase H+/K+ au niveau de la cellule pariétale gastrique. Ils n’ont aucun effet sur le sphincter inférieur œsophagien et la motricité du corps de l’œsophage. Globalement, il existe moins de données pour ce groupe de médicaments que pour les anti-H2 dans l’indication du RGO chez l’enfant et le nourrisson. Seul l’oméprazole (MOPRAL® et ZOLTUM®) a obtenu, en septembre 1998, une extension d’AMM dans l’indication de l’œsophagite par RGO chez l’enfant de plus de 1 an. * Oméprazole L’oméprazole peut remplacer la chirurgie dans certains cas de RGO sévères compliqués (25). L’oméprazole, comme de hautes doses d’anti-H2, peut supprimer l’acidité gastrique et favoriser ainsi l’élévation du taux de gastrine circulant. — Posologie - La posologie du RCP est de 1 mg/ kg/j en une prise : . enfant de 10 à 20 kg : 1 gélule de 10 mg/j voire 2 si besoin, . enfant de plus de 20 kg, 1 gélule de 20 mg/j. - Selon les auteurs, la posologie chez l’enfant et le nourrisson (33) varie de : . 0,7 à 3,3 mg/kg/j le matin, . chez l’enfant > 3 ans : 20 mg le matin, . chez l’enfant < 3 ans : 10 mg le matin. — Effets indésirables Les effets indésirables les plus fréquents sont des troubles digestifs, des éruptions cutanées, des céphalées, des effets endocriniens (galactorrhée et gynécomastie), une hypergastrinémie pouvant entre autres favoriser l’apparition d’une surinfection par Helicobacter pylori. Quelques effets indésirables liés à l’augmentation de la gastrinémie ont pu être observés, mais aucun ne s’est révélé grave : hyperplasie et pseudohypertrophie des cellules entérochromaffine like, par exemple. — Interactions médicamenteuses Les inhibiteurs de la pompe à protons sont aussi des inhibiteurs enzymatiques sans que cela ait des conséquences cliniques importantes en terme d’interactions médicamenteuses. — Conclusion L’oméprazole, comme les antihistaminiques H2 , est réservé par AMM aux cas de RGO compliqués d’œsophagite. En pratique, il est souvent utilisé en phase IV du traitement recommandé par l’EPSGAN (cf page 10) et aux cas de déficit neurologique, d’atrésie œsophagienne, et de maladie pulmonaire sévère chronique (exemple : mucoviscidose). — Propriétés pharmacologiques L’oméprazole diminue, voire supprime l’acidité gastrique, et diminue le volume des sécrétions gastriques. Dossier 2000, XXI, 1 16 7. Chirurgie La chirurgie doit être discutée lorsque les thérapeutiques Le Point sur Béthanéchol médicales prescrites de façon optimale restent en échec devant un RGO compliqué ou potentiellement compliqué (malaise) (18). La fundoplicature selon Nissen est l’intervention la plus pratiquée en pédiatrie. Elle consiste à plier le fundus de l’estomac autour du bas œsophage (manchonnement de l’œsophage par fundopexie circulaire). La formule de la préparation de béthanéchol solution (40) est la suivante : - béthanéchol : 1000 mg, - saccharinate de sodium : 1500 mg, - parahydroxybenzoate de méthyle sodique : 1000 mg, - parahydroxybenzoate de propyle sodique : 500 mg, - eau distillée qsp 1 litre. L’un des inconvénients de l’intervention est la durée de vie limitée du montage, estimée chez l’enfant normal à 5-10 ans (12). Le chlorure de béthanéchol est hydrosoluble ce qui permet une dissolution facile en phase aqueuse. Le saccharinate de sodium fourni par la Cooper est un édulcorant pour améliorer l’acceptabilité du mélange. 8. Conclusions L’arsenal thérapeutique disponible pour traiter le RGO chez l’enfant est déjà considéré comme relativement important. Le béthanéchol va donc devoir trouver une place bien définie dans ce contexte. Le parahydroxybenzoate de méthyle sodique et le parahydroxybenzoate de propyle sodique fournis par la Cooper sont des conservateurs antimicrobiens protégeant la préparation contre les contaminations bactériologiques et fongiques. Leur usage chez l’enfant n’est pas conseillé par tous. 1.2. Préparation n°2 (40) * Flacon PRÉPARATIONS HOSPITALIÈRES DE BÉTHANÉCHOL A USAGE PÉDIATRIQUE Forme PCH - AGAM Cf Fiche d’information produit et fiche conseil au patient, en annexe. Composition des comprimés sécables de béthanéchol 1 mg fabriqués par la PCH - AGAM : - substance active : béthanéchol chlorure 1 mg, La préparation 2 reprend la même formule que précédemment. Elle est conditionnée en flacon de 60 ml, 125 ml ou 250 ml. Elle est livrée avec des seringues doseuses. La stabilité est de 3 mois à + 4 ° C, ce qui permet une délivrance mensuelle. 1.3. Seringues unidoses Des seringues unidoses prêtes à l’emploi, contenant exactement la dose de béthanéchol en solution buvable, ont également été réalisées dans le cadre de la dispensation journalière nominative. - excipients : stéarate de magnésium, cellulose microcristalline. Autres formes préparées en France par les pharmaciens hospitaliers Certaines pharmacies hospitalières réalisent des préparations de béthanéchol pédiatrique selon différentes modalités. 1. À partir de la matière première contrôlée par la PCH- AGAM Certaines pharmacies hospitalières reconditionnent les comprimés de béthanéchol PCH - AGAM à 1 mg en gélules de dosages différents. Ceci permet de réaliser une adaptation posologique fine. 3. À partir de la forme adulte de spécialités étrangères de béthanéchol obtenues par ATU nominative Deux hôpitaux d’Ile de France réalisent des solutions buvables pédiatriques de béthanéchol à 1mg/ml à partir de la matière première pharmaceutique obtenue auprès de Ganes Chemicals et contrôlée par le laboratoire central d’analyses de la PCH - AGAM. 1.1. Préparation n°1 (40) Dossier 2000, XXI, 1 2. À partir de la forme comprimé vendue par la PCH - AGAM 17 Une alternative aux productions PCH - AGAM était la possibilité, par le biais d’une ATU nominative délivrée par l’Agence française de sécuritaire sanitaire des produits de santé (AFSSAPS), de se procurer l’URECHOLINE® 25 mg en comprimés ou l’URECHOLINE 5 mg injectable des laboratoire Merck Sharp Dohme & Chibret. Ceux-ci ayant arrêté la Le Point sur Béthanéchol production en 2000, c’est la MYOCHOLINE® de Glenwood comprimé et injectable - qui est désormais disponible sous ATU. Les formes commercialisées l’étant pour l’adulte, leur dosage n’est pas approprié pour l’enfant et le nourrisson. oxy] - N, N, N - triméthyl - 1 - propaminium. Sa formule chimique est C7 H17 Cl N2 O2 Propriétés pharmacodynamiques (13) 1. Mécanisme d’action La forme injectable n’est plus en ATU nominative dans l’indication du RGO de l’enfant, en raison des risques liés à l’utilisation de la forme injectable en solution buvable, et de son coût. L’AFSSAPS peut accorder une ATU nominative pour les comprimés dans l’indication du RGO de l’enfant et du nourrisson résistant ou mal contrôlé par les traitements disponibles. Les pharmacies hospitalières peuvent réaliser un déconditionnement à partir de ces comprimés en les broyant, les diluant à l’aide d’un excipient, et en les reconditionnant en gélule à un dosage adapté. Cette pratique expose à des risques d’erreur de dosage mais elle est effectuée pour pallier l'absence de spécialité adaptée. D’après une enquête sur la consommation de préparations pédiatriques menée auprès des pharmacies hospitalières, la forme orale de béthanéchol occupe la 20ème place et la forme liquide la 7ème place (29). Le béthanéchol est un ammonium quaternaire utilisé sous forme de chlorure. Le chlorure de béthanéchol agit en stimulant le système nerveux parasympathique par activation directe des récepteurs muscariniques post-synaptiques des terminaisons nerveuses parasympathiques. Il peut être classé parmi les prokinétiques. Sa structure lui confère les propriétés suivantes : - une résistance aux acétylcholinestérases, ce qui lui assure une action beaucoup plus prolongée que celle de l’acétylcholine, - une action nicotinique très faible voire nulle, d’où l’absence de symptômes nicotiniques lorsqu’il est administré par voie orale ou sous-cutanée, - une action muscarinique sélective sur la musculature lisse des tractus digestif et urinaire, - enfin, une très faible action au niveau central en raison de sa faible pénétration cérébrale liée à la présence d’une fonction ammonium quaternaire. Toutes ces caractéristiques procurent au chlorure de béthanéchol un intérêt dans certaines pathologies intestinales et/ou urinaires de par sa durée et sa sélectivité d’action. CHLORURE DE BÉTHANÉCHOL À USAGE PÉDIATRIQUE 2. Pharmacologie clinique chez l’enfant Propriétés physico-chimiques Le béthanéchol, comme le carbachol, est un ester synthétique de l’acétylcholine (ester carbamique de la choline). Il appartient donc à la classe des parasympathomimétiques directs. Un essai clinique (27) a étudié l'effet du chlorure de béthanéchol sur certains paramètres gastriques chez les enfants atteints de troubles gastro-intestinaux (gastroparésie, iléus paralytique, vomissements récurrents…). Les résultats de cette étude sont présentés dans le Tableau II. Son nom chimique est le chlorure de 2 - [(amino carbonyl) 3. Cinétique de l’effet O H2N O CH 3 Les informations suivantes sont issues du dossier LINE®). N(CH3)3 Cl - - L’effet du béthanéchol sur la motilité gastro-intestinale est observé 30 à 90 minutes après une prise per os alors qu’il est observé 5 à 15 minutes après administration par voie sous-cutanée. Chlorure de béthanéchol Dossier 2000, XXI, 1 URECHO- - L’effet clinique persiste 60 minutes après la prise par voie orale. 18 Le Point sur Béthanéchol Tableau II : Pharmacologie clinique du chlorure de béthanéchol chez l’enfant atteints de troubles gastro-intestinaux Méthodologie Inclusion-Exclusion/Évaluation Résultats/Conclusion Effect of metoclopramide and bethanechol on gastric emptying in infants - 1985 (27). Objectif Inclusion Évaluer l’effet du chlorure de béthanéchol sur certains paramètres gastriques chez les enfants atteints de troubles gastro-intestinaux Patients atteints de troubles A moteurs gastro-intestinaux hauts 5,5 ± 0,9 (gastroparésie, iléus post-opéra- Basal toire, vomissements, récurrents) Postprandial - placebo 4,6 ± 0,6 Méthodologie Exclusion Étude unicentrique randomisée en double aveugle versus placebo et versus métoclopramide 3 x 10 enfants (2 à 16 mois) NR Schéma posologique - Groupe béthanéchol : 0,075 mg/kg en SC en dose unique 5 à 7 minutes avant le repas - Groupe placebo : en SC - Groupe métoclopramide : 1 mg/kg en IV en dose unique 5 à 7 minutes avant le repas Protocole opératoire : cf ci-dessous Durée de l’étude : 2 heures Résultats B 46 ± 4 1,9 ± 0,1 111 ± 17 3,5 ± 0,6 - métoclo- 7,3 ± 1,0* 124 ± 15 pramide 30 min.de stabilisation 5 10 10 10 20 30 40 50 60 10 PERIODE A JEUN = 40 minutes estomac vidé de tout résidu par une sonde Administration intragastrique d’un repas test de 15 ml / kg de dextrose 5 % (pH = 7) (37°C) avec du rouge de phénol ASPIRATION DU CONTENU STOMACHAL POUR LES MESURES Conclusion - Le métoclopramide a un effet supérieur statistiquement significatif sur A et C par rapport au placebo. - Le béthanéchol n’a prouvé aucun effet statistiquement significatif sur A, B et C.p 21 21 Il faut cependant noter que le nombre de patients est faible et que l’étude ne porte que sur une dose unique. Dossier 1999, XX, 4 6,5 ± 1,4* - bétha5,1 ± 1,0 143 ± 16 4,9 ± 0,9 néchol - Test t de Student après analyse de variance sur 3 groupes, 2 à 2 - Étude en post-prandial de la - A : taux de vidange gastrique/minutes vidange gastrique, de la pro- (%/minutes) duction de liquide gastrique et - B : production d’acide (µmol/kg/h) de la production d’acide gas- - C : production de liquides gastriques (ml/kg/h) trique par la technique des dilu* p < 0,02, comparaison par rapport au placebo tions teintées. - Étude de manométrie oesophagienne (Pression du Tolérance Sphincter Inférieur de l’œso- NR phage ou pSIO) Évaluation Administration 5 à 7 min. avant le repas de : * Béthanéchol (SC) ou * Métoclopramide (IV) ou * placebo (SC) 10 C 19 Le Point sur Béthanéchol - Par voie sous cutanée, l’effet maximum survient 15 à 30 minutes après administration et disparaît dans les 2 heures. Propriétés pharmacocinétiques autres patients âgés de plus de 5 ans) (15). L’étude comprend : - 1 heure d’enregistrement manométrique, Les données pharmacocinétiques du béthanéchol dans la littérature sont inexistantes. - puis l’absorption orale de béthanéchol (2,9 mg/m2) dans un volume d’eau glucosée, - et l’enregistrement manométrique de la pSIO (pression du sphincter inférieur de l'œsophage) pendant une heure supplémentaire. ÉTUDES CLINIQUES CHEZ L’ENFANT ET LE NOURRISSON Études cliniques non retenues Les essais cliniques utilisant une des méthodologies suivantes ne seront pas présentés dans cet article : - comparaison avant/après dans un même groupe, - suivi de patients, - utilisation d’un groupe comparatif ne recevant pas de traitement, - utilisation d’un groupe comparatif non atteint de RGO. Il est observé une augmentation de la pSIO par rapport à la pSIO de base à partir de 20 minutes. L’effet est maximum au bout de 33 minutes, et il persiste encore 1 heure après le début de l’enregistrement. Tous les patients ont montré une augmentation de la pSIO par rapport à la pSIO de base. 5 enfants ont eu un enregistrement manométrique de 2 heures au lieu de 1 heure. Le béthanéchol est encore actif au bout de 2 heures chez ces 5 patients. La relaxation, due à la déglutition, est normale chez tous ces patients, de même que l’activité péristaltique du corps de l’œsophage. En voici quelques références bibliographiques : 2. Étude de Levi (31) - Strickland : «Results of treatement of gastroesophageal reflux with bethanechol» 1983 (45), Cf Tableau IV - Sondheimer : «Bethanechol treatement of gastroesophageal reflux in infants : effects on continuous oesophageal pH records» 1984 (43), Bilan des études cliniques - Sonheimer : «Early effects of bethanechol on the oesophageal motor function of infants with gastroesophageal reflux» 1986 (44), - Orenstein : «Bethanechol for pediatric gastroesophageal reflux : a prospective blind controlled study» 1986 (37). Au vu des rares études contrôlées, le béthanéchol a montré une efficacité statistique sur le gain de poids à 6 semaines grâce à la diminution du nombre de vomissements (étude d’Euler) (15). L’étude de Levi (36) ne trouve pas de différence significative sur les scores cliniques et le nombre de reflux entre le groupe béthanéchol et le groupe MAALOX® (antiacide). Études cliniques comparatives randomisées 1. Étude de Euler 1980 (15) Durant les essais cliniques contrôlés quelques effets indésirables ont été rapportés : étourdissement, mal de tête, augmentation des vomissements, douleur de la poitrine, anorexie, bronchoconstriction. Aucun effet indésirable n’a été rapporté dans les essais cliniques non contrôlés ouverts. 