ÉDITO
Le droit de la santé est en constante effervescence qu’il s’agisse du droit médical proprement dit, de celui
de la responsabilité médicale ou encore de la bioéthique. Les juges, les législateurs nationaux et com-
munautaires et les organismes professionnels sont autant d’acteurs qui construisent ce droit en
développement.
Toutefois, ce mois-ci, c’est le Conseil constitutionnel qui fait une intervention remarquée dans le domaine
du droit médical en revenant, le 11 juin dernier, sur la loi « anti-perruche » qu’il a déclaré pour l’essen-
tiel conforme à la Constitution. Il s’agira d’une satisfaction de tous ceux qui s’inquiétaient de sa possible
remise en cause et, notamment, les assureurs.
Souvenons-nous: le célèbre arrêt Perruche du 17 novembre 2000 avait autorisé l’indemnisation
d’un enfant né handicapé à la suite d’une erreur de diagnostic des médecins ayant suivi la grossesse de
sa mère alors même que celle-ci avait fait part de sa volonté d’avorter si le fœtus était gravement atteint.
Cette décision avait déclenché une vive polémique nécessitant ainsi l’intervention du législateur.
La question posée expliquait cet émoi : Est-il acceptable d’indemniser une personne pour le préjudice
d’être née ?
La réponse positive de la Cour de cassation était claire aussi bien pour les médecins et que pour les han-
dicapés eux-mêmes. Pour les premiers, il était préférable d’inciter les femmes enceintes à avorter au
moindre risque afin de ne pas voir leur responsabilité engagée et, pour les seconds, leur vie constituait
un véritable problème puisque le fait d’être en vie constituait un préjudice en soi.
Le 4 mars 2002, le législateur donc est venu tempérer cette solution à travers la « loi Kouchner » ou « loi
anti-arrêt Perruche » en limitant l’indemnisation pour l’erreur de diagnostic aux parents, tout en faisant
appel à la « solidarité nationale » concernant le soutien financier nécessaire au soin d’une personne han-
dicapée tout au long de la vie.
Toutefois, pour beaucoup d’handicapés la situation de fragilité dans laquelle ils se retrouvent eux et leurs
familles demeure la même. Cette « solidarité nationale » à laquelle les renvoie est particulièrement
insuffisante et n’engage pas à grand-chose. Ainsi, le soutient des pouvoirs publics ne les aidant pas suf-
fisamment, il est à parier que leur combat pour la solidarité, éminemment politique, ne se mènera pas
seulement dans les prétoires.
SANTÉ|L a l e t t r e d e B i s m u t h A s s o c i é s |n°3|J u i n 2 0 1 0
JURI SP RUD EN CE
Dans un arrêt en date du 3 juin 2010, la première Chambre civile de la Cour de cassation réaffirme que le
manquement au devoir d’information du patient engage la responsabilité du chirurgien lequel est tenu de
réparer le préjudice causé.
En l'espèce, après avoir subi une intervention chirurgicale de la prostate, un patient s'est plaint d'impuis-
sance suite à l’opération, une complication connue pour ce type d'intervention. Il a alors engagé la
responsabilité de l'urologue. A ce titre, il a soulevé, en premier lieu, le manque d'information à son égard
sur les risques qu'il encourait du fait de cette intervention chirurgicale, et a soutenu , en second lieu, que
des négligences avaient été commises dans le cadre du suivi postopératoire.
L’affaire fut portée à la connaissance de la Haute juridiction qui, dans son arrêt du 3 juin 2006, confirme
la solution adoptée par les juges d’appel quant à l'absence de manquement du chirurgien à son obliga-
tion de suivi postopératoire. Pour cela, elle observe que le patient n'avait pas été laissé sans surveillance
postopératoire, que le suivi avait été conforme aux données acquises de la science, de sorte que la
fixation du premier rendez-vous postopératoire un mois après l'intervention était conforme aux pratiques,
que le praticien avait reçu le patient à deux reprises et prévu de le revoir une troisième fois, ce qui n'avait
pas été possible en raison de la négligence de du patient.
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