U4 M. Guillot Cours du 8/04/2013 de 18h à 19h DCEM2 Sarah Huberty Antoine Holzmann Dermo-hypodermites bactériennes nécrosantes I. INTRODUCTION - DEFINITIONS Les dermo-Hypodermites bactériennes nécrosantes (DHBN) sont enseignées dans plusieurs matières (infectiologie, réanimation, ...). Ce cours propose une vue d'ensemble des DHBN. (Note: le diaporama est disponible sur le groupe Facebook ou sur le site des réanimateurs de HTP: http://reamed-htp.org/) - Dermo-hypodermite bactérienne est ce que l'on appelle l'érysipèle. Il n'y a pas d'atteinte de l'aponévrose superficielle. Atteinte du derme et de l'épiderme. - Dermo-hypodermite bactérienne nécrosante, atteinte de l'hypoderme, nécrose en plus. (= Gangrène) - Fascite Nécrosante, est une atteinte du fascia superficielle (inconstant) et de l'aponévrose superficielle. - Myonécrose: Atteinte musculaire. Epidémiologie: Cas sporadique, rare: incidence de 0.25/100 000 habitants / an soit environ 30 à 40 cas/ans en Alsace. Touche plus les hommes que les femmes. L'âge moyen est de 55-60ans. Facteur de risques: - Porte d'entrée ++, traumatique, iatrogène, lésions de grattage... (non retrouvé dans 1 cas sur 5) - Diabète dans 25 à 30% des cas - Obésité - Trouble vasculaire périphérique - Alcoolisme, toxicomanie - Immunodépression: cancer, hémopathie - AINS? Pas d'étude qui montre que les AINS favorise les DHBN, dans le service de réanimation d'Hautepierre, 90% des patient venant pour DHBN sont sous AINS. U4 1/7 Physiopathologie: Classification: DHD non nécrosante: Erysipèle, atteinte primitive de l'épiderme et du derme. DHD nécrosante et fasciite nécrosante: atteinte primitive de l'hypoderme. Type 1: Atteinte polymicrobienne Type 2: Streptocoque B-hémolytique du groupe A (Bactérie mangeuse de chair) Type 3: Clostridium perfingens, rare avec emphysème sous cutané. II. PHYSIOPATHOLOGIE : GERMES Il existe une multitude de germes responsable de DHBN. (Liste à ne pas apprendre, présente dans le diaporama). Il est important de retenir que: - 4 types de germes peuvent donner des DHBN: les coccis gram +, les bacilles gram -, les anaérobies, et les espèces fongiques. - L'incidences des germes ne sera pas la même en fonction de l'atteinte anatomique. (Ex: E. coli espèce la plus fréquente dans une atteinte périnéale, contre Streptococcus milleri dans les atteintes cervicales). III. DIAGNOSTIC A. Clinique Le diagnostic est avant tout clinique. Les signes sont: Douleur importante - hyperthermie - érythème localisé Il faut chercher une porte d'entrée. Au niveau local on note un œdème froid, mal délimité dépassant la zone érythémateuse, puis des taches cyaniques, une nécrose cutanée, et des bulles hémorragiques. U4 2/7 Il existe des signes inconstants: - Emphysème sous cutané "crépitation neigeuse" - Odeur putride - Troubles neurologiques sensitifs. Les signes généraux sont un sepsis sévère, +/- un choc et une détresse respiratoire. La clinique peut ne pas être franche, c'est alors une forme fruste, il faut surveiller régulièrement. Les streptococcus et les clostridium peuvent se développer à une vitesse de 2 à 3 cm/h. Diagnostic au "bistouri test" (utilisé si pas d'imagerie, dans de rares cas...) On fait une incision profonde des tissus cutanés. Si il n'y a pas de pus et pas de saignement, le diagnostic est confirmé. Toute zone qui ne saigne pas est une zone infectée. (Voir les illustrations dans le diaporama) Particularité de la gangrène de Fournier, c'est une atteinte scrotale avec extension vers les membres inférieurs. On voit un aspect de marbrure mais ce n'est pas des marbrures. L'évolution clinique se fait en trois stades. Le pronostic dépend de la rapidité de la prise en charge. Il existe des critères diagnostic qui évoque une certaine étiologie. Mais la sensibilité et la spécificité sont médiocres. Il est presque impossible avec la clinique seul d'affirmer quel germe est en cause. Porte d'entée Colon-rectum: - Abcès péri-anal - Fistule anale - Traumatisme rectal U4 3/7 - Biopsie rectale - Cancer Tractus uro-génital: - Traumatisme scrotal - Cancer prostatique - Résection endoscopique Abcès fesse (suite a une injection IM) Pelvipéritonite Cervico-faciale: - Dentaire (abcès, extraction) - Pharyngée (abcès amygdalien, radio nécrose) - Traumatique et post opératoire (fracture maxillaire, kyste mandibulaire, cervicotomie) Attention: Une atteinte laryngée est à haut risque! Une dyspnée laryngée peut se mettre en place de façon très rapide. Une surveillance rapprochée est indiquée dans ces situations. Le plus grand facteur de risque de mortalité est le temps de prise en charge du patient. Puis vient l'âge (>60ans), les comorbidités, le diabète, etc... Dans le service de Hautepierre le taux de mortalité est de l'ordre de 10%, il va jusqu'à 50% dans la littérature. B. Imagerie L'imagerie ne doit pas retarder la prise en charge. D'ailleurs c'est inutile si le diagnostic clinique est évident. Mais elle permet d'éviter les explorations chirurgicales par excès. Seul le scanner injecté est indiqué en première intention. L'IRM injecté au gadolinium ne permet pas différencier un tissu nécrose d'un tissu non nécrosé. La radiographie n'a pas sa place dans cet