1.1. Étude clinique initiale Cf Tableau III 1.2. Étude complémentaire Une étude manométrique a été réalisée sur 45 patients (30 patients de l'essai clinique décrit dans le tableau III, et 15 Dossier 2000, XXI, 1 20 Les essais cliniques contrôlés ne sont pas assez nombreux, incluent trop peu de patients et leurs méthodologies peuvent être critiquées pour conclure de manière indiscutable sur Le Point sur Béthanéchol Tableau III : Études cliniques du chlorure de béthanéchol chez l’enfant et le nourrisson (Étude de Euler) Méthodologie Inclusion-Exclusion/Évaluation Résultats/Conclusion Use of bethanechol for the treatment of gastroesophageal reflux - 1980 (15). Objectif Inclusion Évaluer l’efficacité et la tolérance du béthanéchol dans le traitement du RGO chez le nourrisson RGO* avec symptômes évalués * Nourrissons dont la thérapeutique initiale pest par 3 méthodes : pH-métrie le béthanéchol œsophagienne, TOGD et mano- Nombre d’épisodes de vomissements par jour : métrie œsophagienne . béthanéchol : 1 (moyenne) Renseignements particuliers . placebo : 5 (moyenne) - nourrissons positionnés avec - Gain de poids pour la période des 6 semaines un angle de 60 ° d’inclinaison. . béthanéchol : 1,05 kg ± 0,18 - repas 6 à 8 fois/j de volumes (p < 0,01) . placebo : 0,45 kg ± 0,22 égaux - évaluation à 3 et 6 semaines - enregistrements par les * Nourrissons dont la première thérapeutique parents de la fréquence des est le placebo vomissements - Nombre d’épisodes de vomissements par jour : . béthanéchol : 1 (moyenne) . placebo : 6 (moyenne) Exclusion NR - Gain de poids pour la période des 6 semaines . béthanéchol : 1,20 kg ± 0,41 Évaluation . placebo : 0,35 kg ± 0,22 (p < 0,01) - Gain de poids - Nombre d’épisodes de vomissements Tolérance Méthodologie Étude unicentrique, randomisée en croisée, en double aveugle, versus placebo 30 nourrissons (15 patients répartis dans chaque groupe) âge : < 12 mois Schéma posologique - Groupe béthanéchol : 8,7 mg/m2/j toutes les 8 heures par voie orale Heure de prise par rapport aux repas : NR - Groupe placebo : prise toutes les 8 heures par voie orale Résultats Aucun effet indésirable n’a été observé Test t de student Durée de l’étude : 12 semaines (2 périodes en cross over de 6 semaines chacun) * Remarque CNHIM Il aurait été intéressant de connaître la gravité des RGO et leur répartition dans les 2 groupes Conclusion Conclusion de l’article Dans les 2 groupes, le nombre de vomissements diminue sous béthanéchol et le gain de poids est significativement (p < 0,01) plus important sous béthanéchol que sous placebo. Conclusion CNHIM Cette étude montre que que le béthanéchol a une efficacité réelle sur les vomissements. Le gain de poids n’est en fait que le reflet de la la diminution du nombre de vomissements. NR : non renseigné RGO : reflux gastro-œsophagien TOGD : technique du transit œso-gastro-duodénal Dossier 1999, XX, 4 21 Le Point sur Béthanéchol IV : Études cliniques du chlorure de béthanéchol chez l’enfant et le nourrisson (Étude de Levy) Méthodologie Inclusion-Exclusion/Évaluation Résultats/Conclusion Bethanechol versus antacids in the treatment of gastroesophageal reflux - 1985 (31). Objectif Inclusion Comparer l’efficacité et la tolérance du béthanéchol et du MAALOX® dans le traitement du RGO chez le nourrisson RGO confirmé par un TOGD et un enregistrement pH-métrique de l’œsophage (réalisés dans différentes positions et Groupe A (n = 10) manoeuvres) avant traitement Résultats Méthodologie Etude unicentrique, randomisée, croisée, versus anti-acides (MAALOX®) 20 enfants (10 patients répartis dans chaque groupe) âge : 2 à 32 mois pas de contraintes alimentaires Schéma posologique - Béthanéchol : 8,7 mg/m2/j en 3 prises par voie orale, 45 minutes avant le repas - MAALOX® : 3 ml/kg/j en 3 prises par voie orale, 15 minutes après le repas Durée de l’étude : 12 semaines (2 périodes de 6 semaines) après antiacide Exclusion NR Score clinique Nombre de reflux 8,4 ± 2,36 5,3 ± 2,7 5,1 ± 3,63 a 4,2 ± 2,7 a’ après béthanéchol 2,6 ± 2,59 c 2,4 ± 2,6 c’ Groupe B (n = 10) avant traitement 10,7 ± 3,12 Évaluation - Nombre de reflux et tests de scores évaluant la symptomatologie clinique. Les scores sont calculés selon le nombre de reflux, le nombre de reflux de plus de 5 minutes., le reflux le plus long (en minutes.), la durée total des reflux (minutes.). Chaque donnée est évaluée dans différentes configurations (allongée, debout, éveillé, endormi). L’ensemble de ces scores sont obtenus dans la période à jeun et dans la période post-prandiale. Puis un test combine ces différents scores. 6,4 ± 3,2 après béthanéchol 5,1 ± 3,12 b 4,1 ± 2,08 b’ après antiacide 2,9 ± 3,84 d 2,5 ± 3,3 d’ a versus b : p = NS c versus d : p = NS a’ versus b’ : p = NS c’ versus d’ : p = NS Tolérance - MAALOX® : un épisode modéré de diarrhée qui s’est spontanément amélioré chez un enfant de 32 mois. - Béthanéchol : . après 3 jours, augmentation des vomissements, des douleurs de la poitrine et apparition d’une anorexie chez un enfant de 16 mois, . bronchoconstriction ayant nécessité une diminution des posologies pendant 2 jours chez 2 enfants de 7 et 8 mois ayant des antécédents d’asthme infectieux - Test de Wilcoxon Conclusion Les 2 groupes traités par MAALOX® et par béthanéchol n’ont pas présenté de différence significative concernant les scores cliniques et le nombre des reflux. Les auteurs essayent de montrer une efficacité des 2 traitements en réalisant une comparaison du type avant/après ; ces résultats ne sont pas repris ici car, pour prouver l’efficacité de l’un ou des deux traitements, il aurait fallu constituer un groupe placebo. Dossier 1999, XX, 4 22 Le Point sur Béthanéchol l’efficacité du béthanéchol. Il semble donc nécessaire de disposer d’études cliniques complémentaires pour confirmer les résultats disponibles. Le cisapride est indiqué dans le RGO, l’œsophagite par RGO et la gastroparésie. PLACE DU BÉTHANÉCHOL Il a été considéré comme ayant une bonne tolérance et une relative innocuité. Mais une enquête nationale de pharmacovigilance a ensuite conduit à une réévaluation clinique et une modification des contre-indications/précautions d’emploi/mises en garde, des interactions médicamenteuses et des posologies. DANS LA STRATÉGIE THÉRAPEUTIQUE Les différentes enquêtes de prescriptions révèlent que les formes pédiatriques de chlorure de béthanéchol sont utilisées lorsque les thérapeutiques habituelles sont inactives ou insuffisantes (15, 18, 24). Cette utilisation thérapeutique correspond d’ailleurs bien aux critères de l’AFSSAPS pour la délivrance d’une ATU nominative pour une spécialité étrangère de béthanéchol. Intérêt du béthanéchol La prescription du chlorure de béthanéchol chez le nourrisson et l’enfant est préconisée lorsque les thérapeutiques conventionnelles ont échoué (15, 18). Le béthanéchol ne figure pas dans les consensus récents sur le traitement du RGO chez l’enfant et le nourrisson (47, 48, 49). La place du béthanéchol dans la stratégie thérapeutique n’est pas documentée. Au travers des essais cliniques et de son action sur la pSIO, le béthanéchol pourrait être proposé aux patients résistants aux prokinétiques classiques et qui ont une atonie, ou une baisse importante de la pSIO. Sa prescription pourrait requérir une mesure de la pSIO avant initialisation du traitement. Du fait de l’élargissement des contre-indications et des interactions médicamenteuses du cisapride, le béthanéchol pourrait trouver un intérêt dans certains RGO sévères où la prescription de cisapride n’est pas possible. Le Tableau V (7, 9) compare effets indésirables, contreindications et interactions médicamenteuses du béthanéchol et du cisapride sans tenir compte de l’indication ni de l’âge de la population. 2. Effets indésirables Cf Tableau V 2.1. Béthanéchol — Des effets indésirables à type de signes d’imprégnation parasympathomimétique ont été observés. — Un syndrome extrapyramidal et une hyperthermie ont été signalés chez le sujet âgé (6). 2.2. Cisapride D’après l’expérience clinique des médecins prescripteurs en France, le béthanéchol constitue un traitement qui répond à un besoin, objectivé par une consommation réelle. En conclusion, sa prescription ne se conçoit qu’après échec des autres moyens médicaux et après étude de la pression du SIO par manométrie, son efficacité semblant en effet optimale en cas d’hypotonie sphinctérienne (17). Comparaison béthanéchol - cisapride 1. Généralités Il est intéressant de comparer le chlorure de béthanéchol par rapport au cisapride, médicament de référence dans le RGO de l’enfant et du nourrisson, d’autant qu’ils appartiennent à la même classe pharmacothérapeutique : les prokinétiques. Le béthanéchol est aujourd’hui réservé, dans la pratique, aux RGO sévères de l’enfant et du nourrisson. Il est le plus souvent utilisé après échec du traitement par le cisapride. Dossier 2000, XXI, 1 23 — Le cisapride semble avoir moins d’effets indésirables à type d’imprégnation parasympathomimétique que le béthanéchol. Il présente des effets cardiaques à type d’allongement du QT et torsades de pointes récemment mis en évidence. — Allongements du QT Plusieurs raisons ont été invoquées : - une posologie dépassant 0,8 mg/kg/j ; l’augmentation de la dose (parfois doublée), pratique courante en cas de non réponse au traitement a longtemps été en vigueur ; outre qu’elle accentue le risque cardiaque, elle ne permet pas toujours un recrutement des non-répondeurs, - l’allongement de la demi-vie du cisapride, par inhibition de son métabolisme lors de certaines interactions médicamenteuses, - l’association à d’autres médicaments allongeant également le QT ; ainsi par exemple, l’association avec le diphémanil (anticholinestérasique) est contre-indiquée par prudence (aucun cas publié). Le Point sur Béthanéchol Tableau V : Comparaison des effets indésirables, contre-indications et interactions médicamenteuses du cisapride et du béthanéchol (7, 9) Cisapride Béthanéchol Effets indésirables - allongement du QT, arythmie ventriculaire et torsade de pointes - tachycardie et palpitation - vertige, trouble du sommeil, céphalée - convulsion, mouvement anormal - somnolence, asthénie - diarrhée, douleur abdominale, constipation et flatulence - incontinence urinaire - hypertonie urinaire - arrêt cardiaque (fortes doses) - hypotension et tachycardie réflexe (fortes doses orales ou par voie parentérale) - céphalée - intoxication cholinergique : tremblement, hypersalivation, dyspnée expiratoire, hypersudation et mydriase - effets extrapyramidaux - hypothermie - effets gastro-intestinaux : diarrhée, crampe abdominale, nausée et douleur colique - hypertonie urinaire - larmoiement et myosis - bronchoconstriction et crise d'asthme - flush cutané Contre-indications - hypersensibilité au cisapride - obstruction, perforation ou hémorragie gastro-intestinale - QT long congénital connu - voir interactions médicamenteuses contre-indiquées - hyperthyroïdie - ulcère peptique - asthme - bradycardie ou hypotension - instabilité vasomotrice - insuffisance coronaire - vagotonie - épilepsie - parkinson - obstacle des voies biliaires - inflammation aiguë du tube digestif - péritonite Interactions médicamenteuses - acénocoumarol, warfarine, phénindione - atropiniques - bépridil, diltiazem - antidépresseurs tricycliques, fluvoxamine - cimétidine, ranitidine - clarithromycine, érythromycine, sparfloxacine, - fluconazole,itraconazole, kétotonazole, miconazole, - halofantrine - agents antiarythmiques classe IA et III - ciclosporine, tacrolimus - diazépam - digoxine - dolasétron - indinavir, nelfinavir, ritonavir, saquinavir, amprénavir, delavirdine, efavirenz - lévovodopa - phénothiazines - pimozide - donépézil - tacrine Adultes Contre-indications, Précautions d’emploi et À prendrte en compte (source = AMM) Nota N’ont été retenues que les DCI correspondant à des spécialités qui sont commercialisées en France Dossier 1999, XX, 4 24 Le Point sur Béthanéchol la dose quotidienne. La posologie pourra ultérieurement être adaptée en fonction des effets thérapeutiques et de la tolérance. 