CONCERT Agnès Pyka, premier violon, et Bruno Robilliard, piano -- Théâtre Manoël à La Valette -10 mai 2012 à 20 heures PROGRAMME Jules Massenet Méditation de Thaïs (1894) Durée : 10 min Jules Massenet, compositeur français né le 12 mai 1842 à Montaud, mort le 13 août 1912 à Paris. Elève du Conservatoire à l’âge de 11 ans, il obtient le Prix du concours de Rome en 1863 et est nommé professeur au Conservatoire de Paris en 1878, date à partir de laquelle il composera ses opéras les plus célèbres. Compositeur prolifique, avec vingt cinq opéras, quatre oratorios, plus de deux cent quatre vingt mélodies, brillant et passionné, doué d’un sens naturel de la musique et d’une connaissance peu commune de la voix humaine, Jules Massenet va représenter, à travers ses créations, l’élégance française sur toutes les grandes scènes du monde. Auteur reconnu de son vivant, ses opéras « Manon », « Werther » ou « Thaïs », bénéficient toujours à travers le monde d’une extraordinaire popularité. Les œuvres lyriques de Jules Massenet sont ponctuées de pages purement orchestrales dont la plus représentative est la célèbre « Méditation de Thaïs ». Au sein de l'opéra, composé entre 1894 et 1898, cette pièce, opposant le violon solo à l'orchestre illustre la méditation religieuse qui scelle le destin des deux héros, une courtisane en route vers la rédemption, et un saint homme qui court à sa perte. Le thème énoncé par le violon solo est à la fois simple et recherché, le mélodiste réputé qu'est Massenet ayant toujours peiné à écrire ce qu'aujourd'hui on qualifie parfois de facile. Claude Debussy Sonate en sol mineur(1917) Durée: 23 min. Pièce pour piano « L’Isle joyeuse » (1904) Durée : 6 mn. Claude Debussy, compositeur français, est né le 22 août 1862 à SaintGermain-en-Laye et mort le 25 mars 1918 à Paris. Entré au Conservatoire à l’âge de 10 ans, titulaire du Prix de Rome et pensionnaire de la villa Médicis, son œuvre se plaça très vite sous le sceau de l'avant garde et de la modernité avec, en 1894, la création du « Prélude à l'après-midi d'un faune ». Personnalité anticonformiste, rejetant les cadres et règles préétablis, Claude Debussy, qui fut l’un des principaux représentants du courant impressionniste, renouvela les formes musicales, qu’il s’agisse de la symphonie avec « La Mer », de la musique pour ballet avec « Jeux », de l’opéra avec « Pelléas et Mélisande », ou de la musique de chambre avec son « Quatuor à cordes en sol mineur ». Son œuvre, en dépit de son volume réduit, marquera et infléchira de façon décisive l'histoire de la musique. La « Sonate en sol mineur » est la dernière œuvre d'un Debussy exténué, troisième volet d'un projet de six sonates en hommage au XVIIIème siècle français. Écrite et créée en 1917 pour la dernière apparition publique de Debussy, elle commence, au départ d'un Allegro vivo par un thème en sol mineur qui donne lieu à une exposition passionnée avant un deuxième thème plus serein. Les deux sont ensuite associés en une construction qui se brise sur une brusque conclusion en sol mineur. L'intermède qui suit est un ostinato de caractère hispanisant, et l'œuvre se termine sur un finale très animé en forme de perpetuum mobile qui affecte la gaieté alors que la mort est proche. « L'Isle joyeuse » est une pièce pour piano de Claude Debussy publiée en même temps que « Masque ». Toutes deux semblent avoir été esquissées plus tôt, lorsque Debussy écrivait, vers 1890, ses mélodies sur des textes de Verlaine. L'Isle joyeuse a été inspirée par une œuvre de Watteau de 1717, « L'Embarquement pour Cythère ». La partition colorée et brillante de L'Isle joyeuse où le pianiste est invité à modifier sans cesse sa sonorité et à faire preuve de finesse dans le jeu, pourrait illustrer la frivolité, l'insouciance, l'évasion. La brève introduction sur un trille est suivie d'un divertissement sur un rythme de habanera ; puis se développe une longue phrase voluptueuse, qui se termine sur un final très vif et brillant. Debussy s'engage dans un univers sonore nouveau avec notamment l'utilisation importante de la gamme par tons et le recours à de nouvelles couleurs musicales. Francis Poulenc Sonate en sol (1942) Durée : 25 min Francis Poulenc, compositeur et pianiste français né le 7 janvier 1899 à Paris, où il mourut le 30 janvier 1963. Francis Poulenc, compositeur autodidacte, très tôt influencé par ses contemporains Eric Satie et Jean Cocteau, participera à la création du groupe des Six en 1920. Ses créations sont diversifiées, alternant mélodies et cantates, musique de chambre, œuvres pour orchestre, musique sacrée. A compter de 1936, à la suite d’un immense choc religieux à l’occasion de la mort accidentelle d’un ami, sa musique