indication. Le scanner injecté: Montre toujours un rehaussement asymétrique des tissus, et la nécrose. Montre dans 30% des cas du gaz et dans 25% une collection liquidienne. Sensibilité de 100% - Spécificité de 81% Exemple de scanner injecté avec DHBN au niveau scrotale, d'autre illutations sont sur le diaporama. U4 4/7 IRM + gadolinium: Montre un hyper-signal T2 dans les tissus sous cutanés et profonds et la présence d'abcès. Sensibilité 100% Spécificité 86%. Mais ces images sont en faveur d'une atteinte non nécrosante ou nécrosante. Il y'a donc un risque de surestimation du nombre de DHBN. Une étude de 2011 tend a montrer que des images en hypersignal de plus de 3mm d'épaisseur (du fascia) et une atteinte de plus de 3 loges musculaire sont en faveur d'une DHBN. Echographie: L'échographie n'est pas à faire en première intention. L'examen peut montrer un rehaussement asymétrique des tissus et de la nécrose, du gaz et d'éventuelle collection liquidienne. Examen biologique: Il existe le LRINEC Score qui sur les résultats biologiques peut indiquer une DHBN mais il n'est pas utilisé dans la pratique clinique. Néanmoins un bilan biologique peut servir à évaluer la gravité: atteinte musculaire (CPK, myoglobine), état de choc (lactates, ionogramme), CIVD hémostase (TP, TCA, Fibrinogène, DDimère) Penser a faire le bilan pré opératoire! Groupe ABO, Rhésus, RAI (minimum). Diagnostic bactériologique: (avant l'antibiothérapie!) Faire des hémocultures. On peut faire des prélèvements standards (écouvillonnage) et des prélèvements par ponction direct à l'aiguille. Mais les meilleurs prélèvements sont les prélèvements per-opératoire. Il faut toujours rechercher des germes anaérobies: Il faut donc respecter les conditions d'anaérobiose et surtout faire une mise en culture en mois de 30 minutes. Concrètement, le patient arrive à l'hôpital, le bilan pré opératoire est fait en urgence. Il est amené au bloc opératoire le plus vite possible avec prélèvement per-opératoire. Puis l'anesthésiste commence l'antibiothérapie probabiliste pendant l'opération. U4 5/7 IV. TRAITEMENT Le traitement est médico-chirurgicale. Le traitement est la chirurgie, l'antibiothérapie et +/l'oxygénothérapie hyperbare. Le taux de mortalité est de 4.5% si le patient est opéré dans les premières 12 heures après l'admission. Passer ce délais la mortalité est de 28%. A. Antibiothérapie Probabiliste, à large spectre. - Atteinte des membres ou cervico-faciale: Penicilline G et Clindamycine - Atteinte périnéales: Uréidopénicille + inhibiteur de beta lactamase Imidazolés Aminosides + Anti staphylocoque si patient toxicomane + Antifongique si atteinte abdomino-périnéale Adaptation secondaire aux germes isolées. Toujours resté actif contre les anaérobies. Note: l'uréidopénicilline et les imidazolés ont le même spectre mais pas la même diffusion tissulaire, d'ou l'association B. Chirurgie Vu le faible nombre de cas par an, il est rare d'avoir un chirurgien expérimenté lors de l'opération. Dans ces cas il est nécessaire, de transférer le patient dans un service spécialisé où une reprise chirurgicale sera faite. Le but reste tout de même de faire de la chirurgie définitive si possible. Le but est de débrider de façon complète les tissus nécrosés, de diminuer les phénomènes compressifs, de drainer et d'exciser tous les fascias jusqu'à la tranche de section. Une irrigation par antiseptique (polyvidone iodée, chlorhexédine) est nécessaire. Les reprises chirurgicale sont systématique. Et le chirurgien met en place un pansement VAC (pansement clos avec dépression). L'illustration montre la même patiente. U4 6/7 C. Oxygénothérapie Hyperbare (OHB) Controversée, les intérêts du caisson hyperbare sont : Le caisson hyperbare est considéré comme bactériostatique, bactéricide et donc actif sur les bactéries anaérobies. Il inhibe la production de toxines et est actif sur les bactéries clostridium, en rétablissant les défenses cellulaires il active la phagocytose cellulaire, rétablit et potentialise l’activité des antibiotiques et favorise ainsi la cicatrisation. Les études sur les chiens beagles ont montré une mortalité de 100% chez les beagles traités seulement par Oxygénothérapie hyperbare. Les autres études n’ont pas montré d’effet sur le nombre de complications. Les coûts sont augmentés de 6700$ et la durée des séjours est augmentée chez les patients traités par HBO. De plus, de nombreux biais sont présents. Selon certains réanimateurs infectiologues il faut associer antibiothérapie, caisson hyperbare et chirurgie, pour d’autres il ne faut pas systématiquement prescrire l’oxygénothérapie hyperbare tant que des études n’ont pas montré les effets favorables. En tout cas il n’y a jamais de transfert longue distance pour OHB, uniquement après chirurgie et en cas de stabilité hémodynamique. 3 séances en 24 heures - puis 1 séance par jour pendant 10 jours CONCLUSION En conclusion il s’agit d’une maladie rare et une mortalité élevée. Il n’y a pas de corrélation entre l’atteinte cutanée et sous-cutanée Le plus souvent il y a une atteinte poly-microbienne dans la majorité des cas. Il s’agit d’une urgence médicale et chirurgicale. OHB selon disponibilité. U4 7/7