3. Contre indications, mises en garde et précautions d’emploi - En cas de diabète ou de régime hypoglucidique, tenir compte de l'apport en saccharose de la solution buvable : 5 ml contient 1 g de saccharose. 3.1. Béthanéchol (cf Tableau V) — L’emploi du béthanéchol doit se faire avec prudence en cas d’inertie colique (17, 30). — L’asthme et les maladies pulmonaires obstructives figurent parmi les précautions d’emploi (17, 30). Or, le RGO peut être associé à des manifestations respiratoires. L’éventualité d’une prescription dans ce dernier cas nécessite des précautions particulières. — Une publication de pharmacovigilance concernant le béthanéchol, rapporte un cas de mouvements anormaux chez un enfant ayant eu le même type de réactions avec le métoclopramide et les phénothiazines, produits bloquant les récepteurs dopaminergiques (41). Cf Tableau V 4.1. Béthanéchol Chez l’adulte toutes les interactions médicamenteuses du béthanéchol sont liées à l’effet cholinergique. Cependant, elles n’ont pas fait l’objet d’études précises. Lors des enquêtes nationales de pharmacovigilance concernant le diphémanil, 3 cas de pharmacovigilance concernaient l’association du diphémanil avec le béthanéchol ont été rapportés : - 2 cas de troubles cardiaques : dans un cas, il s’agissait d’une tachycardie sévère dont l’évolution a été favorable à l’arrêt du béthanéchol, dans l’autre d’une tachycardie ayant spontanément cessé sans arrêt du diphémanil, 3.2. Cisapride — Contre-indications : cf Tableau V — Mises en garde - Il est généralement déconseillé d'utiliser le cisapride chez |le prématuré. Si toutefois l'utilisation du cisapride est jugée absolument nécessaire, la posologie maximale de 1 à 8 mg/kg/jour ne doit pas être dépassée, cette dose doit être fractionnée en plusieurs prises, chacune d'entre elles étant inférieure ou au plus égale à 0,2 mg/kg (utiliser la solution buvable enfant et nourrisson) et une surveillance de l'intervalle QT par ECG s'avère nécessaire avant et au moins 48 heures après toute mise sous traitement. - Des cas d'allongement du QT et/ou de survenue de troubles du rythme ventriculaire graves (notamment torsades de pointes) ont été rapportés chez des patients polymédiqués, porteurs d'anomalies cardiaques préexistantes ou de facteurs favorisant la survenue de ce type d'arythmie. À ce jour, un lien de causalité avec le cisapride |n'est pas établi. Toutefois, la prudence s'impose lors de l'administration du cisapride chez des patients présentant des facteurs favorisant un allongement du QT : QT long congénital, troubles électrolytiques non corrigés (hypokaliémie- hypomagnésémie), traitement par des médicaments susceptibles d'entraîner un allongement du QT. - La prudence est recommandée en cas d'administration chez des patients traités par des anticoagulants oraux (cf Interactions). — Précautions d'emploi - En cas d'insuffisance rénale ainsi qu'en cas d'insuffisance hépatocellulaire, il est recommandé de diminuer de moitié Dossier 2000, XXI, 1 4. Interactions médicamenteuses 25 - 1 cas de mouvements anormaux chez le nourrisson a été décrit ; les mouvements tonicocloniques des membres supérieurs ont nécessité la mise sous anticonvulsivants, l’association diphémanil - béthanéchol ayant été poursuivie. 4.2. Cisapride De nombreux médicaments sont contre-indiqués en cas d’association au cisapride, tels les macrolides et les antifongiques. La plupart des médicaments incriminés dans les interactions médicamenteuses avec le cisapride ont donné lieu à des symptomatologies graves et sévères. Le nouveau libellé de la rubrique interactions médicamenteuses RCP du PREPULSID® modifié en 1999 est le suivant : — Associations contre-indiquées Le cisapride est principalement métabolisé au niveau hépatique par le cytochrome P450 3A4. L'administration concomitante par voie orale ou parentérale de médicaments inhibiteurs du cytochrome P450 3A4 peut entraîner une élévation des concentrations plasmatiques de cisapride et ainsi majorer le risque d 'allongement de l’intervalle QT et donc de survenue de troubles du rythme ventriculaire graves, notamment de torsades de pointes. En conséquence l 'administration concomitante des médicaments suivants est contre-indiquée avec le cisapride : - Antifongiques azolés : kétoconazole, itraconazole, miconazole, fluconazole ; - Macrolides ; - Antiprotéases : les études in vitro suggèrent que le ritona- Le Point sur Béthanéchol vir et l’indinavir sont de puissants inhibiteurs du cytochrome CYP3A4 alors que le saquinavir apparaît comme un faible inhibiteur ; - Médicaments allongeant l’intervalle QT : antiarythmiques de classe Ia (quinidine hydroquinidine disopyramide) et de classe III (amiodarone, sotalol), bépridil, diphémanil, halofantrine, pentamidine, sparfloxacine, vincamine, certains neuroleptiques (tiapride sulpiride, sultopride, thioridazine lévomépromazine, chlorpromazine, trifluopérazine, cyamémazine, pimozide). — Associations déconseillées Lors d 'un traitement par cisapride, la prise de jus de pamplemousse est déconseillée en raison d’une augmentation possible de la biodisponibilité du cisapride. — Associations nécessitant une précaution d'emploi - Anticoagulants oraux : décrit pour l'acénocoumarol ; augmentation de l'effet anticoagulant et du risque hémorragique. Contrôle plus fréquent du taux de prothrombine et surveillance de l’INR. Adaptation éventuelle de la posologie de l’anticoagulant oral pendant le traitement par le cisapride et 8 jours après son arrêt — Associations à prendre en compte - Diazépam : majoration transitoire de l'effet sédatif du diazépam par augmentation de sa vitesse d'absorption. L'altération de la vigilance peut rendre dangereuse la conduite des véhicules et l'utilisation des machines. - Cimétidine: légère augmentation de la biodisponibilité du cisapride considérée comme non cliniquement significative. Le béthanéchol trouve sa place dans les RGO sévères où la prescription de cisapride est contre-indiquée en raison de la co-prescription d’un médicament pouvant induire des allongements du QT et des torsades de pointe. CONCLUSION Le traitement du RGO de l'enfant et du nourrisson doit toujours débuter par des mesures diététiques (laits épaissis) et posturales, et, en cas d'échec de ces dernières, aboutir à la prescription de prokinétiques. Le chef de file de ces derniers demeure le cisapride car il est le seul à avoir fait la preuve de son efficacité par des essais cliniques bien conduits. Il peut bien sur provoquer des effets indésirables, mais les plus graves sont toujours dûs à des règles de prescription non suivies. Depuis sa mise à disposition par la PCH-AGAM en 1988, le chlorure de béthanéchol pour usage pédiatrique est utiliDossier 2000, XXI, 1 26 sé de façon notable dans le RGO de l'enfant et du nourrisson. Même si l'arsenal thérapeutique dans le RGO de l'enfant et du nourrisson est relativement diversifié, le chlorure de béthanéchol trouve son intérêt dans le RGO sévère résistant aux autres thérapeutiques et, en particulier avec une pSIO faible. Son autre utilisation réside dans les cas où le cisapride ne peut être prescrit. Cependant l'évaluation clinique de l'efficacité du chlorure de béthanéchol est insuffisante et les données pharmacocinétiques restent quasiment inexistantes. Il est donc nécessaire maintenant de mener des études complémentaires. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1 - Agence nationale pour le développement et l’évaluation médicale (ANDEM). Indications des explorations dans le diagnostic et le suivi du reflux gastro-œsophagien du nourrisson et de l’enfant. In : Recommandations et références médicales, Paris : ANDEM 1995 ; tome II : 111 – 24. 2 - Anonyme. Pharmacovigilance : dans le dernier bulletin du CSM britannique Agence Presse Médicale 21 septembre 1998. 3 - Anonyme. Reflux gastro-œsophagien et œsophagite par reflux in : Anonyme Fiches de transparence, CFES, oct. 1994 ; 23-5 4 - Laneau S, Evangelista JAK, Pizzi AM, Mobassaleh M, Fulton DR, Berul CI. Proarrhytmia associated with cisapride in children. 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The OR is defined as an involuntary entry of the gastric content in the oesophagus. The primary OR can be classified by 2 categories : the non-complicated OR, characterized by regurgitations only, and the complicated OR which produces or makes worse some diseases (digestive, otorhinolaryngological, bronchopulmonary, apnoea). There are several methods to investigate and to diagnose the OR : 1) the oesophageal pH measure which is the only one able to diagnose an OR. 2) the oeso-gastro-duodenal fibroscopy which is the reference for the oesophagitis diagnosis ; 3) the radiological examination of the oeso-gastro-duodenal transit ; 4) the oesophageal manometry ; 5) the echography which allows the detection of anatomical abnormalities ; 6) the technetium scintigraphy. According to the ESPGAN (European Society of Paediatric Gastroenterology and Nutrition) recommandations the OR global treatment can be broken down into 5 steps : 1) to reassure the parents, to give viscosity-increasing agents ; 2) to give prokinetic drugs i.e. cisapride or domperidone, métoclopramide if the symptoms are persistent ; 3) as an adjuvant therapy to the steps 1 and 2 : anti-Trendelenburg position ; 4) antihistaminics 2 (cimetidine, ranitidine) or proton pump inhibitors (omeprazole) ; 5) surgery. Some authors recommand antiacid drugs. The bethanechol chloride is a prokinetic drug but it is not proposed in the ESPGAN schedule. The french hospital central pharmacy in Paris manufactures a 1 mg bethanechol dispersible tablet for pediatric use. Bethanechol is a parasympathomimetic drug endowed with prokinetic properties. There are no pharmacokinetic data. Controlled clinical studies are rare (Euler, Levi). Some side effects have been reported. Today the bethanechol is indicated in the severe OR in infant and child, generally in case of cisapride inefficacy or contraindiaction. Key words : bethanechol, cisapride, infant, child, pH measure, oesophageal reflux. Dossier 2000, XXI, 1 28 Le Point sur Béthanéchol Annexe 1 : fiche d’information produit Préparation hospitalière BÉTHANÉCHOL - PCH comprimé 1 mg usage pédiatrique Cette spécialité n’a pas fait l’objet d’une autorisation de mise sur le marché. Il appartient au prescripteur d’informer les parents du statut du produit. Présentation - Composition - Conditionnement Interactions médicamenteuses — Comprimés sécables. — Risque d’effets additifs ou d’augmentation de la toxicité avec d’autres médicaments cholinergiques ou d’agents anticholinestérasiques. — Béthanéchol chlorure 1 mg. — Excipient : stéarate magnésium, cellulose microcristalline — Atropine et par extension autres anticholinergiques : antagonisme des effets du béthanéchol. — Blisters de 5 comprimés. — Adrénaline et autres sympathomimétiques : antagonisme des effets du béthanéchol. Indications thérapeutiques Reflux gastro-œsophagien chez l’enfant et le nourrisson après échec des thérapies conventionnelles : traitement positionnel, mesures hygiéno-diététiques (fractionnement des repas, épaississement de l’alimentation), médicaments prokinétiques classiques (métoclopramide, cisapride). — Quinidine et procaïnamide : antagonisme des effets du béthanéchol. Effets indésirables — Céphalées, étourdissements, malaises, vomissements, anorexie, douleurs thoraciques, réaction dystonique. Posologies recommandées — Bronchoconstriction, dyspnée expiratoire ou crise d’asthme. — 9 mg/m2/j répartis en 3 prises orales au moins un quart d’heure avant les repas. — Ce médicament se dissout en moins d’une minute dans un verre d’eau, en remuant bien avec une cuillère. L’existence d’un dépôt blanc n’est que le témoin de la précipitation de l’excipient, la substance active étant totalement dissoute dans le liquide. — Bradycardie, hypotension artérielle. — Autres effets indésirables observés chez l’adulte : . Nausées, diarrhées, hypersalivation, crampes a b d o m i nales, douleurs coliques, émissions involontaires de selles et d’urines, hypertonie urinaire. . Larmoiement, troubles de l’accommodation, myosis. . Effets sans relations causales prouvées : hypothermie, convulsions. — Sueurs, transpiration, vasodilatation cutanée, sensation de chaleur de la face, rougissement cutané. Contre-indications — Hypersensibilité au béthanéchol — Asthme, maladies pulmonaires obstructives, hyperthyroïdie — Bradychardie importante, instabilité vasomotrice, vagotonie, hypotension et hypertension, troubles de la conduction auriculo-ventriculaire — Obstructions gastro-intestinales, péritonites, inflammations aiguës du tractus gastro-intestinal, ulcère gastrique, anastomose, résection gastro-intestinale — Obstacle sur les voies urinaires Dossier 2000, XXI, 1 29 Surdosage Le traitement consiste à administrer 0,01 mg/kg de sulfate