sera durablement influencée par la révélation spirituelle alors éprouvée. Audacieux mais non provocateur, tour à tour austère et fantaisiste, mélancolique et divertissant, Francis Poulenc manie les dualités, que sa musique reflète. Mû par sa propre mélancolie, par sa ferveur religieuse, sa passion pour la voix et les mots, la littérature et la poésie, c’est en matière de musique vocale qu’il créera ses plus grands chefs d’œuvre, qu’il s’agisse d’un opéra bouffe sur des paroles de Guillaume Apollinaire, d’un opéra sur un livret de Bernanos, d’un concerto sur un texte de Jean Cocteau, ou de mises en musique de poèmes de Charles d’Orléans, de Paul Eluard, d’Aragon, … Francis Poulenc, dont les œuvres sont régulièrement reprises sur les scènes mondiales, apparaît comme le représentant d’une musique très française, à la fois grave et légère, spontanée mais achevée, inventive mais structurée. Francis Poulenc compose sa « Sonate en sol » à la mémoire du poète espagnol Federico Garcia-Lorca, assassiné par les milices franquistes lors de la Guerre d'Espagne. Poulenc s'inspire de l'équilibre instrumental atteint par Brahms dans ses sonates, refusant absolument le modèle, comme il l'écrit d'un « violon prima donna sur un piano arpège ». Commençant par une formule énergique et nerveuse, l'allegro initial déroule ensuite deux thèmes mélodiques très caractéristiques du langage de Poulenc. Le développement du premier thème mélodique laisse à son tour la place à une formule pleine de nostalgie. Le mouvement lent, vaguement espagnol de caractère, est avant tout une admirable cantilène qui doit beaucoup à Ravel. Malgré son titre le dernier mouvement commence par une série d'échanges humoristiques entre les deux instruments, qui laisse brutalement la place à une vision tragique où on entend résonner les coups de feu qui assassinent le poète. Cette œuvre paradoxale, dédiée dans Paris occupé par les nazis à un poète exécuté par leurs alliés, oscillant entre humour et tragédie, est souvent mal comprise, malgré la beauté de son écriture. Poulenc la créa avec Ginette Neveu, sa dédicataire, après la mort de laquelle il révisa le dernier mouvement. Elle ne s'impose pas moins au répertoire des grandes œuvres de musique de chambre du vingtième siècle. Maurice Ravel Pièce pour piano « Jeux d'eau » (1901) Durée : 6 min Maurice Ravel, compositeur français né à Ciboure le 7 mars 1875, mort à Paris le 28 décembre 1937. Malgré une initiation précoce à la musique par les plus grands professeurs de son époque, puis de son passage au conservatoire de Paris qu’il intégra en 1889, Maurice Ravel ne fera jamais preuve de grands talents de pianiste. Il se montrera en revanche très tôt un extraordinaire compositeur d’œuvres de grande virtuosité, et ses premières créations, au tournant du siècle, telles « Schéhérazade » (1898), « Pavane pour une infante défunte » (1899) ou « Jeux d'eau » (1901) furent vite remarquées par ses contemporains. Principal représentant, au même titre que Debussy, du courant impressionniste, il fournira parmi les plus belles pages de la musique française, modèles d’audace, de réflexion et d’architecture, d’une rigueur sans égal. L'œuvre de Ravel a réellement révolutionné le piano et la musique orchestrale. Son « Boléro », l’une des œuvres pour orchestre les plus originales qui soit, internationalement et perpétuellement revisitée, est la composition française la plus jouée dans le monde. « Jeux d'eau » est une pièce pour piano dédiée à son maître Gabriel Fauré et jouée pour la première fois le 5 avril 1902 par Ricardo Viñes. La partition porte en épigraphe une citation d’Henri de Regnier : « Dieu fluvial riant de l'eau qui le chatouille ». Bien que la réputation de debussyste et d'impressionniste de Ravel date des Jeux d'eau, c'est chez Liszt qu'il faut chercher les sources du compositeur. Fauré tenait les Jeux d'eau en grande estime, mais Saint-Saëns ne voulut voir dans cette pièce d'avant-garde qu'une « cacophonie ». Pourtant l'œuvre connut rapidement un grand succès, affirma définitivement la personnalité musicale de Ravel et eut une influence sur plusieurs de ses contemporains dont Debusssy (Préludes, Études). Sa brièveté et sa douceur en font une page prisée des concerts. Maurice Ravel la décrivait en ces termes : « Les Jeux d'eau, parus en 1901, sont à l'origine de toutes les nouveautés pianistiques qu'on a voulu remarquer dans mon œuvre. Cette pièce, inspirée du bruit de l'eau et des sons musicaux que font entendre les jets d'eau, les cascades et les ruisseaux, est fondée sur deux motifs à la façon d'un premier temps de sonate, sans toutefois s'assujettir au plan tonal classique. » (Maurice Ravel, esquisse autobiographique, 1928).