Francis Poulenc
(1899-1963)
Sextuor pour piano, flûte, hautbois, clarinette, basson, cor FP 100
Achevé en 1932, le Sextuor est un petit joyau de la musique française du 20
e
siècle. L’œuvre se veut gaie, humoristique, sensible sinon sensuelle. Elle fut créée le
19 juin 1932 à la salle Chopin-Pleyel. Poulenc ne fut pas entièrement satisfait de
la première version. Neuf ans plus tard, il remania considérablement la partition
avant d’en confier la publication aux éditions Chester. La pièce révisée fut créée
à Paris, le 9 décembre 1940 par le compositeur au piano et le Quintette à vent
de Paris. Hélas, les manuscrits de la première mouture ont été perdus, ce qui
interdit toute étude approfondie entre les deux versions.
Souvenons-nous ici d’Aubade, ce concerto chorégraphique pour piano et dix-huit
instruments, composé en 1930. La dimension de la chorégraphie, la vie d’un
personnage imaginaire se retrouvent avec une force comparable dans le Sextuor,
qui propose un instrumentarium original, composé d’un piano et d’un ensemble de
vents. Toutefois, à la différence d’un ballet, il s’agit aussi d’un divertissement
impertinent, violemment rythmé, au point qu’il est parfois indiqué sur la partition le
mot : “féroce”. L’ombre de Prokofiev et de Stravinsky plane sur cette pièce si
joliment ancrée dans l’esprit des salons parisiens des années trente et encore
subjuguée par les tensions rythmiques et le “motorisme” des compositeurs russes. Un
sentiment de liberté irrigue la partition en apparence si fluide. En revanche, pour
les interprètes, le défi est des plus conséquents ! Il leur faut en effet animer deux
mouvements primesautiers encadrant un divertissement, le cœur de la partition,
porté du bout des lèvres par le hautbois.
Le premier mouvement, Allegro vivace impose une tension de tous les instants avec
un piano à la verve épique et des instruments qui s’amusent à se répondre “du
tac au tac”. Le thème mélodique est en effet présenté par un jeu habile de
contretemps. Poulenc joue des écritures diatoniques et chromatiques, prenant
appui sur des dissonances “à la Stravinsky” sans pour autant briser
systématiquement le chant comme le fait l’auteur de l’Histoire du Soldat. Un
second thème, plus lent, mais aussi plus lyrique vient tempérer l’énergie du premier.
L’Andantino qui suit “glisse” à la manière d’une sonate mozartienne. Puis, l’écriture
se fragmente en de multiples sauts. Jeux de rythmes ou bien accès de pudeur de
la part du compositeur, qui ne veut pas céder à sa propre émotion sur le point