d’atropine toutes les 2 heures jusqu’à obtenir les effets désirés. La dose maximale de sulfate d’atropine par prise ne doit pas excéder 0,4 mg. La voie sous cutanée sera préférée sauf en cas d’urgence (effets cardio-vasculaires sévères ou bronchoconstriction) où la voie intraveineuse doit être utilisée. Le Point sur Béthanéchol Des réactions sévères cardio-vasculaires ou de bronchoconstriction peuvent être améliorées par 0,1 à 1 mg d’adrénaline par voie sous cutanée. Statut : Préparation hospitalière. Quantité minimale livrable : 5 comprimés Pharmacodynamie Le béthanéchol est un agoniste des récepteurs cholinergiques muscariniques. Parasympathomimétique, il se caractérise par sa résistance à l’hydrolyse par les cholinestérases et son action muscarinique relativement sélective sur les muscles du tractus gastro-intestinal et de la vessie, et une très faible action nicotinique. Conservation Distribution : Pharmacie Centrale des Hôpitaux Assistance Publique - Hôpitaux de Paris — pour les établissements hospitaliers : Département distribution - 13, rue Lavoisier 92023 Nanterre Cedex Tél : 01 46 69 13 13 — pour les particuliers : Dispensation Pharmaceutique Hospitalière Externe (DPHE), 8, rue des Fossés Saint Marcel; 75005 Paris : Tél : 01 46 69 14 14 Code PCH : 151986 Information médico-pharmaceutique : 01 46 69 12 12 Pharmacovigilance : 01 46 69 15 90 Conservation à température ambiante. Péremption : 2 ans - provisoire Dossier 2000, XXI, 1 Autres renseignements 30 Le Point sur Béthanéchol Annexe 2 : conseil au patient Préparation hospitalière BÉTHANÉCHOL - PCH comprimé 1 mg usage pédiatrique Forme et présentation Grossesse et allaitement Comprimés sécables à 1 mg (blancs) : blister de 5 comprimés sous plaque alvéolée, prédécoupée. Ce médicament n’a pas été étudié chez la femme enceinte ou qui allaite. Comment utiliser ce médicament Composition Béthanéchol chlorure par comprimé par blister 1 mg 5 mg — Ce médicament doit être pris au moins un quart d’heure avant les 3 repas. — Posologie usuelle : 9 mg/m2/j (la surface corporelle se calcule à partir de la taille et du poids du patient) Excipients : stéarate de magnésium, cellulose microcristalline — Ce médicament se dissout en moins d’une minute dans un verre d’eau, en remuant bien avec une cuillère. L’existence d’un dépôt blanc n’est que le témoin de la précipitation de l’excipient, la substance active étant totalement dissoute dans le liquide. À quoi sert votre médicament Ce médicament appartient à la famille des stimulants de la motricité du tube digestif. Il augmente le tonus du bas-œsophage, empêchant le reflux des aliments. Il est particulièrement utilisé pour traiter le reflux gastroœsophagien des nourrissons et des enfants. Effets non souhaités et gênants — Rougeur, maux de tête — Vomissements ; diarrhées, crampes abdominales — Asthme, difficulté respiratoire Attention Ce médicament ne doit pas être utilisé dans les cas suivants : — asthme, maladies pulmonaires obstructives, il faut signaler à votre médecin ou à votre pharmacien tout effet non souhaité et gênant qui ne serait pas mentionné dans cette notice Conservation — hyperthyroïdies, — troubles du rythme cardiaque, — obstruction du tube digestif, — Ne pas dépasser la date limite d’utilisation figurant sur le conditionnement — obstacle sur les voies urinaires. — À conserver à température ambiante En cas de doute, il est indispensable de demander l’avis de votre médecin ou de votre pharmacien. Conditions de prescription et de délivrance — Préparation hospitalière Interactions médicamenteuses et autres interactions Afin d’éviter d’éventuelles interactions entre plusieurs médicaments : il faut signaler systématiquement tout autre traitement en cours à votre médecin ou votre pharmacien Dossier 2000, XXI, 1 31 — Réservé à l’usage hospitalier Assistance Publique - Hôpitaux de Paris Pharmacie Centrale des Hôpitaux Agence Générale des Approvisionnements Médicaux 7, rue du Fer à Moulin, 75005 PARIS Tel : 01 46 69 15 90 Fiche Fiche MICI Nutrition parentérale : 3 - Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin Valérie Papapietro*, Philippe Mauran** et la participation du comité de rédaction *Service Pédiatrie - CHU de Nantes, Hôtel Dieu et Hôpital Mère Enfant ** Service Pharmacie Centrale Euromédecine, CHU Montpellier Remerciements : A. Cortot (Lille), O. Corriol (Paris), J. Bellanger (Paris) Résumé Les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin comprennent notamment la maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique. La nutrition parentérale trouve une place spécifique dans la prise en charge de la maladie de Crohn, mais pas dans celle de la rectocolite hémorragique. La maladie de Crohn est une maladie inflammatoire transmurale chronique non spécifique, affectant généralement l’iléon distal et le côlon. Son étiologie reste inconnue. Elle est caractérisée par une inflammation transmurale, des ulcérations profondes, un œdème et une fibrose, pouvant se compliquer d’occlusion, de fistules profondes et d’abcès mésentériques. Il en résulte une perte de poids importante. La forme chronique est caractérisée par des poussées aiguës tout au long de la vie. La mise au repos du tube digestif n’a pas d’effet propre sur la maladie. La nutrition parentérale est aujourd’hui indiquée dans : 1) les états de dénutrition majeure (perte de 20-25 % du poids corporel) ; la nutrition entérale peut aussi être choisie ; 2) la suspicion d’une complication (fistule ou abcès intraabdominal) : en association à la chirurgie en préopératoire ou en postopératoire ; 3) le traitement des poussées aiguës, en alternative aux corticoïdes ; 4) le traitement habituel des formes corticorésistantes, 5) le traitement des formes corticodépendantes : depuis l’arrivée des immunosuppresseurs, ces formes sont plus rarement une indication de la nutrition artificielle, 6) le syndrome du grêle court où le maintien de l’autonomie nutritionnelle par voie orale n’est plus possible. Mots clés : corticoïdes, Crohn maladie, nutrition entérale, nutrition parentérale, rectocolite hémorragique. INTRODUCTION De nombreux facteurs de risques ont été suspectés d’être impliqués dans les MICI (maladies inflammatoires chroniques de l’intestin) : Les maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (MICI) comprennent la maladie de Crohn (MC), la rectocolite hémorragique (RCH) et des colites non classées (1). - prise d'œtroprogestatifs : aucun lien probant ne semble actuellement établi, La maladie de Crohn et la rectocolite hémorragique sont des affections inflammatoires chroniques du tube digestif dont le diagnostic intervient principalement chez l'adulte jeune entre 16 et 35 ans (cf Annexe 1) (2, 3). - tabac : son rôle dans l'apparition et l'aggravation de la MC est bien établi, - certains agents infectieux, bactériens (mycobactéries, Listeria monocytogenes, chlamydia) ou viraux (virus de la rougeole) : leur rôle dans la survenue des MICI n’est pas établi, L'étude de la répartition mondiale des maladies de Crohn ou des rectocolites hémorragiques montre qu’il existe un gradient nord-sud - le nord étant le plus atteint - malgré la présence de foyers régionaux ou locaux plus sévèrement touchés (4). - facteurs alimentaires, dont les aliments pauvres en fibres et riches en substances chimiques propres aux pays développés : leur rôle n’est pas établi, - prédispositions génétiques : . il existe des cas familiaux de MICI, . les cas de MICI sont plus fréquents chez les israélites, . il existerait des gènes de susceptibilité, . ces pathologies sont fréquemment associées à des affec tions à prédisposition génétique (ex : spondylarthrite ankylosante). À la fin des années 80 en France, l'incidence de la RCH était de 3,2 cas pour 100 000 habitants (région nord-ouest principalement) et celle de la MC de 5,4 (région Nord-Pasde-Calais, principalement). Une incidence croissante de la MC a été observée entre 1950 et 1980, alors que l’incidence de la RCH est restée stable. Dossier 2000, XXI, 1 32 Fiche MICI La nutrition artificielle, et notamment la nutrition parentérale trouve une place spécifique dans la prise en charge de la MC, mais pas dans celle de la RCH. C’est pourquoi le chapitre Maladie de Crohn est plus développé. MALADIE DE CROHN La maladie de Crohn (MC) est une maladie inflammatoire transmurale chronique non spécifique, affectant généralement l’iléon distal et le côlon, mais pouvant être localisée à un niveau quelconque du tube digestif, depuis la bouche jusqu’à l’anus et la région périanale (23). Son étiologie reste inconnue. Elle est caractérisée anatomiquement par une inflammation transmurale, des ulcérations profondes, un œdème et une fibrose. Ces symptômes peuvent se compliquer d’occlusion, de fistules profondes et d’abcès mésentériques. Ces complications sont caractérisées par leur localisation par segment, leur tendance à la récidive et l’extension aux segments digestifs adjacents. Une fois installée, la MC chronique est caractérisée par des poussées aiguës tout au long de la vie. Il n’existe aucun traitement étiologique. Les objectifs du traitement actuel sont le contrôle des poussées et la prévention des rechutes. Le principe du traitement est de l’adapter à la gravité de la maladie. Le traitement de fond fait notamment appel à la sulfasalazine et à ses dérivés (mésalazine, olsalazine) ; celui des poussées aiguës, aux corticoïdes (prednisolone, budésonide) et en cas d’échec, aux immunosuppresseurs (azathioprine, infliximab dans le cadre de l’AMM et méthotrexate hors AMM). Le recours à la chirurgie s’impose en cas d’occlusion intestinale récidivante ou d’abcès et fistules rebelles au traitement médical. La résection du segment intestinal atteint peut amener une certaine amélioration symptomatique, mais jamais la guérison. 1. Amaigrissement L’amaigrissement est le signe le plus fréquemment observé chez 20 à 75 % des patients. Il est fonction de la sévérité de la maladie. Une étude menée en 1982 (5) a montré que 20 % des patients ont un poids diminué de plus de 10 % par rapport à leur poids idéal, en dehors de toute poussée inflammatoire de la maladie. Paradoxalement, la dépense énergétique de repos, déterminée par calorimétrie indirecte chez des patients en phase de rémission, n’est pas augmentée par rapport à la dépense énergétique de repos calculée selon l’équation de Harris et Benedict chez des sujets sains (6, 7). La raison en serait la diminution de la masse grasse liée à une plus grande oxydation des lipides chez les patients atteints de MC par rapport aux sujets contrôles, particulièrement chez les patients ayant une localisation iléale ou iléo-colique de leur maladie (7). 2. Concentration en anti-oxydants Dans une étude récente, une diminution des concentrations sériques en anti-oxydants (vitamine C, vitamine E, sélénium, bêta-carotène et zinc) a été mise en évidence chez des patients en rémission (8). 3. Activité de la glutathion peroxydase La même étude (8), a montré une diminution de l’activité de la glutathion peroxydase chez les patients en rémission. 4. Ostéopénie Une ostéopénie (ostéoporose et ostéomalacie) est fréquemment observée chez les sujets atteints de MC (9). Elle peut être liée à une diminution des apports alimentaires en phosphore et à une diminution des concentrations sériques en magnésium et en vitamine D (8). La corticothérapie aggrave l’ostéoporose en diminuant l’absorption intestinale du calcium et en augmentant son excrétion urinaire. 5. Anémie Statut nutritionnel et symptomatologie La MC peut s’accompagner d’une anémie. Au cours de la MC, la malnutrition a des causes multiples et de nombreux aspects. Dossier 2000, XXI, 1 33 L’anémie peut être : Fiche MICI - microcytaire : due à une carence martiale (syndrome inflammatoire) - macrocytaire : due à une malabsorption de la vitamine B12 : . par atteinte de la dernière anse du grêle ou du grêle proximal, . par malabsorption des folates liée à la salazopyrine ou au méthotrexate (inhibition de la dihydro-folate réductase et donc diminutiondu taux de folates), . ou par un mécanisme mixte souvent. 6. Carences en vitamines liposolubles L’atteinte de la dernière anse du grêle, par localisation iléale de la maladie ou résection chirurgicale, et les pullulations bactériennes en amont d’une sténose digestive, sont responsables de carences en vitamines liposolubles. En traitement de première intention, la nutrition parentérale permet d’obtenir la rémission clinique dans 40 à 94 % des cas selon les études (10, 12). Les résultats sont globalement superposables pour la nutrition entérale. 2. Efficacité dans les formes corticorésistantes ou corticodépendantes de MC La nutrition artificielle, parentérale ou entérale, n’étant globalement pas plus efficace que la corticothérapie dans les poussées aiguës de MC, la majorité des études a cherché à évaluer son efficacité dans les formes corticorésistantes ou corticodépendantes. La nutrition parentérale permet d’obtenir une rémission dans 60 à 95 % des cas (13, 16). L’association nutrition parentérale-corticoïdes n’est pas supérieure à la nutrition parentérale seule (17). 