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RAPPEL DU SUJET
SUJET N°2 : LE TRAVAIL PERMET-IL DE PRENDRE CONSCIENCE DE SOI ?
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Examen : Bac S
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LE CORRIGÉ
LE TRAVAIL PERMET-IL DE PRENDRE CONSCIENCE DE SOI ?
1. Analyse du sujet
Il s’agit d’un sujet classique qui articule deux notions du programme : le travail et la conscience. C’est dans la prise en
compte de ce rapport que réside la clé du traitement.
Le sujet propose d’analyser une thèse selon laquelle le travail permettrait de prendre conscience de soi. Que recouvre
une telle affirmation ? Elle invite à interroger la valeur du travail : est-il de l’ordre d’une contrainte que les Hommes
subissent sous l’emprise de la nécessité et dont ils cherchent à se libérer dès que possible ? Ou bien est-il une activité
qui leur permet d’accéder à la conscience de soi, par quoi les Hommes accèdent à une forme de liberté ? En d’autres
termes, il s’agit de penser le statut du travail dans la connaissance que l’Homme a de lui-même.
Il faut donc bien veiller à considérer strictement le travail sous cet aspect, et non pas, par exemple, comme activité bien
ou mal rémunérée.
Il était important de préciser dans l’analyse du sujet :
1/ que la conscience de soi est ici présentée comme un résultat, ce que souligne l’expression «prendre conscience de
soi». La conscience de soi apparaît dans cette perspective comme un processus, comme ce qui advient au cours
d’une activité, en l’occurrence une activité liée à la production de biens nécessaires à la vie qui exige des efforts, voire
une certaine peine.
2/ qu’il est ici question non pas de la conscience en tant que rapport avec le monde ou la réalité (ainsi lorsqu’on dit
qu’on est conscient d’un danger) mais de la conscience de soi, c’est-à-dire de la conscience que l’Homme a de ses
pensées, de ses sentiments ou de ses actes.
En second lieu, il était nécessaire d’examiner si le travail, en tant qu’activité de transformation du monde, constitue pour
l’Homme un moyen d’accéder à une forme de connaissance de soi.
Enfin, il est important de tenir compte du sens du verbe « permet » qui renvoie à une possibilité ou à un pouvoir.
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2. La problématique du sujet
On sait que notre rapport au travail est fondamentalement ambivalent : souvent considéré comme pénible et
contraignant, il est aussi reconnu comme une activité grâce à laquelle l’Homme conquiert sa liberté parce qu’elle lui
donne l'occasion de développer les facultés qui lui permettent d’accéder à une certaine maîtrise de lui-même et du
monde.
La perspective envisagée par le sujet invite à penser le travail comme le moyen pour l’Homme de prendre conscience
de lui-même, autrement dit de se connaître et ainsi de s’affirmer.
Il semble indispensable de considérer le travail non comme une catégorie abstraite mais comme une activité inscrite
dans des conditions historiquement déterminées, dans une organisation sociale et politique donnée. Il faut aussi
considérer la diversité des activités que rassemble ce terme de travail : qu’y a-t-il de commun, en effet, entre le travail à
la chaîne de l’ouvrier, celui du menuisier ou encore celui d’un chercheur ?
Pour traiter le sujet, il faut donc comprendre en quoi le travail permet d’accéder à la conscience de soi : qu’est-ce qui
dans cette activité rend possible pour l’Homme une connaissance de lui-même ?
Mais une telle question ne saurait s’envisager sans que l’on prenne en compte les conditions auxquelles doit satisfaire
le travail pour que l’accès à cette conscience de soi soit possible. Un travail répétitif et monotone, un travail ennuyeux
ne sont-ils pas des obstacles à l’accès à la conscience de soi, à la reconnaissance des qualités qui constituent l’Homme
comme tel, la pensée réflexive et la liberté ?
Un tel sujet engage en réalité la question de la définition du travail : à quelle condition une activité permet-elle cette
connaissance de soi ? Autrement dit, à quelle condition une activité peut-elle être considérée comme un véritable travail
si l’on comprend le travail comme une activité spécifiquement humaine par laquelle l’Homme peut conquérir sa liberté.
3. La Boîte à outils
- On pouvait partir de l’idée que le travail est le propre de l’Homme, car il est contraint d'adapter le monde à ses
besoins. Le caractère de nécessité propre à l’activité laborieuse pourrait passer pour une épreuve que l’Homme aurait à
supporter. Mais les efforts qu’exige le travail ne sont pas sans bénéfice pour la conscience de ses pouvoirs sur le
monde et sur lui-même et pour la connaissance qu’il a de lui-même.
Marx (Capital, livre I) établit ainsi une distinction entre activité animale et travail humain : celui-ci suppose intelligence
et réflexion et donne ainsi à l’Homme l’occasion de développer ses facultés.
Voir aussi les analyses de Georges Bataille qui montrent que l’Homme est l’animal qui nie le donné naturel et qui, en
constituant ainsi un monde humain, se donne ainsi les moyens de maîtriser ses désirs les plus immédiats et d’accéder
ainsi à une plus grande liberté.
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On pouvait aussi se reporter aux analyses de Hegel qui montrent que c’est par le travail que l’Homme se distingue de
l’animal et accède à la conscience de son humanité (Phénoménologie de l’esprit, voir en particulier la célèbre analyse
de la dialectique du Maître et de l’Esclave )
- Toutefois, et on peut ici encore se référer aux analyses de Marx, le travail est aussi ce qui, dans certaines conditions,
réduit l’Homme à des gestes mécaniques et répétitifs, qui dépossèdent l’Homme de ce qui fait son humanité. Le travail
est alors non pas ce qui libère l’Homme en lui permettant de développer ses facultés mais ce qui l’aliène, le rend
étranger à lui-même pour le cantonner dans une activité purement machinale et le réduire à une simple «marchandise»
(Marx, Manuscrit de 1844) : le travailleur est alors dépossédé de lui-même.
- Dans une perspective un peu différente mais tout aussi critique, on pouvait penser aux analyses de Nietzsche qui
dénoncent la réduction du travail à un simple moyen de survie, issu de la malédiction biblique. Selon lui, la fausse
civilisation, est celle où le travail est dénaturé, où il n’est plus une fin en soi mais un simple moyen de gagner sa vie
(Le gai savoir).
- Il est donc nécessaire de penser les conditions qui permettent que le travail donne à l’Homme la possibilité d’accéder
à la conscience de soi et surtout de comprendre pourquoi il est alors une activité essentielle pour l’Homme à la
conquête de son humanité.
- On pourra rappeler ici les analyses de Descartes (Discours de la méthode, Méditations métaphysiques) qui donnent à
la conscience un rôle fondamental dans la connaissance de soi et du monde. C’est parce que l’Homme est conscience
(il est une «chose pensante»), qu'il est doué pour la connaissance. Or si le travail lui permet de développer ses facultés,
de mettre en oeuvre sa réflexion, d’accroître la maîtrise de son corps, la conscience est aussi ce qui lui permet de
mesurer la liberté qu’il conquiert grâce à cette transformation du monde.
Le travail n’est donc pas seulement ce qui soumet l’Homme à l’emprise de la nécessité, il n’est pas seulement ce qui lui
permet de satisfaire ses besoins, il est aussi ce qui lui permet de s’en libérer pour réaliser sa liberté à travers la
conscience qu’il acquiert de lui-même, de ses pouvoirs sur la réalité extérieure et sur lui-même.
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