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Conseil d’Etat (4) fait état pour la victime «
d’une anxiété liée à la contamination
» rattachée à un
ensemble de préjudices personnels.
Par ailleurs, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur ce même trouble dans un autre contentieux
sensible, celui relatif aux pathologies - la sclérose en plaques notamment- survenues à la suite
d’une vaccination contre l’hépatite B, en particulier dans le cas où elle est obligatoire. Le Conseil
d’Etat qui admet, dans certaines circonstances, depuis 2007 un lien de causalité entre la
vaccination et l’affection, constate en 2009 dans deux espèces relevant de cette hypothèse, «
une
inquiétude permanente liée au risque d’aggravation
» (5). Le caractère évolutif de la pathologie
permet de cerner ce préjudice comme spécifique sans pour autant que le juge ne l’isole et ne le
caractérise nettement.
Enfin, en 2011 la Cour administrative d’appel de Paris (6) intervenant dans le contentieux de
l’amiante au titre de la mise en jeu de la responsabilité de l’Etat a admis que «
le préjudice qualifié
« d'anxiété » n'est pas constitutif devant le juge administratif d'un poste de préjudice spécifique,
mais doit être regardé comme incorporé dans les postes constitués par les troubles dans les
conditions d'existence et le préjudice moral
» en précisant «
sans que soit nécessairement
caractérisé un état pathologique d'anxio-dépression
».
C’est donc en reconnaissant explicitement le préjudice d’inquiétude en tant que tel que le Conseil
d’Etat livre une avancée jurisprudentielle intéressante, sans aller cependant jusqu’à énoncer un
nouveau chef de préjudice distinct du préjudice moral.
L’autre apport -peut-être plus remarquable encore- de cette décision réside dans l’admission et la
réparation d’un préjudice d’inquiétude alors même que le patient a été finalement guéri. Il s’agit là
d’une audace mettant en valeur au point de l’indemniser, un sentiment vécu légitimement à un
moment donné indépendamment de ce qui s’est passé ensuite. Ce faisant, il s’agit de faire
prévaloir une perception temporaire subjective de la situation sur son issue objective.
II. La jurisprudence pionnière du juge judiciaire en matière de réparation des troubles liés à
l’anxiété
Sous la bannière de mots différents le juge judiciaire a été l’initiateur de cette jurisprudence visant
à saisir et réparer le trouble lié à l’appréhension de dommages à venir.
La Cour de cassation a, dès 1996 (7), accepté de réparer «
l’anxiété
» liée à une contamination
transfusionnelle par le virus de l’hépatite C, mentionnant le fait que «
l’évolution de cette
affection pouvait être sournoise
».
Elle a par ailleurs retenu un préjudice spécifique de contamination qui inclue cette dimension
psychologique du dommage à la suite d’une contamination transfusionnelle par le VIH (Civ 2e 1
février 1995 n° 93-06.020, Civ 2e 2 avril 1996 n°94-15.676 : «
le préjudice spécifique de
contamination comprend l’ensemble des préjudices de caractère personnel subis (...) tant
physiques que psychiques et résultant, notamment, de la réduction de l’espérance de vie, des
perturbations de la vie sociale, familiale et sexuelle ainsi que des souffrances et de leur crainte
(…)» ). Puis elle a étendu cette consécration aux cas de contamination transfusionnelle par le virus
de l’hépatite C (8), le préjudice spécifique de contamination de la victime étant caractérisé
notamment par «
l’inquiétude sur son avenir
». Ce dernier arrêt est aussi parce qu’il pose, comme