7. Désordres hydro-électrolytiques Les vomissements, la diarrhée, les fistules ou les stomies, observés après des résections intestinales étendues, sont à l’origine de pertes importantes en eau, électrolytes, sels minéraux, micronutriments et protéines. Quelle que soit la localisation de la MC, l’efficacité de la nutrition parentérale est similaire . La nutrition parentérale ne modifie pas l’histoire naturelle de la maladie, c’est à dire ne diminue pas le taux de rechute. Les déficits en potassium, zinc et magnésium contribuent à négativer la balance azotée. Mécanismes d’action de la nutrition artificielle Rôle thérapeutique de la nutrition artificielle 1. Repos digestif La nutrition artificielle a été utilisée initialement de manière empirique dans le but d’améliorer la dénutrition fréquente chez les patients porteurs d’une MC. L’efficacité de la nutrition artificielle dans la MC a été suggérée ultérieurement par des études prospectives. L’état des patients atteints de MC est amélioré par une dérivation chirurgicale des flux intestinaux. Le concept de «mise au repos» du tube digestif liée à la suppression de l’alimentation orale repose sur le même principe. 1. Efficacité dans les poussées aiguës de MC Le traitement de référence dans les poussées aiguës est la corticothérapie systémique (per os ou IV), qui entraîne une rémission de plus de 90 % des cas après une dose initiale de 1 mg/kg/j de prednisone. L’évaluation de l’efficacité de la nutrition artificielle est rendue difficile pour des raisons méthodologiques, car les études publiées diffèrent sur de nombreux points (études rétrospectives ou prospectives, randomisées ou non, maladies de sévérité et de localisations différentes, nutrition artificielle associée à d’autres traitements, études incluant à la fois des MC et des RCH...). Dossier 2000, XXI, 1 34 Son intérêt a été remis en cause lors d’un essai contrôlé mené chez des patients ne répondant pas à la corticothérapie (18). L’étude a été randomisée en 3 bras : soit nutrition parentérale exclusive, soit nutrition entérale, soit nutrition mixte parentérale et orale. La rémission a été obtenue chez 65 à 70 % des patients, quel que soit le type de nutrition. En conséquence, il apparaît que la mise au repos du tube digestif n’a pas d’effet propre sur la maladie. 2. Modification de l’immunité intestinale La nature de l’apport alimentaire dans la pathogénie de la MC a été évoquée, notamment l’implication d’une alimentation riche en sucres raffinés et pauvre en fibres alimentaires. Fiche MICI Des anomalies de la perméabilité intestinale ont été observées dans la MC, surtout dans sa localisation au grêle, quel que soit son degré d’activité. Ces anomalies pourraient être responsables d’un passage accru, à travers la muqueuse, d’allergènes alimentaires. Dans les formes corticodépendantes, la nutrition artificielle permet habituellement d’obtenir le sevrage corticoïde, mais la maladie récidive le plus souvent dans les mois qui suivent. La nutrition entérale semble préférée à la nutrition parentérale. La nutrition artificielle entérale ou parentérale pourrait améliorer la perméabilité intestinale, en diminuant la stimulation du système immunitaire intestinal par les allergènes alimentaires. 3. Formes compliquées 3. Effet nutritionnel L’un des objectifs de la nutrition artificielle est de maintenir ou de restaurer un état nutritionnel satisfaisant. Certains auteurs ont suggéré que l’efficacité de la nutrition artificielle dans la MC était liée à cette amélioration nutritionnelle. La nutrition artificielle pourrait favoriser la cicatrisation des lésions de MC en augmentant les synthèses protéiques et en améliorant les fonctions immunitaires périphériques intestinales. Indications de la nutrition parentérale totale Les formes compliquées de la MC (abcès, fistule, occlusion) relèvent habituellement de la chirurgie. L’objectif de la nutrition artificielle pré-opératoire serait de faciliter le geste chirurgical en diminuant l’inflammation périviscérale et en opérant à distance de la période aiguë, chez un patient sevré de corticoïdes. Dans une étude rétrospective sur la MC publiée en 1996, les nutritions entérale et parentérale avant résection intestinale, n’ont pas permis de diminuer les complications postopératoires, ni la longueur d’intestin réséqué (19). Les fistules entéro-cutanées postopératoires doivent être considérées a priori comme non spécifique de la MC. La nutrition parentérale permet leur fermeture en 2 à 5 semaines. Les fistules entéro-cutanées spécifiques et les fistules digestives internes sont des complications traduisant une extension extrapariétale de la MC. La nutrition parentérale peut permettre de diminuer, voire de tarir leur débit, mais elles récidivent après la reprise de l’alimentation orale. 1. MC corticorésistante Les poussées corticorésistantes représentent la meilleure indication de la nutrition artificielle. 3. Grêle court Il y a cortico-résistance lorsque les symptômes persistent au delà de 3 semaines de corticothérapie à 1 mg/kg/j de prednisone. Dans ces formes, les nutritions entérale et parentérale sont d’activité équivalente, mais un petit groupe de malades est non répondeur à la nutrition entérale, et répondeur à la nutrition parentérale. Dans les formes sévères, la nutrition parentérale est préférée à la nutrition entérale. Elle permet d’obtenir la rémission à court terme et d’éviter le recours à la chirurgie dans 80 % des cas. 2. Cas des MC corticodépendantes Depuis l’arrivée des immunosuppresseurs, ces formes sont plus rarement une indication de la nutrition artificielle. Dossier 2000, XXI, 1 35 Le syndrome du grêle court ou syndrome de défaillance intestinale, consécutif à des résections intestinales multiples et/ou étendues, est une complication rare de la MC. En dessous d’une longueur critique d’intestin grêle, le maintien de l’autonomie nutritionnelle par voie orale n’est plus possible, et il faut recourir à la nutrition parentérale définitive à domicile. 4. Modalités pratiques Les apports caloriques journaliers conseillés sont de 35 à 40 kcal/kg de poids corporel. La nutrition parentérale est maintenue pendant 4 semaines. Elle peut être interrompue rapidement, sans diminution progressive, avec reprise d’une alimentation orale dès le lendemain. Fiche MICI Conclusion La nutrition parentérale dans la MC est aujourd’hui indiquée dans : - les états de dénutrition majeure, soit une perte de 20-25 % du poids corporel ; la nutrition entérale peut aussi être choisie, - la suspicion d’une complication : fistule ou abcès intraabdominal. Elle est alors presque toujours associée à la chirurgie en préopératoire ou en postopératoire. C’est aujourd’hui la principale indication de la nutrition parentérale. - le traitement des poussées aiguës, - évaluation médicale et chirurgicale 2 fois par jour de l'état du patient : la survenue d'une aggravation clinique, au décours de la surveillance, détermine une intervention chirurgicale de type colectomie totale avec iléostomie et sigmoïdostomie. Après ces 5 jours, une évaluation est faite : - une absence d'amélioration détermine un geste opératoire, - une amélioration importante conduit à une reprise de l'alimentation orale, accompagnée de prises orales de corticoïdes, - une amélioration partielle peut conduire à une prolongation du module de Truelove pour une seconde période de 5 jours, ou à une opération. - le traitement habituel des formes corticorésistantes. RECTOCOLITE HÉMORRAGIQUE RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES Définition La rectocolite hémorragique est une maladie inflammatoire chronique, non spécifique, localisée à la muqueuse colique et caractérisée le plus souvent par une diarrhée sanglante. Elle est caractérisée : - cliniquement, par un syndrome dysentérique mucohémorragique évoluant par poussées, entrecoupées de rémissions, - anatomiquement, par une association de lésions ulcéreuses diffuses, à point de départ superficiel, d’extension continue et rétrograde, exposant le malade à de nombreuses complications (colectasie, hémorragie, perforation, dégénérescence). Prise en charge La prise en charge des rectocolites hémorragiques graves à été grandement améliorée par l'application d'une série de mesures thérapeutiques : le module thérapeutique de Truelove (1, 20). Il consiste en l'application des mesures suivantes pendant une durée de 5 jours : - suppression totale de l'alimentation orale, - mise en place d'une nutrition intraveineuse réduite à l’apport de glucose et d’électrolytes, - utilisation d'une corticothérapie IV à une dose équivalente à 1 mg/kg/j de prednisone, - réalisation matin et soir de lavements de corticoïdes (60 mg de prednisolone dans la valeur d'une verre d'eau), Dossier 2000, XXI, 1 36 1 - Anonyme. Remicade : The European Agency for the Evaluation of Medicinal Products, 1999. 2 - Barbe L, Carbonnel F, Carrat F et al. Effects of preoperative artificial nutrition in intestinal resections for Crohn disease. Gastroenterol Clin Biol 1996 ; 20 : 852-7. 3 - Bellanger J, Gendre JP. Manifestations cliniques et diagnostic de la maladie de Crohn. Méd Thérap 1996 ; 2 : 75361. 4 - Bonnet J, Modigliani R. Traitement médical de la maladie de Crohn. 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An evaluation of total parenteral nutrition in the management of inflammatory bowel disease. Dig Dis Fiche MICI Sci 1980 ; 25 : 42-8. 11 - Fazio VW, Alexander-Williams J, Oberhelman HA, Jr., Goligher JC, Brotman M. Parenteral nutrition as primary or adjunctive treatment. Dis Colon Rectum 1976; 19: 574-8 12 - Fischer JE, Foster GS, Abel RM, Abbott WM, Ryan JA. Hyperalimentation as primary therapy for inflammatory bowel disease. Am J Surg 1973 ; 125 : 165-75. 13 - Geerling BJ, Badart-Smook A, Stockbrugger RW, Brummer RJ. Comprehensive nutritional status in patients with long-standing Crohn disease currently in remission [see comments]. Am J Clin Nutr 1998 ; 67 : 919-26. 17 - Lerebours E, Messing B, Chevalier B, Bories C, Colin R, Bernier JJ. An evaluation of total parenteral nutrition in the management of steroid-dependent and steroid-resistant patients with Crohn's disease. JPEN J Parenter Enteral Nutr 1986 ; 10 : 274-8. 18 - Ostro MJ, Greenberg GR, Jeejeebhoy KN. 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The parenteral nutrition is today indicated : 1) in the severe denutrition diseases (weight loss : 20 - 25 p. cent) ; 2) in case of a suspected complication (fistula, intraabdominal abscess), associated with surgery (before or after) ; 3) in the crisis treatment, alternatively with corticoids ; 4) in the usual treatment of the corticoresistant forms ; 5) in the treatment of the corticodependent forms ; 6) in the short small intestine syndrom when the oral route is impossible. Key words : corticoids, Crohn’s disease, enteral nutrition, parenteral nutrition, ulcerative colitis. Dossier 2000, XXI, 1 37 Fiche MICI Annexe 1 Eléments de différenciation entre maladie de Crohn et rectocolite hémorragique (22) Clinique Rectocolite hémorragique Maladie de Crohn Douleurs abdominales rares (formes compliquées) Douleurs abdominales constantes Rectorragies, syndrome dysentérique Diarrhées Absence de masse abdominale palpable Fièvre fréquente Fièvre rare (formes compliquées) Récidives possibles et fréquentes après chirurgie Absence de récidive postcolectomique Topographie Du rectum au colon De la bouche à l'anus D'aval en amont Plurisegmentaire Continue Discontinue Monomorphe Polymorphe asymétrique Absence de muqueuse saine au sein des lésions Présence de muqueuse saine au sein des lésions Lésions superficielles (sauf formes graves) Lésions profondes transmurales Lésions Aspect granité, intense congestion, hémorragie, endoscopiques glaire, pus Ulcérations aphtoïdes, superficielles, creusantes Muqueuse normale, érythémateuse, boursouflée Fragilité Sténoses Parfois ulcérations, pseudopolypes Lésions histologiques Atteinte muqueuse et sous-muqueuse Atteinte transmurale Hypervascularisation Œdème au sein de la sous-muqueuse Abcés cryptiques fréquents Abcès cryptiques inconstants Absence d'ulcérations fissuraires Présence d'ulcérations fissuraires Perte de la mucosécrétion Mucosécrétion peu modifiée Absence de granulome Granulomes fréquents Dossier 2000, XXI, 1 38 Fiche MICI Annexe 2 Le Crohn Disease Activity Index (CDAI) ou Index de Best (21, 22) J1 J2 J3 J4 J5 J6 J7 Total - 1 : nombre de selles liquides ou très molles ___ x 6 - 2 : douleurs abdominales (0 : bon ; 1 : légère ; 2 : moyenne ; 3 : intense) ___ x 6 - 3 : bien-être général (0 : bon ; 1 : moyen ; 2 : médiocre ; 3 : mauvais ; 4 : très mauvais) ___ x 6 - 4 : autres éléments liés à la maladie 1 : arthrite / arthralgie 2 : iritis / uvéite 3 : érythème noueux / pyoderma G/ stomatite aphteuse 4 : fissure, fistule ou abcès anal/abcès périrectal 5 : autres fissures 6 : fièvre > 38 °C dans la dernière semaine Compte 1 pour chacune des catégories d'élément présent ___ x 30 - 5 : Prise antidiarrhéique (oui : 1, non : 0) (Diarsed®, Imodium®, codéine, élixir parégorique) ___ x 4 - 6 : Masse abdominale (0 : absente, 2 : douloureuse, 5 : présente) ___ x 4 - 7 : Hématocrite (Homme : 47, Femme : 42) ___ x 6 - 8 : Poids / poids théorique : _____ 100 x (1 - poids actuel / poids avant la maladie) ___ x 1 CDAI = Le CDAI d'un sujet atteint de maladie de Crohn en phase de repos est inférieur à 150. L'index augmente de façon proportionnelle à l'expression clinique de la pathologie et à la dépense énergétique du sujet. Un CDAI supérieur à 300 signe une atteinte sévère. Dossier 2000, XXI, 1 39 Fiche Pharmaco-économie : présentation Approche pharmaco-économique : Fiche évaluation pharmaco-médico-économique de stratégies thérapeutiques : éléments de méthodologie Marie-Christine Woronoff-Lemsi*, Samuel Limat*, Marie-Caroline Husson** et la participation du comité de rédaction * Service Pharmacie - CHU Besançon - Bld Fleming, Besançon ** CNHIM - 7 rue du Fer-à-Moulin - 75005 Paris Résumé Les études économiques appliquées au domaine de la santé ont pour objectif de relier le coût de différentes interventions à leurs résultats médicaux. La pharmaco-économie diffère des essais cliniques car elle s’intéresse à des populations " non-contrôlées "et identifie précisément les ressources médicales consommées par l’ensemble des stratégies mises en œuvre. L’objectif est de les valoriser et leur attribuer un coût. Dans la démarche méthodologique adoptée, trois dimensions sont à considérer : le type d’analyse, le point de vue de l’analyse, le type de coûts pris en compte, et de résultats. Toutes les études pharmaco-économiques comparent des alternatives thérapeutiques, et leurs résultats sont exprimés de façon différentielle. Quatre différents types d’études sont pratiquées : l’analyse de minimisation des coûts ou analyse coûtcoût, l’analyse coût-efficacité, l’analyse coût-utilité et l’analyse coût-bénéfice. L’évaluation économique suppose que soit précisé le point de vue adopté – ceux du patient, des prestataires de soins, du payeur ou de la société - orientent directement la comptabilité des ressources consommées par les stratégies comparées et donc leur valorisation (les coûts). Les coûts sont calculés par rapport à une stratégie de référence. Les coûts à inclure sont les coûts directs, les coûts indirects, et les coûts intangibles. L’efficacité de l’analyse peut se définir par la mesure du résultat d’un traitement en termes médicaux, pour un patient ou pour une population. Le résultat final est exprimé en coût par année de vie sauvée ou par résultat de santé obtenue. L’analyse de sensibilité explore le degré d’imprécision, tant pour la mesure des ressources et leur valorisation que pour les résultats. Elle est pratiquée systématiquement pour pallier les conditions d’incertitudes dans lesquelles sont réalisées ces études. L’absence fréquente dans les études publiées (cliniques, épidémiologiques) de données intégrant d’une part toutes les stratégies thérapeutiques, et d’autre part tous les critères de mesure des résultats, oblige à agréger des données provenant de sources différentes. La pharmaco-économie construit alors des modèles, le plus souvent stochastiques (probabilistes). Mots clés : économie, évaluation, pharmaco-économie. INTRODUCTION Elle est utilisée comme outil d’aide à la décision médicale et/ou politique en matière de santé. Les études économiques appliquées au domaine de la santé ont pour objectif de relier le coût de différentes interventions à leur résultat médical. Ainsi, la pharmaco-économie a pour objet la confrontation des coûts d’un traitement à ses conséquences (ou résultats) médicales. Celles-ci peuvent être mesurées en terme physique (décès évités, réduction d’hospitalisation, …) ou en terme qualitatif (amélioration de la qualité de vie). Elle permet de comparer et de hiérarchiser différentes stratégies thérapeutiques à l’aide de la méthodologie exposée ci-dessous. Les éléments méthodologiques présentés ici n’ont, en aucune façon, la prétention d’être exhaustifs ; le lecteur intéressé pourra se reporter avec profit à l’ouvrage de référence de Mike Drummond (3). Si elle pouvait ne pas s’imposer comme nécessaire dans les années d’expansion économique et de plein emploi, par contre dans le contexte actuel de maîtrise des dépenses de santé et d’innovations thérapeutiques coûteuses, la pharmaco-économie a gagné sa place. Dans la démarche méthodologique adoptée, trois dimensions sont à considérer pour la compréhension des études pharmaco-économiques (8) : - le type d’analyse, Discipline spécialisée au sein de l’évaluation économique, elle contribue à l’arbitrage et aux choix des priorités entre les différentes stratégies thérapeutiques disponibles. Dossier 2000, XXI, 1 - le point de vue de l’analyse, - le type de coûts pris en compte, et de résultats. 40 Fiche Approche pharmaco-économique DÉMARCHE DE L’ÉVALUATION PHARMACO-ÉCONOMIQUE Pour bien situer la démarche de l’évaluation pharmaco-économique, il est intéressant de la définir en contrepoint. Les études pharmaco-économiques diffèrent également de l’analyse de gestion, en s’attachant à la globalité des coûts reliés aux stratégies comparées, et non aux seuls comptes gérés par les pharmacies hospitalières (médicaments et/ ou dispositifs médicaux). 1. Spécificités de la démarche Dans cette démarche, il convient de répondre à certaines questions : Les études pharmaco-économiques diffèrent des essais cliniques, d’abord parce qu’elles vont s’intéresser à des populations " non-contrôlées ", ensuite en raison de la nécessité d’identifier précisément les ressources médicales consommées par l’ensemble des stratégies mises en œuvre (par exemple, dosage du cholestérol, biopsie, transfusion, médicament, hospitalisation, etc.…). L’objectif est de les valoriser et de leur attribuer un coût. - quel est l’objectif poursuivi et donc quelles sont les stratégies thérapeutiques (2 ou plus) à comparer ? La population observée au cours d’un essai clinique n’est donc pas sélectionnée pour être représentative de la population générale. Ainsi, les récentes études publiées sur l’intérêt des fibans étude PRISM-PLUS (12), études ESSENCE, CAPTURE, RESTORE… - présentent les résultats cliniques à l’aide d’un critère d’efficacité composite associant aux décès, la survenue d’un infarctus du myocarde ou d’une ischémie réfractaire. En effet, la durée des études (< 1 an) et le recrutement ne permettent pas de retenir uniquement le critère décès qui, pourtant, serait bien le critère final le plus pertinent. - quels critères retenir pour la mesure des résultats obtenus par les stratégies thérapeutiques comparées (en terme d’efficacité supplémentaire obtenue par l’une des stratégies par rapport aux autres) ? Ainsi, si une étude clinique X (loi Huriet) compare différents protocoles chimiothérapeutiques, elle présente les résultats sur une population sélectionnée à partir de critères d’inclusion/exclusion, et en termes de réponse et/ou de survie à trois ans, par exemple. L’analyse pharmaco-économique quant à elle compare les différents protocoles en reliant les coûts aux résultats en terme de survie globale mais sur l’ensemble de la population concernée par ces traitements. Si les essais cliniques sont particulièrement performants pour mesurer l’efficacité d’un traitement (au sens «efficacy»), en revanche ils ne permettent pas une réelle mesure des ressources consommées (médicaments, hospitalisations …). Leur méthodologie est construite pour démontrer la supériorité d’un traitement sur l’autre, ce qui exige parfois des explorations ou des examens qui ne seraient pas réalisés dans la pratique courante. A contrario, les études en conditions réelles d’utilisation assurent une bonne mesure des ressources consommées par ces thérapeutiques, et donc des coûts. Dossier 2000, XXI, 1 41 - qui est le décideur, autrement dit quel est le point de vue retenu pour la démarche de l’analyse (la société, l’assurance-maladie ou les assurances complémentaires, l’hôpital ou le patient), choix qui sera crucial pour la valorisation des coûts ? - quels sont les coûts (directs, indirects, intangibles) ? 2. Terminologie L’efficacité au sens utilisé en économie recouvre deux notions individualisées en anglais par «efficacy» ou par «effectiveness» : - «efficacy» désigne une efficacité expérimentale dans des conditions d’étude proches de l’idéal (essai clinique). - «effectiveness» est utilisé dans le cas de l’efficacité de terrain, dans des conditions moyennes de réalisation d’une intervention ou d’utilisation d’une technologie (vie réelle). L’efficience ou «efficiency» est proche de la notion de rendement, il s’agit d’obtenir les meilleurs résultats au meilleur prix. 3. Expression des résultats Les résultats sont exprimés : - soit par les dépenses évitées (V), et cela uniquement dans le cas de l’analyse de minimisation des coûts, - soit par les états de santé (E) («outcome research») qui correspondent à la mesure objective de l’amélioration de l’état de santé («endpoint») ; par exemple, une année de vie gagnée, ou un décès évité, ou un infarctus évité, - soit par l’utilité (U) qui correspond à l’expression de la préférence d’un individu pour un état de santé, - soit par la disposition à payer (W) d’un individu pour obtenir tel état de santé («the willingness to pay»). Exemple : je suis prêt à payer x FF en plus pour être guéri, pour courir comme un lapin… ". Fiche Approche pharmaco-économique Ressources consommées Stratégie thérapeutique ou diagnostique Coûts engagés (C) Résultats Coûts évités (V) États de santé (E) Coûts directs Coûts directs Mortalité Coûts indirects Coûts indirects Morbidité Coûts intangibles Coûts intangibles Qualité de vie Appréciation de l’état de santé Préférence «Utilité» (U) Disposition à payer (W) Étude de minimisation des coûts ou Étude coût-coût Bilan financier Étude coût-efficacité Étude coût-utilité Étude coût-bénéfice Schéma 1 : démarche de l’évaluation pharmaco-économique. Le schéma 1 résume la démarche de l’évaluation pharmacoéconomique. Pour chacune des stratégies comparées, 2 ou plus, il faut déterminer d’une part les ressources qu’il a fallu mobiliser pour la mettre en œuvre (les dépenses nécessaires) et d’autre part le résultat (bénéfice thérapeutique obtenu grâce à cette stratégie). L’expression de ces ressources et des résultats obtenus, et leur comparaison, déterminent le type d’analyse réalisée. DIFFÉRENTS TYPES D’ÉTUDE Toutes les études pharmaco-économiques comparent des alternatives thérapeutiques, et leurs résultats sont exprimés de façon différentielle. Quatre différents types d’études sont pratiquées : - l’analyse de minimisation des coûts ou analyse coût/coût, - l’analyse coût-efficacité, - l’analyse coût-utilité, Schéma 2 Les analyses de minimisation des coûts permettent de répondre simplement à la question "quelle stratégie est la moins chère ? ". Elles ne sont réalisées que dans l’hypothèse où les stratégies comparées ne différent que par les coûts qu’elles mettent en œuvre (l’efficacité et la tolérance de stratégies comparées sont considérées comme identiques). Il peut s’agir, par exemple, de comparer les héparines de bas poids moléculaire entre elles dans la prévention des thromboses veineuses profondes en chirurgie et de déterminer celle qui est la moins coûteuse. Il faut recenser l’ensemble des coûts engagés (nécessaires) et des coûts évités (diminution du temps infirmier, par exemple, ou absence de nécessité d’une surveillance biologique par chacune d’entre elles). Le résultat sera exprimé en Francs (ou en Euros). - l’analyse coût-bénéfice. Dossier 2000, XXI, 1 Analyse de minimisation des coûts ou coût-coût 42 Fiche Ressources consommées Approche pharmaco-économique Stratégie thérapeutique ou diagnostique Résultats Coûts engagés (C) Coûts évités (V) Coûts directs Coûts directs Coûts indirects Coûts indirects Coûts intangibles Coûts intangibles Étude de minimisation des Coûts ou Étude Coût-Coût Bilan financier Schéma 2 : Analyse de minimisation des coûts ou coût-coût Ressources consommées Coûts engagés (C) Stratégie thérapeutique ou diagnostique Coûts évités (V) Résultats États de santé (E) Coûts directs Coûts directs Mortalité Coûts indirects Coûts indirects Morbidité Coûts intangibles Coûts intangibles Qualité de vie Étude Coût-Efficacité Schéma 3 : Analyse coût-efficacité Dossier 2000, XXI, 1 43 Fiche Approche pharmaco-économique Analyse coût-efficacité Le terme utilité signifie ici préférence des individus ou de la société pour un état de santé donné. Schéma 3 L’analyse coût-efficacité relie les coûts des stratégies médicales à ses conséquences exprimées en unité physique comme, par exemple, les années de vie gagnées ou le nombre de patients guéris. La différence de coûts des différentes stratégies rapportée à la différence d’efficacité obtenue à l’issue de ce type d’étude correspond au sacrifice supplémentaire de nature financière qu’il faut consentir pour gagner une unité de santé (3). Ce type d’étude est fréquemment retrouvé dans la littérature. Exemples : - comparaison de traitements antifibrinolytiques dans l’infarctus du myocarde, le bénéfice obtenu par la thrombolyse par rt-Pa ou streptokinase est exprimé avec le même indicateur de résultat, c’est à dire la même unité de santé, qui est l’année de vie sauvée (10), - protocoles de prise en charge de l’asthme : l’unité de santé est le nombre de jours sans crise d’asthme. Analyse coût-utilité Schéma 4 Ressources consommées Coûts engagés (C) Sauver une vie est important, mais n’est pas suffisant, il faut également prendre en compte la qualité de vie du patient sauvé par une stratégie thérapeutique. La nécessité de distinguer d’une part un résultat et d’autre part l’utilité de ce résultat peut-être illustré par l’exemple suivant donné par Mike Drummond (4). Cet exemple théorique considère des jumeaux, identiques en tout point, sauf dans leur activité professionnelle, l’un est peintre et l’autre traducteur. Ils se cassent le bras droit. Bien qu’ils souffrent du même handicap, s’il leur était demandé de placer l’hypothèse " avoir un bras cassé " sur une échelle allant de 0 (mort) à 1 (santé parfaite), leurs réponses pourraient différer de façon considérable, compte tenu de l’importance que chacun accorde au mouvement de son bras du fait de son activité professionnelle. Par conséquent, leurs évaluations de l’utilité du traitement (c’est à dire l’amélioration de la qualité de vie grâce au traitement), différent aussi. L’analyse coût-utilité peut-être considérée comme une forme particulière d’analyse coût-efficacité où les résultats sont mesurés en années de vie gagnées ajustées par la qualité de vie ou AVAQ (en anglais QALY : «quality adjusted life-year») (13). Ces AVAQ sont mesurés en ajustant la durée de vie obtenue par le résultat de santé à l’aide des valeurs d’utilité des états de santé correspondants (sur une échelle allant de 0 à 1). Une année de vie en bonne santé Stratégie thérapeutique ou diagnostique Résultats Appréciation de l’état de santé Coûts évités (V) Coûts directs Coûts directs Coûts indirects Coûts indirects Coûts intangibles Coûts intangibles Préférence «Utilité» (U) Disposition à payer (W) Étude coût-utilité Schéma 4 : Analyse coût-utilité Dossier 2000, XXI, 1 44 Fiche Approche pharmaco-économique compte pour 1 et une année de vie en moins bonne santé compte pour une fraction d’année (<1). Encore très controversée sur le plan théorique, elles sont très utilisées par les équipes américaines (et par les HMO) pour comparer des protocoles où l’impact sur la qualité de vie est prononcé. C’est, par exemple, les cas lors de comparaisons de traitements anticancéreux qui peuvent améliorer l’efficacité en terme de réponse et/ou de durée de survie, mais surtout en confort de vie ; les résultats sont alors exprimés en années de vie gagnées ajustées par la qualité de vie (9). stratégies de dépistage (par exemple, décès, morbidité, arrêt de travail, etc.…). Les trois premiers types d’analyses - coût-coût, coût-efficacité et coût-utilité - sont résumées analytiquement dans le tableau ci-dessous : POINTS DE VUE ET COÛTS Analyse coût-bénéfice Dans une analyse coût-bénéfice, les coûts et les résultats sont exprimés dans la même unité, en termes monétaires. L’analyse coût-bénéfice est une évaluation économique globale car les résultats des programmes – que ce soient des gains en survie ou en qualité de vie – doivent être mesurés et évalués. Pour évaluer les résultats de santé en termes monétaires, il existe trois approches générales : 1) l’approche dite du capital humain ; 2) l’approche par les préférences révélées, 3) l’approche par les préférences déclarées de la disposition-à-payer. Pour en savoir plus, le lecteur peut se reporter à l’ouvrage cité en référence (6). Cependant, la valorisation monétaire des résultats de santé pose un problème éthique puisqu’en fin de compte cette méthode revient à donner une valeur monétaire à la vie… Il est à remarquer qu’en France, d’une certaine manière, l’état a fait cette démarche en créant le fonds d’indemnisation des personnes contaminées par le VIH lors de transfusion sanguine. Plus rares, ces études sont par exemple utilisées pour évaluer l’impact économique de stratégies vaccinales ou de Points de vue Toute évaluation économique suppose que soit précisé le point de vue adopté. Les différents points de vue adoptés – ceux du patient, des prestataires de soins (hôpital, clinique ou médecins), du payeur (assurance-maladie, collectivités locales) ou de la société - orientent directement la comptabilité des ressources consommées par les stratégies comparées et donc leur valorisation (les coûts). Ainsi, le patient considère les biens et les services médicaux qui ne lui sont pas remboursés, par exemple, le ticket modérateur (en l’absence de mutuelles). Le payeur, lui, considère ce qu’il verse aux hôpitaux et/ou aux patients. L’hôpital ne va prendre en compte que les coûts hospitaliers. En revanche, la société dans son ensemble prend en compte les ressources utilisées pour le traitement d’un patient, mais également le manque à gagner exprimé, par exemple, en terme de journées de travail perdues. En pratique, plusieurs points de vue pourront être adoptés alternativement pour une même étude. Les différences de méthode d’évaluation des coûts devront alors apparaître clairement dans la présentation. Analyse Stratégie A Stratégie B Evaluation pharmaco-économique Coût-coût CA – VA CB – VB = (CA – VA)-(CB – VB) Coût-efficacité (CA – VA )/ EA (CB – VB )/ EB = (CA – VA)-(CB – VB)/EA -EB Coût-utilité (CA – VA )/ UA (CB – VB )/ UB = (CA – VA)-(CB – VB)/UA -UB Légende : C= coûts engagés / V = coûts évités E = états de santé U= utilité Dossier 2000, XXI, 1 45 Fiche Approche pharmaco-économique mique. Coûts EFFICACITÉ Les coûts sont calculés par rapport à une stratégie de base, ou stratégie de référence, qui correspond au traitement standard de la pathologie. Cela revient donc à calculer un surcoût (ou un sous-coût, mais cette situation est rare, car le principe commun à toute innovation thérapeutique semble être un coût plus élevé !). Les coûts à inclure sont les coûts directs, les coûts indirects, et les coûts intangibles. 1. Coûts directs Les coûts directs sont les coûts directement imputables à la pathologie et/ou à sa prise en charge thérapeutique lors de l’hospitalisation et/ou en ambulatoire. Ils peuvent être : - médicaux : médicaments, transfusions, hospitalisation, consultations, examens, explorations, imagerie, - non médicaux : transport, aide à domicile, mais également frais d’aménagement des habitations (enlever la moquette chez un asthmatique, par exemple). 2. Coûts indirects L’efficacité peut se définir par la mesure du résultat d’un traitement en termes médicaux, pour un patient ou pour une population. Il peut s’agir de critères d’efficacité et de tolérance retrouvés dans les études cliniques prospectives. Mais pour l’analyse pharmaco-économique, la mesure des résultats obtenus correspond à l’utilisation courante du traitement en dehors de tous critères de sélection. Ainsi, l’analyse pharmaco-économique s’attache à la mesure la plus finale possible du résultat, et cette mesure peutêtre calculée de façon rétrospective. En l’absence de données épidémiologiques ou de données au cours d’un essai clinique, il est possible de recourir à l’avis d’experts. Dans ce cas, la méthode de recueil communément utilisée est la méthode DELPHI. RÉSULTATS DE L’ANALYSE PHARMACO- Les coûts indirects (1) sont les coûts des conséquences négatives indirectement induites par la pathologie ou son traitement : pertes de productivité liées aux arrêts de travail par exemple, ou coûts de substitution comme l’embauche d’une femme de ménage. Ceci implique la perte de productivité du malade, mais également de son entourage (celle-ci est importante, par exemple dans la maladie d’Alzheimer). La valorisation monétaire est délicate et est toujours l’objet de discussions. 3. Coûts intangibles Les coûts intangibles représentent les conséquences sociales ou psychologiques induites par la pathologie et son traitement. C’est la perte du bien-être du patient et de son entourage (douleur, souffrance, impact affectif). Il s’agit de la valorisation du préjudice psychologique ou de l’altération de qualité de vie subie par le patient ou son entourage. Tous ces coûts sont réels mais rarement pris en compte en raison de l’extrême difficulté de leur valorisation éconoDossier 2000, XXI, 1 Les résultats mesurent l’amélioration de la santé grâce aux interventions mises en œuvre. 46 ECONOMIQUE Le résultat final est exprimé en coût par année de vie sauvée ou par résultat de santé obtenue. Ces analyses calculent un rapport (ratio) qui correspond, au numérateur, à la différence de coût entre les stratégies comparées (unité : francs FF ou euros) et, au dénominateur, à la différence des résultats médicaux (unité : années de vie sauvée par exemple). Avec ces exemples d’unités, le ratio s’exprime alors en francs/année de vie sauvée. Les résultats peuvent être présentés sur une figure simple, où l’efficacité est représentée en abscisse et les coûts en ordonnée (figure 1). Les axes déterminent quatre quadrants qui correspondent aux différentes situations de l’analyse : - Dans le quadrant supéro-droit, la stratégie thérapeutique B est plus efficace et plus coûteuse que la stratégie thérapeutique de référence A. Dans cette situation, le choix est réalisé selon les ressources disponibles et selon ce que le décideur est prêt à investir pour obtenir ce surcroît d’efficacité. Si la stratégie thérapeutique se situe en Ba, elle est «dominée» avec un ratio coût-efficacité peu acceptable et a donc peu de chances d’être adoptée. En revanche si la stratégie thérapeutique se situe en Bb, elle est «faiblement Fiche Approche pharmaco-économique Coûts Ba : Stratégie dominée B : Stratégie dominée Bb : Stratégie faiblement dominée A B : Stratégie faiblement dominée Efficacité B : Stratégie dominante Figure 1: Représentation schématique des résultats d'une analyse coût-efficacité comparant une stratégie thérapeutique B à une stratégie thérapeutique de référence A. dominée» avec un ratio coût-efficacité plus acceptable, et donc une probabilité plus forte d’être adoptée. - Dans le quadrant supéro-gauche, la stratégie thérapeutique B est moins efficace et plus coûteuse que A, elle sera donc refusée, B est dit «traitement dominé», - Dans le quadrant inféro-gauche, B est moins efficace et moins coûteux que A, B est faiblement «dominé» par le traitement A, la probabilité d’adopter la stratégie thérapeutique B est faible. - Dans le quadrant inféro-droit, B est plus efficace et moins coûteux que A ; il est «dominant» et doit donc être préféré. ANALYSE DE SENSIBILITE L’analyse de sensibilité explore le degré d’imprécision, tant pour la mesure des ressources et leur valorisation que pour les résultats. En effet, la mesure des coûts est souvent imprécise et les données qui permettent l’analyse sur une population précise, incomplètes, ce qui oblige à formuler des hypothèses. Dossier 2000, XXI, 1 47 Pour pallier ces conditions d’incertitudes dans lesquelles sont réalisées ces études, la pharmaco-économie procède systématiquement à une analyse de sensibilité. L’analyse de sensibilité est indispensable pour vérifier la fiabilité de l’étude ; elle teste la robustesse de l’analyse et permet de s’assurer de la validité du résultat. L’analyse de sensibilité consiste à recalculer le ratio en faisant varier chacun des paramètres caractéristiques des interventions comparées afin de déterminer quelle amplitude de variation va se traduire par un changement dans l’ordre de préférence des stratégies thérapeutiques. Par exemple, si A domine B, sont recherchées les variations qui vont faire que B domine A. Plus l’amplitude est éloignée de l’hypothèse raisonnable, plus l’analyse est considérée comme robuste (11). C’est par exemple le cas, si pour changer le sens du ratio il faut un prix négatif à l’une des ressources, ou une durée d’hospitalisation négative. Fiche Approche pharmaco-économique Les conclusions peuvent ainsi être modifiées, ou invalidées sous certaines hypothèses : le ratio est alors dit sensible à telle ou telle variable. Au terme de l’analyse de sensibilité, il est recommandé de choisir une attitude prudente "conservatrice " qui vise à retenir de manière préférentielle, lorsqu’il y a incertitude, les données a priori les plus défavorables au produit étudié. En raison des nombreuses hypothèses qui ont permis la construction du modèle, une analyse de sensibilité est conduite. Elle démontre que le ratio ne change jamais de sens, à moins de fournir l’érythropoïétine gratuitement. Cependant, le critère d’efficacité retenu est critiquable, il n’inclut pas l’ensemble des risques viraux résiduels associés à la transfusion allogénique (même si c’est le plus fréquent), ni le risque immunoallergique. LA MODÉLISATION CONCLUSION L’absence fréquente dans les études publiées (cliniques, épidémiologiques) de données intégrant d’une part toutes les stratégies thérapeutiques, et d’autre part tous les critères de mesure des résultats (bénéfice thérapeutique : «efficacy» ou «effectiveness») oblige à agréger des données provenant de sources différentes telles que plusieurs essais cliniques et/ou des méta-analyses. Les études pharmaco-économiques publiées (combien ne le sont pas ?), sont rarement réalisées dans le contexte français. Parmi celles disponibles, très peu sortent indemnes de la grille de lecture critique préconisée par Mike Drummond (5). La pharmaco-économie construit alors des modèles, le plus souvent stochastiques (probabilistes). Pour illustrer la modélisation, l’analyse retenue ici est une analyse coût-efficacité publiée en 1999 qui compare deux stratégies de transfusion autologue différée (TAD), l’une utilisant l’érythropoïétine et l’autre ne l’utilisant pas (traitement de référence) (14). L’analyse est conduite du point de vue de l’assurance maladie. Les coûts retenus correspondent au coût du programme de transfusion autologue différée et au coût de l’érythropoïétine pour un patient de 60 ou de 70 kg. Pour construire la première partie de l’arbre décisionnel (14), l’étude utilise les probabilités de transfusion allogénique pour chacun des programmes, issues d’un essai clinique publié. Mais elles sont incomplètes, et des hypothèses de survenue d’épisode transfusionnel ont dû être formulées. Dans tous les cas, l’analyse est conduite de façon à favoriser le bras TAD utilisant l’érythropoïétine. La deuxième partie de l’arbre décisionnel inclut la survenue d’une hépatite C liée au risque résiduel transfusionnel. Là encore, c’est le risque maximal qui a été retenu de manière à favoriser le bras érythropoïétine, soit 1 hépatite C pour 121 000 dons. Le critère d’efficacité retenu, est donc l’hépatite C évitée grâce à l’utilisation de l’érythropoïétine en association avec le programme d’autotransfusion différée. Les résultats sont impressionnants, avec un surcoût de 148 000 000 FF pour une hépatite C évitée. Dossier 2000, XXI, 1 48 La pharmaco-économie, en France, est encore à la recherche de crédibilité. Le collège des économistes de la santé a tenté d’y répondre en produisant des recommandations de bonnes pratiques d’évaluation économique du médicament avec le concours d’experts (2). Mais il ne s’est pas mis en place de structures équivalentes à celles existant au Canada (forte incitation des autorités) ou en Australie (obligation réglementaire). Les autorités de tutelle françaises n’ont pas clairement précisé la place des études d’évaluation économique des produits pharmaceutiques. Cette situation a limité la production d’études françaises spécifiques au contexte national. Mais la contre-expertise se développe avec d’une part l’implication de certaines revues professionnelles, et d’autre part la mise en place par le ministère d’un groupe d’experts-économistes auprès du comité économique des produits de santé (ex-comité économique du médicament). Les experts de ce groupe sont des personnalités indépendantes de l’industrie pharmaceutique. RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES 1 - Bengt Lijas. How to calculate indirect costs in economic evaluations. PHarmacoeconomics 1998 ; 13 : 1-7. 2 - Collèges des Economistes de la Santé. Evaluation économique des stratégies thérapeutiques. Recommandations de bonne pratique. La Lettre du Collège 1997 ; avril (numéro spécial). p 1-16. Fiche Approche pharmaco-économique 3 - Drummond MF, O’Brien BJ, Stoddart GL, Torrance GW. Méthodes d’évaluation économique des programmes de santé. 2ème édition. Traduction de Marie-Odile Carrère. Paris, Ed Economica, 1998. 4 - Drummond MF, O’Brien BJ, Stoddart GL, Torrance GW. Méthodes d’évaluation économique des programmes de santé. 2ème édition. Traduction de Marie-Odile Carrère. Paris, Ed Economica, 1998. pp 20-21. 5 - Drummond MF, O’Brien BJ, Stoddart GL, Torrance GW. Méthodes d’évaluation économique des programmes de santé. 2ème édition. Traduction de Marie-Odile Carrère. Paris, Ed Economica, 1998. pp 33-57. 6 - Drummond MF, O’Brien BJ, Stoddart GL, Torrance GW. Méthodes d’évaluation économique des programmes de santé. 2ème édition. Traduction de Marie-Odile Carrère. Paris, Ed Economica, 1998. pp 219-48. 7 - Durand-Zaleski I. Principes généraux d’analyse économique : application à l’évaluation économique de l’utilisation de facteurs de croissance hématopoïétiques dans la prise en charge des hémopathies malignes. Hématologie 1995 ; 1 : 15-421. 8 - Eisenberg JM. Clinical economics. A guide to the economic analysis of clinical practices. JAMA 1989 ; 262 : 2879-86. 9 - Launois R, Reboul-Marty J, Henry B et al. A cost-utili- 10 - Mark DB,Hlatky MA, Califf RM, Naylor CD, Lee KL et al. Cost-effectiveness of thrombolytic therapy with tissue plasminogen activator as compared with streptokinase for acute myocardial infarction. N Engl J Med 1995 ; 332 : 1418-24. 11 - Picot MC, Nègre M. Le point sur les méthodes d’évaluation en économie de la santé. Neurologies 1999 ; 2 : 34651. 12 - PRISM-PLUS study investigators. Inhibition of the platelet glycoprotein Iib/IIIa receptor with tirofiban in unstable angina and non-Q-wave myocardial infarction. N Engl J Med 1998 ; 338 : 1488-97. 13 - Roser R, Kind P. A scale of valuation of states of illness : is there a social consensus ? Int J Epidemiol 1978 ; 7 : 347-58. 14 - Woronoff-Lemsi MC, Arveux P, Limat S, Morel P, LePen C, Cahn JY. Erythropoietin and preoperative autologous blood donation in the prevention of hepatitis C: necessity or luxury ? Transfusion 1999 ; 39 : 933-7. Abstract Economic evaluations of clinical strategies Economic evaluations applied to health care system rely costs to medical effectiveness. In economic analysis of clinical practices three different parameters have to be considered : the analysis specificity, the analysis point of view, the types of cost and benefits. Pharmacoeconomic analysis differ from clinical trials as they consider real life and take into account the global cost of care. All the pharmacoeconomic analysis compare different alternatives with the standard alternative they are designed to replace. Four different types of analysis are used, cost minimisation analysis, cost-effectiveness analysis, cost-utility analysis and cost-benefit analysis. The economic perspective is the point of view according to which the analysis is realised : the patient, the provider, the society. Costs, outcomes and benefits might be seen differently from these different points of view. The types of costs wich can be included in the economic analysis of medical care are the direct medical costs, the direct nonmedical costs, the indirect morbidity and mortality costs and the intangible costs. It is important to distinguish the fixed costs from the variable costs. The criteria in the measurement of effectiveness could be efficacy from clincial trials or meta-analysis, or effectiveness from epidemiological studies. Economic analysis compares the costs and outcomes ratios of alternative clinical strategies. Sensitivity analysis determines the degree to which the uncertainty could influence the economic impact of clinical decisions. Due to the lack of published data from clinical or epidemiological studies, several information sources have to be aggregated, and some decision tree analysis are proposed. Key words : costs, evaluation, pharmacoeconomy. ty analysis of second-line chemotherapy in metastatic breast cancer : docetaxel versus paclitaxel versus vinorelbine. PharmacoEconomics 1996; 10 : 504-521. Dossier 2000, XXI, 1 49 Fiche Approche pharmaco-économique Annexe Lecture et évaluation critique d'un article d'évaluation économique publié 1 - A-t-on posé une question précise, à laquelle on puisse répondre ? 4 - Les coûts et les conséquences les plus importants de chaque option ont-ils été identifiés ? 1.1. L'étude a-t-elle pris en compte à la fois les coûts et les résultats du (des) programme(s) ? 4.1. Le domaine d'investigation est-il assez large compte tenu de la question posée ? 1.2. L'étude compare-t-elle différentes options (stratégies thérapeutiques) ? 4.2. A-t-on examiné les différents points de vue pertinents ? (i.e. le point de vue de la société, des patients et des tierspayants; d'autres points de vue peuvent être pertinents dans une analyse particulière) q oui q oui q non q non q sans opinion q sans opinion q oui 1.3. Un point de vue précis a-t-il été adopté et l'étude se place-t-elle dans un contexte décisionnel particulier ? q oui q non q sans opinion 2 - Les options concurrentes ont-elles été décrites de façon exhaustive ? (i.e. pouvez-vous dire qui a fait quoi ? à qui ? où ? et avec quelle fréquence ?) q sans opinion 2.2. Une option «ne rien faire » a-t-elle été envisagée ? q oui q non q sans opinion 3 - L'efficacité des stratégies thérapeutiques a-t-elle été établie ? q non Dossier 2000, XXI, 1 q non q sans opinion q oui q non q sans opinion q non q sans opinion *** 6 - Les coûts et les conséquences ont-ils été évalués de façon pertinente ? q sans opinion 3.3. A-t-on utilisé des données d'observation ou des hypo thèses pour établir l'efficacité ? Dans ce cas, comment les résultats s'en trouvent-ils biaisés ? q oui q non *** q oui q sans opinion 3.2. L'efficacité a-t-elle été établie par une synthèse d'études cliniques ? q oui q oui 5.2. Y avait-il des circonstances particulières (i.e. l'utilisation conjointe des ressources) qui rendaient le calcul difficile ? En a-t-on correctement tenu compte ? 3.1. S'est-on appuyé sur un essai clinique randomisé et contrôlé ? Dans ce cas le protocole correspond-il à la pratique courante ? q non q sans opinion 5.1. Tous les items identifiés ont-ils été mesurés ? Lorsqu'un item a été écarté, pouvait-on le considérer comme négligeable ? *** q oui q non q sans opinion 5 - Les coûts et les conséquences ont-ils été mesurés correctement, en unités physiques appropriées ? (i.e. nombre d'heures de soins infirmiers, nombre de consultations, journées de travail perdues, années de vie gagnées) 2.1. Des options importantes ont-elles été omises ? q non q non 4.3. Les coûts en capital, de même que les coûts d'exploitation, ont-ils été inclus ? (par exemple la journée d'hospitalisation intègre le capital) *** q oui q oui q sans opinion 6.1. Les sources d'information ont-elles été clairement identifiées ? (Parmi les sources possibles, on peut citer les prix de marché, les préférences des patients, les opinions des décideurs et les avis des professionnels de santé) q oui 50 q non q sans opinion Fiche Approche pharmaco-économique 6.2. Les prix de marché ont-ils été utilisés pour mesurer des gains ou des pertes de ressources ? q oui q non q sans opinion 6.3. Comment a-t-on procédé pour estimer des prix de marché lorsqu'ils été absents (dans le cas par exemple d'un travail bénévole) ou lorsqu'ils ne reflétaient pas les valeurs réelles (dans le cas par exemple d'un organisme de soins subventionné) ? 6.4. L'évaluation des conséquences a-t-elle été bien adaptée à la question posée (i.e. a-t-on retenu le(s) type(s) d'analyse adéquat(s): coût-efficacité, coût-utilité, coût-bénéfice) ? q oui q non q sans opinion *** 7.1. Les coûts et les conséquences ont-ils été actualisés ? q non q non q sans opinion 8.1. Les coûts supplémentaires engendrés par une option par rapport à une autre ont-ils été comparés à ses effets, bénéfices ou utilités supplémentaires ? q non q sans opinion *** 9 - A-t-on tenu compte de l'incertitude dans l'estimation des coûts et des conséquences ? 9.1. Si les données sur les coûts et les conséquences étaient stochastiques, a-ton réalisé des analyses statistiques adaptées ? q oui q non Dossier 2000, XXI, 1 q non q non q sans opinion 10.2. Les résultats ont-ils été comparés à ceux d'autres études sur le même sujet ? Dans ce cas, s'est-on préoccupé des différences méthodologiques possibles ? q non q sans opinion q oui q non q sans opinion 10.4. L'étude a-t-elle évoqué ou pris en compte d'autres facteurs importants relatifs à la décision considérée (i.e. la distribution des coûts et des conséquences ou les questions d'ordre éthique) ? q oui q non q sans opinion 10.5. L'étude a-t-elle abordé les problèmes posés par la mise en œuvre du programme choisi, compte tenu des contraintes financières ou autres, et s'est-on demandé si les ressources éventuellement dégagées pourraient être réaffectées à d'autres programmes dignes d'intérêt ? q oui q non q sans opinion *** q sans opinion Source : Michael F Drummond, Bernie J O'Brien, Greg L Stoddart, George W Torrance. Méthodes d'évaluation économique des programmes de santé. 2e édition. Traduction de MO Carrère. Paris, Ed Economica, 1998. 9.2. Si on a procédé à une analyse de sensibilité, a-t-on justifié les intervalles de valeurs (pour les paramètres-clés) ? q oui 10.1. Les conclusions de l'étude sont-elles fondées sur un quelconque indicateur de synthèse (i.e. un ratio coûtefficacité) ? Dans ce cas, I'a-t-on interprété de façon intelligente ? 10.3. L'étude a-t-elle abordé la question de la généralisation des résultats, pour d'autres contextes ou d'autres groupes de patients ? 8 - Une analyse différentielle des coûts et des conséquences des options concurrentes a-t-elle été réalisée ? q oui 10 - La présentation et la discussion des résultats de l'étude recouvrent-elles toutes les préoccupations des utilisateurs ? q oui q sans opinion 7.2. A-t-on justifié le choix du taux d'actualisation ? q oui *** q oui 7 - Les coûts et les conséquences ont-ils été ajustés en fonction du temps ? q oui 9.3. Quelle est la sensibilité des résultats de l'étude aux variations des paramètres (pour les valeurs retenues de l'analyse de sensibilité, ou à l'intérieur de l'intervalle de confiance du ratio des coûts aux conséquences) ? q sans opinion 51